«Tintin au Congo» enfin muni d'une préface sur son contexte colonial

Une scène, tirée de l'album de bandes-dessinées "Tintin au Congo" et réalisée à partir de milliers d'oranges et de citrons, est présentée, le 14 février 1998 à Menton, lors de la traditionnelle fête du citron, dont le thème, cette année-là, était le célèbre personnage du dessinateur belge Hergé. (Photo  Patrick Hertzog  AFP)
Une scène, tirée de l'album de bandes-dessinées "Tintin au Congo" et réalisée à partir de milliers d'oranges et de citrons, est présentée, le 14 février 1998 à Menton, lors de la traditionnelle fête du citron, dont le thème, cette année-là, était le célèbre personnage du dessinateur belge Hergé. (Photo Patrick Hertzog AFP)
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Publié le Dimanche 10 décembre 2023

«Tintin au Congo» enfin muni d'une préface sur son contexte colonial

  • Sur les aventures du jeune reporter dans ce très vaste pays qui fut colonie belge de 1908 à 1960, la polémique ne s'est jamais vraiment éteinte depuis plus d'un demi-siècle
  • En 1975, Hergé avait répondu au journaliste Numa Sadoul: «Je ne connaissais de ce pays que ce que les gens en racontaient (...) Je les ai dessinés, ces Africains, d'après ces critères-là, dans le plus pur esprit paternaliste qui était celui de l'époque»

PARIS : C'est sans beaucoup de publicité que «Tintin au Congo» est ressorti en novembre dans une version inédite, colorisée, dotée d'une nouvelle couverture mais surtout, pour la première fois, avec une préface qui remet dans son contexte cet album à la gloire de la colonisation.

«Tintin au Congo», par Hergé, est republié dans sa version originale, parue en feuilleton en 1930-1931 dans Le Petit Vingtième, et en volume en 1931. Alors qu'à l'époque il était en noir et blanc, les éditions Moulinsart et Casterman ont ajouté des couleurs.

L'album est vendu au sein d'un coffret appelé «Les colorisés», sorti le 1er novembre. Il comprend aussi «Tintin au pays des Soviets» (1930) et «Tintin en Amérique» (1932).

L'éditeur a très peu communiqué sur cette parution, malgré son importance. Pascal Blanchard, historien spécialiste de l'imaginaire et de la propagande colonialistes, n'en avait ainsi jamais entendu parler avant que l'AFP ne la lui montre.

«C'est très intéressant et intelligent de leur part de faire ce travail. Car il faut publier Tintin tel qu'il était à l'époque», affirme-t-il. Mais «je trouve étonnant que la couverture ne mentionne pas cet avant-propos. Et que le petit garçon congolais disparaisse: cette couverture, ils l'ont déracialisée!» Dans l'édition de 2023, Tintin y fait face à un lion.

Les lecteurs connaissent mieux celle de la version couleur de «Tintin au Congo» de 1946, où Tintin est au volant. Cet album avait été entièrement revu. Exemple: à l'intérieur, Tintin donne un cours de mathématiques à des écoliers congolais, alors qu'à l'origine (et donc dans l'édition de 2023) sa leçon porte sur «votre patrie: la Belgique!...»

- «Pur esprit paternaliste» -

Sur les aventures du jeune reporter dans ce très vaste pays qui fut colonie belge de 1908 à 1960, la polémique ne s'est jamais vraiment éteinte depuis plus d'un demi-siècle. Autour d'une question surtout: les personnages noirs de l'album sont-ils représentés de manière simplement caricaturale, ou franchement raciste?

Hergé lui-même avait vu cette controverse monter à la fin de sa vie. Il avait répondu au journaliste Numa Sadoul en 1975: «Je ne connaissais de ce pays que ce que les gens en racontaient (...) Je les ai dessinés, ces Africains, d'après ces critères-là, dans le plus pur esprit paternaliste qui était celui de l'époque».

