Irak: pour la postérité, des témoins de l'enfer djihadiste face caméra

Une femme irakienne se prépare à partager ses souvenirs de ce qu'elle a enduré sous le groupe État islamique (EI), lors d'un entretien filmé avec les membres du projet Mosul Eye, à Mossoul, le 27 février 2023. (AFP).
Une femme irakienne se prépare à partager ses souvenirs de ce qu'elle a enduré sous le groupe État islamique (EI), lors d'un entretien filmé avec les membres du projet Mosul Eye, à Mossoul, le 27 février 2023. (AFP).
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Publié le Lundi 27 mars 2023

Irak: pour la postérité, des témoins de l'enfer djihadiste face caméra

  • Moslem Hmeid, 27 ans, est l'un des quelque 70 témoins à avoir accepté de revivre leur quotidien sous la férule du groupe Etat islamique (EI)
  • A l'été 2014, le groupe ultra-radical s'était emparé de Mossoul et de la province de Ninive, dans le nord de l'Irak, avant d'être vaincu fin 2017 par l'armée irakienne et une coalition internationale

MOSSOUL : Devant la caméra, Moslem Hmeid raconte comment à l'été 2014 il a vu défiler les camions des djihadistes enlevant des femmes yazidies. Son témoignage de la terreur sous le joug de l'EI compte parmi d'autres que recueille une ONG irakienne... pour ne pas oublier.

Moslem Hmeid, 27 ans, est l'un des quelque 70 témoins à avoir accepté de revivre leur quotidien sous la férule du groupe Etat islamique (EI).

A l'été 2014, le groupe ultra-radical s'était emparé de Mossoul et de la province de Ninive, dans le nord de l'Irak, avant d'être vaincu fin 2017 par l'armée irakienne et une coalition internationale.

Mais dans les esprits, les traumatismes restent vivaces. En témoignent les entretiens qu'enregistre l'ONG Mosul Eye jusqu'à fin avril. Conservés à l'université de Mossoul, ils seront accessibles aux chercheurs et aux générations futures.

L'EI déferle en août 2014 au Sinjar et Moslem Hmeid et sa famille endurent cinq mois durant le joug djihadiste avant de s'enfuir. Cette région est le foyer historique de la minorité yazidie, adepte d'une religion ésotérique monothéiste considérée comme "hérétique" par l'EI.

L'étudiant en droit se souvient d'une "première semaine sanglante, impossible à effacer des mémoires". "Une fois j'ai vu deux ou trois camions, remplis de femmes. Quelques hommes, mais principalement des jeunes femmes, âgées de 17 à 30 ans, peut-être", confie-t-il à l'AFP.

Les villages yazidis sont vidés. Les femmes sont kidnappées et réduites à l'esclavage sexuel, les hommes tués et "ceux qui le pouvaient s'enfuient vers les montagnes", poursuit ce père de deux enfants.

«Rouvrir les blessures»

Les habitants qui ne sont pas yazidis assistent impuissants au drame. "Voir une telle catastrophe arriver à ton voisin et ne pas pouvoir l'aider... On avait le coeur brisé. Psychologiquement, on était effondré", lâche M. Hmeid.

Avec trois frères militaires recherchés par les djihadistes, sa famille fuit en Turquie.

Depuis lors, l'ONU et plusieurs pays, dont l'Allemagne, ont reconnu que les crimes de l'EI à l'encontre des Yazidis constituaient un "génocide".

"En abordant ces sujets, nous allons rouvrir des blessures", admet M. Hmeid. Mais "les prochaines générations doivent savoir très exactement ce qui s'est passé."

Mossoul, Sinjar, les villages chrétiens de Hamdaniya ou Baachiqa: les récits de vie glanés à travers Ninive brossent un portrait multidimensionnel des exactions djihadistes. Mais aussi de la vie d'avant et d'après.

Les plus jeunes témoins ont 10 ans à peine, d'autres sont octogénaires. Il y a même le doyen de Baachiqa, 104 ans: "on lui a parlé, mais c'était difficile à cet âge", dit à l'AFP le responsable communication de Mosul Eye, Mohannad Ammar.

Finalisés fin avril, les entretiens, dont la longueur varie d'une heure à une heure et demie, seront déposés à la bibliothèque de l'université de Mossoul. Des copies seront conservées dans les locaux de Mosul Eye et à l'université américaine George-Washington.

