Incendie meurtrier à Strasbourg: les accusés condamnés à 23 ans et 4 ans et demi de prison

Un pompier français inspecte un bâtiment endommagé à Strasbourg le 27 février 2020, le matin après un incendie. (AFP).
Un pompier français inspecte un bâtiment endommagé à Strasbourg le 27 février 2020, le matin après un incendie. (AFP).
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Publié le Mardi 26 septembre 2023

Incendie meurtrier à Strasbourg: les accusés condamnés à 23 ans et 4 ans et demi de prison

  • Ce procès, "c'était horrible. Perdre son enfant, c'est quelque chose d'extrêmement difficile, mais ressasser, remuer chaque minute" du drame laisse la plaie "à vif""
  • Tout au long des cinq jours de procès, la question des facultés mentales de ce jeune homme de 25 ans s'est posée

STRASBOURG: La cour d'assises du Bas-Rhin a condamné lundi à 23 ans de réclusion criminelle Sassoun Azarian pour l'incendie "volontaire" d'un immeuble de Strasbourg en 2020 qui avait fait cinq morts, et à quatre ans et six mois de prison Munasar Ali Abdullahi pour non assistance à personne en danger.

Dans la matinée, l'avocat général, Alexandre Chevrier, avait requis une peine de 25 ans de réclusion à l'encontre de Sassoun Azarian, estimant qu'il avait "volontairement" lancé un mégot dans la colonne électrique de l'immeuble, et de 12 ans de réclusion à l'encontre de Munasar Ali Abdullahi, pour "complicité". Les deux hommes encouraient la perpétuité.

A l'annonce du verdict, Sassoun Azarian, jeune homme de 24 ans d'origine azerbaïdjanaise, a dénoncé une décision "injuste" et "raciste", interrompant le président de la cour, Antoine Giessenhoffer. "Avec des cigarettes on tue des gens ? C'est un accident ! C'est un accident !", s'est-il emporté. Il a également été jugé coupable de non assistance à personne en danger.

Juste avant le délibéré, il avait présenté ses "excuses" aux familles des victimes. "Mais jamais de la vie on a voulu faire un coup pareil", avait-il assuré.

Son avocat, Me Randall Schwerdorffer, a dénoncé un verdict fondé sur "une intime impression" plutôt que sur une "intime conviction".

"Il est bien évident que nous ferons appel, car il nous paraît évident que le caractère volontaire (de l'incendie) ne peut pas être démontré dans cette affaire", a souligné l'avocat, qui avait réclamé que les jurés se penchent sur l'aspect "involontaire" du départ de feu.

QI à 53

A l'inverse, la cour a acquitté Munasar Ali Abdullahi pour les charges d'incendie volontaire ayant entraîné la mort. Elle l'a condamné uniquement pour non assistance à personne en danger, prononçant une peine de prison proche des cinq années encourues, assortie d'un mandat de dépôt.

"Cet acquittement nous satisfait", a réagi auprès de l'AFP Me Michaël Wacquez, son avocat. "Mais on estime que Munasar Ali Abdullahi n'a pas les facultés mentales pour prendre des décisions dans des situations extrêmes, la peine prononcée pour le délit connexe reste difficile à admettre", a-t-il poursuivi, indiquant qu'il allait étudier la possibilité de faire appel.

Tout au long des cinq jours de procès, la question des facultés mentales de ce jeune homme de 25 ans s'est posée. L'enquêtrice de personnalité a relevé chez lui "un retard de développement moteur et intellectuel", son QI a été mesuré à 53. L'expert psychiatre, au contraire, n'a décelé "aucune anomalie mentale" chez cet accusé qui "ruse, fabule et a réponse à tout".

A la barre, il n'a pas été capable d'apporter des réponses aux questions du tribunal, se contentant de répliquer le plus souvent "je ne me rappelle plus" aux interrogations des juges et des parties civiles.

« Vraiment soulagé »

"Je me sens vraiment soulagé. J'avais de grandes craintes, mais la justice a été rendue, à la hauteur des faits, même si ça ne remplacera jamais un être cher disparu", a commenté, les larmes aux yeux, Joël Giunta, 62 ans, dont la fille a péri dans l'incendie.

