La croissance européenne plombée par l'Allemagne

La présidente de la Banque centrale européenne Christine Lagarde a jugé jeudi que les perspectives économiques de la zone euro s'étaient "détériorées". (AFP)
La présidente de la Banque centrale européenne Christine Lagarde a jugé jeudi que les perspectives économiques de la zone euro s'étaient "détériorées". (AFP)
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Publié le Vendredi 28 juillet 2023

La croissance européenne plombée par l'Allemagne

  • Le Produit intérieur brut (PIB) allemand a affiché une croissance nulle entre avril et juin sur un trimestre, après avoir reculé successivement de 0,4% et 0,1% lors des deux trimestres précédents
  • L'Allemagne, qui reste fortement exportatrice, s'appuie aujourd'hui sur sa consommation des ménages, qui résiste grâce à un marché du travail solide

FRANCFORT: La France et Espagne ont tiré la croissance économique européenne au deuxième trimestre tandis que l'Allemagne a déçu en stagnant, la récession annuelle guettant désormais la plus grande économie du continent.

Le Produit intérieur brut (PIB) allemand a affiché une croissance nulle entre avril et juin sur un trimestre, après avoir reculé successivement de 0,4% et 0,1% lors des deux trimestres précédents, selon des données révisées et corrigées des variables de saison et de calendrier (CVS) publiées vendredi.

C'est moins bien que la prévision des analystes sondés par Factset, qui tablaient sur un rebond de 0,3% en Allemagne.

Les dépenses de consommation des ménages privés "se sont stabilisées au deuxième trimestre 2023 après le faible semestre d'hiver", a détaillé l'office des statistiques Destatis, ce qui n'a pu rattraper une industrie manufacturière qui broie toujours du noir.

Deux autres grands pays européens ont davantage la sourire. La croissance en France a atteint 0,5% au deuxième trimestre, bien plus que prévu, tirée par les exportations qui ont compensé une consommation des ménages en berne, a annoncé vendredi l'Insee.

Le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire a salué une "performance remarquable". "Pour la première fois, la croissance française est tirée beaucoup plus par les exportations que par la consommation", a-t-il dit sur RTL.

Et en Espagne, si la croissance a légèrement ralenti au deuxième trimestre, elle est restée solide (+0,4%), grâce à une forte consommation des ménages, selon l'Institut national des statistiques (INE).

Une première estimation de la croissance pour la zone euro sera communiquée lundi par Eurostat.

En Allemagne, l'industrie de la chimie en pleine crise existentielle

A 58 ans, Thomas Kadowsky s'imaginait travailler jusqu'à la retraite dans son usine de résine synthétique de Hambourg, où il occupe le même poste de responsable d'équipe depuis plus de trente ans.

Mais ses projets se sont effondrés en mars lorsqu'il a appris que le propriétaire, le groupe allemand Allnex, allait fermer ce site vieux de 90 ans, niché au milieu d'habitations de briques rouges.

"J'étais complètement abasourdi", raconte-t-il à l'AFP.

Comme lui, 130 salariés perdront l'an prochain leur emploi en raison de cette fermeture, que Allnex justifie par les "récentes évolutions du prix de l'énergie", qui plombent l'industrie chimique en Allemagne.

Un énième exemple de la crise que traverse ce secteur clé de l'économie nationale.

Longtemps locomotive, le secteur est désormais un boulet pour la première économie européenne, entrée en récession en début d'année, et qui, au vu de la stagnation annoncée vendredi au deuxième trimestre, pourrait finir dans le rouge sur l'ensemble de l'année.

"La maison brûle", a lancé récemment Markus Steilemann, le président de  la VCI, lobby des industriels de la chimie, qui représente 1.900 entreprises.

L'industrie chimique est capitale en Allemagne, par son poids — 466.000 salariés et un chiffre d'affaires équivalent à 5% du PIB — et son importance sur les autres secteurs, qu'elle fournit en biens intermédiaires.

Dopée par le gaz bon marché

Mais depuis plusieurs mois, les mauvaises performances s'accumulent. Le chiffre d'affaires a plongé de 11,5% au premier semestre de l'année, et une chute de 14% est attendue pour 2023.

Les PME — 92% du secteur — réduisent la voilure. En mai, le nombre de salariés de la branche a reculé de 0,8% sur un an.

