PARIS: Sans "illusion", un piège, une "mise en scène médiatique": la rencontre au sommet mercredi d'Emmanuel Macron avec les principaux chefs de partis, destinée à trouver des terrains d'entente et contourner des blocages au Parlement, s'annonce ardue face à des oppositions méfiantes.
La rencontre, prévue dans le cadre très symbolique de la maison d'éducation de la Légion d'honneur à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), doit commencer à 15H00.
Alors que le chef de l'Etat veut convaincre les formations représentées au Parlement de bâtir "ensemble" des textes législatifs et de s'entendre éventuellement sur des référendums, la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes) répond d'une seule voix, malgré ses multiples tensions internes sur d'autres sujets.
Dans un sévère courrier au chef de l'Etat, les quatre principaux partis de l'alliance (LFI, EELV, PS, PCF) affirment qu'"au vu du contenu de la politique" d'Emmanuel Macron et "des termes de (son) invitation", ils ne se font "pas d'illusion" sur ses objectifs, se disant "habitués" à ses "opérations de communication sans lendemain et sans effets".
"Nous ne voulons pas participer à nouveau à une mise en scène médiatique. C'est la raison pour laquelle nous ne participerons pas au dîner que vous organisez en soirée", ajoutent-ils.
Une prise de position qui a quelque peu surpris du côté de l'exécutif, alors que le repas en question doit porter sur les sujets d'éducation, d'autorité, d'intégration, après de premiers échanges sur la situation internationale et les réformes institutionnelles.
Rencontre «inédite»
"C'est un dîner de travail qui est consacré à la dernière partie de l'ordre du jour, le 'faire Nation'", quelques semaines après les violentes émeutes urbaines qui ont secoué la France, fait-on valoir dans l'entourage du chef de l'Etat.
De quoi convaincre les partis de gauche de revenir à la table des agapes? "Cet amateurisme et cette improvisation insupportables montrent bien le mépris du président de la République pour l'opposition", botte en touche, en réservant sa réponse, le patron de LFI Manuel Bompard.
Emmanuel Macron, qui promet avec ce rendez-vous une "initiative politique d'ampleur", souhaite une "discussion franche, loyale, directe", assure l'Elysée, en soulignant que cette rencontre "entre un président de la République et tous les chefs de partis en même temps est inédite".
Les chefs de la Nupes se disent pour leur part "interloqués" par le courrier d'Emmanuel Macron et la "politique d'indépendance et de justice" qu'il revendique.
Ils porteront de leur côté des propositions sur les difficultés de recrutement dans l'Education nationale, le coût de la vie. Et, surtout, ils réclameront un référendum sur la réforme des retraites, contre laquelle la Nupes a bataillé pendant des mois à l'Assemblée nationale.
A droite et à l'extrême droite, c'est d'immigration que les chefs de partis veulent parler: Eric Ciotti (LR) et Jordan Bardella (RN) réclameront un référendum sur le sujet, les lepénistes souhaitant une consultation le 9 juin 2024, en même temps que les élections européennes.
«Se relégitimer»
Du côté de la majorité présidentielle, Renaissance entend aussi arriver avec des idées de référendums.
"Ce que nous avons validé (lundi, lors d'un bureau exécutif), c'est un référendum avec entre trois et cinq questions, avec de l'international, du national et du pouvoir d'achat", a indiqué mardi Renaud Muselier sur Sud Radio, citant l'immigration, la sécurité et les institutions parmi les thèmes possibles.
"Tout doit être mis en œuvre pour éviter cette fameuse motion (de censure). Et cette dissolution. Et ce retour aux urnes", résume un cadre de majorité alors que les examens du budget 2024 ou du projet de loi sur l'immigration s'annoncent périlleux.
"Emmanuel Macron va mettre les oppositions devant leurs responsabilités", renchérit un autre qui plaide pour un référendum sur les institutions. "C'est une façon, si les gens votent oui, de se relégitimer", pointe-t-il.
Mais pour le patron des socialistes, Olivier Faure, cette rencontre est "un nouveau bidule" et "un barnum surtout destiné à Éric Ciotti", dont le parti reste l'arbitre de nombreux votes, y compris des motions de censure.