Face à Macron, le discours papal résonne dans le débat français sur les migrants

Le président français Emmanuel Macron (à droite) et son épouse Brigitte Macron (à gauche) accompagnent le pape François (au centre) lors de la cérémonie de départ de ce dernier à l'aéroport Marseille Provence, à Marseille, le 23 septembre 2023. (Photo de Sébastien NOGIER / POOL / AFP)
Le président français Emmanuel Macron (à droite) et son épouse Brigitte Macron (à gauche) accompagnent le pape François (au centre) lors de la cérémonie de départ de ce dernier à l'aéroport Marseille Provence, à Marseille, le 23 septembre 2023. (Photo de Sébastien NOGIER / POOL / AFP)
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Publié le Samedi 23 septembre 2023

Face à Macron, le discours papal résonne dans le débat français sur les migrants

  • La présence du chef de l'Etat a fait polémique en France, l'opposition de gauche dénonçant une atteinte à la laïcité
  • La droite et l'extrême droite ne se sont pas offusquées de la présence d'Emmanuel Macron à la messe, mais elles minimisent voire déplorent le discours du pape sur les migrants

MARSEILLE: Le discours du pape samedi à Marseille contre "l'indifférence" face au sort des migrants résonne dans le débat politique français, la gauche accusant d'hypocrisie Emmanuel Macron et critiquant sa présence à la messe de François au stade Vélodrome.

Samedi matin au Palais du Pharo, le président et son épouse Brigitte Macron sont assis face au chef de l'Eglise catholique qui, de sa voix frêle, scande des mots fermes en forme d'avertissement à la classe politique française et européenne.

Les migrants "qui risquent leur vie en mer n'envahissent pas", ils "ne doivent pas être considérés comme un fardeau", affirme le souverain pontife, plaidant pour "un grand nombre d'entrées légales et régulières" quand la tendance est à la restriction.

François fustige ceux qui parlent d'une "invasion" pour alimenter "la peur" et en appelle à une "responsabilité européenne". Puis il s'invite dans un débat vif en France lorsqu'il défend l'"intégration" des étrangers, plutôt que "l'assimilation" chère à la droite.

Qu'en pense Emmanuel Macron, dont la ligne sur ce thème explosif a pu fluctuer depuis son arrivée à l'Elysée en 2017 ? S'il a prôné un "devoir de solidarité européenne" avec l'Italie face à l'afflux de migrants sur l'île de Lampedusa, le président français a aussi promis de "réduire significativement l'immigration".

A ses côtés, son ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, chargé de la gestation très complexe d'une loi sur l'immigration qui peine à réunir une majorité parlementaire, écoute aussi le souverain pontife. La France "n'accueillera pas de migrants" de Lampedusa, a affirmé M. Darmanin en début de semaine.

«Mort douce»

Après ce discours papal, en clôture des Rencontres méditerranéennes réunissant dans la deuxième ville de France évêques et jeunes, François et Emmanuel Macron s'enferment pour leur quatrième tête-à-tête en six ans, le premier en dehors du Vatican.

Ils évoquent la situation internationale mais aussi, brièvement, la question migratoire. "La France n'a pas à rougir, c'est un pays d'accueil et d'intégration", se défend l'Elysée.

Emmanuel et Brigitte Macron ont ensuite assisté à la messe géante célébrée par "papa Francesco" au stade Vélodrome, l'antre de l'Olympique de Marseille - le club de coeur du président français.

La présence du chef de l'Etat a fait polémique en France, l'opposition de gauche dénonçant une atteinte à la laïcité.

"Le président de la République n’a rien à faire là (…), je pense qu’il tape l’incruste", a lancé le leader de la gauche radicale, Jean-Luc Mélenchon. Emmanuel Macron "se comporte de manière particulièrement hypocrite parce que c’est lui qui met en place ces politiques-là" sur l'immigration, a-t-il poursuivi, tout en saluant le rôle "utile" du pape pour dénoncer "la barbarie contre les migrants".

