LE CAIRE: Un journaliste égyptien a été libéré dimanche soir, près de 48 heures après son arrestation pour des articles publiés par un site de fact-checking indépendant accusant des "officiels" d'être impliqués dans un scandale, annonce le syndicat des journalistes.
"Karim Assaad est sorti et il est en route vers son domicile", a écrit sur Facebook Khaled Elbalshy, président du syndicat.
Son site internet "Matsada2sh", "n'y croyez pas" en arabe, a confirmé sa libération.
M. Assaad avait été "arrêté samedi à 01H00 du matin à son domicile par des membres de forces de sécurité en civil", selon la plateforme Matsada2sh.
"Ils ont frappé son épouse, menacé son enfant en bas âge, perquisitionné son domicile et l'ont enlevé, le conduisant vers une destination inconnue", précise la plateforme fondée en 2018 à Londres.
"Les seules questions posées par les assaillants concernaient notre couverture de l'affaire de l'avion Egypte-Zambie", affirme encore Matsada2sh.
Les autorités zambiennes avaient annoncé la saisie cette semaine d'un avion à l'aéroport international de Lusaka ainsi que l'arrestation de dix personnes, dont neuf étrangers.
L'avion transportait, selon elles, près de 5.7 millions de dollars, cinq revolvers, 126 balles et près de 130 kg de lingots présentés un temps comme de l'or.
Des documents d'avocats à Lusaka, consultés par l'AFP, font état d'au moins cinq Egyptiens en détention.
Des journalistes indépendants égyptiens affirment que certains seraient officiers de l'armée et de la police.
La presse d'Etat affirme qu'il s'agit d'un avion privé et non de l'Etat égyptien et qu'il est passé en "transit au Caire".
«Attaques coordonnées»
"Jusque là, la seule réaction du gouvernement a été d'arrêter Karim Assaad de Matsda2sh, une des seules sources d'information sur le sujet", a réagi tard samedi sur X (ex-Twitter) la militante Lobna Darwish de l'Initiative égyptienne pour les droits personnels (EIPR).
Selon Matsada2sh, son équipe et ses comptes sur les réseaux sociaux "font l'objet d'attaques coordonnées": deux articles ont été "supprimés sur (sa) page Facebook" à cause de son enquête révélant, selon elle, "l'implication de plusieurs officiels égyptiens".
"Nous tenons les autorités égyptiennes responsables de la sécurité de nos équipes", ajoute-t-elle.
L'Egypte occupe la 166e place sur 180 dans le classement de la liberté de presse de RSF en 2023. Selon le syndicat égyptien, 24 journalistes sont actuellement détenus, M. Assaad inclus.
Dimanche soir, l'une des figures de l'opposition historique en Egypte, Hisham Kassem, est lui aussi entré en détention.
Convoqué au parquet pour interrogatoire après une plainte pour diffamation déposée par un ancien ministre, il a annoncé sur X avoir refusé de payer les 5.000 livres égyptiennes (150 euros) de caution.
M. Kassem était apparu samedi aux côtés d'un autre opposant célèbre, Ahmed Douma, figure de la "révolution" de 2011, libéré après une grâce présidentielle.
Et en soirée, il avait dénoncé l'arrestation de M. Assaad, écrivant sur X: "même si vous arrêtez la moitié du pays, nous trouverons quand même les informations sur les vols et les détournements de l'argent du peuple".