Le Sénat entérine une «hausse inédite» du budget de la Justice

Le Sénat se penche à partir de mardi, avant l'Assemblée nationale, sur le projet de loi pour une justice "plus rapide" porté par le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti. (AFP)
Le Sénat se penche à partir de mardi, avant l'Assemblée nationale, sur le projet de loi pour une justice "plus rapide" porté par le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti. (AFP)
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Publié le Mercredi 07 juin 2023

Le Sénat entérine une «hausse inédite» du budget de la Justice

  • L'article 1er du projet de loi ambitionne ainsi de faire passer le budget du ministère de la Justice de 9,6 milliards d'euros en 2023 à près de 11 milliards d'ici quatre ans
  • Il entérine également l'embauche de 10 000 personnes, dont 1 500 magistrats

PARIS: Le Sénat a entériné une "hausse inédite" du budget de la Justice, qui atteindra près de 11 milliards d'euros en 2027, mardi, premier jour d'examen de la réforme du garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti. Objectif: "tourner la page du délabrement et de la clochardisation" de l'institution.

Le projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la Justice 2023-2027 est accompagné d'un projet de loi organique réformant le statut des magistrats.

Le Sénat poursuivra jusqu'à jeudi, voire vendredi, l'examen de ces deux textes et se prononcera sur l'ensemble lors de votes solennels mardi prochain. Ils iront ensuite à l'Assemblée nationale.

"Ils ont l'ambition de répondre concrètement aux attentes de nos concitoyens au premier rang desquelles celle d'une justice plus rapide", a affirmé le ministre. Le but est de "diviser par deux l'ensemble des délais de justice d'ici 2027".

L'article 1er du projet de loi, voté à main levé, entend faire passer le budget du ministère de 9,6 milliards d'euros en 2023 à près de 11 d'ici quatre ans. Il entérine également l'embauche de 10.000 personnes, dont 1.500 magistrats.

Les sénateurs ont porté de 1.500 à 1.800 le nombre de nouveaux greffiers et prévu la création de 600 postes de conseillers pénitentiaires de probation et d'insertion (CPIP).

L'effort budgétaire et les recrutements supplémentaires ont été salués par les magistrats, dubitatifs cependant quant à la promesse d'une amélioration rapide des délais de traitement des dossiers.

Les sénateurs restent eux aussi sur leur faim. Si l'effort budgétaire "est assurément le bienvenu", a estimé la rapporteure Agnès Canayer (LR), "le chantier de la réforme de la justice n'est pas qu'une réforme comptable".

Le garde des Sceaux a souligné que le texte entérine d'"importantes revalorisations des métiers de justice".

Les voies d'accès à la magistrature seront réformées et ouvertes à de nouveaux profils. La réforme prévoit par ailleurs la création d'une nouvelle fonction, celle d'"attachés de justice", qui se substitueront aux actuels "juristes assistants".

Violences intra-familiales 

A l'initiative du gouvernement, le texte instaure des pôles spécialisés dans la lutte contre les violences intra-familiales dans les tribunaux. Un amendement de l'écologiste Mélanie Vogel prévoit qu'ils soient opérationnels au plus tard au 1er janvier 2024.

Ces pôles étaient proposés dans le rapport sur les violences conjugales remis le 22 mai au ministre par la rapporteure centriste Dominique Vérien et la députée Emilie Chandler (Renaissance).

"Faute de mieux, nous nous en contenterons", a commenté la socialiste Laurence Rossignol, qui plaide pour "une loi cadre" sur les violences faites aux femmes.

Malgré des réticences, les sénateurs ont autorisé le gouvernement à "clarifier" par ordonnance la rédaction du code de procédure pénale.

Le ministre s'est engagé à ce que le nouveau code n'entre pas en vigueur avant d'avoir été ratifié par le Parlement.

La commission des Lois du Sénat a accueilli "favorablement" certaines mesures de modernisation de l'institution judiciaire. C'est en particulier le cas de l'expérimentation de tribunaux des activités économiques, aux compétences élargies par rapport aux tribunaux de commerce. Ou du renforcement de la responsabilité des magistrats.

