Frankly Speaking : Comment la Russie compte-t-elle mettre fin à la guerre avec l’Ukraine ?

Andrey Baklanov, diplomate russe et ancien ambassadeur en Arabie saoudite, répond à Katie Jensen, animatrice de Frankly Speaking. (Photo AN)
Andrey Baklanov, diplomate russe et ancien ambassadeur en Arabie saoudite, répond à Katie Jensen, animatrice de Frankly Speaking. (Photo AN)
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Publié le Dimanche 30 juillet 2023

Frankly Speaking : Comment la Russie compte-t-elle mettre fin à la guerre avec l’Ukraine ?

  • Le diplomate russe Andrey Baklanov estime qu’un règlement négocié de la guerre est improbable et insiste sur la nécessité que le gouvernement ukrainien soit anéanti
  • Il remercie les pays arabes, en particulier l’Arabie saoudite, pour leur médiation en vue de l’échange de prisonniers, et considère qu’un rôle plus important de la Chine au Moyen-Orient sert également les intérêts de la Russie

DUBAÏ : Une trêve entre la Russie et l’Ukraine n’est pas envisageable et la normalité ne pourra être atteinte qu’après « l’anéantissement » de l’actuel gouvernement de Kiev, déclare Andrey Baklanov, diplomate russe et ancien ambassadeur en Arabie saoudite.

Faisant part de ses réflexions dans le dernier épisode de Frankly Speaking, l’émission hebdomadaire d’Arab News consacrée aux questions d’actualité, M. Baklanov estime qu’un règlement négocié de la guerre est improbable.

« Je pense qu’il n’y a aucune possibilité de trêve entre le gouvernement actuel — le soi-disant gouvernement, composé des fascistes de Kiev — et nous », ajoute-t-il, faisant référence au gouvernement du président ukrainien Volodymyr Zelensky.

« Je suis absolument certain que la seule option dont nous disposons est d’anéantir ce régime en Ukraine et de ramener l’Ukraine à la normalité. »

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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky ( à droite) pose pour un selfie avec un militaire lors d'une visite dans la région de Donetsk. (File/AFP) 

Outre le conflit ukrainien, l’entretien portait sur des questions allant de l’échec de l’initiative céréalière de la mer Noire et du groupe Wagner aux relations de la Russie avec la Syrie et à l’accord de normalisation entre l’Iran et l’Arabie saoudite, conclu sous l’égide de la Chine.

Selon M. Baklanov, les objectifs de la Russie en Ukraine restent inchangés.

« Le premier objectif est la dénazification, le deuxième la démilitarisation et le troisième la fin des activités criminelles du régime criminel, qui a fait un coup d’État en 2014 », précise-t-il, faisant référence aux manifestations qui ont permis d’écarter du pouvoir le dirigeant pro-russe Viktor Ianoukovytch cette année-là.

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Un employé marche près d'entrepôts mutilés dans une installation céréalière à Pavlivka, en Ukraine, samedi 22 juillet 2023, à la suite d'attaques de missiles russes. (File/AFP) 

Bien que l’affirmation russe selon laquelle l’Ukraine est contrôlée par une clique fasciste ait été vigoureusement contestée, M. Baklanov s’est appuyé sur les événements de la Seconde Guerre mondiale pour justifier l’« opération militaire spéciale » lancée contre l’Ukraine il y a 18 mois.

« Nous considérons ce qui se passe en Ukraine comme une prolongation de la Seconde Guerre mondiale », poursuit-il. 

Dans la situation actuelle, il décrit le président Zelensky comme un « traître » qui, avec « beaucoup d’autres criminels, répondra devant notre tribunal des activités criminelles menées pendant huit ou même neuf ans contre notre peuple au Donbass. Ils seront arrêtés et emprisonnés. »

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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky ( à gauche) achète une glace lors d'une visite dans la région de Donetsk. (File/AFP) 

M. Baklanov a également profité de l’interview pour défendre la décision de la Russie de renoncer à un accord conclu sous l’égide de l’ONU et de la Turquie, qui permettait d’expédier des céréales, des denrées alimentaires, des engrais et d’autres produits de base depuis les ports ukrainiens de la mer Noire, soumis à un blocus, vers certains des pays du monde les plus touchés par l’insécurité alimentaire.