Pour cette préface, l'auteur choisi n'est pas un observateur neutre. Philippe Goddin, expert de BD, préside l'association Les Amis de Hergé.

Il a longuement recherché les sources choisies par Hergé, à la fois iconographiques, pour son dessin, et textuelles, pour son scénario. Et il ne voit pas de racisme.

«On a dit qu'Hergé a odieusement caricaturé les Congolais. Raciste, lui? Il s'en est vigoureusement défendu (...) Il brocarde allègrement tout son monde, Blancs comme Noirs», écrit le préfacier.

Une position qu'il explique à l'AFP: «On est raciste à partir du moment où on veut dénigrer, rabaisser l'autre, ce qui n'est pas le cas de +Tintin au Congo+. Bien sûr, il y a des stéréotypes, des caricatures. Hergé insiste sur les grosses lèvres, les nez épatés, comme beaucoup de dessinateurs à l'époque. Mais pour moi, même si la frontière est fragile entre caricature et racisme, il ne la franchit pas».

- Eponge de son époque ? -

Pascal Blanchard se dit peu convaincu.

«Cette préface est très contestable. Elle nous dit Hergé serait une simple éponge de son époque. C'est léger, c'est faux», estime-t-il.

«Hergé a fait un choix politique d'ignorer les sources qui décrivent la violence de la colonisation», ajoute l'historien. «Et Philippe Goddin abuse d'un paradoxe: en nous montrant qu'Hergé est au plus près des photos qui lui parviennent du Congo, il considère que l'iconographie sur les colonies, dans un pays doté d'une agence de propagande coloniale, deviendrait une source de véracité. Non, c'est une propagande».

Pascal Blanchard en aurait voulu plus: «une deuxième préface signée d'un grand historien comme Elikia M'Bokolo», Congolais spécialiste de l'Afrique aux XIXe et XXe siècles.

Le Conseil représentatif des associations noires (Cran), collectif français, a plusieurs fois interpellé sur la nécessité d'ajouter une préface à «Tintin au Congo», en vain. Il salue aujourd'hui la préface de 2023.

«C'est depuis 2007 qu'on se bat pour l'avoir, donc c'est une satisfaction. Le bon sens l'a emporté», a déclaré à l'AFP le fondateur du Cran, Patrick Lozès.

«Cet album renvoie à une époque, heureusement révolue, où il était acceptable de considérer les Noirs comme des êtres inférieurs», a-t-il ajouté. «Dans l'album, les Africains sont les seuls à s'exprimer comme des imbéciles. Même un chien parle mieux qu'eux. On ne pouvait plus laisser les jeunes lecteurs face à ça, sans contexte, sans explication».


Imane Alaoui, auteure de «Flavors of Morocco Transcended», rejoint E& Beach Canteen pour un cours culinaire en direct ce dimanche

Imane Alaoui, auteure du livre de recettes « Flavors of Morocco Transcended » (fournie)
Imane Alaoui, auteure du livre de recettes « Flavors of Morocco Transcended » (fournie)
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  • Rejoignez Imane pour un cours de cuisine marocaine à la pittoresque cantine E& Beach, située sur la plage de Jumeirah à Dubaï
  • Imane Alaoui s'est donné pour mission de détruire le mythe selon lequel la cuisine marocaine est trop complexe

DUBAÏ : Imane Alaoui, auteure du livre de recettes « Flavors of Morocco Transcended », invite les aficionados de la cuisine à embarquer pour un voyage culinaire sans précédent.

Rejoignez Imane pour un cours de cuisine marocaine à la pittoresque cantine E& Beach, située sur la plage de Jumeirah à Dubaï.

Au cours de cette expérience immersive, les participants visiteront la cuisine marocaine, découvrant et savourant des recettes exquises adaptées aux palais et aux styles de vie modernes. Au cœur de l'événement se trouve le célèbre tajine marocain, pour s'adapter à l'emploi du temps trépidant des habitants de Dubaï.