"Nous avons voulu montrer au monde comment les habitants de Mossoul ont surmonté cette expérience", avance M. Ammar.

«Désespoir, soulagement»

Grâce à des financements de l'Agence américaine de développement USAID, Mosul Eye a appris à dix étudiants à filmer et mener les entretiens.

L'essentiel du travail se concentre à Mossoul, mais quelques témoignages proviennent d'autres provinces, comme Bassora (sud) ou Al-Anbar (ouest).

Le projet fait écho au militantisme de Mosul Eye. Quand Mossoul était aux mains des djihadistes, le compte Twitter du fondateur Omar Mohammed était pour le monde extérieur une lucarne sur le quotidien dans la ville.

Oum Mohamed, 55 ans, a elle aussi témoigné.

Une nuit de 2015, les djihadistes ont arrêté son fils Ahmed, ouvrier en bâtiment, 27 ans. Mohamed, de dix ans son cadet, rallie les rangs de l'EI pour retrouver son frère.

"Je lui ai dit: 'mon fils, ne les rejoins pas'. Il a dit: 'ça ne vous regarde pas, je vais aller chercher mon frère, entrer dans les prisons'", raconte-t-elle à l'AFP.

Ahmed est mort, Mohamed est parti "et n'est jamais revenu", déplore la quinquagénaire, foulard sombre sur les cheveux. "Ils ont senti qu'il n'était pas un des leurs, ils ont dû croire que c'était un espion".

Aujourd'hui prendre la parole a un effet cathartique.

"J'avais un volcan en moi", confie-t-elle. "Quand j'ai parlé, j'ai ressenti de la joie, de la tristesse, du désespoir, du soulagement."


Le prince héritier saoudien rassure la nation sur l’état de santé du roi lors d’une réunion du Conseil des ministres

Le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane a présidé la réunion du cabinet mardi (Photo, SPA).
Le prince héritier saoudien Mohammed ben Salmane a présidé la réunion du cabinet mardi (Photo, SPA).
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  • Le roi Salmane suit un traitement pour une inflammation des poumons
  • Le prince héritier a également informé le Conseil des ministres des résultats du sommet de la Ligue arabe

RIYAD: Le prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, a tenu des propos rassurants sur la santé du roi Salmane lors d’une réunion du Conseil des ministres aujourd’hui, rapporte l’agence de presse saoudienne (SPA).

Dimanche, le roi a subi des examens médicaux dans les cliniques royales du palais Al-Salam après avoir souffert de fortes fièvres et de douleurs articulaires, selon SPA.

On lui a diagnostiqué une inflammation des poumons et on lui a prescrit un traitement antibiotique au palais de Djeddah.

Le prince héritier a également informé le Conseil des ministres des résultats du sommet de la Ligue arabe, soulignant l’engagement du Royaume à l’égard des questions arabes, du développement de l’action commune, du renforcement de la sécurité régionale et de la défense des intérêts arabes.

Le ministre de l’Information, Salmane ben Youssef al-Dosari, a déclaré après la réunion que le Conseil avait discuté des activités récentes de l’État, en particulier des efforts visant à renforcer la coopération régionale et internationale.

Le Conseil a réaffirmé l’engagement du Royaume dans la coopération internationale en matière de lutte contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et la corruption.

Le Cabinet saoudien a également autorisé le ministre de l’Énergie, le prince Abdelaziz ben Salmane, à finaliser un protocole d’accord avec le Pakistan sur la coopération énergétique.

Le Cabinet a par ailleurs approuvé l’adhésion du Royaume à un accord international sur les zones humides d’importance internationale, notamment en tant qu’habitats pour les oiseaux d’eau.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Qui sont les chefs du Hamas visés par les mandats réclamés par le procureur de la CPI?

