Au Tchad, les réfugiés du Darfour racontent leur périlleuse fuite

Des femmes ayant fui la guerre au Soudan attendent la distribution de rations d'aide internationale au camp de réfugiés d'Ourang, près de la ville d'Adre, dans l'est du Tchad, le 15 août 2023. (AFP).
Des femmes ayant fui la guerre au Soudan attendent la distribution de rations d'aide internationale au camp de réfugiés d'Ourang, près de la ville d'Adre, dans l'est du Tchad, le 15 août 2023. (AFP).
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Publié le Mercredi 23 août 2023

Au Tchad, les réfugiés du Darfour racontent leur périlleuse fuite

  • Après quatre mois de guerre sanglante pour le pouvoir entre l'armée et les paramilitaires, ils sont, d'après l'ONU, près de 380 000 Soudanais, principalement des femmes et des enfants, à avoir traversé la frontière
  • Dans le camp d'Aura à Adré, ville de l'est du Tchad frontalier du Darfour, ils s'entassent sous des tentes des organisations humanitaires internationales

ADRÉ: Ils se sont d'abord terrés des semaines chez eux, puis ils ont fui à pied, errant des jours avant de trouver une échappatoire: au Tchad, les réfugiés soudanais du Darfour racontent leur fuite à la merci des miliciens, leurs enfants sur le dos.

Après quatre mois de guerre sanglante pour le pouvoir entre l'armée et les paramilitaires, ils sont, d'après l'ONU, près de 380 000 Soudanais, principalement des femmes et des enfants, à avoir traversé la frontière.

Dans le camp d'Aura à Adré, ville de l'est du Tchad frontalier du Darfour, ils s'entassent sous des tentes des organisations humanitaires internationales.

Hawa Moussa, 30 ans, y est assise à même le sol, son nouveau-né sur les genoux.

Un jour de juin, alors que le Darfour-Ouest s'embrasait, que son gouverneur était assassiné et que tout le monde redoutait les exécutions sommaires des miliciens arabes alliés des paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), elle est partie en catastrophe au milieu de la nuit.

"J'étais encore enceinte, j'ai attaché mon cadet sur mon dos et j'ai pris mon aîné par la main", raconte-t-elle à l'AFP.

Au Darfour, le conflit est désormais ethnique: des rescapés ont raconté à l'AFP comment les miliciens arabes abattent des civils uniquement parce qu'ils ne sont pas Arabes.

Face aux violences, dans cette vaste région grande comme la France où vivent un quart des 48 millions de Soudanais, l'exode a été massif. Et certains ont dû partir pour la deuxième fois de leur vie, car la région comptait déjà des milliers de familles déplacées par l'atroce guerre de 2003.

«Ni eau ni nourriture»

Aujourd'hui, la Cour pénale internationale (CPI), qui enquête sur le "génocide" des années 2000, met en garde contre une répétition de l'histoire.

A Aura, la plupart des réfugiés ont fui El-Geneina, le chef-lieu du Darfour-Ouest où plus de 1 000 personnes sont mortes en quelques jours selon l'ONU, des exactions qui pourraient constituer des "crimes contre l'humanité".

Le bilan est sûrement bien plus élevé car, encore plus qu'ailleurs au Soudan, les réseaux de communication sont quasiment totalement coupés au Darfour. Et, dans le chaos des combats, des corps se décomposent, abandonnés, en travers des rues de villes désormais fantômes.

Human Rights Watch (HRW) et de nombreuses autres organisations des droits humains rapportent aussi "des passages à tabac, des exécutions, des pillages, des maisons, des entreprises et des administrations incendiées".

"On nous a recommandé une route mais même là, quatre d'entre nous ont été blessés, on a erré pieds nus pendant sept jours dans El-Geneina", raconte, en sanglots, Souad Ibrahim, 41 ans.

"On n'avait ni eau ni nourriture et alors même que j'étais enceinte de sept mois, j'ai dû porter mon fils de quatre ans sur mon dos et ma fille de six ans suivait à pied" durant les 35 kilomètres qui séparent El-Geneina d'Adré, déclare à l'AFP cette Soudanaise drapée dans un voile rose et noir.

«Ciblées parce que Massalit»

Et le trajet est particulièrement dangereux pour les femmes, qui en plus des attaques de miliciens et des balles perdues, redoutent le viol, communément utilisé dans les violences au Soudan depuis des décennies.

Selon HRW, à El-Geneina et sur la route vers le Tchad, rien qu'entre avril et juin, "les FSR et les milices arabes alliées ont violé au moins 78 femmes et jeunes filles".