Il affirme que le Kremlin a été contraint d’annuler l’accord, conclu dans la ville turque d’Istanbul en juillet 2022, afin de préserver les exportations de céréales et d’engrais de la Russie.

Dmitri Peskov, porte-parole du gouvernement russe, a annoncé le 17 juillet que la Russie se retirerait de l’initiative céréalière de la mer Noire. « Lorsque la partie de l’accord de la mer Noire concernant la Russie sera mise en œuvre, la Russie reviendra immédiatement à la mise en œuvre de l’accord », a-t-il déclaré.

Le Kremlin a donné trois mois à l’ONU pour accepter ses conditions.

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Les armoiries soviétiques sur le bouclier d'un monument de 62 mètres à Kiev vont être remplacées par les armoiries de l'Ukraine, conformément à la loi sur la décommunisation. (File/AFP) 

M. Baklanov qualifie l’accord de « frauduleux », affirmant que la majorité des céréales étaient en fait destinées à l’Europe, et non aux pays africains souffrant d’insécurité alimentaire, et que les agriculteurs russes ne bénéficiaient pas de l’accord.

« Seuls 3% des céréales sont allées au continent africain et aux populations qui souffrent de la faim. La majorité absolue des céréales est allée aux pays occidentaux prospères, en particulier aux pays européens », ajoute-t-il.

Affirmant que seule « la moitié de l’accord » était reconnue, il fait remarquer qu’aucun progrès n’est visible sur un accord connexe destiné à faciliter les exportations alimentaires et agricoles russes dans le cadre des sanctions occidentales imposées à Moscou en réponse à l’invasion de l’Ukraine.

En ce qui concerne la guerre en Ukraine, M. Baklanov note que les pourparlers de paix ne sont pas à l’ordre du jour, même si la Russie est « très reconnaissante aux pays arabes et à l’Arabie saoudite pour leurs tentatives de médiation ».

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Une vue aérienne montre des bâtiments détruits à la suite de combats intenses, lors de l'invasion russe, à Bakhmut, en Ukraine, sur cette image tirée d'une vidéo distribuée. (File/AFP) 

Près de 300 prisonniers ont été échangés entre l’Ukraine et la Russie dans le cadre d’un accord négocié par l'Arabie saoudite et la Turquie en septembre. Les deux parties avaient capturé des centaines de combattants ennemis depuis que la guerre entre la Russie et l’Ukraine a éclaté le 24 février 2022, mais seuls quelques échanges de prisonniers ont eu lieu depuis.

M. Baklanov estime que la médiation peut être très utile, mais seulement en ce qui concerne certains « aspects humanitaires », tels que l’échange de prisonniers de guerre.

«L’origine de la guerre est quelque chose que nos collègues des pays arabes et africains devraient mieux comprendre. Il est nécessaire de ressentir l’histoire, pas seulement de la connaître.»

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Des prisonniers de guerre sont vus sur le tarmac après leur arrivée de Russie à l'aéroport international King Khalid, à Riyad, à la suite des efforts de médiation déployés par l'Arabie saoudite. (File/SPA) 

«Ce sont seulement ces personnes-là — comme moi et quelques autres — qui comprennent l’origine, la source, de ce conflit. Pour les personnes extérieures, il est assez difficile de comprendre cette origine comme il se doit.» 

«Nous sommes donc très reconnaissants de ces tentatives de médiation, mais je pense qu’en réalité, cette médiation ne peut être utile que sur le plan humanitaire» souligne-t-il.

M. Baklanov regrette que la Russie n’ait pas commencé plus tôt à coordonner ses politiques avec l’Arabie saoudite, notamment en ce qui concerne le pétrole.