Ismail Haniyeh, chef du bureau politique du mouvement islamiste palestinien Hamas basé à Doha, alors qu'il s'adresse à la presse à Téhéran le 26 mars 2024, et présumé chef militaire palestinien du mouvement radical Hamas, Mohammed Deif (au centre) et chef de Yahya Sinwar, l'aile politique du mouvement palestinien Hamas dans la bande de Gaza (Photo, AFP).
Ismail Haniyeh, chef du bureau politique du mouvement islamiste palestinien Hamas basé à Doha, alors qu'il s'adresse à la presse à Téhéran le 26 mars 2024, et présumé chef militaire palestinien du mouvement radical Hamas, Mohammed Deif (au centre) et chef de Yahya Sinwar, l'aile politique du mouvement palestinien Hamas dans la bande de Gaza (Photo, AFP).
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  • Mechaal, M. Haniyeh, 60 ans, s'était fait connaître aux yeux du monde en 2006 en devenant Premier ministre de l'Autorité palestinienne
  • Chef des Brigades Ezzedine al-Qassam, la branche militaire du Hamas, c'est lui qui a annoncé dans un enregistrement diffusé par le mouvement, le 7 octobre au matin

JERUSALEM: Trois dirigeants du Hamas sont visés par des mandats d'arrêt réclamés par le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) pour des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité présumés commis depuis l'attaque sanglante du mouvement islamiste palestinien en territoire israélien le 7 octobre.

Voici leurs portraits:

Ismaïl Haniyeh, le leader politique:

Elu chef du bureau politique du Hamas en 2017 pour succéder à Khaled Mechaal, M. Haniyeh, 60 ans, s'était fait connaître aux yeux du monde en 2006 en devenant Premier ministre de l'Autorité palestinienne après la victoire surprise de son mouvement aux législatives.

Mais la cohabitation avec Fatah, le parti du président Mahmoud Abbas, fut de courte durée. Le Hamas l'a évincé par la force de la bande de Gaza en 2007, deux ans après le retrait unilatéral d'Israël de ce territoire.

M. Haniyeh, qui vit en exil volontaire entre le Qatar et la Turquie, plaide de longue date pour concilier résistance armée et combat politique au sein du mouvement, considéré comme "terroriste" par les Etats-Unis, l'Union européenne et Israël.

Connu pour son calme et son discours posé, M. Haniyeh, le visage rond encadré par une barbe poivre et sel, entretient de bonnes relations avec les chefs des différents mouvements palestiniens, y compris rivaux.

Il a été emprisonné à plusieurs reprises par Israël et expulsé pour six mois vers le sud du Liban.

Sur des images diffusées par les médias du Hamas peu après le déclenchement de l'attaque sanglante contre Israël, on peut voir M. Haniyeh discuter sur un ton jubilatoire avec d'autres chefs du Hamas, dans son bureau à Doha, en train de regarder le reportage d'une télévision arabe montrant des commandos du Hamas s'emparer de jeeps de l'armée israélienne.

Alors que plus de sept mois de guerre ont laissé des pans entiers de Gaza en ruines, M. Haniyeh a insisté à plusieurs reprises sur le fait que le groupe ne libérerait les otages que si les combats cessaient définitivement.

Mohammed Deif, le «chef d'état-major»?

Chef des Brigades Ezzedine al-Qassam, la branche militaire du Hamas, c'est lui qui a annoncé dans un enregistrement diffusé par le mouvement, le 7 octobre au matin, le début de l'opération "Déluge d'Al-Aqsa".

Sur l'enregistrement, illustré par une photo de Mohammed Deif dans la pénombre comme le fait toujours le Hamas pour qu'il ne soit pas identifié, on l'entend annoncer que "les positions et les fortifications de l'ennemi ont été visées par 5.000 roquettes et obus lors des 20 premières minutes" de l'attaque.

L'attaque a fait plus de 1.170 morts, majoritairement des civils, selon un bilan de l'AFP établi à partir de données officielles israéliennes. Le Hamas a pris en otage 252 personnes.

Celui que le Hamas présente comme "le chef d'état-major de la résistance" est une cible pour Israël depuis de nombreuses années. Il a échappé à au moins six tentatives d'élimination connues.

La plus récente a eu lieu en 2014 lorsqu'un raid aérien israélien le visant dans la bande de Gaza a entraîné la mort de son épouse et de l'un de leurs enfants.

Depuis près de 30 ans, l'homme, né en 1965 dans le camp de réfugiés de Khan Younès (sud de la bande de Gaza), est mêlé aux coups les plus durs portés contre Israël: enlèvements de soldats, attentats suicide, tirs de roquettes...

Désigné en 2002 à la tête de la branche armée du Hamas, après la mort de son prédécesseur Salah Chéhadé, tué dans un raid israélien, Mohammed Deif a une longue histoire militante et clandestine entamée dans les années 1980.

