La Turquie cent ans après: Erdogan, successeur et concurrent d'Atatürk

Le président Erdogan, au pouvoir depuis 2003 et réélu en mai pour cinq ans, cumule déjà une longévité inégalée à la tête de l'Etat, supérieure même à celle d'Atatürk - le «père des Turcs». (AFP)
Le président Erdogan, au pouvoir depuis 2003 et réélu en mai pour cinq ans, cumule déjà une longévité inégalée à la tête de l'Etat, supérieure même à celle d'Atatürk - le «père des Turcs». (AFP)
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Publié le Jeudi 26 octobre 2023

La Turquie cent ans après: Erdogan, successeur et concurrent d'Atatürk

  • Pour un expert, «Erdogan pousse pour une Seconde République, plus conservatrice, plus islamique, qui prend ses distances avec l'Occident»
  • L'historien français tempère en rappelant que l'autoritarisme reproché au président était déjà «un mode d'action politique instauré par Ataturk et qu'Erdogan va reproduire»

ANKARA: La Turquie célèbre dimanche le centenaire de sa république: l'occasion pour Recep Tayyip Erdogan d'imprimer sa marque sur le destin du pays au détriment de son illustre fondateur, Mustafa Kemal Ataturk, en imposant l'idée d'un "Siècle de la Turquie".

Pour de nombreux observateurs, le chef de l'Etat se serait même volontiers passé de ces célébrations auxquelles ils reprochent, par avance, le manque d'éclat.

Le programme des célébrations n'a été que tardivement publié, une semaine avant le Jour J, et prévoit des feux d'artifices, des spectacles de drones au-dessus du Bosphore et l'illumination de monuments emblématiques.

Mais "il n'y a pas d'émotion ni d'ambiance de fête. C'est comme si on éludait", regrette l'historien Ekrem Isin.

"Les gens sont mécontents, rien n’a été fait pour créer une atmosphère de fête. (Le gouvernement) n’a même pas lancé d’invitations aux dirigeants étrangers" s'insurge Soli Özel, professeur de Relations Internationales à l'université Kadir Has d'Istanbul.

"Et ça n'a rien à voir avec la guerre", assure-t-il, alors que la Turquie affiche son soutien aux populations palestiniennes sous les bombes à Gaza.

La veille de la fête nationale, le président a d'ailleurs prévu de rallier un grand meeting "de soutien à la Palestine", organisé samedi par l'AKP, son parti islamo-conservateur, à Istanbul - sur l'aéroport Atatürk désaffecté...

La télévision publique TRT a annulé toutes les festivités en arguant de la guerre au Proche-Orient. Et des mairies AKP, comme celle de Gaziantep (sud), ont érigé cette semaine un grand drapeau palestinien à quelques jours des célébrations.

nouvelle constitution 

Le président Erdogan, au pouvoir depuis 2003 et réélu en mai pour cinq ans, cumule déjà une longévité inégalée à la tête de l'Etat, supérieure même à celle d'Atatürk - le "père des Turcs".

En 1923, ce dernier a projeté son pays, bâti sur les ruines de l'Empire ottoman, dans le XXè siècle et la modernité, lui imposant la laïcité, l'autonomisation des femmes, le droit de vote et à l'éducation et même une nouvelle langue.

Mais plus que célébrer ces acquis, Erdogan est accusé par ses détracteurs de vanter une "nouvelle Turquie", plus conservatrice et plus religieuse.

"Depuis sa fondation, l’AKP s'efforce de construire une identité et des récits alternatifs à la République", relève Seren Selvin Korkmaz, directrice de l'Institut de recherches politiques d'Istanbul.

"La polarisation de la Turquie s'est même étendue aux célébrations du Centenaire: l'AKP parle du +Siècle de la Turquie+, d'autres du +Deuxième Siècle+" de la République, insiste-t-elle.

La conversion en mosquée de la basilique byzantine Sainte Sophie, qu'Ataturk avait sanctuarisée en musée, ou l'érosion des droits des femmes sont autant de coups de canifs dans la République du père fondateur.

«à marche forcée»

"Alors que nous aurions dû embrasser une attitude plus démocratique à l’occasion du centenaire de la République, nous sommes confrontés au Parlement le plus réactionnaire de notre histoire. Ceux qui ne montrent même pas le visage de leurs candidates et les représentent comme des ombres sur leurs affiches électorales siègent au Parlement!", s'insurge Fidan Ataselim, de la plateforme féministe We Will Stop Feminicides.