«Malheureusement, je dois admettre que pendant de nombreuses années, nous n’avons pas donné de réponse claire aux propositions de l’Arabie saoudite de conclure un accord commun sur ce front. C’était une grave erreur de la part de l’Union soviétique et de la Fédération de Russie.»

«Mais aujourd’hui, heureusement, nous avons l’OPEP+, et je répète que l’initiative est venue de l’Arabie saoudite, que nous l’avons soutenue, et qu’il s'agissait, pendant une longue période, d’une très bonne décision de la part de la Fédération de Russie. Nous apprécions également beaucoup l’initiative de l’Arabie saoudite de sacrifier ses propres intérêts », poursuit-il.

Il indique ensuite que, d’après son expérience, il existe « une grande différence » entre les politiques de l’ère soviétique et celles de la Fédération de Russie.

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Des soldats biélorusses des forces d'opérations spéciales et des combattants mercenaires de la société militaire privée Wagner participent aux manœuvres d'une semaine menées sur un champ de tir près de la ville de Brest, en Biélorussie. (File/AFP)

« Lorsque j’ai été pendant cinq ans ambassadeur en Arabie saoudite, je n’ai jamais demandé aux autorités saoudiennes de prendre une quelconque (décision) concernant leurs liens avec les États-Unis. Jamais. Nous parlions de nos propres intérêts. Nous avions des choses intéressantes à faire sur le plan bilatéral », raconte-t-il. 

« Nous ne faisons pas de propagande contre les pays tiers. Nous critiquons certains éléments de la politique lorsque nous les voyons, mais nous ne poussons pas ces pays — les pays du Golfe et l’Arabie saoudite — à faire quoi que ce soit qui aille à l’encontre des intérêts des pays tiers. » 

Saluant l’état actuel des relations entre l’Arabie saoudite et la Russie, il ajoute : « Il est plus facile d’entretenir de bonnes relations avec nous, d’être sur un pied d’égalité avec nous, d’être en bons termes avec la Fédération de Russie. Nous n’encourageons pas d’autres personnes à avoir des relations tendues avec d’autres pays. »

«C’est là que réside la différence avec les États-Unis, qui exercent une pression sur les nations pour qu’elles participent aux sanctions qu’ils nous ont imposées. Les approches de notre côté et celles des pays occidentaux sont absolument différentes.»

« Je pense que les peuples du Moyen-Orient connaissent cette différence et qu’ils sont plus amicaux envers nous parce qu’ils connaissent ces faits. » 

Étant donné que la Russie a favorablement accueilli la normalisation des relations entre l’Arabie saoudite et l’Iran à la suite d’un accord négocié par la Chine, la question qui se pose naturellement est de savoir pourquoi Moscou n’a pas joué le rôle de médiateur honnête, compte tenu de ses propres liens étroits avec Riyad et Téhéran.

M. Baklanov affirme que la Russie est effectivement prête à assurer une médiation, tout en admettant qu’en tant que spécialiste des pays arabes et du Moyen-Orient, il est « un peu déçu de voir que nos amis chinois ont réussi. »

Néanmoins, il fait remarquer que la Russie est surtout intéressée par le résultat.

« Si cette médiation aboutit à un début de normalisation des relations entre l’Arabie saoudite et l’Iran, nous nous y intéressons. Si les Chinois ont remporté cette victoire politique et diplomatique, nous les félicitons (simplement pour cet exploit). »

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Le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Faisal ben Farhane, le ministre chinois des Affaires étrangères, Qin Gang (au centre), et le ministre iranien des Affaires étrangères, Hossein Amir-Abdollahian (à gauche), posent lors d'une réunion à Pékin. (File/AFP) 

« Cependant, nous sommes également prêts à suivre la même voie, nous sommes donc tous les deux dans le même bateau. Nous sommes intéressés par la stabilisation et la normalisation de la situation dans l’ensemble de la région. Récemment, nous avons à nouveau repris notre proposition d’accord sur un système de sécurité régional », mentionne-t-il.

M. Baklanov a écarté l’idée que le rôle croissant de la Chine au Moyen-Orient constituait une menace pour l’influence de la Russie en tant qu’alternative à une puissance diplomatique régionale non occidentale.