A gauche, la socialiste Laurence Harribey, la communiste Laurence Cukierman et l'écologiste Guy Benarroche ont déploré "l'absence" de réponse à la question de la surpopulation carcérale, alors que le nombre de détenus a atteint un nouveau record historique au 1er mai, avec 73.162 personnes incarcérées.

Les Etats généraux avaient suggéré de fixer pour chaque établissement un seuil de "suroccupation majeure", au-delà duquel pourraient être envisagées des mesures de régulation de la population carcérale.

Le ministre a préféré rappeler le "cap" fixé par le gouvernement de construire 15.000 places de prison supplémentaires d'ici 2027.

Comme la gauche, des associations et des avocats s'inquiètent par ailleurs d'une disposition permettant dans certaines conditions aux enquêteurs judiciaires d'activer à distance les appareils électroniques d'une personne à son insu. Elle devrait être abordée en séance mercredi.


Macron et Xi dans les Pyrénées pour une escapade «personnelle»

Le président chinois Xi Jinping est accueilli par le président français Emmanuel Macron et son épouse Brigitte à son arrivée à l'aéroport de Tarbes (Photo, AFP).
Le président chinois Xi Jinping est accueilli par le président français Emmanuel Macron et son épouse Brigitte à son arrivée à l'aéroport de Tarbes (Photo, AFP).
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  • L'étape pyrénéenne pourrait, dans l'esprit de la délégation française, favoriser «un échange franc et amical»
  • Ce coin de montagne est «directement lié à l'histoire très personnelle» d'Emmanuel Macron, explique son entourage

 

TARBES: Après les ors de l'Elysée, la neige des cimes: Emmanuel Macron et Xi Jinping sont arrivés mardi dans les Pyrénées au second jour de la visite d'Etat du président chinois, pour une escapade "personnelle" censée permettre un dialogue plus direct sur la guerre en Ukraine ou les désaccords commerciaux.

"Nos montagnes françaises", "j'espère, continueront de nous inspirer", a lancé lundi, lyrique, le président français en accueillant son homologue chinois à Paris pour la première fois depuis 2019. Il a dit s'attendre, dans les Hautes-Pyrénées, à des "discussions fructueuses et amicales".

L'avion du chef de l'Etat et celui du président chinois ont atterri à Tarbes en fin de matinée, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Les deux dirigeants sont attendus au col du Tourmalet, mythique ascension du Tour de France, où la météo est encore hivernale même si la saison est finie à la station de ski de La Mongie.

Une centaine de personnes sont venues apporter leur soutien au dirigeant chinois et des dizaines de drapeaux rouges aux cinq étoiles jaunes coloraient les abords de la route menant au col, dans la commune de Sainte-Marie-de-Campan.

"C'est vraiment étrange de voir ça ici", sourit Jean-Michel Garem, un villageois retraité.

Emmanuel Macron et Xi Jinping, accompagnés de leurs épouses, déjeuneront dans le restaurant d'altitude d'Eric Abadie, éleveur et ami du président français. Une sorte de réponse à la cérémonie du thé qu'ils avaient partagée l'an dernier à Canton dans la résidence officielle où le père du président chinois avait vécu quand il était gouverneur de la province du Guangdong.

Un cadre qui contraste avec celui du palais présidentiel où, entre un accueil en grande pompe et un banquet fastueux, ils n'ont pas cherché à dissimuler les différends sur le commerce entre l'Europe et la Chine.

Emmanuel Macron a appelé à un "cadre de concurrence loyale", se félicitant à l'issue des discussions d'avoir préservé le cognac français de la menace de taxes douanières chinoises "provisoires".

Conviée pour afficher un front continental uni, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a prévenu que l'Union européenne prendrait "des décisions fermes" pour "protéger son économie", dénonçant l'afflux de véhicules électriques chinois massivement subventionnés.

"Le soi-disant +problème de la surcapacité de la Chine+ n'existe pas", leur a répondu sèchement Xi Jinping.

Sur l'Ukraine, il s'est voulu plus consensuel, réaffirmant sa volonté d'œuvrer à une solution politique.