A l'autre bout de l'échiquier politique, la droite et l'extrême droite ne se sont pas offusquées de la présence d'Emmanuel Macron à la messe, mais elles minimisent voire déplorent le discours du pape sur les migrants.

Le parti conservateur Les Républicains (LR) réclame un référendum pour changer la Constitution afin de déroger aux règles européennes. "Pour que les Français puissent enfin décider qui peut entrer ou non en France, sans que des juridictions nous condamnent à l'impuissance", a encore expliqué sur X (ex-Twitter) le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau.

"Moi je suis en désaccord avec le pape François, je trouve que le pape François n'a pas à faire de la politique et qu'il en fait trop", a même dit la semaine dernière Marion Maréchal, tête de liste de Reconquête!, le parti d'extrême droite d'Eric Zemmour, pour les élections européennes de 2024.

Dans son discours, le pape François a glissé un autre thème aux allures de mise en garde à Emmanuel Macron: celui de la fin de vie. Il a pourfendu la "perspective faussement digne d'une mort douce, en réalité plus salée que les eaux de la mer".

Le gouvernement français s'apprête à dévoiler un projet de loi qui pourrait aller jusqu'à autoriser une "aide active à mourir". Sa présentation devait théoriquement intervenir avant la venue du pape, mais elle a été décalée.


Paris entend résoudre les tensions avec Alger « sans aucune faiblesse »

le chef de la diplomatie française, chef de la diplomatie française (Photo AFP)
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  • Le chef de la diplomatie française a assuré mardi que Paris entendait résoudre les tensions avec Alger « avec exigence et sans aucune faiblesse ».
  • « L'échange entre le président de la République (Emmanuel Macron, ndlr) et son homologue algérien (Abdelmadjid Tebboune) a ouvert un espace diplomatique qui peut nous permettre d'avancer vers une résolution de la crise », a-t-il ajouté.

PARIS : Le chef de la diplomatie française a assuré mardi que Paris entendait résoudre les tensions avec Alger « avec exigence et sans aucune faiblesse ». Il s'exprimait au lendemain d'un entretien entre les présidents français et algérien, qui visait à renouer le dialogue après huit mois de crise diplomatique sans précédent.

« Les tensions entre la France et l'Algérie, dont nous ne sommes pas à l'origine, ne sont dans l'intérêt de personne, ni de la France, ni de l'Algérie. Nous voulons les résoudre avec exigence et sans aucune faiblesse », a déclaré Jle chef de la diplomatie française devant l'Assemblée nationale, soulignant que « le dialogue et la fermeté ne sont en aucun cas contradictoires ».

« L'échange entre le président de la République (Emmanuel Macron, ndlr) et son homologue algérien (Abdelmadjid Tebboune) a ouvert un espace diplomatique qui peut nous permettre d'avancer vers une résolution de la crise », a-t-il ajouté.

Les Français « ont droit à des résultats, notamment en matière de coopération migratoire, de coopération en matière de renseignement, de lutte contre le terrorisme et au sujet bien évidemment de la détention sans fondement de notre compatriote Boualem Sansal », a affirmé le ministre en référence à l'écrivain franco-algérien condamné jeudi à cinq ans de prison ferme par un tribunal algérien. 


Algérie: Macron réunit ses ministres-clés au lendemain de la relance du dialogue

Emmanuel Macron, président français (Photo AFP)
Emmanuel Macron, président français (Photo AFP)
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  • Emmanuel Macron  réunit mardi plusieurs ministres en première ligne dans les relations avec l'Algérie, dont Bruno Retailleau, Gérald Darmanin et Jean-Noël Barrot, au lendemain de l'appel avec son homologue algérien Abdelmadjid Tebboune
  • Le président français a décidé, à la suite de ce coup de fil, de dépêcher le 6 avril à Alger le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot afin de « donner rapidement » un nouvel élan aux relations bilatérales.

PARIS : Emmanuel Macron  réunit mardi à 18H00 plusieurs ministres en première ligne dans les relations avec l'Algérie, dont Bruno Retailleau, Gérald Darmanin et Jean-Noël Barrot, au lendemain de l'appel avec son homologue algérien Abdelmadjid Tebboune pour relancer le dialogue, a appris l'AFP de sources au sein de l'exécutif.

