Mort de Nahel, émeutes: hystérisation de la classe politique et règlement de comptes

Des piétons sur l'avenue des Champs-Élysées à Paris, le 2 juillet 2023, un jour après que des manifestants soient descendus dans la rue et aient affronté la police sur cette avenur mythique auprès des touristes lors d'une manifestation contre l'assassinat par la police de Nahel, 17 ans.
Des piétons sur l'avenue des Champs-Élysées à Paris, le 2 juillet 2023, un jour après que des manifestants soient descendus dans la rue et aient affronté la police sur cette avenur mythique auprès des touristes lors d'une manifestation contre l'assassinat par la police de Nahel, 17 ans.
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Publié le Lundi 03 juillet 2023

Mort de Nahel, émeutes: hystérisation de la classe politique et règlement de comptes

  • Emmanuel Macron n’ignore pas que les banlieues constituent un sujet ultrasensible; elles l’étaient avant qu’il devienne président, certes, mais il a lui aussi délaissé ce dossier
  • Des pans entiers de la France et de la société française sont oubliés et occultés depuis des décennies et ils retomberont dans l’oubli dès que sera amorcé le retour au calme

PARIS: «Inadmissible», «inexplicable», «inexcusable»… Ces mots reviennent en boucle dans la bouche des différents responsables depuis la mort du jeune Nahel (17 ans), qui a plongé la France dans une nouvelle vague de violence incontrôlable. Si les termes utilisés pour qualifier les responsables des affrontements, de la casse, des pillages et des blessés tombés par centaines sont les mêmes, ils ne désignent pas pour autant le même coupable.

«Inexplicable» et «inadmissible» sont des qualificatifs attribués aux uns et aux autres selon la place de chaque responsable sur l’échiquier politique français. Le chef de l’État et le gouvernement, à peine sortis de la crise de la réforme des retraites, ont pris en pleine figure ce basculement dans les banlieues. La gravité des faits leur impose une grande prudence et suscite même une vive inquiétude.

Emmanuel Macron n’ignore pas que les banlieues constituent un sujet ultrasensible; elles l’étaient avant qu’il devienne président, certes, mais il a lui aussi délaissé ce dossier.

En 2017, le président a chargé l’ancien ministre Jean-Louis Borloo d’élaborer un plan afin de «faire revenir la république dans les banlieues» et de «remédier au repli identitaire et communautaire».

La situation est si tendue qu’elle a semé le trouble jusqu’au sommet de l’État. Ainsi, Emmanuel Macron a dû écourter sa participation à un sommet européen à Bruxelles puis annuler une visite officielle en Allemagne.

Un an plus tard, et à la suite des consultations fournies, le plan Borloo, qualifié de «plan Marshall pour les banlieues», est remis en grande pompe à l’occasion d’une cérémonie à l’Élysée. Pourtant, sitôt né, sitôt enterré, ce plan est estimé trop onéreux et peu innovant.

Depuis, le discours gouvernemental privilégiait une approche globale de la situation des banlieues sans faire la moindre différence avec le reste du territoire français. Pourtant, cette distinction est bien réelle; la mort du jeune Nahel et ses répercussions en sont la preuve. Face à ce retour de flamme, le président et le gouvernement devaient parer au plus urgent, agir de façon à ménager la vague d’émotion qui submerge le pays, sans donner le sentiment de fustiger les forces de l’ordre.

Ils devaient doser et trouver un équilibre difficile entre l’émotion face à la mort du jeune homme et le maintien de l’ordre; il leur fallait concilier la fermeté et l’apaisement et, surtout, éviter coûte que coûte une maladresse susceptible d’envenimer la situation.

Hystérisation de la situation par la classe politique

La situation est si tendue qu’elle a semé le trouble jusqu’au sommet de l’État. Ainsi, Emmanuel Macron a dû écourter sa participation à un sommet européen à Bruxelles puis annuler une visite officielle en Allemagne pour rester au chevet de son pays. Cela n’a pas permis d’éviter une hystérisation de la situation par la classe politique, toutes tendances confondues.

En effet, dès l’annonce de la mort de Nahel, cette classe politique – y compris parmi les élus du parti présidentiel – s’est lancée dans un règlement de compte à coups de déclarations et de Tweets assassins.

Ils se sont invectivés, interpellés et même insultés dans le but de marquer un point, faisant preuve d’un déni presque total de la gravité de la situation.

S’adressant à la gauche, le député Renaissance (le parti présidentiel) Mathieu Lefèvre a lancé: «La mort d’un jeune homme est évidemment un drame», mais «où sont les condamnations des refus d’obtempérer par la Nupes [groupement des partis de gauche] qui, toutes les quelques minutes, mettent en péril la vie de nos forces de l’ordre et de nos citoyens?»

