MALINDI: Les enquêteurs redoutaient de découvrir de nouvelles victimes mardi dans la forêt de Shakahola, dans l'est du Kenya, où les recherches se poursuivaient dans l'enquête sur la mort de 73 membres présumés d'une secte prônant le jeûne extrême.
Le macabre décompte de ce qui est désormais appelé le "massacre de la forêt de Shakahola" n'a cessé d'augmenter ces derniers jours.
Lundi soir, des sources policières ont fait état de 73 morts, après la découverte de nouveaux corps dans des fosses communes.
Le président William Ruto a qualifié de "terroriste" le "pasteur" de ce groupe appelé Eglise Internationale de Bonne Nouvelle (Good News International Church), Paul Mackenzie Nthenge, qui prônait de jeûner pour rencontrer Jésus. M. Ruto a promis des mesures contre ceux "qui veulent utiliser la religion pour faire avancer une idéologie louche et inacceptable".
Les enquêteurs sont à la recherche de dizaines de fosses communes dans une vaste zone de 325 hectares, située dans une forêt non loin de la ville côtière de Malindi.
"Nous pensons qu'il y en a plus", a déclaré le chef de la police kényane Japhet Koome, qui s'est rendu sur place lundi.
Une équipe est également chargée de rechercher d'éventuels survivants. Lundi à la mi-journée, 29 personnes avaient été retrouvées et hospitalisées depuis le début des recherches, a affirmé M. Koome.
"Chaque jour qui passe, il y a une très forte possibilité que d'autres meurent", a déclaré à l'AFP Hussein Khalid, le directeur exécutif de l'ONG Haki Africa qui avait alerté la police sur les agissements de l'Eglise Internationale de Bonne Nouvelle.
"L'horreur que nous avons vue ces quatre derniers jours est traumatisante. Rien ne vous prépare à des fosses peu profondes contenant des enfants", a-t-il ajouté
Un enquêteur a déclaré à l'AFP que jusqu'à six personnes étaient enterrées dans la même tombe, tandis que d'autres corps ont été retrouvés à même le sol.
Failles
Selon la Croix Rouge kényane, 212 personnes ont été signalées disparues à son bureau de recherche installé sur place.
Le ministre de l'Intérieur, Kithure Kindiki, est attendu mardi sur le site des recherches.
Cette affaire suscite de nombreuses interrogations sur des failles de la part des autorités policières et judiciaires, qui connaissaient ce "pasteur" depuis plusieurs années.
Ancien chauffeur de taxi qui avait créé son église en 2003, Paul Mackenzie Nthenge avait été arrêté en 2017, accusé de "radicalisation" car il prônait de ne pas mettre les enfants à l'école, affirmant que l'éducation n'est pas reconnue dans la Bible.
Il avait à nouveau été arrêté en mars après que deux enfants étaient morts de faim sous la garde de leurs parents, qui les avaient ensuite enterrés. Il avait été libéré contre une caution de 100 000 shillings kényans (environ 670 euros).
Il est en détention après s'être rendu à la police le 14 avril, après le début des recherches dans la forêt de Shakahola. Il a comparu le lendemain devant un tribunal, et doit à nouveau être entendu le 2 mai.
Ce scandale a également ravivé également le débat sur le contrôle des cultes au Kenya, pays majoritairement chrétien, où des "pasteurs", "Eglises" et autres mouvements religieux marginaux défraient la chronique.
M. Kindiki a affirmé dimanche que ce massacre devait amener à "non seulement à la plus sévère des punitions pour le ou les auteurs de l'atrocité (...), mais aussi à une réglementation plus stricte (y compris l'auto-réglementation) de chaque église, mosquée, temple ou synagogue à l'avenir".