L'alliance de l'AKP avec les deux partis islamistes réactionnaires Yeniden Refah et à Huda Par leur a permis de décrocher des sièges de députés aux dernières élections.

"Au lieu de souligner les acquis de la République, les célébrations du 29 octobre se concentrent sur le message qu'Erdogan +a fait plus en vingt ans que (d'autres) en cent", constate Barcin Yinanc, analyste politique et éditorialiste.

L'historien français Jean-François Colosimo tempère en rappelant que l'autoritarisme reproché au président était déjà "un mode d'action politique instauré par Ataturk et qu'Erdogan va reproduire".

"En quelques jours, mois ou années, cette population, principalement musulmane va être turquisée, mais aussi modernisée, occidentalisée à marche forcée", glisse-t-il, avec le passage à l'alphabet latin ou l'interdiction du fez et autres vêtements traditionnels.

Mais pour Berk Esen, politique de l'université Sabanci d'Istanbul, "Erdogan pousse pour une Seconde République, plus conservatrice, plus islamique, qui prend ses distances avec l'Occident".

"Il essaie d'imprimer sa marque dans tous les champs politiques importants et sur tous les projets. Mais qu'il s'agisse de célébrer l'Indépendance du pays ou d'honorer l'armée" dont le président est commandant en chef, "Mustafa Kemal est partout", note l'universitaire.

"Il n'a pas totalement réussi à l'effacer, mais c'est probablement ce qu'il va tenter de faire après 2023", parie-t-il.


L'UE conditionne son aide au Liban à une réforme bancaire et un accord avec le FMI 

La Banque centrale du Liban. (AFP)
La Banque centrale du Liban. (AFP)
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  • Vendredi, la commissaire européenne pour la Méditerranée, Dubravka Suica, a précisé que, sur les fonds alloués, "500 millions avaient déjà été adoptés en août dernier, et 500 millions supplémentaires seront bientôt débloqués"
  • "La principale condition préalable est la restructuration du secteur bancaire (...) ainsi qu'un bon accord avec le FMI", a-t-elle déclaré lors d'une conférence de presse après sa rencontre avec le président Joseph Aoun

BEYROUTH: Une responsable de l'Union européenne (UE) en visite au Liban a déclaré vendredi que le versement d'un demi-milliard d'euros de financement était conditionné à une restructuration du secteur bancaire et à la conclusion d'un accord avec le Fonds monétaire international (FMI).

En mai dernier, l'UE avait annoncé une aide d'un milliard d'euros pour le Liban afin d'endiguer l'immigration clandestine vers l'Europe. Cette aide vise à renforcer les services de base, notamment l'éducation et la santé, alors que le pays traverse une grave crise économique.

Vendredi, la commissaire européenne pour la Méditerranée, Dubravka Suica, a précisé que, sur les fonds alloués, "500 millions avaient déjà été adoptés en août dernier, et 500 millions supplémentaires seront bientôt débloqués, mais certaines conditions doivent être remplies".

"La principale condition préalable est la restructuration du secteur bancaire (...) ainsi qu'un bon accord avec le FMI", a-t-elle déclaré lors d'une conférence de presse après sa rencontre avec le président Joseph Aoun.

"Une fois ces conditions remplies, nous poursuivrons bien sûr le versement" des fonds, a-t-elle ajouté.

La communauté internationale réclame depuis longtemps que le Liban mette en oeuvre des réformes pour débloquer des milliards de dollars d'aide et relancer son économie, après la crise financière de 2019, imputée à la gabegie et la corruption.

Le mois dernier, le Liban a élu un nouveau président après plus de deux ans de vacance du pouvoir, et un gouvernement a été formé ce mois-ci, remplaçant l'administration intérimaire.

Cette semaine, le FMI a déclaré être ouvert à un nouvel accord de prêt avec le Liban après des discussions avec son nouveau ministre des Finances.

Mme Suica a également dit avoir discuté avec Joseph Aoun d'un "nouveau pacte pour la Méditerranée", ce qui signifie, selon elle, que "nous allons entamer des accords globaux de partenariat stratégique bilatéraux avec des pays, dont le Liban".

L'UE cherche à stabiliser le pourtour méditerranéen afin d'éviter d'importants flux migratoires vers l'Europe. Le Liban affirme accueillir environ deux millions de Syriens, soit le plus grand nombre de réfugiés par habitant au monde, et constitue également un point de départ pour les migrants en route vers l'Europe.

