BRUXELLES: La Commission européenne a affirmé jeudi sa volonté de poursuivre les discussions avec les autorités tunisiennes pour la mise en oeuvre d'un partenariat migratoire malgré les "obstacles" et une querelle avec Tunis sur des fonds européens.
Le gouvernement tunisien a restitué à l'UE une aide budgétaire de 60 millions d'euros qui lui avait été versée par Bruxelles, dans une démarche inédite de la part d'un pays partenaire, selon la Commission.
Le président tunisien Kais Saied avait affirmé mercredi soir que cette somme avait été versée par l'UE "sans que les autorités tunisiennes n'en aient été informées au préalable". "Cette méthode porte atteinte à notre dignité", a-t-il dit pour expliquer la restitution.
Les fonds étaient prévus dans le cadre d'un programme d'aide à la relance post-Covid, sans lien avec ceux du protocole d'accord signé en juillet entre l'UE et la Tunisie et qui porte notamment sur une coopération en matière migratoire.
Kais Saied avait dès le 2 octobre déclaré rejeter la "charité" de l'UE.
Quelques jours plus tard, le commissaire européen Oliver Varhelyi avait souligné que la somme de 60 millions d'euros avait pourtant été sollicitée par la Tunisie le 31 août, et que ce pays était libre de rendre l'argent.
"La mise en oeuvre du protocole d'accord devrait se poursuivre une fois la Tunisie revenue à l'esprit de notre partenariat stratégique et global basé sur le respect mutuel", avait aussi cinglé le commissaire hongrois.
Le porte-parole de la Commission européenne Eric Mamer a reconnu jeudi que la mise en oeuvre de ce protocole d'accord avait "encore du chemin à faire".
«Un effort à long terme»
Mais il "est très important, pour la Tunisie et pour l'Union européenne. C'est un effort à long terme. Oui, il va y avoir des obstacles, parfois importants, sur la route", a-t-il concédé.
"Mais la Commission continue et continuera à travailler à sa mise en oeuvre avec les autorités tunisiennes", a-t-il assuré.
Ce partenariat en plusieurs volets, destiné notamment à faire baisser les arrivées dans l'UE de migrants depuis la Tunisie, prévoit une aide de 105 millions d'euros pour lutter contre l'immigration irrégulière, ainsi qu'une aide budgétaire directe de 150 millions d'euros à ce pays confronté à de graves difficultés économiques.
L'UE a indiqué avoir, dans le cadre de ce protocole d'accord, signé deux contrats, l'un de 13 millions d'euros avec l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), l'autre de 8 millions d'euros avec l'Agence des nations unies pour les réfugiés (HCR).
Ces contrats sont destinés à assurer la protection des migrants en Tunisie, mais aussi à accroître les "retours volontaires" de ces migrants vers leurs pays d'origine.
Ce partenariat UE-Tunisie est l'objet de controverses, liées notamment à des inquiétudes sur les atteintes aux droits des migrants dans ce pays. Mardi, l'ONG Human Rights Watch (HRW) a rapporté que plus de 100 migrants africains interceptés en mer par la garde nationale tunisienne avaient été "expulsés vers l'Algérie" à la mi-septembre, et laissés "sans nourriture ni eau".