Flavors of Morocco Trenscended par Imane Alaoui (fournie)
Flavors of Morocco Transcended par Imane Alaoui (fournie)

Imane Alaoui s'est donné pour mission de détruire le mythe selon lequel la cuisine marocaine est trop complexe, en veillant à ce qu'elle soit accessible à tous ceux qui ont une passion pour la cuisine et un amour pour les saveurs diverses. Grâce à ce cours culinaire, les participants acquerront des connaissances inestimables, des compétences pratiques et une nouvelle appréciation de la riche tapisserie de la gastronomie marocaine.

Pour vous lancer dans cette aventure culinaire, rendez-vous sur : www.breakbread.com/experiences .

À propos d'Imane Alaoui :

Passionnée de cuisine et par le partage de son héritage, Imane Alaoui est connue pour son approche innovante de la cuisine marocaine. Elle cherche à inspirer les autres pour embrasser la richesse et la diversité de la gastronomie marocaine.

À propos de « Flavors of Morocco Transcended » (Les saveurs du Maroc transcendées)

« Les saveurs du Maroc transcendées » est un livre de recettes qui réinvente les plats marocains traditionnels pour un public moderne. Le livre présente un mélange harmonieux de saveurs authentiques et de tournures contemporaines, invitant les lecteurs à un voyage culinaire captivant à travers le paysage culinaire vibrant du Maroc.

 


L'Arabie saoudite annonce la Semaine de la mode de la mer Rouge

Parmi les moments forts, notons la participation de cent marques saoudiennes, une initiative lancée par la Commission de la mode afin de soutenir et de promouvoir les talents locaux émergents. (Photo Arab News).
Parmi les moments forts, notons la participation de cent marques saoudiennes, une initiative lancée par la Commission de la mode afin de soutenir et de promouvoir les talents locaux émergents. (Photo Arab News).
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  • Organisé par la Commission saoudienne de la mode, cet événement mettra en vedette des créateurs locaux et internationaux
  • L’Arabie saoudite avait accueilli sa première semaine de la mode en 2023 à Riyad

DUBAÏ: Le Royaume s’apprête à accueillir la toute première Semaine de la mode de la mer Rouge. Prévu en bord de mer sur l'île d'Ummahat, cet événement glamour se déroulera du 16 au 18 mai au St. Regis Red Sea Resort. Organisé par la Commission saoudienne de la mode, cet événement mettra en vedette des créateurs locaux et internationaux. Son objectif est de célébrer la fusion entre l'esthétique traditionnelle saoudienne et le design contemporain de pointe.

Parmi les moments forts, notons la participation de cent marques saoudiennes, une initiative lancée par la Commission de la mode afin de soutenir et de promouvoir les talents locaux émergents.

Rappelons que l'Arabie saoudite avait accueilli sa première semaine de la mode en 2023 à Riyad. L'événement, qui s’était déroulé dans le quartier financier du roi Abdallah du 20 au 23 octobre, a jeté les bases de la nouvelle capitale de la mode au Moyen-Orient.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


La rappeuse afghane Sonita Alizada, voix des jeunes filles pour la liberté

Sonita Alizada elle-même a failli être vendue à un homme vers l'âge de 10 ans, puis à 14 ans pour 9.000 dollars. (AFP).
Sonita Alizada elle-même a failli être vendue à un homme vers l'âge de 10 ans, puis à 14 ans pour 9.000 dollars. (AFP).
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  • Non au travail des enfants, aux mariages forcés, au renoncement à ses rêves: à travers le rap, Sonita Alizada (ou Alizadeh) a trouvé un médium parfait pour crier ses combats et raconter son histoire démarrée sous le régime taliban
  • Postée sur internet, la vidéo est vue plus de 8.000 fois le premier jour, tant les mariages forcés sont répandus dans le monde avec 12 millions de mineures mariées chaque année, selon l'Unicef

ARROMANCHES-LES-BAINS: Non au travail des enfants, aux mariages forcés, au renoncement à ses rêves: à travers le rap, Sonita Alizada (ou Alizadeh) a trouvé un médium parfait pour crier ses combats et raconter son histoire démarrée sous le régime taliban.