Et il a apporté son soutien à une "trêve olympique" à l'occasion des Jeux de Paris cet été, poussée également par Emmanuel Macron. Selon une source diplomatique française, cette trêve pourrait servir, s'agissant de l'Ukraine, à enclencher un processus plus politique après plus de deux ans de conflit.

Mais Paris, qui insiste depuis un an pour que Pékin fasse pression sur la Russie pour contribuer à mettre fin à la guerre, se veut "lucide" sur les chances limitées d'une percée rapide. D'autant que le président chinois reste le principal allié de son homologue russe Vladimir Poutine, qu'il doit recevoir prochainement.

Séduction 

L'étape pyrénéenne pourrait, dans l'esprit de la délégation française, favoriser "un échange franc et amical" sur ces sujets épineux. L'idée est de casser l'imposant protocole qui accompagne le moindre déplacement du numéro un chinois.

Ce coin de montagne est "directement lié à l'histoire très personnelle" d'Emmanuel Macron, explique son entourage. Celui qui fête mardi les 7 ans de sa première élection, a passé de nombreuses vacances entre le bourg de Bagnères-de-Bigorre et La Mongie avec ses grands-parents auxquels il était très attaché.

"La diplomatie d'Emmanuel Macron a toujours misé, de manière peut-être excessive, sur le pouvoir de séduction", analyse Bertrand Badie, spécialiste des relations internationales à Sciences Po. "Il y a toujours eu chez lui l'idée que ses relations personnelles pouvaient renverser les structures", ajoute-t-il.

Le cadre intimiste du Tourmalet participe de cette volonté.

"Mais c'est mal connaître Xi Jinping qui n'est pas vraiment un grand sentimental", prévient le chercheur.

Le candidat des socialistes aux élections européennes de juin Raphaël Glucksmann a dénoncé la "tonalité amicale" de cette visite officielle. "L'homme qui déporte les Ouïghours, qui réprime les Hongkongais et les Tibétains n'est pas notre ami", a-t-il déclaré sur RTL.

Son adversaire de droite François-Xavier Bellamy (Les Républicains) a également pointé sur LCI les "ingérences" de Pékin et sa "stratégie agressive pour mettre à terre notre économie". La tête de liste macroniste Valérie Hayer a néanmoins défendu la volonté du chef de l'Etat de parler à son homologue chinois, souhaitant sur France 2 "un dialogue direct et franc sur l'ensemble des sujets".

Le politiste Bertrand Badie acquiesce: avec la Chine de Xi Jinping, "il y a un vrai travail à faire" car personne, jusqu'ici, "n'a trouvé la clé des relations euro-chinoises".


Affaire Meurice et remous à France Inter: appel à la grève dimanche à Radio France

Le 3 mai, dans la foulée de l'affaire Meurice, les sociétés des journalistes (SDJ) et des producteurs (SDPI) de France Inter avaient dénoncé "un virage éditorial" de la première radio de France  (Photo, AFP).
Le 3 mai, dans la foulée de l'affaire Meurice, les sociétés des journalistes (SDJ) et des producteurs (SDPI) de France Inter avaient dénoncé "un virage éditorial" de la première radio de France (Photo, AFP).
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  • L'humoriste en a été suspendu le 2 mai dans l'attente d'une éventuelle sanction pouvant aller jusqu'au licenciement, quatre jours après avoir réitéré ses propos polémiques sur Benjamin Netanyahu
  • Il avait comparé le Premier ministre israélien à une «sorte de nazi mais sans prépuce»

 

PARIS: Les syndicats de Radio France ont appelé à faire grève dimanche pour protester contre "la répression de l'insolence et de l'humour" après la suspension de Guillaume Meurice, ainsi que contre "des menaces" qui pèsent sur certaines émissions de France Inter.

Six syndicats (CGT, CFDT, FO, SNJ, SUD, Unsa) ont déposé lundi soir un préavis de grève pour dimanche de 00h00 à minuit. C'est le jour où est diffusée l'émission hebdomadaire de Charline Vanhoenacker, à laquelle participe d'ordinaire Guillaume Meurice.

L'humoriste en a été suspendu le 2 mai dans l'attente d'une éventuelle sanction pouvant aller jusqu'au licenciement, quatre jours après avoir réitéré ses propos polémiques sur Benjamin Netanyahu tenus fin octobre.

