WASHINGTON: Porté aux nues par ses soutiens, conspué par les autres, le "Freedom Caucus" (groupe parlementaire "de la liberté"), composé d'élus trumpistes, sème le chaos chez les républicains au Congrès où il a poussé pour un "shutdown" finalement reporté in extremis samedi.
Le bloc est entouré d'un air de mystère. La liste de ses membres n'est pas publique mais il est communément admis qu'il est composé d'une quarantaine d'élus, intégrés sur invitation. Parmi ceux à avoir été identifiés figure Lauren Boebert.
Le groupe, qui bloquait toute avancée dans les négociations sur la loi de finances du budget de l'Etat fédéral, s'apprête encore à semer la zizanie dans les jours à venir.
L'élu de Floride Matt Gaetz, l'un de ses alliés, a confirmé dimanche qu'il allait tenter d'obtenir la destitution du président de la Chambre des représentants Kevin McCarthy, accusé d'avoir "menti" aux conservateurs et passé un accord avec les démocrates pour éviter la paralysie de l'administration fédérale.
Le bloc, composé de lieutenants de Donald Trump, dispose d'un pouvoir disproportionné en raison de la très fine majorité républicaine à la Chambre des représentants.
Il avait reçu l'ordre de la part de l'ancien président, qui pourrait affronter Joe Biden en 2024, de pousser au "shutdown" à moins d'obtenir gain de cause sur "tous" les dossiers budgétaires en débat.
Newt Gingrich, un pilier de l'aile droite républicaine qui fut président de la Chambre dans les années 1990, a vertement critiqué le groupe, l'accusant d'avoir "gaiement fait foirer les choses" quand le Congrès cherchait à mettre fin à l'impasse.
Déconcertant mais clair
Le "Freedom Caucus" trouve ses origines dans le mouvement ultra-conservateur Tea Party, qui avait émergé après l'élection de Barack Obama.
L'un de ses membres fondateurs, Mick Mulvaney, qui fut directeur de cabinet de la Maison Blanche par intérim sous Donald Trump, a révélé la semaine dernière que le nom provisoire du bloc avait été "le groupe parlementaire des cinglés raisonnables".
Rien que cette année, 19 membres du "Freedom Caucus" ont manqué de faire échouer l'élection du président de la Chambre, Kevin McCarthy, et une poignée d'entre eux a provoqué une crise de la dette qui a failli mener à un défaut de paiement des Etats-Unis, première économie mondiale.
Le Freedom Caucus ne représente qu'un cinquième des républicains à la Chambre.
Mais son poids au Congrès étant disproportionné, il suffit de quelques élus pour que le programme de la direction des républicains à la Chambre soit contesté.
Si ses pratiques peuvent parfois paraître déconcertantes, son but est clair: des réductions drastiques dans les dépenses et un Etat moins interventionniste.
Son influence est d'ailleurs visible dans le virage à droite pris par les républicains sous Trump, nombre de ses positions politiques étant devenues la politique dominante du parti, comme sur l'avortement.
Kevin McCarthy a été élu au 15ème tour en janvier, lorsque ses ennemis du "Freedom Caucus" ont enfin accepté de le soutenir en échange d'énormes concessions, dont un retour à la possibilité pour les législateurs individuels de convoquer un vote pour destituer le président de la Chambre.
Une concession qui revient donc le hanter avec la menace d'une motion dès la semaine prochaine.
Règles
Dernièrement, le groupe est parvenu à investir les plus hauts échelons du parti: l'un de ses membres-fondateurs, Jim Jordan, est devenu le chef de la puissante commission des Affaires judiciaires.
Jim Jordan a été l'un des instigateurs de l'enquête en destitution lancée contre le président démocrate Joe Biden. Une procédure qui a irrité nombre de ses collègues du courant dominant républicain car les personnes appelées à témoigner de la corruption du président ont déclaré que rien n'appuyait cette allégation.
Mais le Freedom Caucus n'est lui-même pas à l'abri des divisions.
Malgré tout, Mick Mulvaney estime que la réputation de fauteur de troubles du groupe n'est pas totalement méritée.
"Le Freedom Caucus a des règles. Certaines sont tacites, mais la plupart sont écrites", a-t-il récemment écrit dans une tribune publiée dans le média spécialisé dans la politique The Hill. "Je le sais parce que je les ai écrites".