BEYROUTH: Le Liban est-il vraiment le pays le plus triste de la planète? Est-il vrai que le pays du Cèdre a perdu son attrait touristique? Selon certains, il serait devenu terriblement triste. Pourtant, sur les réseaux sociaux, bien des stories suggèrent le contraire. Avec l’Aïd al-Adha (le 28 juin), au tout début de l’été, plus d’un million d’expatriés se sont pressés dans les aéroports du monde entier. Destination Beyrouth!
«J'ai quitté le Liban à cause de la situation politique et des difficultés économiques du pays. Je suis parti en quête d'une vie digne qui réponde à tous mes besoins, un endroit où je puisse dormir à tête reposée en sachant que je ne mourrais pas aux portes des hôpitaux par manque de fonds», affirme Richard, un expatrié qui vit à Boston, aux États-Unis.
«Mais, cette année, je ne pouvais pas imaginer que je ne rendrais pas visite à mes parents et à mes grands-parents, ou même que je ne verrais pas les paysages à couper le souffle – la mer et le coucher du soleil – qui me réunissent avec mes amis», lance Richard.
«Du jamais vu au Liban!»
La saison estivale 2023 s’annonce excellente au Liban, avec 18 000 passagers qui arrivent chaque jour entre le mois de juin et la fin août, selon des chiffres officiels communiqués à Arab News en français par un haut responsable de la Direction générale de l’aviation civile. «À vrai dire, 20 400 voyageurs sont arrivés à Beyrouth le 25 juin, du jamais vu au Liban!», se félicite-t-il.
«En juin, il s’avère que la majorité de ces passagers viennent des Émirats arabes unis, de l’Arabie saoudite, du Koweït, du Qatar, de Jordanie, de Turquie, de France, d’Allemagne et du Royaume-Uni, étant donné que ce mois coïncide avec les jours fériés de l’Aïd al-Adha dans les pays du Golfe», explique le responsable. «Les compagnies aériennes ont dû doubler, voire tripler le nombre de vols effectués par jour», ajoute-t-il.
EN BREF
Selon les statistiques de l'Aviation civile fournies à Arab News en français, «jusqu’au 27 juin 2023, trois jours avant la fin du mois, 357 853 passagers ont atterri à l’aéroport international de Beyrouth, contre 340 446 en juin 2022 et 234 519 en juin 2021».
«Les expatriés libanais et les étrangers qui aiment visiter le Liban se bousculent aux aéroports: c’est sans doute un été prometteur», se félicite pour sa part le ministre libanais du Tourisme, Walid Nassar, à l’issue d’un événement annuel organisé par le ministère.
Beyrouth, cette ville qui a été ravagée par une double explosion en août 2020, semble se redresser trois ans plus tard pour accueillir avec chaleur ses expatriés venus du monde entier.
«Ahla bhal tallé»
Tout au long de l’autoroute, à la sortie de l’aéroport, les expatriés sont accueillis par des banderoles sur lesquelles est inscrite l’expression arabe «Ahla bhal tallé», qui signifie: «Vous êtes les bienvenus!»
Le président du syndicat des propriétaires des agences de voyages, Jean Abboud, qui a révélé que «l'année 2023 connaît un important flux d’expatriés et de touristes qui arrivent au Liban», est convaincu que 2023 «écrasera les années précédentes en matière de tourisme».
Au sujet des billets d’avion et du nombre d’arrivées par jour, M. Abboud déclare que «les billets d’avion et les réservations dans les hôtels sont presque tous vendus. 55 compagnies aériennes opèrent à l’aéroport, un nombre qui s’élèvera bientôt à 66». Il évoque également «l'ouverture de la ligne Beyrouth-Madrid par la compagnie aérienne libanaise Middle East Airlines», expliquant: «C’est le trajet que prendront les Libanais qui viennent du Brésil, d'Amérique et du Canada, en plus des Libanais qui travaillent en Afrique et dans le Golfe.»
«Je vous assure, un été prometteur est à l’horizon!», lance M. Abboud.
À la mi-juin, des manifestations ont été organisées par les Libanais à l’étranger contre la compagnie aérienne Middle East Airlines (MEA), qui ont actualisé les prix des tickets de vol à Beyrouth et les ont augmentés de façon déraisonnable et «illogique».
«J’achetais le ticket à 350 et 500 euros durant les hautes saisons. Aujourd’hui, le ticket se vend à 1 000 euros. En tant qu’étudiant, comment suis-je censé payer tel prix?», regrette Fouad, étudiant libanais à Paris.
Un Aïd de festivités!
Avec plus de 80 événements prévus cet été, la saison s’ouvre avec les préparations des festivals pour l’Aïd. Des réjouissances qui s’étendent du sud au nord du Liban.
