MILAN: L'ex-chef de gouvernement italien Silvio Berlusconi, sulfureux milliardaire aussi célèbre pour ses manoeuvres politiques que pour ses démêlés judiciaires et frasques sexuelles, est mort lundi à 86 ans.
Soigné à l'hôpital San Raffaele de Milan (Nord) pour une leucémie, le sénateur de droite y était entré vendredi. Des funérailles d'Etat auront lieu mercredi en la majestueuse cathédrale de Milan et le gouvernement a proclamé une journée de deuil national pour cette occasion.
Peu après l'annonce de son décès, des dizaines de personnes se sont rassemblées devant l'hôpital, avant que sa dépouille ne soit transférée dans sa luxueuse demeure de villa San Martino, à Arcore, dans la banlieue de Milan, alors que les hommages affluaient d'Italie et dans une moindre mesure de l'étranger.
Le président russe Vladimir Poutine, parmi les premiers à réagir, a salué une "personne chère" et un "vrai ami" doté d'une "énergie vitale incroyable", louant son "optimisme" et son "sens de l'humour".
Ami personnel de Vladimir Poutine, reçu dans sa méga-villa en Sardaigne, Silvio Berlusconi a rejeté plusieurs fois sur Kiev la responsabilité de la guerre avec Moscou.
Le parcours de cet éternel revenant, dont la mort politique fut maintes fois annoncée à tort puisqu'il avait encore été élu sénateur en 2022, se confond avec l'histoire italienne des 30 dernières années.
Il était aussi l'un des hommes les plus riches de la péninsule avec une fortune évaluée début avril par Forbes à 6,4 milliards d'euros.
A l'étranger, il était surtout connu pour la ribambelle de scandales dans lesquels il fut impliqué, ses gaffes devenues légendaires, ses procès à répétition et ses coups d'éclat diplomatiques.
«L'Italie pleure»
S'il restait populaire en Italie, son parti Forza Italia, une machine à gagner les élections qu'il avait fondée en 1994, a suivi son lent déclin, passant de presque 30% des voix aux législatives de 2001 à 8% en 2022.
"Il est immortel, il sera toujours avec nous. Je l'ai toujours admiré, comme toute notre famille. Pour sa générosité, sa gentillesse, tout ce qu'il a fait pour nous", a affirmé à l'AFP Carla Ballarini, une retraitée de 75 ans accourue à l'hôpital San Raffaele.
Dans un message vidéo, la cheffe du gouvernement italien Giorgia Meloni a salué son "courage" et sa "détermination", voyant en lui "l'un des hommes les plus influents de l'histoire de l'Italie".
"Le grand combattant s'en est allé", a tweeté le Premier ministre hongrois Viktor Orban.
"Attaché à notre pays, où il étudia durant sa jeunesse, Silvio Berlusconi participa, de concert avec ses homologues français, à réaffirmer les liens entre nos deux nations sœurs, fortes de leur amour commun de la pensée, du sport, des arts, et de ce cheminement européen né de plusieurs siècles d’histoire partagée", a réagi le président français Emmanuel Macron.
Après avoir débuté son ascension à Milan dans le BTP, l'entrepreneur au bagout à toute épreuve s'était lancé avec succès dans la télévision, inventant la TV paillettes des années 1980 qui fera sa fortune, lui permettant d'investir dans des clubs de foot, l'AC Milan puis l'AC Monza.
«Il Cavaliere»
Né le 29 septembre 1936, Berlusconi, fils d'un employé de banque milanais, commence à travailler comme animateur sur des bateaux de croisière où il chantait et racontait des histoires drôles.
Armé d'une licence de droit, il se lance dans les affaires, entamant une irrésistible ascension qui soulève des interrogations quant à l'origine de sa fortune, sur laquelle il est toujours resté flou.
La holding de la famille Berlusconi, Fininvest, compte trois chaînes de télévision, des journaux, les éditions Mondadori et bien d'autres participations.
Fan de football, Silvio Berlusconi a présidé pendant 31 ans l'AC Milan qui a remporté cinq fois la Ligue des champions sous son ère, avant de le vendre en avril 2017 à des investisseurs chinois. "Merci président, toujours avec nous", a réagi le club sur son site internet.
En 1994, il crée Forza Italia, et à l'issue d'une campagne-éclair relayée par son empire médiatique, il devient chef du gouvernement avant d'être lâché par ses alliés sept mois plus tard.
Il revient au pouvoir en 2001 pour cinq ans, un record depuis l'après-guerre. Battu d'un cheveu en 2006, il prend sa revanche deux ans plus tard, s'installant aux commandes pour la troisième fois. Mais en novembre 2011, il doit céder sous les huées les rênes d'une Italie en proie à une grave crise financière.
Il ressurgit en 2013 sur la scène politique en raflant près d'un tiers des voix aux législatives.
Quelques mois plus tard, la longue litanie de ses déboires judiciaires aboutit à une première condamnation définitive pour fraude fiscale : un an de prison - effectué sous forme de travaux d'intérêt général dans une maison pour personnes âgées -, six ans d'inéligibilité et l'expulsion du Sénat.
Père de cinq enfants issus de deux mariages, il était plusieurs fois grand-père.