« Nous voyons ce qui se passe au Moyen-Orient sous un angle différent. Nous n’avons pas de différends avec la Chine et nous ne cherchons pas à y jouer un rôle monopolistique contre l’influence de la Chine. Non. » 

Il décrit l’intérêt de la Russie pour le Moyen-Orient comme étant très simple.

« Nous aimerions que la situation à proximité de nos frontières soit bonne et tranquille. Si nous sommes (au service de la paix), c’est bon. Si la Chine est (au service de la paix), c’est également une bonne chose. L’objectif principal pour nous n’est pas d’être les meilleurs dans ces activités diplomatiques, mais d’obtenir des résultats positifs », insiste-t-il.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Cyberattaques : Berlin a rappelé «pour consultations» son ambassadeur en Russie

L'ambassadeur allemand en Russie, Alexander Graf Lambsdorff  (Photo, AFP).
L'ambassadeur allemand en Russie, Alexander Graf Lambsdorff (Photo, AFP).
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  • Une cyberattaque a notamment ciblé des adresses email de responsables du SPD, le parti social-démocrate du chancelier Olaf Scholz
  • Les pays occidentaux sont depuis le début de l'invasion russe en Ukraine, en février 2022, en alerte maximum contre le risque d'attaques informatiques massives

BERLIN: Berlin a indiqué lundi avoir rappelé pour consultations son ambassadeur en Russie, Alexander Graf Lambsdorff, après avoir accusé vendredi un groupe de hackeurs russes contrôlé par Moscou d'une récente campagne de cyberattaques.

L'ambassadeur "restera une semaine à Berlin puis retournera à Moscou", a indiqué lors d'un point presse régulier la porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères, Kathrin Deschauer, ajoutant que le gouvernement prenait "très au sérieux" cet "acte contre (notre) démocratie".

Les gouvernements allemand et tchèque ont accusé vendredi le groupe APT28, dirigé par les services de renseignement de la Russie, d'une récente campagne de cyberattaques dans leur pays respectif. Des accusations jugées "infondées" par la Russie.

Attaques ciblées 

Une cyberattaque a notamment ciblé des adresses email de responsables du SPD, le parti social-démocrate du chancelier Olaf Scholz, selon le gouvernement.

Berlin a annoncé vendredi la convocation du chargé d'affaires de l'ambassade de Russie, "pour faire comprendre au gouvernement russe que nous n'acceptons pas ces actions".

Les pays occidentaux sont depuis le début de l'invasion russe en Ukraine, en février 2022, en alerte maximum contre le risque d'attaques informatiques massives et d'opérations de désinformation orchestrées par la Russie.


Exercice américano-philippin contre une «invasion» en mer de Chine

Le président philippin Ferdinand Marcos Jr. a quant à lui assuré lundi que son pays n'entendait pas "faire monter la tension" en mer de Chine méridionale (Photo, Fournie).
Le président philippin Ferdinand Marcos Jr. a quant à lui assuré lundi que son pays n'entendait pas "faire monter la tension" en mer de Chine méridionale (Photo, Fournie).
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  • Ces incidents font craindre un conflit plus large qui pourrait impliquer les Etats-Unis, allié des Philippines
  • La semaine dernière, les forces américaines participant à Balikatan avaient tiré des roquettes de précision Himars depuis l'île occidentale de Palawan

LAOAG: Les troupes américaines et philippines ont tiré lundi des obus et des missiles sur une force d'"invasion" imaginaire pendant des exercices en mer de Chine méridionale, dans le nord des Philippines où les deux pays ont récemment accusé la Chine de "conduite dangereuse et déstabilisante".

Plus de 16.700 soldats américains et philippins participent à ces manoeuvres annuelles navales, terrestres et aériennes organisées jusqu'au 10 mai dans une zone où les incidents à répétition entre embarcations chinoises et philippines font craindre un conflit plus large.