À Baalbek, les festivals débutent le 1er juillet, une date qui coïncide avec l’arrivée des expatriés.
À Batroun, poumon touristique du Liban, dès le 30 juin, des dizaines de milliers de festivaliers se presseront aux concerts qui se tiendront dans cette ville côtière.
«Le Liban propose des événements touristiques spectaculaires. Malgré la crise économique, le pays est riche en attractions touristiques», confie le ministre du Tourisme.
Climat méditerranéen idéal
Sur les côtes libanaises de Byblos et de Batroun, les complexes balnéaires et touristiques s’apprêtent à recevoir des milliers de visiteurs qui viennent profiter de la mer Méditerranée. Ces destinations combinent bonnes ondes, jus colorés, énergie communicative et musique.
Perchés juste au-dessus de la mer, les restaurants du littoral libanais séduisent grâce à leurs décors aux couleurs terreuses. Les touristes viennent y déguster les spécialités de la cuisine libanaise en admirant le coucher du soleil.
«Je ne vois personnellement aucun obstacle qui m’empêche de venir au Liban: la vie est retournée à la normale après la Covid-19 et le pays est loin d’être en état de guerre», raconte Elie, un Libanais qui vit à Londres, à Arab News en français.
Sur l'île aux Lapins, au large de Tripoli, dans le nord du Liban, le thermomètre affiche plus d'une trentaine de degrés et les expatriés s’offrent un bain de mer.
«L'écotourisme, le tourisme religieux et les escapades dans les montagnes attirent également un flot de voyageurs», se réjouit le ministre du Tourisme.
Où passer les vacances au Liban?
Presque toutes les régions libanaises peuvent être parcourues en deux heures et demie en voiture à partir de Beyrouth.
Baalbek et Anjar
Si vous êtes passionné par la Rome antique, vous devez y visiter ces ruines exceptionnelles. Elles figurent sur la liste du patrimoine mondial de l'Unesco. Le temple de Jupiter, à Baalbek, est l'un des plus grands temples romains de la planète.
Tyr et Byblos
Les ruines de Tyr et de Byblos, qui surplombent la Méditerranée, sont également admirables. Ces deux sites sont également classés au patrimoine mondial de l'Unesco. Décidément, si vous aimez l’histoire, vous passerez un bon moment au Liban!
Jbeil
C’est le coin européen du Liban. Avec ses bateaux chics, ses restaurants luxueux et ses femm en robe d'été aux longs cheveux flottants, vous vous sentirez comme à Trogir, en Croatie, ou à Budva, au Monténégro. Seul le souk vous rappellera que vous êtes bien au Moyen-Orient.
Les Cèdres/Bécharré
La forêt des «Cèdres de Dieu» fait la fierté du Liban. Elle figure également sur la liste du patrimoine de l’Unesco et ses arbres comptent parmi les plus célèbres au monde. Dans les temps anciens, des forêts illimitées poussaient sur les montagnes du Liban. Sans oublier la vallée de Qannoubine (Wadi Qannoubine ou Wadi Qadisha), l'une des zones touristiques les plus charmantes et les plus mystiques du nord du Liban.
Sidon et Maghdouche
Sidon est célèbre pour ses souks et son château (appelé «château de la Mer»), et Maghdouche offre de superbes vues.
Batroun
Batroun est une ville côtière du nord du Liban et l'une des plus anciennes cités du monde. Située au nord du Liban, elle est une destination touristique importante. La ville est dotée d’églises historiques, d’une citadelle, de vieilles rues et d’un mur phénicien. C’est également une station balnéaire majeure du pays.
La Grotte de Jeita et Harissa
Harissa offre une vue exceptionnelle sur la côte méditerranéenne et la grotte de Jeita abrite de magnifiques galeries de grottes souterraines.
Redressement économique garanti?
Le pays du Cèdre est en quête de nouveaux moyens pour redresser son économie. Les revenus du tourisme sont estimés à 9 milliards de dollars (1 dollar = 0,91 euro) selon le site d’informations The National News.
«Le Liban s'attend à accueillir 2,2 millions de passagers et à gagner environ 9 milliards de dollars de revenus touristiques cette année, ce qui est indispensable alors qu'il est actuellement confronté à une impasse politique et traverse sa pire crise économique depuis l'indépendance du pays», lit-on sur le site.
«Le tourisme est la colonne vertébrale de l'économie nationale», conclut M. Nassar.
Dans tous les domaines, des crises frappent le Liban de plein fouet depuis 2020. La livre libanaise connaît aujourd’hui une dépréciation record d'environ 98% selon des rapports publiés par le Fonds International monétaire (FMI).