PARIS: Les tensions géopolitiques mondiales, guerre en Ukraine en tête, focalisent l'attention des hauts dirigeants de la planète mais un "consensus" demeure sur les grandes orientations de la lutte contre le terrorisme, assure un cadre des Nations Unies.
Dans un entretien en visioconférence avec l'AFP, Raffi Gregorian, directeur du Bureau de lutte contre le terrorisme aux Nations unies, admet une forme de "distraction" des responsables politiques mais assure que l'activité des groupes djihadistes n'est pas négligée.
L’Assemblée Générale a adopté une résolution sur la stratégie antiterroriste des Nations unies. Qu'en retenez-vous ?
C'est un signal très important au monde que malgré les tensions géopolitiques et les désaccords sur un vaste panel de sujets, quand on en vient au besoin de travailler contre le terrorisme, il y a consensus. Et ce, malgré l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Les fractures au sein de la communauté internationale attirent l'attention et font les gros titres, c'est normal. Mais à côté de ça, il y a toujours un consensus sur le besoin d'une action collective et coordonnée.
On a parfois l'impression que les pays occidentaux négligent le sujet parce qu'ils ne sont plus frappés directement.
Je peux comprendre que vous ayiez cette impression. Mais le monde a appris (...) que des évènements qui se passent de l'autre côté de la planète peuvent vous affecter, et que même si votre pays n'est pas confronté à une menace sous forme d'une attaque, cela ne signifie pas que vous ne faites pas partie du problème. Des terroristes peuvent se réfugier dans votre pays, lever des fonds, fournir des composants de drones ou d'explosifs improvisés et les envoyer sur des théâtres de conflits ou conduire des attaques dans un pays voisin. Il y a une prise de conscience que nous sommes tous interconnectés sur cette question. Il était intéressant d'entendre des pays d'Amérique du Sud comme le Mexique, l'Equateur, la Colombie et d'autres, exprimer leurs inquiétudes sur le terrorisme mondial et la situation en Afrique.
N'y a-t-il pas quand même une forme de relâchement de l'attention ?
Ce que nous constatons, c'est une disconnection entre ce que les experts jugent nécessaire et ce que les décideurs politiques jugent acceptable, en particulier sur le sujet du retour des combattants des camps dans le nord de la Syrie. Tous les experts comprennent l'importance de les rapatrier dans leurs pays d'origine (...). Mais au niveau politique, il y a une vraie réticence (...).
Là où nous sommes confrontés à un défi, c'est sur les ressources. Certains des fonds disponibles avant la guerre en Ukraine ont été consacrés à la réponse des pays (aux conséquences du conflit ndlr) donc il y a moins d'argent disponible pour lutter contre le terrorisme.
Au plus haut niveau politique, les gens seront plus concentrés sur les fractures géopolitiques et les tensions. Donc nous devons travailler encore plus étroitement et trouver d'autres ressources pour maintenir les efforts. Nonobstant l'intérêt des hauts responsables pour les questions géopolitiques, les gens qui s'occupent de l'anti-terrorisme font leur travail.