LONDRES: Après New York, le monde de la mode s'est retrouvé vendredi à Londres pour cinq jours de défilés, avec quelques grands noms comme l'incontournable Burberry mais aussi beaucoup de jeunes créateurs qui pourraient faire la mode de demain.
Il y a un an, la semaine de la mode de Londres, qui devait faire son grand retour après les années Covid, avait été éclipsée par la mort de la reine Elizabeth II, le 8 septembre, suivie de dix jours de deuil national. Cette année, plus de 80 designers présentent leur collection printemps/été 2024.
"Nous allons avoir cinq jours passionnants, pleins de créativité", s'enthousiasme Caroline Rush, directrice du British Fashion Council (BFC), l'organisateur de cet événement.
Premier show à l'agenda, vendredi matin, celui du créateur Paul Costelloe, le vétéran de la fashion week de Londres, qui fut longtemps couturier fétiche de la princesse Diana. Les mannequins ont défilé, raquette de tennis en bois à la main, sous la grande verrière du Royal horticultural halls pour cette collection appelée "Il giardino" (le jardin).
C'est une ode à la douceur de vivre, "un après-midi tranquille" à Ferrara, dans le nord de l'Italie, explique le créateur. On imagine l'aristocratie en vacances dans cette collection marquée par une certaine nostalgie.
Les mannequins portent de larges bandeaux dans les cheveux, des vestes aux épaules larges sur de simples hauts de bikini, le tout dans des tons pastels. C'est chic, mais décontracté. Si elles enfilent un pull en maille, c'est pour laisser une épaule dénudée. Les plus hardies portent en haut des bandeaux en forme de noeud.
Jeudi soir, en introduction à cette fashion week, le magazine Vogue a déroulé le tapis rouge à nombre de stars britanniques pour une soirée de gala. Parmi les looks marquants: l'actrice Sienna Miller a exhibé son ventre de femme enceinte dans une tenue Schiaparelli.
Les mannequins Cara Delevingne et Kate Moss ont défilé lors de cette soirée en hommage à la culture britannique, ainsi que les quatre tops des années 1990, Cindy Crawford, Naomi Campbell, Christy Turlington, Linda Evangelista.
IA, diversité, Brexit: la mode britannique en trois questions avant la fashion week
Secouée par le Brexit et l'inflation, remuée par l'intelligence artificielle, interpellée sur sa diversité: l'industrie de la mode britannique fait face à une série de défis.
Etat des lieux avec la directrice du British Fashion Council (BRC), Caroline Rush, à l'orée de la semaine de la mode de Londres, qui démarre vendredi.
Question: Comment s'annonce la semaine de la mode et comment se porte le secteur?
Réponse: Cela va être cinq journées exaltantes pleines de créativité, des jeunes créateurs indépendants jusqu'au grands noms, comme Burberry. Nous attendons des gens de 40 pays qui assisteront à 80 défilés. Parmi les tendances principales que nous verrons: une nouvelle approche vers la durabilité, avec beaucoup de nos jeunes créateurs qui utilisent des matériaux recyclés ou réutilisés.
La pandémie a été un défi, particulièrement pour les petites entreprises indépendantes. En plus au Royaume-Uni nous avons eu le Brexit (...). Ca a vraiment mis sous pression les marges des entreprises en plus de la hausse du coût de la vie et des biens. Je ne vais pas prétendre que les affaires sont faciles en ce moment, mais il y a un réel appétit pour les créateurs britanniques et heureusement nous allons nous focaliser là-dessus dans les jours à venir.
Q: Le monde de la mode est sous pression pour devenir plus inclusif.
R: Je pense qu'à Londres nous voyons une diversité incroyable dans les défilés et l'une des critiques que nous recevons c'est que ce n'est pas le cas dans les équipes de direction (des entreprises du secteur, ndlr).
Mais les images que vous verrez sur les podiums cette semaine, ce sera une grande diversité de corps, d'âges, d'ethnicités, un réel reflet de la brillante cité culturelle où nous vivons.
Q: De quelle manière l'intelligence artificielle influence-t-elle déjà la mode?
R: L'intelligence artificielle est un sujet qui est au menu de tous les conseils d'administration. Chaque entreprise l'approche différemment. Certaines regardent comment faciliter les processus créatifs, d'autres comment cela peut perturber leurs modèles d'activité.
Est-ce qu'on pourrait produire toute une collection à base d'intelligence artificielle? J'en suis sûre. Mais ce qui est beau avec la créativité et les écoles d'art c'est la liberté d'expression et les différences créatives et c'est là que s'exprime le rôle des designers, ils s'inspirent peut-être d'informations rassemblées par le biais de l'IA, et ils y impriment leur touche très humaine.
Rebelle
Malgré cette touche glamour, Londres est plutôt à la peine sur la planète mode. La pandémie, l'inflation qui reste la plus élevée des pays du G7 (6,8% en juillet) et aussi le Brexit n'aident pas.
La fashion week de Paris reste la plus prestigieuse, devant Milan et New York. La capitale britannique manque de grands noms. Comme un symbole de cette perte d'influence: la très British Victoria Beckham présente depuis l'an dernier sa collection à Paris.
Le gouvernement a annoncé mercredi un fond de 2 millions de livres sterling (2,3 millions d'euros) pour soutenir les jeunes créateurs. Cette aide ira au programme NewGen du BFC.
Depuis trente ans, cette initiative soutient les meilleurs jeunes créateurs de mode et vise à lancer les marques mondiales haut de gamme de demain. Plusieurs grands noms de la mode ont bénéficié de ce programme, dont Alexander McQueen, mort en 2010.
Le Design Museum à Londres présente d'ailleurs à partir de samedi une exposition célébrant ces jeunes talents NewGen, qui ont apporté tant d'énergie à la mode. "Rebel: 30 years of London fashion" (Rebelle: 30 ans de mode londonienne) montre une centaine de looks, dont certains sont entrés dans l'histoire de la culture pop.
Cette année, une vingtaine de créateurs bénéficient du programme NewGen. La plupart sont sortis tout récemment d'école, mais ont déjà réussi à habiller certaines des plus grandes stars du moment. Des créations de l'Ukrainienne Masha Popova ont été ainsi portées par la chanteuse Dua Lipa. L'actrice Zendaya a été séduite par Di Petsa.
Mais Burberry, maison londonienne fondée en 1856, reste le rendez-vous le plus attendu. Le défilé aura lieu lundi après-midi. Ce sera seulement la deuxième collection du directeur de création anglais Daniel Lee, après celle de février.
Le dernier jour, mardi, des créateurs ukrainiens vont présenter leur collection, Londres accueillant une nouvelle fois, en raison de la guerre, la fashion week ukrainienne.