En 2000, au début de la Seconde Intifada dans les territoires palestiniens contre l'occupation israélienne, il s'est échappé -- ou a été libéré -- d'une prison de l'Autorité palestinienne de Yasser Arafat. Au grand dam des Israéliens qui l'avaient dans le collimateur.

Juste après son accession au commandement des Brigades al-Qassam, il est la cible d'une tentative d'élimination par Israël dont il sort grièvement blessé, une paraplégie étant évoquée mais non confirmée.

Il gagne chez ses ennemis le surnom de "chat aux neuf vies" et devient aux yeux des Palestiniens une figure légendaire, aussi résolu dans son combat contre Israël que mystérieux.

Il a été inscrit en 2015 sur la liste américaine des "terroristes internationaux".


Syrie: l'épouse du président Bachar al-Assad atteinte de leucémie

Asma Assad, épouse du président syrien Bashar al-Assad (Photo, AFP).
Asma Assad, épouse du président syrien Bashar al-Assad (Photo, AFP).
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  • Elle a précisé que l'épouse du président syrien, âgée de 48 ans, allait subir un traitement spécialisé
  • En août 2019, l'épouse du président syrien, mère de deux garçons et d'une fille, avait annoncé être totalement guérie d'un cancer du sein

BEYROUTH: L'épouse du chef de l'Etat syrien Bachar al-Assad, Asma, qui s'était rétablie d'un cancer du sein, est atteinte de leucémie, a annoncé mardi la présidence du pays ravagé par 13 ans de guerre.

"Après avoir présenté différents symptômes et signes cliniques, et à la suite d'une série d'examens médicaux, la première dame, Asma al-Assad, a été diagnostiquée d'une leucémie myéloïde aiguë", a indiqué la présidence dans un communiqué.

Elle a précisé que l'épouse du président syrien, âgée de 48 ans, allait subir un traitement spécialisé pendant lequel elle allait renoncer à ses engagements publics.

En août 2019, l'épouse du président syrien, mère de deux garçons et d'une fille, avait annoncé être totalement guérie d'un cancer du sein au terme d'un an de traitement.

Elle apparaît souvent, selon les images sur les réseaux sociaux, rendant visite à des blessés de guerre ou menant des activités caritatives, comme elle a accompagné le président syrien au cours de ses récentes visites à l'étranger.

Qualifiée de "Rose du désert" par le magazine américain Vogue avant le déclenchement de la guerre en Syrie en 2011, Asma al-Assad a ensuite été vivement critiquée pour son silence face à la répression sanglante des manifestations prodémocratie puis de la rébellion.

Plus d'un demi-million de personnes ont été tuées depuis le soulèvement pacifique de 2011 qui a dégénéré en guerre civile et a morcelé la Syrie.

Née en 1975 en Grande-Bretagne d'un père cardiologue et d'une mère diplomate, Asma al-Assad travaillait avant son mariage pour JP Morgan à Londres, où elle avait fait la connaissance de Bachar al-Assad.

En 2000, il avait succédé à son père, Hafez al-Assad, à la mort de ce dernier, et Asma avait tenté de moderniser l'image de la première dame syrienne, avant l'éclatement de la guerre.

Elle a fondé l'organisation caritative Syria Trust for Development, basée à Damas et qui est l'une des rares organisations de ce type autorisées à travailler dans les zones contrôlées par le gouvernement.

Au cours des dernières années, elle a également consolidé son influence sur les milieux d'affaires syriens, selon ses détracteurs.

"Le secteur humanitaire en Syrie est devenu de plus en plus rentable, en particulier pour des personnes sanctionnées comme Asma", écrivait en 2023 la revue économique en ligne Syria report.

Elle fait l'objet de sanctions américaines depuis 2020 dans le cadre de la "loi César", aux côtés d'autres personnes et entités parmi lesquelles le président syrien et de nombreux membres de sa famille.

Elle avait alors été présentée par le secrétaire d'Etat américain de l'époque, Mike Pompeo, comme "l'une des plus célèbres profiteuses de la guerre en Syrie".

César est le pseudonyme d'un ex-photographe de la police militaire syrienne qui a fait défection en 2013 en emportant 55.000 images illustrant la brutalité et les abus commis dans les prisons syriennes.