 


Le pape François a passé une nouvelle «bonne nuit et s'est levé», selon le Vatican

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  • "La nuit s'est bien passée. Ce matin, le pape François s'est levé et a pris son petit déjeuner", indique un bref communiqué, une semaine après son hospitalisation
  • Le Vatican avait fait savoir jeudi soir que l'état de santé du pape était en légère amélioration

CITE DU VATICAN: Le pape François, 88 ans, a passé une nouvelle nuit calme à l'hôpital Gemelli de Rome où il est soigné pour une pneumonie touchant les deux poumons, a indiqué vendredi le Vatican.

"La nuit s'est bien passée. Ce matin, le pape François s'est levé et a pris son petit déjeuner", indique un bref communiqué, une semaine après son hospitalisation.

Le Vatican avait fait savoir jeudi soir que l'état de santé du pape était en légère amélioration.

"L'état clinique du Saint-Père s'améliore légèrement. Il est apyrétique (sans fièvre, ndlr) et ses paramètres hémodynamiques (circulation sanguine) restent stables", a annoncé le Vatican dans un bulletin de santé.

"Ce matin, il a reçu l'Eucharistie et s'est ensuite consacré à ses activités professionnelles", selon la même source.

Selon une source vaticane, il s'agit de contacts avec ses plus proches collaborateurs, la lecture et la signature de documents et des appels téléphoniques.

Dans la journée déjà, des cardinaux s'étaient montrés encourageants sur l'état de santé du pape argentin, assurant que ce dernier était "sur la bonne voie".

François a été admis à l'hôpital Gemelli de Rome vendredi dernier pour une bronchite, mais le Saint-Siège a révélé mardi qu'il avait développé une pneumonie dans les deux poumons, une infection du tissu pulmonaire potentiellement mortelle.

Cette hospitalisation, la quatrième depuis 2021, suscite de vives inquiétudes alors que le pape a déjà été affaibli par une série de problèmes ces dernières années, allant d'opérations du côlon et de l'abdomen à des difficultés à marcher.

Messages de soutien 

Ces préoccupations sont renforcées par la diffusion de fausses informations sur les réseaux sociaux, notamment sur X, rapportant la mort du pape en plusieurs langues.

"Quelle perte de temps", a déploré le cardinal espagnol Juan José Omella, qui assure que le pape va "beaucoup mieux". "L'important est de savoir comment il réagit aux médicaments. Mais je pense qu'il y a de l'espoir", a-t-il affirmé aux journalistes.

Aucune indication n'a toutefois été fournie sur la durée de ce séjour et le Vatican n'a pas précisé si François, qui n'est plus apparu en public depuis le 14 février, pourrait présider dimanche la prière hebdomadaire de l'Angélus.

L'hospitalisation du pape, à la fois leader spirituel de 1,3 milliard de catholiques et chef de l'Etat de la Cité du Vatican, a relancé les spéculations autour de sa capacité à assurer sa charge, alors que le droit canonique ne prévoit aucune disposition en cas de problème grave qui altèrerait sa lucidité.

L'évêque de Rome a reçu de nombreux messages de sympathie du monde entier, de la part de responsables politiques et religieux, de fidèles ou des dessins d'enfants.

Malgré des alertes de santé à répétition ces dernières années, Jorge Bergoglio, connu pour sa force de caractère, a maintenu un rythme effréné, au grand dam de ses médecins qui ne cessent de lui répéter de ralentir la cadence.


Poutine remercie le prince héritier saoudien d'avoir accueilli les pourparlers américano-russes

Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane et le président russe Vladimir Poutine. (SPA/AFP)
Le prince héritier d'Arabie saoudite Mohammed ben Salmane et le président russe Vladimir Poutine. (SPA/AFP)
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  • Le président russe a fait l'éloge de la profondeur des relations entre leurs pays et de sa volonté de les développer dans divers domaines
  • Le prince Mohammed a souligné l'engagement du Royaume à déployer tous les efforts possibles pour renforcer la paix et la sécurité mondiales

RIYAD: Le président russe Vladimir Poutine a remercié, jeudi, le Royaume et son prince héritier d'avoir accueilli mardi à Riyad les pourparlers américano-russes.

Lors d'un appel téléphonique entre le prince héritier Mohammed ben Salmane et M. Poutine, le président a également fait l'éloge de la profondeur des relations entre leurs pays et de sa volonté de les développer dans divers domaines.

Le prince Mohammed a souligné l'engagement du Royaume à déployer tous les efforts possibles pour renforcer la paix et la sécurité mondiales, fermement convaincu que le dialogue est le seul moyen de résoudre toutes les crises internationales.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com