Les soldats américains massés sur les dunes de la côte nord-ouest des Philippines, près de la ville de Laoag, à 400 kilomètres au sud de Taïwan, ont tiré plus de 50 obus de 155 millimètres sur des cibles flottantes à environ cinq kilomètres de la côte, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Les troupes philippines ont enchaîné avec des tirs de roquettes vers les attaquants factices, avant que les deux forces ne finissent l'exercice avec des mitrailleuses, des missiles Javelin et d'autres salves d'artillerie.

Cet exercice à munitions réelles, baptisé "Balikatan" ("Epaule contre épaule" en tagalog, la langue philippine), vise à "se préparer au pire", a déclaré aux journalistes le commandant de la Première force expéditionnaire des Marines des Etats-Unis, Michael Cederholm.

"Il est conçu pour repousser une invasion", a-t-il ajouté sur le site de l'exercice, débuté le 22 avril dans plusieurs endroits des Philippines. "Notre flan nord-ouest est plus exposé", a détaillé à l'AFP le général philippin Marvin Licudine, dirigeant l'exercice pour la partie philippine. "A cause des problèmes régionaux, nous devons dès maintenant nous entraîner sur notre propre sol".

Pékin revendique la quasi-totalité de la mer de Chine méridionale, une importante route commerciale. Elle ignore un arbitrage international qui lui a donné tort en 2016, et y fait patrouiller des centaines de navires des garde-côtes et de la marine.

La semaine dernière, Manille a accusé les garde-côtes chinois d'avoir endommagé un bateau des garde-côtes philippins et un autre du bureau des pêches en tirant dessus au canon à eau près du récif de Scarborough, contrôlé par la Chine mais revendiqué par les Philippines.

Des exercices en forme de dissuasion 

Ces incidents font craindre un conflit plus large qui pourrait impliquer les Etats-Unis, allié des Philippines, et d'autres pays de la région, dans une période où la Chine renforce sa pression diplomatique et militaire autour de Taïwan.

La semaine dernière, les ministres de la Défense des Philippines, des Etats-Unis, du Japon et de l'Australie ont, à l'issue d'une réunion dans l'archipel américain d'Hawaï, publié un communiqué conjoint dénonçant la "conduite dangereuse et déstabilisante" de Pékin en mer de Chine méridionale.

"Les actions de la Chine dans les mers de Chine orientale et méridionale sont légitimes, légales et irréprochables", avait auparavant affirmé le 12 avril le ministère chinois des Affaires étrangères.

La semaine dernière, les forces américaines participant à Balikatan avaient tiré des roquettes de précision Himars depuis l'île occidentale de Palawan, face aux îles Spratleys également disputées.

Selon l'armée américaine, il s'agissait d'une répétition du déploiement rapide du système Himars sur les côtes philippines bordées par la mer de Chine méridionale afin de "sécuriser et de protéger le territoire, les eaux territoriales et les intérêts de la zone économique exclusive des Philippines".

"Les exercices militaires sont une forme de dissuasion", a déclaré le ministre philippin des Affaires étrangères, Enrique Manalo, dans un discours prononcé en son nom par un assistant lors d'un atelier public vendredi. "Plus nous simulons, moins nous agissons."

Le président philippin Ferdinand Marcos Jr. a quant à lui assuré lundi que son pays n'entendait pas "faire monter la tension" en mer de Chine méridionale.

"Nous ne suivrons pas les garde-côtes chinois et les navires chinois dans cette voie", a-t-il dit. "Nous n'avons pas l'intention d'attaquer qui que ce soit avec des canons à eau ou tout autre équipement offensif", a-t-il poursuivi, ajoutant que Manille continuera à utiliser exclusivement la voie diplomatique pour régler les différends avec Pékin.