La riposte a été fulgurante de la part de La France insoumise (LFI, extrême gauche): «Vous êtes à vomir», ont répondu plusieurs de ses élus, dont le député de la Seine-Saint-Denis, Thomas Portes, qui a qualifié le «macronisme» de «déchéance morale». Il faut dire que la réaction du leader de LFI, Jean-Luc Mélenchon, et de ses acolytes avait eu de quoi susciter la perplexité: ils s’en étaient pris frontalement aux forces de l’ordre. «Les chiens de garde nous ordonnent d’appeler au calme. Nous appelons à la justice», a indiqué Mélenchon dans un Tweet.

Le député LFI David Guiraud lui emboîte le pas: «Ce sont les policiers qui doivent se calmer. Moi, je n’appelle pas au calme, j’appelle à la justice», a-t-il affirmé.

Autre son de cloche pour le leader de Reconquête! (extrême droite), Éric Zemmour: les émeutes ne sont que le fait «de populations qui ne veulent pas s’acclimater à nos mœurs et à nos coutumes».

Entre-temps, la droite et l’extrême droite ont critiqué le «manque de fermeté» du gouvernement face aux émeutiers et ont apporté leur soutien aux forces de l’ordre sans un mot pour la famille de Nahel.

Le président du Rassemblement national (RN, extrême droite), Jordan Bardella, lui, a tiré à boulets rouges sur l’extrême gauche «systématiquement dans la roue des délinquants, des criminels, des islamistes et de tous ceux qui veulent détruire la république», selon lui.

La réplique n’a pas tardé de la part du député LFI Antoine Léaument, qui a accusé Bardella de se mettre «du côté de la violence et de l’absence des règles et des lois».

De son côté, le Parti socialiste (PS) cherche maladroitement à se démarquer de LFI, son encombrant allié, en affirmant l’attachement du parti à «l’État de droit».

La révolte des banlieues «est une forme d’intégration négative, un rituel initiatique» et le combat contre la police «tient lieu d’une révolte impossible contre un père absent ou inexistant», affirme Pascal Bruckner.

Le sénateur PS Rachid Temal est allé jusqu’à déclarer publiquement que le dirigeant de La France Insoumise avait tenu «des propos déconnectés de la réalité», alors que d’autres socialistes l’ont accusé de donner le sentiment «que les gens de banlieue cautionnent la violence, ce qui est faux».

Au milieu de cette cacophonie, il est difficile de ne pas ressentir l’impression de déjà-vu: une bavure policière qui a causé la mort d’un jeune homme, des émeutes dans les banlieues et les grandes villes françaises, des affrontements entre les forces de l’ordre et des  jeunes en colère, des voitures calcinées, des institutions publiques et des commerces saccagés, des blessés par centaines et des arrestations par milliers.

Il ne s’agit surtout pas de banaliser l’impact de ces événements; le sentiment de répétition accentue leur gravité et mène à un constat implacable.

Depuis les émeutes qui ont mis la France à feu et à sang en 2005 après la mort de deux jeunes, Zyed et Bouna, les banlieues françaises, avec leurs millions de jeunes et de laissés-pour-compte, ont toujours fait face à d’importantes difficultés.

Des pans entiers de la France et de la société française sont oubliés et occultés depuis des décennies et ils retomberont dans l’oubli dès que sera amorcé le retour au calme.

Nahel a été inhumé dans la plus stricte intimité à la demande de sa famille. Sa grand-mère a appelé au retour au calme et à l’arrêt des hostilités. Si cette requête est entendue, les banlieues pourront renouer progressivement avec leur rythme habituel et retomber dans l’oubli… jusqu’à la prochaine étincelle qui viendra tout bousculer.

Peut-être n’est-il pas inutile qu’un philosophe tel que Pascal Bruckner nous aide à saisir la nature du malaise des banlieues et de leur débordement répétitif. Dans une interview au journal Le Figaro, il souligne que la révolte des banlieues «est une forme d’intégration négative, un rituel initiatique» et que le combat contre la police «tient lieu d’une révolte impossible contre un père absent ou inexistant». Il revient donc au père – qui n’est autre que la république – de prendre à bras le corps les appels incessants qui lui sont adressés par ses enfants délaissés.