Ce procès, "c'était horrible. Perdre son enfant, c'est quelque chose d'extrêmement difficile, mais ressasser, remuer chaque minute" du drame laisse la plaie "à vif", a-t-il témoigné.

"C'est un verdict juste mais sévère, c'est ce que je demandais", s'est réjoui de son côté Grégory Engel, avocat de parties civiles. "A partir du moment où l'on considère que l'un est responsable d'un incendie volontaire, la peine est logique. Quant à l'autre, c'est une peine sévère mais normale compte-tenu des conséquences".

Dans la nuit du 26 au 27 février 2020, vers 01H00 du matin, les flammes s'étaient rapidement propagées dans cet immeuble d'habitation de sept étages dans le quartier de la gare à Strasbourg. Le feu, "très violent" selon un témoin, avait mobilisé pas moins de 48 sapeurs-pompiers et 23 véhicules, arrivés très rapidement sur les lieux.

Les secours avaient compté sept blessés, dont une femme enceinte, et cinq morts: une retraitée de 68 ans, une interne en médecine de 25 ans, un cariste de 45 ans, un jeune homme de 29 ans, et un étudiant togolais de 25 ans.


Un homme armé tentant de mettre le feu à une synagogue à Rouen tué par la police

"A Rouen, les policiers nationaux ont neutralisé tôt ce matin un individu armé souhaitant manifestement mettre le feu à la synagogue de la ville. Je les félicite pour leur réactivité et leur courage", écrit M. Darmanin sur X. (Reuters).
"A Rouen, les policiers nationaux ont neutralisé tôt ce matin un individu armé souhaitant manifestement mettre le feu à la synagogue de la ville. Je les félicite pour leur réactivité et leur courage", écrit M. Darmanin sur X. (Reuters).
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  • Les policiers sont "intervenus sur un signalement de dégagement de fumée près de la synagogue", a indiqué une source policière
  • "L'homme était armé d'un couteau et d'une barre de fer, il s'est approché des policiers qui ont tiré, l'individu est décédé", a précisé à l'AFP une source proche du dossier

PARIS: Un homme armé qui tentait vendredi matin de mettre le feu à une synagogue à Rouen, dans le nord-ouest de la France, a été tué par la police, a annoncé le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.

Les policiers sont "intervenus sur un signalement de dégagement de fumée près de la synagogue", a indiqué une source policière.

"L'homme était armé d'un couteau et d'une barre de fer, il s'est approché des policiers qui ont tiré, l'individu est décédé", a précisé à l'AFP une source proche du dossier.

"A Rouen, les policiers nationaux ont neutralisé tôt ce matin un individu armé souhaitant manifestement mettre le feu à la synagogue de la ville. Je les félicite pour leur réactivité et leur courage", écrit M. Darmanin sur X.


Des Français musulmans s'exilent à l'étranger, fuyant la « morosité ambiante »

Sur plus de 1.000 personnes répondant à un questionnaire relayé par l'intermédiaire de réseaux militants, 71% ont cité le racisme ou les discriminations pour expliquer ce choix, selon cette enquête, intitulée "La France, tu l'aimes mais tu la quittes". (AFP).
Sur plus de 1.000 personnes répondant à un questionnaire relayé par l'intermédiaire de réseaux militants, 71% ont cité le racisme ou les discriminations pour expliquer ce choix, selon cette enquête, intitulée "La France, tu l'aimes mais tu la quittes". (AFP).
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  • Une étude de sociologie publiée le mois dernier rapporte que des Français de culture musulmane, hautement qualifiés, souvent issus de l'immigration, quittent la France pour un nouveau départ
  • Ses amis, sa famille, la culture française lui manquent, mais il raconte avoir fui "l'islamophobie" et le "racisme systémique" entraînant des contrôles policiers à répétition à son encontre

PARIS: Après avoir échoué à 50 entretiens d'embauche pour un job de consultant, en dépit de ses qualifications et diplômes, Adam, Français de confession musulmane, a fait ses valises pour commencer une nouvelle vie à Dubaï.

"Je me sens beaucoup mieux ici qu'en France", estime désormais ce trentenaire d'origine nord-africaine.

