PARIS: "Laissez-moi vous ouvrir la porte": bienvenue au 5 bis rue de Verneuil à Paris, antre mythique de Serge Gainsbourg qui ouvre enfin au public le 20 septembre, avec la voix de sa fille Charlotte par audio-guide.
Les souvenirs d'enfance de la chanteuse et actrice -- en français ou en anglais, au choix -- portent ce parcours sonore d'une demi-heure et évitent l'effet entrée dans un mausolée.
Mis à part des panneaux de verre à mi-hauteur qui laissent le visiteur à l'entrée des pièces -- et l'empêchent de toucher à tout -- l'endroit est resté comme il l'était à la disparition de l'artiste en 1991.
Tel que l'ont vu pendant des années les amis -- Jacques Dutronc, Françoise Hardy, etc -- les journalistes conviés pour des interviews, ainsi que les chauffeurs de taxi et les policiers.
On entre par le salon. Il y a les éléments attendus, le piano noir -- de la même couleur que murs et plafonds -- les disques d'or, les photos des femmes de sa vie -- Brigitte Bardot, Jane Birkin, Bambou -- et de l'icône Marilyn Monroe. Le plus émouvant, c'est une banquette, légèrement déformée à gauche, là où le maître des lieux s'asseyait toujours. La voix de sa fille se fêle un peu à ce moment dans les écouteurs.
«Ne rien bouger»
"Dès qu'il est mort, j'ai eu la volonté de ne rien bouger, tout de suite j'ai parlé d'ouvrir un musée car il en avait lui-même parlé", a confié Charlotte Gainsbourg devant quelques journalistes lors d'une table ronde mercredi après-midi.
Le parcours jusqu'à l'ouverture de la Maison Gainsbourg, soit le 5 bis rue de Verneuil et un musée dédié à "L'homme à la tête de chou" au 14 de la rue, a duré 32 ans. Avec des séquences d'emballements et de doutes. "Il y a eu des moments de grande poussière, quand je n'avais plus confiance et que je ne voulais plus que personne n'y rentre", confie Charlotte Gainsbourg.
A la disparition en juillet de Jane Birkin, sa mère, qui avait vécu dans ses murs entre la fin des années 1960 et son départ en 1980, lassée des excès de "Gainsbarre", la question d'un report de l'ouverture s'est posée. "Mais il n'y avait pas de raison de repousser", souffle sa fille devant la presse.
Gardienne du temple, l'artiste a réussi à ce que le temps se fige dans la maison. Les gâteaux au chocolat Yes -- marque émblématique des années 1980 -- sont d'époque, intacts sous plastique.
Bulletins scolaires
On ne verra pas sa fourchette favorite, qu'il avait dérobée chez Maxim's et que Charlotte confesse avoir "piquée" à son tour pour la remiser dans sa "table de nuit".
L'émotion dans sa voix enregistrée est palpable quand on termine la visite à l'étage par la chambre à coucher. Charlotte Gainsbourg y raconte des choses très intimes dans les heures qui ont suivies le décès de son père, comme le fait de s'allonger à côté du corps embaumé.
Au sol de la chambre, une zone du tapis est élimée. Là où Gainsbourg posait le pied en premier quand il se levait vers 13h après une nuit en boîte.
Au 14 rue de Verneuil, le musée permet d'exposer des objets qui n'étaient pas visibles dans cette maison de poupée, exiguë en dépit de ses 130 mètres carrés tant le collectionneur Gainsbourg y a entassé de bibelots. Dans une vitrine du musée, les bulletins scolaires avant son entrée en 6e sont touchants. Quelques 100 000 visiteurs sont espérés par an.