"Les assaillants semblaient viser les femmes appartenant à l'ethnie des Massalit", l'ethnie non-arabe majoritaire à El-Geneina, affirme HRW.

Mais fuir le viol à El-Geneina signifie aussi souvent s'exposer à d'autres dangers en dehors de la ville.

"Ma femme et mes enfants sont partis en premier vers le Tchad", raconte à l'AFP Adam Haroun, qui a depuis rejoint sa famille à Aura.

Sur leur trajet "ils ont été attaqués par (des miliciens arabes) Janjawids et ma femme a été touchée par une balle à la jambe", affirme ce Soudanais de 39 ans, vêtu d'une jellaba élimée. "Aujourd'hui, elle est prise en charge par une ONG dans un dispensaire".

Adam et sa famille, Hawa, Souad et leurs enfants sont maintenant à l'abri au Tchad. Mais ailleurs au Darfour, tous n'ont pas la possibilité de fuir le pays.

Les combats se concentrent désormais à Nyala, chef-lieu du Darfour-Sud et deuxième plus grande ville du Soudan.

De là, la frontière la plus proche est celle avec le Soudan du Sud. A 200 kilomètres.


Prison à vie pour une Syrienne jugée coupable de l'attentat meurtrier d'Istanbul

Des gens portent lors de cérémonies funéraires, les cercueils des victimes de l'explosion dans la rue Istiklal à Istanbul, le 14 novembre 2022. (AFP)
Des gens portent lors de cérémonies funéraires, les cercueils des victimes de l'explosion dans la rue Istiklal à Istanbul, le 14 novembre 2022. (AFP)
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  • Ahlam Albashir a été condamnée à sept peines de prison à vie par un tribunal turc pour avoir perpétré l'attentat sur l'avenue Istiklal le 13 novembre 2022
  • Vingt autres personnes ont été condamnées à des peines d'emprisonnement allant de quatre ans à la perpétuité

DJEDDAH : Une femme syrienne qui avait posé une bombe  tuant six personnes dans la principale rue commerçante d'Istanbul il y a 18 mois a été condamnée à la prison à vie vendredi.

Ahlam Albashir a été condamnée à sept peines de prison à vie par un tribunal turc pour avoir perpétré l'attentat sur l'avenue Istiklal le 13 novembre 2022. Six citoyens turcs, deux membres de chacune des trois familles, ont trouvé la mort dans l'explosion qui s'est produite dans cette rue très fréquentée par les commerçants et les touristes. Une centaine de personnes ont été blessées.

Plus de 30 autres personnes ont été accusées d'avoir participé à l'explosion. Quatre d'entre elles ont été remises en liberté vendredi, et dix autres ont été jugées séparément par contumace, car elles étaient introuvables.

Vingt autres personnes ont été condamnées à des peines d'emprisonnement allant de quatre ans à la perpétuité. Six d'entre eux ont été condamnés à la réclusion à perpétuité pour meurtre et « atteinte à l'unité et à l'intégrité de l'État ».

La Turquie a accusé des militants kurdes d'être à l'origine de l'explosion et a déclaré que l'ordre d'attaquer avait été donné à Kobani, dans le nord de la Syrie, où les forces turques ont mené des opérations contre la milice kurde syrienne YPG au cours des dernières années.

Les YPG et le groupe séparatiste kurde hors-la-loi PKK, qui mène depuis des décennies une insurrection contre l'État turc, ont nié toute implication dans l'attentat. Aucun groupe n'a admis avoir participé à l'attentat.

Istanbul a été attaquée par le passé par des militants kurdes, islamistes et gauchistes. Une vague d'attentats à la bombe et d'autres attaques a commencé à l'échelle nationale lorsque le cessez-le-feu entre Ankara et le PKK a été rompu à la mi-2015.

Plus de 40 000 personnes ont été tuées dans le conflit entre le PKK et la Turquie depuis que le groupe militant a pris les armes en 1984. Il est considéré comme une organisation terroriste par la Turquie, l'UE et les États-Unis.

 Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com

 


Des milliards de cigales vont envahir les Etats-Unis

L'exuvie de la cigale s'accroche à un arbre lors du deuxième tour du Barbasol Championship au Robert Trent Jones Golf Trail at Grand National le 21 juillet 2017 à Auburn, Alabama. (Cliff Hawkins/Getty Images/AFP)
L'exuvie de la cigale s'accroche à un arbre lors du deuxième tour du Barbasol Championship au Robert Trent Jones Golf Trail at Grand National le 21 juillet 2017 à Auburn, Alabama. (Cliff Hawkins/Getty Images/AFP)
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  • Certaines cigales apparaissent chaque année, quand d'autres, appelées cigales «périodiques», sortent de terre tous les 13 ou 17 ans
  • «Nous avons eu plusieurs appels concernant un son qui ressemble à une sirène, un gémissement ou un rugissement», a indiqué sur Facebook le bureau du shérif de Newberry, en Caroline du Sud (sud-est) cette semaine

WASHINGTON : Bruyantes et prêtes à s'accoupler, des milliards de cigales s'apprêtent à envahir les forêts et banlieues pavillonnaires américaines.

Dans les prochaines semaines, deux groupes particuliers de cigales vont batifoler au même moment. Un phénomène qui n'est pas arrivé depuis 1803, quand Thomas Jefferson était encore président et que les Etats-Unis rachetaient la Louisiane à la France.

La famille des cigales comprend plus de 3.000 espèces d'insectes à travers le monde. La majorité d'entre-elles passent leur vie sous terre, sous forme de larve. Elles émergent adultes pour muer et se reproduire.

Certaines apparaissent chaque année, quand d'autres, appelées cigales «périodiques», sortent de terre tous les 13 ou 17 ans.

Cette année, le phénomène implique deux groupes de cigales: le groupe XIX, qui émerge tous les 13 ans et a déjà commencé à le faire en Caroline du Nord et du Sud (sud-est). Il sera suivi par le groupe XIII dans le Midwest, qui émerge tous les 17 ans. Dans le centre de l'Etat de l'Illinois (nord), les deux pourraient être présentes au même endroit.

«Quand elles font surface, elles le font en grand nombre, ce qui enthousiasme parents et enfants», selon l'entomologiste Gene Kritsky, de l'Université Mount-Saint-Joseph, qui a développé une application pour que tout un chacun puisse collecter des données sur ces bestioles aux yeux rouges.

Un phénomène dont on se souvient, et dont les histoires se transmettent de génération en génération. Tout comme, par exemple, être témoin d'une éclipse.

«C'est ce que fait la science: vous faites des hypothèses qui vous conduisent à des prédictions, les prédictions sont vérifiées, (...) cela a de la valeur, au moment où certaines personnes cherchent à discréditer la science», note Gene Kritsky.

- Une merveille scientifique  -

Sans grande défense, les cigales «périodiques» comptent sur leur nombre pour la survie de l'espèce: grâce aux hordes qui déferlent au même moment, les oiseaux, renards, ratons laveurs, tortues et autres prédateurs sont vite rassasiés, explique à l'AFP John Lill, professeur de biologie à l'Université George Washington.

Dans une étude publiée récemment dans la revue Science, John Lill et ses collègues montrent qu'un groupe de cigales ayant émergé à Washington en 2021 avait conduit à une augmentation du nombre de chenilles -- délaissées par les oiseaux, qui se sont concentrés sur les cigales.

Résultat: la consommation de pousses de jeunes chênes s'est accrue.

D'autres recherches montrent que les années où les chênes produisent le plus de glands suivent toujours deux ans après l'émergence des cigales. Plus il y a de glands, plus les populations de mammifères qui s'en nourrissent croît, plus le risque de maladie de Lyme chez l'homme augmente.

Ce phénomène «montre qu'il existe potentiellement des impacts écologiques à plus long terme se répercutant pendant des années après l'apparition des cigales», ajoute M. Lill.

- Impacts humains -

Puis il y a le son singulier -- et strident -- des cigales mâles qui s'accouplent.

«Nous avons eu plusieurs appels concernant un son qui ressemble à une sirène, un gémissement ou un rugissement», a indiqué sur Facebook le bureau du shérif de Newberry, en Caroline du Sud (sud-est) cette semaine.

Selon Chris Simon, chercheuse à l'université du Connecticut, le changement climatique perturbe l'horloge interne des cigales.

Avec le réchauffement climatique aux Etats-Unis, l'allongement de la saison de croissance des plantes fournit plus de nourriture et accélère celle des cigales. «Je prédis que davantage de cigales de 17 ans se transformeront en cigales de 13 ans», a-t-elle indiqué «et, éventuellement, que ce trait sera assimilé génétiquement».

Il est difficile de savoir ce que cela signifie pour l'espèce à long terme, ajoute M. Lill.