"Ici on est tous égaux. On peut avoir comme patron une personne indienne, une personne arabe, un Français", témoigne-t-il à l'AFP, ajoutant que sa religion est "plus acceptée".

Une étude de sociologie publiée le mois dernier rapporte que des Français de culture musulmane, hautement qualifiés, souvent issus de l'immigration, quittent la France pour un nouveau départ dans des villes telles que Londres, New York, Montréal ou Dubaï.

Sur plus de 1.000 personnes répondant à un questionnaire relayé par l'intermédiaire de réseaux militants, 71% ont cité le racisme ou les discriminations pour expliquer ce choix, selon cette enquête, intitulée "La France, tu l'aimes mais tu la quittes".

En France, "vous devez faire deux fois plus d'efforts quand vous venez de certaines minorités", reprend Adam, qui ne donne pas son nom de famille, comme tous ceux interrogés par l'AFP.

Ses amis, sa famille, la culture française lui manquent, mais il raconte avoir fui "l'islamophobie" et le "racisme systémique" entraînant des contrôles policiers à répétition à son encontre.

'Plafond de verre'

La France, ancienne puissance coloniale et pays d'immigration, compte une importante population d'origine maghrébine et africaine.

Les enfants d'immigrés venus chercher une vie meilleure ou appelés à constituer une main d'oeuvre bon marché dans les années 60 sont Français. Mais nombre d'entre eux se sentent étrangers dans leur propre pays, considérés comme des "citoyens de seconde zone". En particulier depuis les attentats jihadistes de 2015 en France.

"Le climat en France s’est largement dégradé. En tant que musulman on est pointé du doigt", estime sous couvert de l'anonymat un banquier franco-algérien de trente ans, qui s'apprête à quitter son pays en juin, direction Dubaï.

Il évoque notamment certaines chaînes d'info et éditorialistes assimilant tous les musulmans à des extrémistes religieux ou des fauteurs de troubles.

Ce fils d'une femme de ménage algérienne, titulaire de deux masters, estime en outre s'être heurté à un "plafond de verre" dans son parcours professionnel en France.

En France, les statistiques ethniques et religieuses sont interdites. Mais de nombreuses enquêtes documentent depuis des années les discriminations frappant les personnes d'origine immigrée dans la recherche d'emploi, de logement, les contrôles policiers...

Un candidat au nom français a près de 50% de chances supplémentaires d’être rappelé par un employeur par rapport à un candidat au nom maghrébin, rappelle ainsi l'Observatoire des inégalités dans son rapport 2023.

'Morosité'

Le rapport très particulier de la France à la laïcité, les polémiques récurrentes sur le voile musulman, provoquent aussi le malaise chez certains.

"Il y a une vraie spécificité française sur cette question. Dans notre pays, une femme qui porte le voile est reléguée à la marge de la société et il lui est notamment très difficile de trouver un emploi. Des femmes portant le hidjab qui veulent travailler sont donc assez logiquement amenées à quitter la France", explique Olivier Esteves, l'un des auteurs de l'étude, au Monde.

"On étouffe en France", raconte à l'AFP un Français de 33 ans d'origine marocaine, qui s'apprête à émigrer en Asie du sud-est avec sa femme enceinte, "pour vivre dans une société plus apaisée et où les communautés savent vivre ensemble".

Cet employé dans la tech veut fuir "la morosité ambiante" et les "humiliations" du quotidien liées à son patronyme et ses origines.

"On me demande encore aujourd’hui ce que je fais dans ma résidence", où il vit depuis plusieurs années. "Et c’est pareil pour ma mère quand elle me visite. Mais ma femme qui est blanche de peau n’a jamais eu cette question", raconte-t-il.

"Cette humiliation constante est d’autant plus frustrante que je contribue net à cette société en faisant partie des hauts revenus qui paient plein pot", s'insurge-t-il.

Paradoxalement, la société française est pourtant "plus ouverte qu'il y a vingt ans" et "le racisme recule", souligne le dernier rapport annuel de l'Observatoire des inégalités, notant que 60% des Français déclarent n'être "pas du tout racistes", soit deux fois plus qu'il y a 20 ans.