Le budget de la Sécurité sociale et son débat sur les retraites suspendus au vote sur les "recettes"

Le Premier ministre français Sébastien Lecornu (en bas) s'exprime lors d'un débat parlementaire sur le budget 2026 à l'Assemblée nationale, à Paris, le 31 octobre 2025. (AFP)
Le Premier ministre français Sébastien Lecornu (en bas) s'exprime lors d'un débat parlementaire sur le budget 2026 à l'Assemblée nationale, à Paris, le 31 octobre 2025. (AFP)
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  • Les députés doivent voter sur la partie « recettes » du budget de la Sécurité sociale, dont le rejet bloquerait l’examen de la suspension de la réforme des retraites prévue dans la partie « dépenses »
  • Malgré les divisions, le gouvernement appelle à la responsabilité pour éviter un blocage, tandis que les oppositions cherchent à peser sur le déficit et la répartition des recettes

PARIS: Le budget de la Sécurité sociale va-t-il poursuivre son chemin à l'Assemblée? Les députés doivent se prononcer, potentiellement samedi, sur sa partie "recettes" largement remaniée, et dont le rejet interromprait les débats avant même l'article-phare suspendant la réforme des retraites.

Signe de l'importance du moment, le ministère des Relations avec le Parlement a appelé les députés à adopter cette partie du texte pour que le débat "se poursuive" sur les dépenses, avant un vote sur l'ensemble du texte prévu mercredi, plutôt que d'envoyer dès ce week-end tout le projet de loi initial au Sénat. Laconique, et s'exprimant depuis le Mexique, Emmanuel Macron a tout de même répété ses vœux de "stabilité" pour le pays, en misant sur "la responsabilité de chacun" dans l'examen de ce budget.

La partie "dépenses" contient des "sujets de santé, de prévention, d'hôpital" et "la suspension de la réforme des retraites", rappelle le ministère.

Un message nécessairement adressé aux oppositions, mais qui peut aussi se lire comme un appel à la mobilisation de son propre camp, échaudé par certaines concessions à la gauche.

"On est loyal à un gouvernement qui fait n'importe quoi", s'est emporté anonymement cette semaine un député Renaissance.

L'opportunité d'aborder tous les sujets pèse à gauche: "on ne votera pas contre la partie recettes, ne serait-ce que parce qu'on veut qu'il y ait le débat sur la réforme des retraites", a expliqué à l'AFP Stéphane Peu, patron du groupe communiste, qui devrait s'abstenir.

Renaud Labaye, secrétaire général du groupe RN, pense que tous les groupes ont "intérêt à ce qu'on aborde les dépenses" car "ce n'est pas bon de laisser entendre aux Français que quand on parle de budget on ne parle que de fiscalité". Mais la décision sera actée par la patronne Marine Le Pen.

Le gouvernement espérera nécessairement une abstention des socialistes plutôt qu'un vote contre, alors que le PS, qui a obtenu sous la menace d'une censure l'annonce d'une suspension de la réforme des retraites, a un intérêt objectif à ce que les débats aillent jusqu'à cet article crucial.

- Quel déficit? -

Les oppositions, mais aussi une partie du camp gouvernemental, peuvent aussi se targuer d'avoir largement réécrit la partie recettes: exit la surtaxe sur les mutuelles, la cotisation patronale sur les tickets-restaurants ou la fin d'une exonération sur les salaires des apprentis.

Et la gauche a aussi fait adopter des amendements PS, LFI et communiste pour une hausse de CSG sur les revenus du patrimoine, et dégager 2,8 milliards de recettes en 2026. Le tout avec un avis favorable, quoique très froid, du gouvernement, qui n'a pas approuvé le dispositif mais veut qu'il reste sur la table pour la suite de la navette parlementaire.

"C'est la seule chose, pour l'instant, qu'ils ont cédée. Si les choses ne changent pas (...) ce sera un vote contre", estimait vendredi après-midi Hendrik Davi, du groupe écologiste, qui décidera samedi de sa position.

"J'aurais bien aimé qu'il y ait un petit peu plus de recettes", pointait aussi Jérôme Guedj (PS) vendredi, déçu du manque de soutien à certaines réductions d'exonérations patronales. "Il faut qu'on voit à la fin ce qu'il y a."

Plus d'impôts, moins de dépenses... Tous les groupes s'inquiètent à leur manière de la façon dont sera réduit le déficit de la Sécu. La copie du gouvernement prévoyait 17,5 milliards d'euros de déficit en 2026 (contre 23 milliards en 2025).

Mais le feu nourri des parlementaires contre plusieurs mesures-phares, comme le gel des retraites et des minima sociaux auquel le gouvernement entend renoncer, éloigne l'objectif.

"Il faudra nous assurer que, de manière absolue, le déficit de la sécurité sociale ne soit pas supérieur à 20 milliards d'euros", a insisté mercredi la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin.

Une alerte perçue comme une marge de manœuvre par certains à gauche, qui considèrent que le gouvernement de Sébastien Lecornu est effectivement prêt à renoncer à certaines mesures d'économies.


