CASABLANCA: Durant le mois d’avril, chaque week-end, Casablanca et ses habitants ont vibré au rythme du Street Art Tour. Organisé en collaboration avec l’Institut français et le collectif Alouane Bladi, le circuit culturel met en lumière les œuvres et le parcours de nombreux artistes marocains et internationaux. Durant toute une matinée, c’est à vélo que les participants sillonnent les rues de la capitale économique du Maroc à la recherche de fresques grandeur nature.
Avant de se lancer dans le parcours, les participants se réunissent dans l’une des salles de l’Institut français de Casablanca pour en apprendre davantage sur cet art urbain à travers l’intervention de créateurs de street art confirmés, à l’image des initiateurs du projet Thamud, Fouad Abid et Amine Hannaoui, ou encore d’Amine Benbaba, alias Senzo. «On leur explique la différence entre le vandalisme et le street art et dans quel contexte cette pratique est arrivée au Maroc. On leur parle de la place de la femme dans le street art. C’est vrai que dans ce domaine, au Maroc, il n’y a pas encore beaucoup d’artistes féminines, mais les choses commencent à changer.»
Les pauses qui jalonnent le parcours permettent aux participants de reprendre leur souffle et d’admirer les différentes fresques, plus impressionnantes les unes que les autres. «Les façades qui plaisent le plus sont souvent les plus colorées. Mais lorsque l’on s’arrête devant une façade un peu plus sobre, je vois qu’ils montrent davantage d’intérêt quand je raconte une anecdote sur la fresque ou sur le parcours de l’artiste», explique Senzo à Arab News en français.
Le fabuleux destin de Senzo
C’est en 2015 que Senzo pose ses valises au Maroc. Une étape que le jeune homme n’avait pas prévue… Ce natif de Brive avait pour projet initial de s’installer au Royaume-Uni. «J’avais tout préparé pour aller à Londres avec mon collègue Fouad, avec qui je peignais déjà à l’époque. Mais on voulait passer quelques jours au Maroc. On en a profité pour faire quelques fresques. La première d’entre elles, sur le boulevard Al-Massira, a suscité un fort engouement. On ne s’y attendait pas. Le street art alors n’était pas développé, alors, au Maroc. De retour en France, on a réfléchi et, finalement, on est revenus au Maroc. À nouveau, notre travail a plu et a créé le buzz.»
Amine Benbaba opte pour sa passion et travaille quelque temps dans les hôpitaux. Il y organise des ateliers artistiques pour les enfants malades avant de rejoindre Casablanca quelques années plus tard.
Passionné de dessin, Amine Benbaba se prédestinait à une tout autre carrière: celle de comptable. Pourtant, atteint d’hémiplégie dès l’enfance, il dessine presque sans arrêt pendant ses jeunes années. Durant sa scolarité, son talent est remarqué par ses professeurs. Finalement, le Franco-Marocain opte pour sa passion et travaille quelque temps dans les hôpitaux. Il y organise des ateliers artistiques pour les enfants malades avant de rejoindre Casablanca quelques années plus tard.
Depuis, Senzo et ses collègues street artists ont créé leur propre société dans leur pays d’origine. Ils ont ainsi permis à de nombreux jeunes de se lancer au Maroc dans cet art de rue. «Sur la vingtaine d’artistes qui ont travaillé avec nous, dix sont déjà indépendants, vivent du street art, voyagent… Notre objectif est de permettre à tous ces artistes de se faire connaître à l’international, d’avoir une belle carrière et de voler de leurs propres ailes», raconte-t-il avec fierté.
Démocratiser le street art
Par ailleurs, à travers l’association «Alouane Bladi», créée en 2019, Senzo et son équipe espèrent démocratiser le street art à travers tout le Maroc. Ils organisent plusieurs fois par an des ateliers artistiques et des interventions dans les écoles et les orphelinats du pays.
En parallèle, le collectif propose toute l’année aux amateurs de vélo et de culture de s’inscrire auprès de l’Institut français pour suivre le chemin du Street Art Tour. L’occasion de découvrir, à l’occasion d’une excursion à deux roues, les œuvres gigantesques qui ont redonné de la couleur aux murs de la ville blanche.