Il avait comparé le Premier ministre israélien à une "sorte de nazi mais sans prépuce", ce qui lui avait valu des accusations d'antisémitisme et une plainte, récemment classée sans suite.

Dans leur préavis de grève, les syndicats demandent à la direction du groupe public "la fin de la répression de l'insolence et de l'humour" et "la réaffirmation sans limites de la liberté d'expression" sur ses antennes.

Menaces 

Plus largement, les syndicats s'inquiètent des "menaces" qui pèsent selon eux "sur des émissions populaires et singulières", en particulier sur France Inter.

Le 3 mai, dans la foulée de l'affaire Meurice, les sociétés des journalistes (SDJ) et des producteurs (SDPI) de France Inter avaient dénoncé "un virage éditorial" de la première radio de France. Elles assuraient notamment avoir appris le remplacement prochain de l'émission sur l'environnement "La terre au carré".

Les syndicats accusent la direction de Radio France de mener "une politique de casse sociale sur les antennes" alors qu'un "projet de réforme de l'audiovisuel public va être discuté prochainement à l'Assemblée nationale".

Projet de la ministre de la Culture Rachida Dati, la mise en place d'une gouvernance unique pour l'audiovisuel public (dont France Télévisions et Radio France) sera examinée les 23 et 24 mai dans l'hémicycle.

Les syndicats fustigent enfin "une campagne de dénigrement et de calomnies orchestrée par des partis politiques, organisations ou personnalités franchement hostiles au service public de la radio". Ce dernier est fréquemment accusé par des personnalités de droite de pencher nettement à gauche.


L'entrée des locaux historiques de Sciences Po Paris à nouveau bloquée

Des gendarmes français évacuent des manifestants qui organisent un sit-in pro-Gaza dans le hall d'entrée de l'Institut d'études politiques (Sciences Po Paris) à Paris, le 3 mai 2024. (Photo Miguel Medina AFP)
Des gendarmes français évacuent des manifestants qui organisent un sit-in pro-Gaza dans le hall d'entrée de l'Institut d'études politiques (Sciences Po Paris) à Paris, le 3 mai 2024. (Photo Miguel Medina AFP)
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  • Une vingtaine d'étudiants sont présents dans la rue, certains arborant des masques sanitaires ou des keffiehs dissimulant une partie de leur visage
  • Les cours sont terminés depuis vendredi au sein de cet établissement d'enseignement supérieur souvent assimilé à une pouponnière des élites

PARIS : L'entrée des locaux historiques de Sciences Po Paris est bloquée mardi matin par des étudiants mobilisés en faveur des Palestiniens, a constaté une journaliste de l'AFP.

Des poubelles, mobilier urbain, vélos en libre service, obstruaient l'entrée du bâtiment situé au 27 rue Saint-Guillaume, un quartier huppé de la capitale.

Une vingtaine d'étudiants sont présents dans la rue, certains arborant des masques sanitaires ou des keffiehs dissimulant une partie de leur visage. Des policiers sont positionnés à proximité.

«On se mobilise avec ces moyens non conventionnels car on pense qu’on n’a plus d’autres choix, on a essayé les mails, les discussions. On est en période d’examen, on est tous fatigués», a déclaré à l'AFP une étudiante en première année qui n'a pas souhaité dévoiler son identité.

Cette jeune femme justifie le blocage par les mêmes revendications qui agitent les campus de Sciences Po Paris depuis plusieurs semaines, notamment une enquête sur les partenariats avec des universités israéliennes et «l'arrêt de la répression des étudiants mobilisés et des sanctions».

Elle affirme que 10 étudiants poursuivent une grève de la faim entamée vendredi après une évacuation de ces mêmes locaux par les forces de l'ordre.

Contactée la direction de Sciences-Po n'a pas répondu à ce stade.

Les cours sont terminés depuis vendredi au sein de cet établissement d'enseignement supérieur souvent assimilé à une pouponnière des élites.

Les étudiants en examens peuvent rentrer par une porte annexe, a constaté une journaliste de l'AFP.