De manière significative, le géant BASF a annoncé en février la suppression de 3.300 emplois, avec la fermeture d'unités de son site historique de Ludwigshafen.

Au deuxième trimestre, le groupe, qui fabrique des produits chimiques pour l'automobile, l'agriculture ou la construction, a annoncé vendredi une chute de 76% de son bénéfice.

L'Allemagne a été dopée pendant des années par les tarifs bon marché du gaz vendu par la Russie.

Maintenant, avec l'arrêt de ces approvisionnements à la suite de la guerre en Ukraine, le secteur souffre, d'autant que les dernières centrales nucléaires en Allemagne ont été fermées.

Les prix ont certes baissé depuis un pic atteint en août 2022, mais ils restent très élevés: "cinq fois plus" qu'aux États-Unis et "entre deux et trois fois plus" qu'en Chine, selon la VCI.

A cela s'ajoutent les généreuses subventions accordées au secteur par les concurrents de l'Allemagne, États-Unis en tête.

Les investissements dans le pays ont chuté de 24% l'an dernier, et un quart des entreprises allemandes envisagent la délocalisation d'une partie de leur production, selon la VCI.

Subventions

A Hambourg, les drapeaux rouges du syndicat IGBCE flottent devant le site Allnex, des bâtiments de bétons reliés par des tuyaux gris.

"Cette décision est illogique, l'usine est rentable", s'indigne Christian Wolf, président du comité d'entreprise. La direction pointe du doigt sa "position concurrentielle en Europe".

Syndicats et entreprises s'entendent toutefois pour demander un bouclier tarifaire massif de l'énergie, le temps que les prix baissent avec le déploiement prévu des renouvelables dans le pays.

"Nous avons besoin d'un pont vers l'avenir", a résumé M.Steilemann, de la VCI.

Certains experts appellent à laisser le secteur péricliter en Allemagne pour se concentrer sur des secteurs d'avenir, moins énergivores.

"L'objectif prioritaire des industriels comme des syndicats n'est (...) pas de changer et d'innover", a déploré dans une tribune Moritz Schularick, président de l'institut économique de Kiel.

Mais sans la chimie, l'économie perdrait un secteur "très productif, qui a tiré pendant des années l'industrie tout entière", prévient Timo Wollmershäuser de l'institut IFO.

D'autant qu'il s'agit d'emplois bien rémunérés et socialement avantageux.

"Je retrouverai un poste. Mais jamais comme ici, aussi bien payé avec d'aussi bonnes conditions", se désole Torben Boldt, 26 ans, mécanicien dans l'usine de Hambourg.

Maillon faible 

L'Allemagne, qui reste fortement exportatrice, s'appuie aujourd'hui sur sa consommation des ménages, qui résiste grâce à un marché du travail solide, des salaires qui ont fortement augmenté et une tendance au recul de l'inflation.

L'industrie, à l'image d'une chimie en crise, et le bâtiment n'ont en revanche pas été en mesure d'augmenter leur production, bien que les difficultés d'approvisionnement se soient réduites et qu'elle ait bénéficié d'un important carnet de commandes.

En outre, la hausse des coûts de financement a freiné la demande intérieure, et l'industrie a été ralentie par une baisse de la demande étrangère.

"Si les industries chimique et automobile s'affaiblissent ensemble, cela déclenchera une véritable récession industrielle", prévient l'économiste Sebastian Dullien, de l'institut IMK, cité par le quotidien Süddeutsche Zeitung.

"L'Allemagne reste le maillon faible" en Europe, résume Capital Economics.

Si le PIB allemand a laissé derrière lui la récession technique traversée cet hiver, avec deux trimestres d'affilée en recul, le répit pourrait n'être que de courte durée.

L'indice des directeurs d'achats (PMI) de juillet, en repli, a pointé vers une nouvelle baisse du PIB au 3e trimestre, à moins d'un renversement de tendance en août et septembre.

Perspectives détériorées 

Aussi l'économie allemande pourrait finir l'année au global dans le rouge, en queue de peloton des pays de la zone euro.

Les principaux instituts économiques s'attendent désormais à un recul estimé entre 0,2 et 0,4%, le FMI tablant de son côté sur -0,3%.

Le gouvernement d'Olaf Scholz voit encore la croissance du PIB afficher 0,4%, mais cette prévision d'avril a de bonnes chances d'être abaissée à l'automne.