La mésaventure d'un proviseur américain, cas d'école des dangers de l'IA

Les mots « Intelligence artificielle IA », miniature d’un robot et d’une main jouet sont représentés sur cette illustration prise le 14 décembre 2023 (Photo, Reuters).
Les mots « Intelligence artificielle IA », miniature d’un robot et d’une main jouet sont représentés sur cette illustration prise le 14 décembre 2023 (Photo, Reuters).
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  • Eric Eiswert, proviseur à Pikesville dans le Maryland, près de Washington, s'est retrouvé au coeur d'une violente polémique avec un enregistrement vocal
  • L'affaire, qui survient en pleine année électorale aux Etats-Unis, met en lumière la facilité avec laquelle les outils d'IA générative peuvent être employés pour nuire à tout un chacun

WASHINGTON: Après l'indignation provoquée dans un lycée américain par la diffusion de propos racistes attribués au proviseur, le vertige de découvrir que la bande sonore a été montée de toutes pièces. Cet épisode illustre les dangers d'une intelligence artificielle devenue accessible à tous.

Eric Eiswert, proviseur à Pikesville dans le Maryland, près de Washington, s'est retrouvé au coeur d'une violente polémique avec un enregistrement vocal -- qui se révélera un faux -- lui faisant prononcer des commentaires choquants contre des élèves juifs et des "enfants noirs ingrats".

L'affaire, qui survient en pleine année électorale aux Etats-Unis, met en lumière la facilité avec laquelle les outils d'IA générative peuvent être employés pour nuire à tout un chacun, et les difficultés auxquelles font face les autorités pour lutter contre de telles pratiques.

"Désormais, tout le monde est vulnérable", et non plus seulement les célébrités, alerte Hany Farid, professeur à l'Université de Californie à Berkeley (ouest).

"Il suffit d'une image pour ajouter une personne dans une vidéo, et 30 secondes d'audio pour cloner la voix de quelqu'un", poursuit le spécialiste en détection d'images et d'enregistrements manipulés numériquement, consulté par la police dans cette affaire.

Quand l'enregistrement fuite sur les réseaux sociaux en janvier, il devient rapidement viral. Une publication recueille des milliers de commentaires sur Instagram, et propulse l'école au coeur d'une polémique nationale.

Le militant des droits civiques DeRay McKesson réclame la démission du proviseur sur son compte X, suivi par près d'un million d'internautes. Il admettra s'être fait abuser.

Les messages haineux pleuvent sur les réseaux sociaux et les coups de fil menaçants se multiplient dans l'établissement. Le "monde serait meilleur si vous étiez sous terre", écrit ainsi un internaute au proviseur.

Ce dernier est placé en congés, son domicile mis sous protection. Contacté par l'AFP, il n'a pas répondu.

Vengeance 

"Je continue de m'inquiéter des dégâts provoqués par cette affaire", confie Billy Burke, directeur du syndicat représentant le proviseur.

Fin avril, Dazhon Darien, 31 ans, responsable sportif du lycée, a été arrêté par les autorités, accusé d'être à l'origine du faux. Les enquêteurs sont remontés jusqu'à lui grâce à l'adresse électronique qui a initialement partagé le fichier.

Il aurait agi pour se venger d'une enquête ouverte à son encontre par le proviseur sur des paiements suspects.

Le prévenu a mené des recherches sur des outils d'IA depuis le réseau informatique du lycée, selon l'acte d'accusation.

La bande sonore, selon l'analyse d'un expert consulté par la police, "contient des traces de contenu généré par l'IA, avec un montage humain a posteriori".

Cette affaire démontre la nécessité "d'adapter la loi aux avancées technologiques", a estimé le procureur local, Scott Shellenberger.

Les montages audio sont particulièrement difficiles à déceler. En janvier, un message diffusé par appels téléphoniques automatisés usurpant la voix du président Joe Biden incitait les électeurs démocrates de l'Etat du New Hampshire (nord-est) à s'abstenir lors des primaires pour du parti.

A Pikeville, l'affaire a secoué les habitants, "très proches les uns des autres", raconte Parker Bratton, l'entraîneur de golf du lycée.

"Il y a un seul président, mais il y a un million de proviseurs!", s'inquiète-t-il, "les gens se demandent +Que va-t-il m'arriver si quelqu'un décide tout simplement de détruire ma carrière?+".