Les émeutes en France vues de l'étranger, entre inquiétudes et instrumentalisation

Des policiers anti-émeute passent devant un camion en feu à Nantes, le 1 juillet, 2023 (Photo, AFP).
Des policiers anti-émeute passent devant un camion en feu à Nantes, le 1 juillet, 2023 (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Mercredi 05 juillet 2023

Les émeutes en France vues de l'étranger, entre inquiétudes et instrumentalisation

  • Les pays étrangers s'interrogent sur le modèle social français et l'intégration, la sécurité, ou encore l'affaiblissement du président Macron
  • L'une des réactions les plus remarquées est venue du chancelier allemand Olaf Scholtz, qui s'est dit «préoccupé» de la situation en France

PARIS: Les émeutes en France ont été scrutées avec intérêt dans les pays étrangers, qui s'interrogent, non sans arrière-pensées, sur le modèle social français et l'intégration, la sécurité, ou encore l'affaiblissement du président Macron.

En Autriche, Der Standard pointe mardi en éditorial la "paralysie" de la politique étrangère française. "Les turbulences politiques internes forment une sombre toile de fond à la superactivité souvent provocatrice du chef d'État français", écrit le journal, avant de s'interroger : "la question se pose pour les amis et les ennemis à l'étranger : peut-on faire confiance à Macron ?".

L'une des réactions les plus remarquées est venue du chancelier allemand Olaf Scholtz, qui s'est dit "préoccupé" de la situation en France, le lendemain de l'annonce de l'annulation de la visite d'État d'Emmanuel Macron en Allemagne, alors que les deux pays connaissent de multiples tiraillements, du nucléaire à l'Europe de la défense en passant par les relations avec Washington.

"En Allemagne, on s'inquiète de plus en plus de la marge de manoeuvre du président francais", souligne à l'AFP Yann Wernert, politologue au Centre Jacques Delors à Berlin: "on se pose la question sur la force politique du partenaire avec lequel Berlin veut travailler".

M. Macron s'est campé depuis le début de son premier mandat en "leader" européen, affichant sa volonté de relancer et réformer l'UE, une ambition qui suscite souvent l'irritation de ses partenaires, en dépit d'avancées comme la Communauté politique européenne (CPE) ou la réflexion sur l'Europe de la défense.

«Masses anti-européennes»

D'autres ont vu dans les émeutes une occasion en or de fustiger l'immigration et de justifier leurs politiques antimigratoires. Le jeune Nahel abattu par un policier, dont la mort a déclenché les émeutes, était Français d'origine algérienne. Et les banlieues difficiles et précarisées en France abritent souvent des populations issues de l'immigration maghrébine ou africaine.

Le pouvoir nationaliste en Pologne réduit ainsi la crise à un conflit entre les immigrés et la société française, le Premier ministre Mateusz Morawiecki allant jusqu'à opposer les images "des émeutes, des pillages, des voitures en feu" à celles "des villes et des villages polonais tranquilles".

Idem en Espagne où le parti d'extrême droite Vox a dénoncé ce weekend "les masses anti-européennes" qui "détruisent des commissariats et brûlent des bibliothèques".

Le ministre hongrois des Affaires étrangères Peter Szijjarto a lui dénoncé "la fausse illusion et l'échec de l'intégration" en Europe de l'ouest.

Côté américain, le New York Times a vu dans la crise un problème spécifique français, allant jusqu'à mettre en parallèle la mort de Nahel et l'interdiction du hijab pour les footballeuses, qui illustrent selon lui "la crise d'identité et d'intégration en France".

Sans surprise enfin, la Russie et la Chine ont fait des gorges chaudes des émeutes. Les médias russes proches du Kremlin ont glosé sur la "décadence", le "désordre" ou l'"abîme social" qui divise la France.

Le Global Times chinois n'a pas reculé devant des accents complotistes pour pointer du doigt son grand rival américain, soupçonné d'oeuvrer en coulisses: "Des observateurs font remarquer que Macron s'est distancié des États-Unis, appelant à une autonomie stratégique européenne ou se démarquant de la politique américaine vis-à-vis de la Chine".