La zone euro dans l'ensemble pourrait connaître une deuxième partie d'année plus difficile.

La présidente de la Banque centrale européenne Christine Lagarde a jugé jeudi que les perspectives économiques de la zone euro s'étaient "détériorées".

Gardant la lutte contre l'inflation comme principale boussole, les gardiens de l'euro ont néanmoins décidé de remonter leurs taux directeurs de 0,25 point de pourcentage, pour la neuvième fois d'affilée.

La BCE a en même temps ouvert la porte à une possible pause dans les mois à venir, alors que le coût plus cher du crédit pèse sur l'économie.


France: forte contraction de l'activité du secteur privé en novembre, selon l'indice PMI Flash

Le Premier ministre français Michel Barnier prononce un discours lors du forum d'affaires trilatéral France-Italie-Allemagne à Paris, le 22 novembre 2024. Le Forum trilatéral, qui en est à sa sixième édition, réunit les associations professionnelles MEDEF, Confindustria et BDI des trois pays, qui représentent les secteurs industriels des plus grandes économies européennes. (AFP)
Le Premier ministre français Michel Barnier prononce un discours lors du forum d'affaires trilatéral France-Italie-Allemagne à Paris, le 22 novembre 2024. Le Forum trilatéral, qui en est à sa sixième édition, réunit les associations professionnelles MEDEF, Confindustria et BDI des trois pays, qui représentent les secteurs industriels des plus grandes économies européennes. (AFP)
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  • "De très nombreuses entreprises interrogées ont imputé cette baisse de l'activité globale à la faiblesse de la demande" de la part des entreprises et des ménages, indique le communiqué
  • "Les données de l'enquête indiquent une accélération de la contraction, tant dans le secteur des services que dans l'industrie manufacturière en milieu de quatrième trimestre", soulignent S&P et HCOB

PARIS: L'activité du secteur privé français a enregistré en novembre sa plus forte contraction depuis janvier, avec un indice PMI Flash en recul pour le troisième mois consécutif, indiquent vendredi l'agence S&P Global et la Hamburg Commercial Bank (HCOB), qui calculent cet indice.

Le PMI Flash s'est établi à 44,8 en novembre, au plus bas depuis dix mois, contre 48,1 en octobre.

"De très nombreuses entreprises interrogées ont imputé cette baisse de l'activité globale à la faiblesse de la demande" de la part des entreprises et des ménages, indique le communiqué.

"Les données de l'enquête indiquent une accélération de la contraction, tant dans le secteur des services que dans l'industrie manufacturière en milieu de quatrième trimestre", soulignent S&P et HCOB.

La production a ainsi "fortement baissé" dans le secteur manufacturier, avec un taux de contraction le plus élevé depuis décembre 2023. Les fabricants attribuent cette baisse de l’activité à plusieurs facteurs, dont la faiblesse des secteurs automobile, cosmétique et du BTP, ainsi qu’une conjoncture morose sur les marchés étrangers.

"Les prestataires de services ont quant à eux mentionné un manque de visibilité économique et politique, se traduisant par une plus grande réticence des clients à engager des dépenses". L'activité "a ainsi enregistré son plus fort recul depuis janvier dernier" dans les services.

Le volume des nouvelles affaires s'est lui aussi contracté en novembre, une baisse qui est "la plus marquée depuis quatre ans". Cette tendance "reflète principalement une forte diminution des nouvelles commandes dans l’industrie manufacturière".

Le recul global des ventes "s’explique également par un très fort repli de la demande étrangère, les tensions géopolitiques et l’affaiblissement de la demande en provenance des Etats-Unis", qui ont entraîné "la plus forte contraction des nouvelles affaires à l’export depuis mai 2020".

Les perspectives d’activité pour les douze prochains mois "sont orientées à la baisse pour la première fois depuis mai 2020" dans le secteur privé en novembre, car de nombreuses entreprises craignent que la faiblesse prolongée de la demande soit synonyme d'une contraction de l'activité au cours de 2025.

Les répondants à cette enquête expliquent leur pessimisme par "le climat d’incertitude actuel, engendré notamment par la morosité de la conjoncture économique", et "par la fermeture d’entreprises et la faiblesse des secteurs de l’automobile et du BTP".

S&P et HCOB relèvent toutefois "une tendance favorable" sur un point: "l'emploi est reparti à la hausse", avec un taux de création de postes à un plus haut depuis six mois, "exclusivement" dû à une augmentation des effectifs dans les services.