Sahel: Washington va retirer des soldats du Tchad, après le Niger

Des milliers de Tchadiens assistent au meeting de Mahamat Idriss Deby Itno, président de la transition et candidat à l'élection présidentielle au Tchad, dans le stade en construction au quartier Dombao, à Moundou, le 25 avril 2024. (AFP)
Des milliers de Tchadiens assistent au meeting de Mahamat Idriss Deby Itno, président de la transition et candidat à l'élection présidentielle au Tchad, dans le stade en construction au quartier Dombao, à Moundou, le 25 avril 2024. (AFP)
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  • Washington a entamé cette semaine des discussions avec Niamey sur le retrait du Niger des plus de 1 000 soldats américains présents dans le pays
  • Dans un courrier au ministre des Armées, le chef d'état-major de l'armée de l'air tchadienne avait réclamé début avril le départ des soldats américains

WASHINGTON: Les Etats-Unis vont retirer temporairement des soldats du Tchad, a annoncé le Pentagone quelques jours après leur accord pour retirer leurs forces du Niger voisin.

Au Tchad, les Etats-Unis disposent d'une centaine de soldats dans le cadre de la lutte antijihadiste au Sahel.

"L'Usafricom envisage actuellement de repositionner certaines forces militaires américaines depuis le Tchad, dont le départ d'une partie était déjà prévu", a déclaré lors d'une conférence de presse jeudi le porte-parole du Pentagone, Pat Ryder, se référant au commandement militaire américain en Afrique.

"Il s'agit d'une étape temporaire dans le cadre d'une révision en cours de notre coopération de sécurité, qui reprendra après l'élection présidentielle du 6 mai au Tchad", a-t-il ajouté.

Dans un courrier au ministre des Armées lu par l'AFP, le chef d'état-major de l'armée de l'air tchadienne avait réclamé début avril le départ des soldats américains, incriminant un défaut de documents sur un accord permettant leur présence.

Selon ce courrier, "l'armée de l'air a demandé à l'attaché de défense américain d'arrêter immédiatement les activités militaires sur la BAK", la base aérienne d'Adji Kossei où les soldats américains entraînent des forces spéciales tchadiennes à lutter contre le groupe jihadiste Boko Haram.

"Nous vous demandons d'intercéder auprès de qui de droit afin de prévenir les Américains que nous avons pris la décision d'arrêter leur activité", ajoute la lettre.

"La présence des forces américaines au Tchad était initialement motivée par l'engagement commun dans la lutte contre le terrorisme, un objectif partagé par les deux nations", a déclaré vendredi à l'AFP le porte-parole du gouvernement tchadien.

Discussions supplémentaires 

"Cependant, des préoccupations ont été exprimées par l'état-major tchadien quant à cette présence" et "en reconnaissance des préoccupations exprimées, le gouvernement américain a décidé de retirer temporairement ses forces du Tchad", a ajouté M. Abderaman Koulamallah.

"Il est important de souligner que ce retrait ne signifie en aucun cas une rupture de la coopération entre les deux pays dans la lutte contre le terrorisme", a-t-il dit.

"Des discussions supplémentaires auront lieu pour explorer la possibilité d'un retour des forces américaines dans le cadre d'un accord bilatéral précis et convenu entre les deux pays", a encore indiqué le porte-parole.

Au Niger, autre pivot de la stratégie des Etats-Unis et de la France pour combattre les jihadistes dans la région, la junte militaire au pouvoir depuis juillet a dénoncé en mars l'accord de coopération militaire en vigueur avec les Etats-Unis, estimant que la présence américaine était désormais "illégale".

Washington a entamé cette semaine des discussions avec Niamey sur le retrait du Niger des plus de 1.000 soldats américains présents dans le pays.

Les Etats-Unis disposent notamment au Niger d'une base de drones importante près d'Agadez, construite pour environ 100 millions de dollars.

Washington va "continuer à explorer les options possibles afin d'assurer que nous soyons toujours en mesure de faire face aux potentielles menaces terroristes", avait déclaré lundi Pat Ryder après l'annonce la semaine dernière du retrait américain du Niger.

Au Tchad, le général Mahamat Idriss Deby Itno a annoncé en mars sa candidature à la présidentielle, qu'il est quasi-assuré de remporter après que son régime a violemment réprimé dans la rue et muselé toute opposition et éliminé toute concurrence.

Il avait été proclamé par l'armée président de transition le 20 avril 2021, à la tête d'une junte de 15 généraux, à la mort de son père Idriss Déby Itno, lequel régnait d'une main de fer sur le Tchad depuis 30 ans.

Son principal adversaire, Yaya Dillo, a été tué fin février par des militaires dans l'assaut de son parti, d'une "balle dans la tête à bout portant" selon l'opposition, puis les candidatures de dix autres potentiels rivaux ont été invalidées.