MARSEILLE: Les violences liées au narcobanditisme sont montées d'un cran à Marseille où une femme de 24 ans se retrouve en état de mort cérébrale après avoir été touchée chez elle par une rafale tirée à l'aveugle.
Depuis quelques mois, les autorités policières et judiciaires s'inquiétaient d'une "vendetta" entre gangs de trafiquants de drogues, une guerre de territoire à coup de rafales tirées à l'aveugle sur ou à proximité de points de deal. Des violences qui ont déjà fait une quarantaine de morts dans la deuxième ville de France depuis janvier, dépassant le bilan 2022 (31 morts).
Alors que la plupart des victimes sont des hommes jeunes, parfois des adolescents, petites mains du trafic, dimanche soir vers 23H00 c'est une jeune femme qui "vivait sa vie tranquillement" avec sa mère qui a été touchée à la tête par une rafale de kalachnikov dans leur appartement, au 3e étage d'un immeuble d'une cité du 10e arrondissement, dans le sud-est de Marseille.
Transférée dans un état très grave à l'hôpital avec un pronostic vital engagé, elle se trouve en état de mort cérébrale, a annoncé la procureure de Marseille, Dominique Laurens, lors d'un point presse.
Des tirs ont eu lieu dans un premier temps au niveau de la pharmacie de son groupe d'immeubles à Saint-Thys, quartier classé prioritaire, près de laquelle il est "habituel" que des jeunes se regroupent le soir et où se situait un point de trafic de stupéfiants.
"Après ce premier tir à l'aveugle, un deuxième à l'aveugle en l'air va impacter" l'appartement de la victime ainsi que deux autres logements, où se trouvaient deux dames âgées de 79 et 86 ans qui n'ont pas été blessées, mais sont psychologiquement atteintes, selon Dominique Laurens.
Vingt-trois douilles de kalachnikov ont été retrouvées sur place. Donc, même si cette jeune femme "apparait comme une victime collatérale", la troisième depuis le début de l'année, "l'intention de l'homicide prémédité est caractérisée par le passage à l'acte", pour la magistrate.
«Pieuvre»
L'enquête, confiée à la police judiciaire, est ouverte pour "tentatives d'assassinats en bande organisée et association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime".
Les violences liées au narcobanditisme se concentrent en général dans les quartiers déshérités du nord de la ville. Là, elles touchent le sud-est de la ville où existent aussi des ensembles paupérisés.
"Des tensions sur fond de trafic de stupéfiants" se font ressentir "actuellement dans plusieurs cités", a expliqué la préfète de police des Bouches-du-Rhône Frédérique Camilleri.
"Nous avons évidemment renforcé depuis hier soir la présence policière dans cette cité Saint-Thys, cité dans laquelle se trouvait un point de deal, qui était manifestement ciblé (…) Un point de deal qui n’est pas un point de deal extrêmement important, qui n’a pas une activité extrêmement importante et cette cité-là était relativement calme ces derniers temps", a-t-elle ajouté.
"Nous sommes engagés dans une bataille contre le trafic de drogue sous toutes ces formes qui sera sans doute longue", a encore poursuivi la préfète alors qu'une forme d'impuissance semble palpable chez de nombreux acteurs de terrain. "La police est dans son rôle d'aller en permanence couper les tentacules de la pieuvre" du trafic et des violences liées, a-t-elle poursuivi, fustigeant "un usage débridé des armes de guerre pour essayer de conquérir de nouveaux territoires".
Depuis le début de l'année, une quarantaine de personnes ont été tuées dans des violences liées au narcobanditisme à Marseille, une situation qualifiée de "bain de sang" par les autorités.
En 2023, ces violences ont déjà fait deux victimes collatérales, le 10 mai une femme de 43 ans tuée par balles cité Saint-Joseph (14e arrondissement), et le 24 avril, un homme de 63 ans, atteint à un snack situé à côté d'un point de deal de la cité de la Busserine (14e arrondissement) alors qu'il jouait aux cartes.
Avec ce nouveau drame, "on a atteint le degré ultime" de ces violences, a dénoncé Mme Laurens.
Dans le sud-est de la France, un enfant de dix ans a également été tué par erreur à Nîmes le 22 août dans la guerre que se livrent les trafiquants de drogue.