450 000 emplois dans le secteur saoudien du divertissement d'ici 2030, selon le ministère de l'Investissement

La progression rapide du secteur du divertissement s'aligne sur les objectifs de la Vision 2030 du Royaume. (Shutterstock)
La progression rapide du secteur du divertissement s'aligne sur les objectifs de la Vision 2030 du Royaume. (Shutterstock)
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  • L'Arabie saoudite a délivré 34 permis d'investissement dans l'industrie du divertissement au cours du troisième trimestre de l'année
  • La progression rapide du secteur du divertissement s'aligne sur les objectifs de la Vision 2030 du Royaume, qui visent à réduire la dépendance du pays aux revenus du pétrole brut

RIYAD: Le secteur du divertissement en Arabie saoudite devrait créer 450 000 emplois et pourrait contribuer à hauteur de 4,2% au produit intérieur brut du pays d'ici à 2030, selon un nouveau rapport.

Dans son dernier communiqué, le ministère de l'Investissement du Royaume indique que l'Arabie saoudite a délivré 34 permis d'investissement dans l'industrie du divertissement au cours du troisième trimestre de l'année, ce qui représente une augmentation de 13% par rapport aux trois mois précédents.

Le ministère a ajouté que le nombre total de permis d'investissement délivrés dans le secteur du divertissement entre 2020 et la fin du troisième trimestre s'élevait à 303.

«Conformément à l’initiative saoudienne Vision 2030, l'Arabie saoudite vise à diversifier son économie et à améliorer la qualité de vie en promouvant le tourisme et la culture saoudienne à l'échelle internationale pour attirer les visiteurs. Le secteur du divertissement est un pilier crucial pour atteindre ces objectifs ambitieux, en se concentrant sur l'amélioration de la qualité de vie à travers diverses activités culturelles et de divertissement», a déclaré le ministère de l'Investissement.

La progression rapide du secteur du divertissement s'aligne sur les objectifs de la Vision 2030 du Royaume, qui visent à réduire la dépendance du pays aux revenus du pétrole brut, qui dure depuis des décennies.

En 2016, l'Arabie saoudite a créé l'Autorité générale pour le divertissement en vue de stimuler l'industrie du divertissement et des loisirs. Depuis, le Royaume a connu des développements notables, notamment la réouverture de salles de cinéma en 2018.

Selon le rapport, l'Arabie saoudite a délivré 2 189 permis dans le secteur du divertissement au cours des cinq dernières années.

Le Royaume a également accueilli 26 000 événements au cours des cinq dernières années, attirant plus de 75 millions de participants.

Le ministère a ajouté que l'essor du secteur du divertissement catalysait également la croissance du secteur du tourisme dans le Royaume.

Le rapport indique que le nombre de touristes entrants dans l'industrie du divertissement a atteint 6,2 millions en 2023, ce qui représente une augmentation de 153,3% par rapport à 2022.

Les dépenses des touristes entrants dans l'industrie du divertissement ont atteint 4 milliards de riyals saoudiens (1,07 milliard de dollars; 1 dollar = 0,95 euro) en 2023, soit une augmentation de 29,03% par rapport à l'année précédente.

«Le secteur du divertissement est un domaine vital et dynamique du Royaume, agissant comme un catalyseur pour le secteur du tourisme. En accueillant divers événements et activités, il stimule le tourisme et attire les visiteurs, ce qui se traduit par une augmentation des dépenses touristiques et un renforcement de l'économie locale», a déclaré le ministère de l'Investissement.

En 2023, le secteur du divertissement a attiré 35 millions de touristes locaux, soit une augmentation de 17% par rapport à 2022.

Les dépenses des touristes locaux en 2023 étaient de 4,7 millions de riyals saoudiens, ce qui représente une baisse marginale de 8,5% par rapport à l'année précédente.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le Black Friday, moment privilégié pour les cadeaux de Noël, réjouit les e-commerçants et désespère les indépendants

Un piéton passe devant un magasin lors du Black Friday à Paris, le 25 novembre 2022. (AFP)
Un piéton passe devant un magasin lors du Black Friday à Paris, le 25 novembre 2022. (AFP)
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  • Une nouvelle opportunité pour faire ses achats de Noël avant l'heure, que saisiront "près de 60% des consommateurs français" cette année, selon une étude du Boston Consulting Group (BCG)

PARIS: Dépassé, le lèche-vitrine des boutiques enguirlandées de Noël? Faire ses cadeaux durant le Black Friday séduit désormais les consommateurs, une tendance mettant au défi logistique les acteurs de la vente en ligne, et désespérant les commerces indépendants.