"Comme toutes les filles, je suis en cage, je ne suis qu'un mouton qu'on élève pour le dévorer", chante-t-elle, en 2014 en Iran, dans "Brides for sale" (Mariées à vendre), en robe de mariée, code-barre et ecchymoses sur le visage. "Relis le Coran! Il ne dit pas que les femmes sont à vendre."

Postée sur internet, la vidéo est vue plus de 8.000 fois le premier jour, tant les mariages forcés sont répandus dans le monde avec 12 millions de mineures mariées chaque année, selon l'Unicef.

Sonita Alizada elle-même a failli être vendue à un homme vers l'âge de 10 ans, puis à 14 ans pour 9.000 dollars.

Repérée par la documentariste iranienne Rokhsareh Ghaem Maghami qui verse 2.000 dollars, elle a droit à six mois de sursis et saisit sa chance lorsqu'une ONG américaine lui propose d'étudier aux Etats-Unis.

Dans l'Utah, les débuts sont difficiles pour celle qui ne sait dire en anglais que "salut, je suis une rappeuse". Elle découvre aussi qu'aux Etats-Unis les mariages de mineures existent.

Elle décide de raconter son histoire dans les écoles, jusqu'au très prisé festival américain du film de Sundance où le documentaire qui lui est consacré, "Sonita", remporte en 2016 le prix du jury.

Ses jeunes années sont marquées par la peur des Talibans et la faim. Née à Herat en 1996, elle a environ cinq ans lorsqu'elle fuit avec ses parents et ses sept frères et sœurs, sans papiers, vers l'Iran.

"On pensait que la vie y serait plus facile, sans guerre mais c'était très difficile de se faire accepter à cause de l'image des Afghans", se rappelle Sonita Alizada, 27 ans, dans un entretien avec l'AFP.

Là aussi, interdiction d'aller à l'école: "Je cirais des chaussures avec mes frères puis je vendais des fleurs." Sa première bonne étoile est une femme qui apprend clandestinement aux filles à lire et à écrire dans une mosquée.

« Toujours en colère »

De retour en Afghanistan, son père, malade, meurt. Son mariage est planifié puis annulé lorsqu'elle retourne en Iran. Sonita y rencontre une association qui lui permet de prendre des cours de guitare en secret... et l'encourage à écrire après avoir remporté un prix de poésie.

Un jour l'artiste en devenir entend le rappeur star Eminem et, sans comprendre les paroles, pense que c'est "probablement la meilleure façon de partager une histoire".

La jeune fille écrit "Brides for sale" même si sa mère, mariée à 12 ans et illettrée, lui interdit de faire du rap. C'est le succès et le départ vers les Etats-Unis.

Devenue sa plus grande admiratrice, sa mère apparaît dans son clip "Run Boy", qui parle des Talibans essayant d'empêcher la scolarisation des filles.

Le 4 juin, elle sera à Caen, dans le nord-ouest de la France, pour le prix Liberté, qu'elle a remporté en 2021. La jeune artiste chantera "Stand up" avec des locaux et le clip de la chanson, filmé sur les plages du Débarquement, sera diffusé devant des vétérans de la Seconde Guerre mondiale.

"Toujours en colère", elle continue de défendre avec le rap et sur les réseaux sociaux la liberté sous toutes ses formes: à l'éducation, à s'exprimer, à choisir son partenaire. Elle a aussi mis en place deux projets en Afghanistan pour aider les enfants et les femmes.

Diplômée l'année dernière en droits humains et en musique à New York, Sonita Alizada veut maintenant étudier la politique à Oxford.

"L'art et la politique vont ensemble. Toute ma musique parle de politique, de faire la différence, de donner de l'espoir, de prendre conscience. Alors j'essaye d'éveiller les consciences à travers la musique", souligne celle qui espère, un jour, pouvoir prendre une part active dans l'avenir de son pays.