PARIS: « On a une drôle d'année »: le 8 octobre, Emmanuel Macron reconnaît que 2020 n'aura pas été une année comme une autre, la faute à la meurtrière épidémie du Covid-19 qui a percuté de plein fouet son quinquennat et plombé ses ambitions réformatrices.
Rien ne s'est passé comme prévu. Le 31 décembre 2019, le président présente ses voeux aux Français et leur fait deux promesses pour 2020: « mener à son terme » la très contestée réforme des retraites et continuer à « transformer notre pays ».
« J'ai conscience que les changements bousculent souvent. Mais les inquiétudes ne sauraient pousser à l'inaction », insiste-t-il à la télévision.
Un an plus tard, cette ambition a été balayée par « cette pandémie historique, les crises internationales, le terrorisme, les divisions de la société et une crise économique et sociale sans précédent », comme il le résume dans son allocution du 28 octobre.
La réforme des retraites a certes été votée en début d'année. Mais sans voir le jour car Emmanuel Macron annonce à la mi-mars que « toutes les réformes en cours sont suspendues ».
A la place, il exhorte les Français à la « mobilisation générale » face au Covid-19, contre lequel « nous sommes en guerre ».
Suivront des mois imprévisibles, rythmés par la succession des conseils de défense sanitaires, des annonces de restrictions puis de leur assouplissement, et des polémiques sans fin sur les masques ou les tests.
Président protecteur
Au fil de ses huit allocutions télévisées, qui battent des records d'audience, le chef de l'Etat adapte son discours à la crise et aux critiques. Après avoir endossé l'uniforme de chef de guerre, il enfile le costume de président protecteur, appelant à « l'unité ».
Il lance la mobilisation de tous les moyens nécessaires face à la crise, et ce, « quoi qu'il en coûte ». Avec, à la manœuvre, un Etat omniprésent et dépensier comme jamais.
Au début de l'été, Emmanuel Macron saisit l'occasion d'un retour à une certaine normalité pour tenter de relancer une fois de plus son quinquennat. Pour Matignon, il parie sur un quasi-inconnu, Jean Castex, le « M. déconfinement », en lieu et place du populaire Edouard Philippe.
Las, deux mois plus tard, l'épidémie chamboule la rentrée et la reprise économique que devait booster l'injection des 100 milliards d'euros du plan de relance. L'exécutif est accusé d'avoir mal anticipé la deuxième vague, qui l'oblige à instaurer un couvre-feu suivi d'un reconfinement national.
Mais, pariant sur la stratégie du « vivre avec le virus », Emmanuel Macon tente de retrouver un élan politique. Ce sera sur le régalien, considéré comme un angle mort du macronisme.
Le 2 octobre, il présente aux Mureaux (Yvelines) sa stratégie pour lutter contre l'islam radical, longtemps attendue. L'actualité le rattrape avec le retour des attentats: la décapitation du professeur Samuel Paty le 16 octobre par un islamiste russe tchétchène de 18 ans, puis l'attentat de Nice.
Flou pour 2021
Face à la très forte émotion de la population, l'exécutif durcit son discours sécuritaire. Mais se retrouve piégé dans une crise politique provoquée par la concomitance de la controverse sur la loi sur la Sécurité globale et du scandale provoqué par les images de policiers tabassant un producteur de musique.
Emmanuel Macron est contraint de calmer le jeu. « Je ne peux pas laisser dire qu'on réduit les libertés en France », affirme-t-il face aux critiques venues aussi de pays anglo-saxons.
Il doit également se défendre de stigmatiser les musulmans, après des manifestations, parfois violentes, à l'étranger autour de la republication de caricatures de Mahomet par Charlie Hebdo.
Sur la défensive en France, le président cherche l'initiative sur la scène internationale où il est régulièrement insulté par le président turc Recep Tayyip Erdogan. Avec des résultats mitigés.
Grâce à sa complicité affichée avec Angela Merkel, il porte « la grande avancée » que représente l'adoption par l'UE de l'énorme plan de relance de 750 milliards d'euros pour faire face à l'épidémie.
Mais il essuie une cuisante déconvenue dans sa tentative de provoquer un électrochoc politique au Liban après la tragique explosion du 4 août au port de Beyrouth.
Dans ce contexte tourmenté, 2021 se présente comme une page blanche pour le chef de l'Etat, dont la popularité résiste dans les sondages. Sera-t-il contraint de gérer la crise sanitaire jusqu'à la fin du quinquennat ou pourra-t-il retrouver le chemin des réformes, notamment écologiques?
Prudent, il « n'exclut rien » pour la présidentielle de 2022. « Peut-être que je devrai faire des choses dures dans la dernière année parce que les circonstances l'exigeront, et qui rendront impossible le fait que je sois candidat », a-t-il même avancé le 4 décembre sur le média en ligne Brut.