«Dégradation»

Et un an après le fiasco de l'organisation de la finale de la Ligue des Champions près de Paris, quelques mois après l'annulation de la visite du roi Charles pour cause de manifestations contre la réforme des retraites, et à un an des Jeux Olympiques à Paris, la sécurité est au coeur des préoccupations.

"On a un plan de sécurité global pour les JO", assure l'Élysée, soulignant par ailleurs que la France n'est pas la seule à faire face à des violences urbaines, citant la Belgique, la Suisse ou le Canada.

Reste que l'image de la France subit "une dégradation", s'inquiétait le patronat français lundi, citant notamment "les annulations dans le secteur du tourisme".

Dans un éditorial lundi, le Bild allemand pleurait "un paradis en flamme", et convoquait Bardot, Godard, Belmondo et la Côte d'Azur pour regretter une France de carte postale.


Première mission du porte-avions nucléaire français Charles de Gaulle aux Philippines

Le 6 juillet 1999, un prototype du Rafale M02 effectue un appontage sur la piste du porte-avions nucléaire Charles de Gaulle à Brest (Photo Getty Images)
Le 6 juillet 1999, un prototype du Rafale M02 effectue un appontage sur la piste du porte-avions nucléaire Charles de Gaulle à Brest (Photo Getty Images)
Short Url
  • L'ambassadrice de France a jugé dimanche que ces exercices militaires étaient « encore plus importants » en raison de la montée des tensions en mer de Chine méridionale.
  • La France cherche à réaffirmer son poids dans la région Asie-Pacifique, où la Chine et les États-Unis sont en concurrence pour exercer leur influence.

SUBIC BAY FREEPORT ZONE PHILIPPINES : Le porte-avions nucléaire français Charles de Gaulle a effectué sa première mission aux Philippines, où l'ambassadrice de France a jugé dimanche que ces exercices militaires étaient « encore plus importants » en raison de la montée des tensions en mer de Chine méridionale.

« Compte tenu de la montée des tensions, il est d’autant plus important de défendre le droit international et la liberté de navigation, que ce soit en mer ou dans les airs », a déclaré l'ambassadrice Marie Fontanel sur le pont du porte-avions, dans la baie de Subic, au nord de Manille.

Le groupe aéronaval a rejoint la marine des Philippines vendredi pour ces exercices.

Constitué de quelque 3 000 marins, il avait quitté le port de Brest en novembre pour une mission de plusieurs mois en mer Rouge, dans l'océan Indien et dans le Pacifique, durant laquelle il doit intégrer régulièrement des frégates ou des sous-marins de pays étrangers.

La France cherche à réaffirmer son poids dans la région Asie-Pacifique, où la Chine et les États-Unis sont en concurrence pour exercer leur influence.

Les Philippines cherchent pour leur part à renforcer leurs relations avec leurs alliés face aux confrontations régulières entre Manille et Pékin concernant la mer de Chine méridionale. Pékin y revendique en effet la majeure partie de cette voie navigable stratégique.

En novembre, Manille avait annoncé l'achat à la France de 40 vedettes rapides de patrouille dans le cadre d'un accord de 440 millions de dollars (environ 420 millions d'euros).


L'écrivain Boualem Sansal a entamé une grève de la faim, a déclaré son avocat

Short Url
  • « Je suis inquiet pour sa santé, comme pour la possibilité même d'un procès équitable », a affirmé Me François Zimeray, avocat français de l'écrivain, confirmant une information du JDD.
  • Selon Me Zimeray, qui a expliqué ne pas avoir obtenu de visa pour se rendre en Algérie afin de voir son client, Boualem Sansal aurait pris cette décision « en raison des pressions exercées contre lui pour changer d'avocat ».

PARIS : L'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, incarcéré en Algérie depuis mi-novembre, a entamé lundi une grève de la faim, a indiqué son avocat dimanche à l'AFP, précisant tenir cette information d'une source judiciaire.

« Je suis inquiet pour sa santé, comme pour la possibilité même d'un procès équitable », a affirmé Me François Zimeray, avocat français de l'écrivain, confirmant une information du JDD.

Selon Me Zimeray, qui a expliqué ne pas avoir obtenu de visa pour se rendre en Algérie afin de voir son client, Boualem Sansal aurait pris cette décision « en raison des pressions exercées contre lui pour changer d'avocat ».

