JUBA: Le gouvernement du Soudan du Sud a reconnu vendredi qu'il censurait les médias et supprimait les articles qu'il considérait comme incitant à la haine, après la publication d'une enquête d'experts indépendants de l'ONU dénonçant ces pratiques.
Le ministre de l'Information Michael Makuei, qui est également le porte-parole du gouvernement, a affirmé que la censure était une "mesure de protection" au motif qu'autoriser certains articles à être imprimés provoquerait "de l'insécurité".
"Si l'article incite à la haine, alors il doit être retiré", a-t-il dit à des journaliste à Juba à l'issue d'un Conseil des ministres. "Nous ne voulons pas traduire en justice l'auteur (de l'article), c'est pourquoi nous retirons" les articles de presse.
Ces commentaires interviennent au lendemain de la publication d'une enquête par des experts indépendants mandatés par le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU évoquant les pressions sur les médias pratiquées par les services de renseignement sud-soudanais, le Service de sécurité nationale (NSS).
Selon les experts de la Commission des Nations unies sur les droits de l'homme au Soudan du Sud, les rédactions sont notamment contraintes d'accueillir en leur sein des agents du NSS pour qu'ils vérifient les articles avant publication et coupent ou suppriment des éditions entières.
Selon leur enquête, le NSS a essayé en février d'ajourner la publication d'un reportage sur un massacre à la veille de l'arrivée du pape François au Soudan du Sud et a lancé une cyber-attaque contre un point de vente qui diffusait l'histoire.
Mais pour Michael Makuei, les conditions de travail des médias se sont améliorées dans ce pays et la Commission n'a pas suffisamment intégré cet aspect dans son enquête. Il a en outre affirmé que le gouvernement serait contraint de traduire les journalistes en justice si l'Etat autorisait la publication d'articles incendiaires.
"Si l'on veut que nous traduisions les gens en justice, nous sommes prêts à le faire", a-t-il dit.
Après avoir obtenu son indépendance du Soudan en 2011, le Soudan du Sud a sombré dans une guerre civile qui a fait près de 400.000 morts et provoqué le déplacement de millions de personnes entre 2013 et 2018.