La présidente du Louvre déterminée à mener à bien la modernisation du musée

 La présidente-directrice du Louvre, musée le plus visité au monde, a assuré vendredi "avoir pris toute la mesure" des problèmes de sécurité du musée, après le vol retentissant de bijoux de la Couronne et un rapport très critique de la Cour des comptes. (AFP)
La présidente-directrice du Louvre, musée le plus visité au monde, a assuré vendredi "avoir pris toute la mesure" des problèmes de sécurité du musée, après le vol retentissant de bijoux de la Couronne et un rapport très critique de la Cour des comptes. (AFP)
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  • "J'ai pris toute la mesure de nos problèmes de sécurité", a déclaré Laurence des Cars, en précisant que le plan de sécurisation du Louvre, ou "schéma directeur" des équipements de sûreté, rentrait "en application aujourd'hui"
  • Il consiste en "toute une série de travaux d'améliorations, notamment en matière de vidéosurveillance", qui constitue "un des points faibles" du musée, comme l'a rappelé la présidente

PARIS: La présidente-directrice du Louvre, musée le plus visité au monde, a assuré vendredi "avoir pris toute la mesure" des problèmes de sécurité du musée, après le vol retentissant de bijoux de la Couronne et un rapport très critique de la Cour des comptes.

"J'ai pris toute la mesure de nos problèmes de sécurité", a déclaré Laurence des Cars, en précisant que le plan de sécurisation du Louvre, ou "schéma directeur" des équipements de sûreté, rentrait "en application aujourd'hui".

Il consiste en "toute une série de travaux d'améliorations, notamment en matière de vidéosurveillance", qui constitue "un des points faibles" du musée, comme l'a rappelé la présidente, qui en avait déjà fait état lors de son audition devant la commission de la Culture du Sénat fin octobre.

"Je veux remercier la confiance qui m'est accordée" pour "porter la transformation du Louvre, qui a plus que jamais besoin de transformation, de modernisation, pour devenir pleinement un musée du XXIe siècle. Ce qu'il n'est pas aujourd'hui", a ajouté la présidente, dont la démission avait été refusée après le vol.

Laurence des Cars, en poste depuis septembre 2021, a convoqué un conseil d'administration d'urgence vendredi pour revoir la gouvernance du musée le plus visité du monde.

Le 19 octobre, des malfaiteurs avaient réussi à s'introduire au Louvre et à dérober des joyaux d'une valeur de 88 millions d'euros, qui restent introuvables. Quatre suspects ont été mis en examen et écroués.

La Cour des comptes a étrillé jeudi le grand musée parisien dans un rapport en estimant qu'il avait "privilégié des opérations visibles et attractives" au détriment de la sécurité.

Entre 2018 et 2024, le Louvre a consacré 26,7 millions d'euros à des travaux d'entretien et de mise aux normes et 105,4 millions d'euros "pour l'acquisition d'œuvres", selon le rapport.

Mais, pour Laurence des Cars, "le Louvre est un tout" dans "lequel il ne faut pas opposer les travaux aux acquisitions des oeuvres, l'accueil de tous les publics". "Nous avons assuré l'ensemble de nos missions".

 


Un jeune homme tué par arme blanche dans une rixe à Clermont-Ferrand

Un jeune homme a été tué par arme blanche lors d'une rixe dans la nuit de jeudi à vendredi à Clermont-Ferrand et l'auteur des coups est en fuite, a indiqué le procureur à l'AFP. (AFP)
Un jeune homme a été tué par arme blanche lors d'une rixe dans la nuit de jeudi à vendredi à Clermont-Ferrand et l'auteur des coups est en fuite, a indiqué le procureur à l'AFP. (AFP)
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  • A un moment, l'un des protagonistes est parti chercher un couteau. A son retour, il a frappé au thorax un jeune homme qui n'a pas pu être ranimé par les secours, a précisé le magistrat
  • La victime était âgée de 20 ans et son meurtrier s'est enfui avec l'arme du crime, selon une source policière

CLERMONT-FERRAND: Un jeune homme a été tué par arme blanche lors d'une rixe dans la nuit de jeudi à vendredi à Clermont-Ferrand et l'auteur des coups est en fuite, a indiqué le procureur à l'AFP.

Une rixe est survenue entre deux groupes de personnes dans le centre de la ville en fin de soirée pour un motif encore inconnu, a expliqué Eric Serfass.

A un moment, l'un des protagonistes est parti chercher un couteau. A son retour, il a frappé au thorax un jeune homme qui n'a pas pu être ranimé par les secours, a précisé le magistrat.

La victime était âgée de 20 ans et son meurtrier s'est enfui avec l'arme du crime, selon une source policière.

Il n'y a pas eu d'autres blessés et aucune interpellation n'a encore eu lieu, selon le procureur.

Une enquête pour homicide volontaire est ouverte.