DUBAI: Un responsable haut gradé de la marine américaine au Moyen-Orient a déclaré dimanche que l'Amérique est parvenue à un statut de «dissuasion fragile» avec l'Iran, et ce après des mois d'attaques régionales et de saisies en mer. Les tensions restent pourtant élevées entre Washington et Téhéran au sujet du programme nucléaire de la République islamique.
Le vice-amiral Sam Paparo, qui supervise la 5e flotte de la marine basée à Bahreïn, a pris un ton académique dans son allocution lors du Dialogue IISS de Manama à Bahreïn, organisé par l’Institut international d’études stratégiques. Il dit avoir «un grand respect», tant pour la marine iranienne que pour les forces navales des Gardiens de la révolution, un groupe paramilitaire.
«Nous avons atteint un statut de dissuasion fragile, exacerbé par les événements qui se déroulent à l’échelle planétaire», a déclaré le vice-amiral. «Et je trouve que l'activité iranienne en mer est prudente, circonspecte et respectueuse, pour ne pas risquer une erreur de calcul inutile ou une aggravation de la situation en mer».
Les envoyés de l’Iran auprès de l’ONU n’ont pas immédiatement répondu à une demande de commentaires.
Bien que l'Iran n'ait pas directement saisi ou ciblé un pétrolier au cours des derniers mois, une mine a récemment en a frappé un au large de l'Arabie saoudite, et un cargo près du Yémen a été attaqué. Les soupçons sont immédiatement tombés sur les rebelles houthis du Yémen, soutenus par l’Iran. Les Houthis n'ont commenté aucune de ces agressions.
Paparo, un ancien pilote de chasse de la marine qui a récemment occupé le poste de directeur des opérations au commandement central de l’armée américaine, prend une position différente de celle de son prédécesseur, le vice-amiral James Malloy. Dans l'un de ses derniers commentaires aux journalistes en août, Malloy avait qualifié l'Iran de pays «téméraire et provocateur» qui essaie toujours, lors d'exercices navals dramatiques, de «faire baisser le niveau jusqu'à ce qu'il soit sûrs d’avoir l'air d'avoir gagné quelque chose».
Malloy a vu durant son mandat un nombre de pétroliers saisis par l’Iran. Il a aussi vu une série d’explosions de mines marines qui visent les pétroliers, et que la marine attribue à Téhéran. Le régime nie son implication, bien que des membres des Gardiens de la révolution aient été filmés alors qu’ils retiraient une mine non explosée d’un navire.
Les quelques mois que Paparo a passé aux commandes n’ont en revanche pas vu de crise majeure.
La marine américaine a régulièrement des face-à-face tendue avec les Gardiens de la révolution, dont les vedettes rapides côtoient les navires de guerre américains dans le golfe arabe. La milice effectue parfois des exercices de tir avec des mitrailleuses, et lui lance des missiles.
Les Gardiens patrouillent généralement les eaux moins profondes du golfe arabe et de son embouchure étroite, le détroit d'Ormuz. La marine iranienne sillonne quant à elle le golfe d’Oman et dans la mer d’Arabie. Alors que les commandants précédents ont tenu à faire la différence entre l’attitude des deux groupes, Paparo rejette comme une «vieille idée» la rumeur persistante que le service reste fidèle à l'ancien shah iranien, renversé lors de la révolution islamique de 1979.
«Après quarante et un ans de révolution, je pense que nous pouvons passer outre cette notion», a déclaré le vice-amiral. «Je doute sincèrement qu’il y ait une différence entre eux», ajoute-t-il.
Paparo a aussi déclaré qu'il ne pensait pas que la mission de la 5ème flotte serait affectée par la reconstitution potentielle de l’équipage d'une 1ère flotte chargée de patrouiller l'océan Indien.
Pourtant, les remarques de Paparo portent un avertissement clair, et il cite même l’ancien secrétaire américain à la Défense, Jim Mattis.
«Il faut rester poli, professionnel, et avoir un plan pour tuer tout le monde dans la pièce le cas échéant», a-t-il déclaré. «C'est ainsi que nous nous conduisons en mer».
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com