Loriane, 26 ans, achète ses cadeaux de Noël pendant le Black Friday car "les offres sont plus intéressantes, ça permet de faire de plus beaux cadeaux", justifie auprès de l'AFP la jeune femme, qui travaille au ministère de l’Intérieur. Pareil pour Marlène, 53 ans, salariée d'Orange, qui recherche "les meilleures offres". Son collègue Julien, 42 ans, confirme : "En boutique l’année dernière, les gens se pressaient plus pour le Black Friday qu'à Noël".

Né aux États-Unis, le Black Friday a été introduit en France par Amazon "il y a à peu près 15 ans", rappelle à l’AFP Frédéric Duval, le directeur général d'Amazon.fr.

Une nouvelle opportunité pour faire ses achats de Noël avant l'heure, que saisiront "près de 60% des consommateurs français" cette année, selon une étude du Boston Consulting Group (BCG).

Les consommateurs plébiscitent le "large choix de produits, les prix bas et la livraison rapide", selon M. Duval.

Cet événement commercial est toujours lancé le vendredi après Thanksgiving, et se tiendra cette année le 29 novembre.

- Black Month -

"Aujourd’hui, le plus gros mois pour la consommation, c’est novembre" plutôt que décembre, abonde Marc Lolivier, délégué général de la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad), qui juge auprès de l'AFP que ce phénomène "a cinq, six ans".

Evénement devenu phare de la vente en ligne, le Black Friday oblige les logisticiens à s'adapter pour faire face à l'afflux colossal de colis.

A titre d'exemple, en 2022, sur la semaine qui a suivi le Black Friday, La Poste avait livré 13,7 millions de colis. Elle en attend "16 millions en 2024", chiffre Jean-Yves Gras, le directeur général de Colissimo.

Certains entrepôts passent dès le mois de novembre "en trois-huit, sept jours sur sept, le dimanche et la nuit", comme à Cdiscount, décrit à l'AFP son PDG Thomas Métivier.

Les équipes sont massivement reforcées: Amazon recrute ainsi 8.000 saisonniers pour novembre-décembre.

Le défi est également technologique, comme pour Cdiscount, dont le site est visité par 10 millions de clients ce jour-là, contre 17 millions par mois en temps normal. "De loin la plus grosse journée de l’année en termes de trafic et d’achats", ce qui conduit les équipes à réaliser des crash-tests pour éprouver la robustesse de leur site internet, raconte M. Métivier.

Au fil des ans, le Black Friday est devenu une "Black Month", constate Quentin Benault, directeur général délégué de Mondial Relay, qui explique que les commerçants proposent des promotions dès le début du mois de novembre. Un soulagement pour les acteurs de l'e-commerce, car cela leur permet de lisser la charge logistique sur un mois plutôt qu'un seul jour.

- "Ça tue le commerce" -

Mais le Black Friday ne fait pas que des heureux. L’Union des Fabricants (Unifab), qui défend la propriété intellectuelle des industriels, alerte : cette période marquée par une profusion de colis en circulation "est une aubaine pour les contrefacteurs", leurs produits passant plus facilement entre les gouttes des contrôles.

"Plus de 8 millions de jeux et de jouets de contrefaçon ont été saisis par les douanes en 2023, la majorité au moment du Black Friday", rappelle sa directrice générale Delphine Sarfati-Sobreira à l'AFP.

Le Black Friday "tue la notion du commerce", déplore aussi Thibaut Ringo, directeur général d'Altermundi, un réseau de boutiques prônant une consommation responsable. "Le consommateur n’attend qu’une chose : qu'on fasse des remises mais nous, les commerçants indépendants, on ne peut pas s'aligner", se désole-t-il.

La Confédération des commerçants de France s'indigne, elle aussi, et met en garde contre des remises "pouvant être basées sur des prix de référence artificiels" et "des stocks spécifiques de moindre qualité proposés à prix cassés". Contre cette "concurrence déloyale", elle appelle à "mieux protéger [les] petits commerçants, qui font vivre [les différents] territoires".