« Ni la pondération dans l'expression de sa défense, ni la retenue face à la campagne abjecte que j'ai subie dans certains médias algériens, ni le respect du cadre judiciaire de ce pays ne semblent avoir été appréciés par un régime qui persiste à me refuser le visa sans raison valable, privant Boualem Sansal de la défense de son choix », a martelé l'avocat.

Ce dernier a également affirmé que le protocole de soin suivi par Boualem Sansal avait été interrompu, alors que l'écrivain souffrirait d'un cancer, d'après des informations de presse.

Boualem Sansal est poursuivi en vertu de l'article 87 bis du Code pénal algérien, qui sanctionne comme acte terroriste ou subversif tout acte visant la sûreté de l'État, l'intégrité du territoire, la stabilité et le fonctionnement normal des institutions.

Selon le quotidien français Le Monde, le pouvoir algérien aurait mal pris les déclarations de Boualem Sansal au média français Frontières, réputé d'extrême droite, reprenant la position du Maroc selon laquelle le territoire de ce dernier pays aurait été amputé sous la colonisation française au profit de l'Algérie.

Son incarcération a provoqué les protestations de nombreux intellectuels et écrivains, qui estiment les poursuites sans aucun fondement.

Boualem Sansal a longtemps affirmé être né en 1949, ce qui lui donnerait aujourd'hui 75 ans. En décembre, son éditeur Antoine Gallimard avait pour sa part indiqué qu'il était en vérité né en 1944 et avait donc 80 ans.


Immigration : un conseil interministériel se réunit mercredi

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) serre la main d'un agent de la police nationale française dans une caserne de pompiers après une attaque au couteau à Mulhouse, dans l'est de la France, où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux agents de police, le 22 février 2025 (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) serre la main d'un agent de la police nationale française dans une caserne de pompiers après une attaque au couteau à Mulhouse, dans l'est de la France, où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux agents de police, le 22 février 2025 (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
Short Url
  • Ce conseil, qui était prévu avant l'attaque de Mulhouse, « se réunira ce mercredi », a déclaré Jean-Noël Barrot lors d'un entretien avec Europe 1 et CNews, où il était interrogé sur l'attaque de samedi.
  • Interrogé sur TF1, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué que le suspect faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et a accusé l'Algérie de l'avoir refoulé à 10 reprises.

PARIS : Le gouvernement français réunira un conseil interministériel de contrôle de l'immigration mercredi, alors qu'une attaque au couteau, perpétrée par un Algérien en situation irrégulière, a fait un mort samedi à Mulhouse, a assuré dimanche le ministre des Affaires étrangères.

Ce conseil, qui était prévu avant l'attaque de Mulhouse, « se réunira ce mercredi », a déclaré Jean-Noël Barrot lors d'un entretien avec Europe 1 et CNews, où il était interrogé sur l'attaque de samedi.

Au cours de l'entretien, le ministre a été interrogé sur les discussions avec ses homologues algériens concernant les obligations de quitter le territoire français (OQTF).

« Cette attaque terroriste nous appelle à amplifier encore la mobilisation qui est la nôtre pour mieux contenir et prévenir les conséquences de la présence de ce terroriste islamiste sur le territoire national », a estimé le ministre avant d'évoquer le conseil interministériel.

Interrogé sur TF1, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué que le suspect faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et a accusé l'Algérie de l'avoir refoulé à 10 reprises.

Le Premier ministre, François Bayrou, a d'ailleurs convoqué un conseil interministériel de contrôle de l'immigration ce mercredi. « Nous devons faire plus et nous devons faire mieux », a-t-il déclaré.

M. Barrot a également affirmé avoir demandé « aux 19 ambassadeurs, dans les pays où nous rencontrons le plus de difficultés pour renvoyer les étrangers en situation irrégulière, à me faire un rapport circonstanciel dont je présenterai les résultats ce mercredi au Premier ministre pour que nous puissions prendre des mesures fortes ».

« Il y a des pays vis-à-vis desquels il nous faut effectivement prendre des mesures fortes. Il y en a d'autres où, au contraire, il nous faut des mesures d'accompagnement », a-t-il ajouté.