PARIS: L'Assemblée nationale a adopté sans heurts vendredi un texte élargissant les missions de la Société du Grand Paris, rebaptisée Société des grands projets, pour mettre sur les rails la promesse de RER dans au moins dix grandes villes comme Lille ou Bordeaux.
Malgré des inquiétudes des oppositions sur le financement de ces trains, la proposition de loi a été approuvée en première lecture à l'unanimité des 25 députés votants et doit désormais aller au Sénat. La gauche et le RN se sont majoritairement abstenus.
Porté par Jean-Marc Zulesi, député Renaissance des Bouches-du-Rhône, ce texte organise juridiquement le déploiement des "services express régionaux métropolitains" (SERM), l'équivalent des RER en Ile-de-France.
Au moins dix SERM devraient être mis en place dans un délai de dix ans suivant la promulgation. Les villes retenues ne sont pas précisées, mais des projets sont en cours à Lille, Bordeaux ou Grenoble.
L'adoption de la proposition de loi "est une excellente nouvelle pour nos services publics et la décarbonation des transports", a souligné le ministre délégué aux Transports, Clément Beaune. Il a promis "une équipe spécifique" au ministère "pour accompagner les collectivités" dès la rentrée.
Le texte prévoit que la Société du Grand Paris (SGP), chargée actuellement de la construction du Grand Paris Express, soit renommée Société des grands projets, avec des missions élargies. Elle pourra intervenir dans les phases préparatoires, s'occuper de nouvelles infrastructures, voire de travaux sur des lignes existantes sur lesquelles aucun train n'a circulé depuis cinq ans.
"En aucun cas, nous ne remettons en cause l'expertise de SNCF Réseau", a insisté Jean-Marc Zulesi face aux inquiétudes répétées des oppositions.
Une convention entre les deux organismes est prévue. Mais le LFI Thomas Portes a dénoncé une "mise en concurrence" de la SNCF et a déploré "les cinq morts" d'accidents du travail survenus sur les chantiers du Grand Paris Express depuis le début des travaux en 2015.
Billet unique
Le président Emmanuel Macron a relancé en novembre ce projet déjà ancien de RER métropolitains: des trains régionaux cadencés toutes les demi-heures, voire tous les quarts d'heure aux heures de pointe, pour irriguer les alentours des grandes villes.
Dès décembre, la métropole de Strasbourg lançait le sien avec la promesse de 800 trains supplémentaires par semaine et d'"une fréquence élevée et continue tout au long de la journée". Avec de nombreux dysfonctionnements jusqu'ici pour les usagers.
Un plan à 100 milliards d'euros pour le ferroviaire, souhaité de longue date par le PDG de la SNCF Jean-Pierre Farandou, a été annoncé en février.
Et, le 6 juin, l'Etat promettait 8,6 milliards d'euros aux régions pour aider à financer leurs infrastructures de transport entre 2023-2027, avec une forte priorité donnée aux transports ferroviaires et collectifs. Dans cette enveloppe, 800 millions d'euros sont fléchés vers les premiers SERM.
Assez peu quand on sait que le projet strasbourgeois a par exemple coûté 700 millions d'euros et nécessitera 600 millions d'investissement supplémentaires dans les cinq prochaines années.
Cette question du financement est l'une des principales préoccupations des députés, alors que la SGP bénéficie de ressources provenant d'une taxe sur les bureaux et d'une taxe spéciale d'équipements.
"La base fiscale de nos régions n'est pas la même que l'Ile-de-France", a souligné Gérard Leseul (PS). Le "financement reste à clarifier", a-t-il insisté, proposant sans succès la remise d'un rapport du gouvernement "sur le modèle de financement des projets" et la répartition des efforts entre les acteurs.
Les débats ont aussi porté sur les "zones à faibles émissions mobilité", qui doivent contribuer à bannir progressivement les véhicules les plus polluants des grandes agglomérations, de plus en plus remises en cause par les oppositions.
Gérard Leseul a proposé, en vain, que les sanctions dans ces zones soient repoussées jusqu'à l'entrée en service d'un SERM dans le territoire.
La proposition de loi est un "nécessaire pas en avant", mais la "coquille reste encore bien vide" en termes de financements, a renchéri l'écologiste Sébastien Peytavie.
Le député RN Pierre Meurin a de son côté critiqué un texte qui "ignore la France rurale et la France des clochers".
Des amendements ont été adoptés pour la mise en place d'un billet unique permettant de combiner différents modes de transports publics dans le périmètre d'un même service express régional.