Le président français a décidé, à la suite de ce coup de fil, de dépêcher le 6 avril à Alger le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot afin de « donner rapidement » un nouvel élan aux relations bilatérales après des mois de crise, selon le communiqué conjoint publié lundi soir.

Le ministre français de la Justice, Gérald Darmanin, effectuera de même une visite prochainement pour relancer la coopération judiciaire.

Le communiqué ne mentionne pas en revanche le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, figure du parti de droite Les Républicains, partisan d'une ligne dure à l'égard de l'Algérie ces derniers mois, notamment pour obtenir une nette augmentation des réadmissions par le pays de ressortissants algériens que la France souhaite expulser.

Bruno Retailleau sera présent à cette réunion à l'Élysée, avec ses deux collègues Barrot et Darmanin, ainsi que la ministre de la Culture, Rachida Dati, et celui de l'Économie, Éric Lombard, ont rapporté des sources au sein de l'exécutif.

 Dans l'entourage du ministre de l'Intérieur, on affirme à l'AFP que si la relance des relations décidée par les deux présidents devait bien aboutir à une reprise des réadmissions, ce serait à mettre au crédit de la « riposte graduée » et du « rapport de force » prônés par Bruno Retailleau. 


Algérie: la relance de la relation décriée par la droite

Cette photo prise le 25 août 2022 montre les drapeaux français et algérien avant l'arrivée du président français à Alger pour une visite officielle  afin d'aider à rétablir les liens avec l'ancienne colonie française, qui célèbre cette année le 60e anniversaire de son indépendance. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Cette photo prise le 25 août 2022 montre les drapeaux français et algérien avant l'arrivée du président français à Alger pour une visite officielle afin d'aider à rétablir les liens avec l'ancienne colonie française, qui célèbre cette année le 60e anniversaire de son indépendance. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • La droite a dénoncé mardi la relance de la relation bilatérale avec l'Algérie en minimisant son impact sur les obligations de quitter le territoire (OQTF).
  • Selon l'élu des Alpes-Maritimes, cette conversation entre les deux chefs d'État signifie « que les ministres n'ont aucun pouvoir, M. Retailleau en premier ».

PARIS : La droite a dénoncé mardi la relance de la relation bilatérale avec l'Algérie en minimisant son impact sur les obligations de quitter le territoire (OQTF), Laurent Wauquiez déplorant « une riposte très provisoire » et Éric Ciotti, allié du RN, dénonçant une relation « insupportable » entre les deux pays.

« La riposte était très graduée et en plus très provisoire », a réagi Laurent Wauquiez sur X au lendemain de la conversation entre les présidents français Emmanuel Macron et algérien Abdelmadjid Tebboune, qui ont acté une relance de la relation bilatérale, après des mois de crise.

Lors de la réunion du groupe des députés LR, l'élu de Haute-Loire, qui brigue la présidence du parti face au ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, s'est dit convaincu que les autorités algériennes n'accepteront pas les OQTF.

« On va se retrouver dans 90 jours avec les OQTF dangereux qui seront dans la nature. Nous ne pouvons pas l'accepter », a déploré le député de Haute-Loire.

De son côté, Éric Ciotti, l'ancien président des LR alliés avec le RN, a directement ciblé le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau sur CNews, lui reprochant de n'avoir montré que « des petits muscles face à Alger ».

Selon l'élu des Alpes-Maritimes, cette conversation entre les deux chefs d'État signifie « que les ministres n'ont aucun pouvoir, M. Retailleau en premier ».

« La relation privilégiée Macron-Algérie depuis 2016 perdure. Et cette relation est insupportable, parce qu'elle traduit un recul de notre pays. »

Les deux présidents, qui se sont entretenus le jour de l'Aïd el-Fitr marquant la fin du ramadan, ont marqué « leur volonté de renouer le dialogue fructueux », selon un communiqué commun.

La reprise des relations reste toutefois subordonnée à la libération de l'écrivain Boualem Sansal et à des enjeux de politique intérieure dans les deux pays.