Et la part de ceux qui pensent qu’il y a des "races supérieures à d’autres" a été divisée par trois, de 14% à 5%.


Les députés érigent l'agriculture en « intérêt général majeur »

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  • "La protection, la valorisation et le développement de l'agriculture et de la pêche sont d'intérêt général majeur en tant qu'ils garantissent la souveraineté agricole et alimentaire de la Nation, qui contribue à la défense de ses intérêts fondamentaux"
  • L'engagement avait été pris par Emmanuel Macron au salon de l'Agriculture, alors que la colère des agriculteurs battait son plein

PARIS: Les députés ont approuvé jeudi un article du projet de loi agricole qui prévoit de conférer à l'agriculture un caractère "d'intérêt général majeur", une innovation juridique censée répondre à une demande des agriculteurs, mais dont les oppositions contestent la portée.

"La protection, la valorisation et le développement de l'agriculture et de la pêche sont d'intérêt général majeur en tant qu'ils garantissent la souveraineté agricole et alimentaire de la Nation, qui contribue à la défense de ses intérêts fondamentaux", énonce cet article-clé du projet de loi.

L'engagement avait été pris par Emmanuel Macron au salon de l'Agriculture, alors que la colère des agriculteurs battait son plein. "Sur le plan juridique, ça positionne l'agriculture en équilibre avec l'environnement", avait approuvé Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, premier syndicat agricole.

"Cela va venir produire, sur le long terme, des effets dans la manière dont vont pouvoir être pondérés différents objectifs de politiques publiques, et dans la manière dont, sur le terrain, des projets agricoles pourront être évalués, réalisés et développés", a affirmé le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau.

Plusieurs députés -- à l'instar de juristes --, doutent cependant de sa portée.

La mesure "crée le fantasme d'une remise en cause de la charte de l'environnement" et "donne l'illusion au monde paysan qu'on a répondu de façon démagogique à toutes ces attentes d'être au-dessus du reste des normes, du droit", a fustigé Dominique Potier (PS).

Nicole Le Peih, rapporteure Renaissance, a admis qu'il s'agissait d'une "innovation juridique" qui ne "modifie pas la hiérarchie des normes".

"Il n'y a pas de remise en cause du principe constitutionnel de la protection de l'environnement" mais "lorsque plusieurs dispositions législatives seront en présence, voire seront contradictoires, l'agriculture fera désormais l'objet d'une attention spécifique", a-t-elle soutenu.

« Intentions »

L'article propose également une longue définition de la souveraineté alimentaire et agricole de la France, reposant notamment sur sa capacité à "produire, transformer et distribuer" les produits nécessaires à "une alimentation suffisante, saine (et) sûre".

Il pose aussi le principe "d'ici au 1er juillet 2025 puis tous les dix ans d'une programmation pluriannuelle de l'agriculture".

Le reste consiste surtout en une longue liste de bonnes pratiques que les politiques publiques sont censées suivre pour assurer cette "souveraineté alimentaire".

L'article a surtout permis à chaque groupe de faire valoir sa vision de l'agriculture, et au camp présidentiel de jouer la carte de la co-construction.

Il a intégré certains objectifs proposés par Les Républicains (justifier et évaluer les surtranspositions avant de les mettre en place, valoriser les agricultrices) ou la gauche (améliorer les conditions de travail des agriculteurs, développer la prévention sanitaire).

Mais l'article "n'a aucune valeur normative" et n'apporte "aucune contrainte", a déploré Sébastien Jumel (PCF). Aurélie Trouvé (LFI), a dénoncé l'absence de mesures pour des "prix planchers".

"C'est caricatural", a rétorqué Henri Alfandari (Horizons), estimant que les agriculteurs demandaient aussi de la clarté sur leurs missions. L'article pose des "intentions qui encouragent", pour Julien Dive (LR).

Les députés RN ont eux fustigé le manque de soutien à leurs amendements.

Les règles de la procédure parlementaire ont aussi donné lieu à une fin de séance kafkaïenne, les députés passant près d'une heure et demie à voter ou rejeter près de 560 amendements, dont certains avaient été débattus de nombreuses heures auparavant.

"C'était complètement dingue", soupirait une députée en sortant, mi-amusée, mi-fatiguée.