Dégradées, les nappes phréatiques françaises sont dans une situation préoccupante

Pour préserver les eaux souterraines, le BRGM a esquissé des pistes, comme de désimperméabiliser les sols pour favoriser l'infiltration des eaux ou recharger les nappes par des eaux «non-conventionnelles», y compris des eaux usées traitées. (Photo, AFP)
Pour préserver les eaux souterraines, le BRGM a esquissé des pistes, comme de désimperméabiliser les sols pour favoriser l'infiltration des eaux ou recharger les nappes par des eaux «non-conventionnelles», y compris des eaux usées traitées. (Photo, AFP)
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Publié le Lundi 13 mars 2023

Dégradées, les nappes phréatiques françaises sont dans une situation préoccupante

  • Pour février, «l'ensemble des nappes affichent des niveaux sous les normales et 80% des niveaux sont modérément bas à très bas», indique le Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM)
  • Le mois de février, qui selon Météo-France a été le 4e le plus sec en France depuis 1959 (...), a été particulièrement dommageable

PARIS: Une situation "inédite" et inquiétante: les nappes phréatiques de l'ensemble de la France sont à la fin de l'hiver "dégradées" et sous les normales, ce qui laisse augurer d'une probable sécheresse dans les prochains mois, estime lundi le BRGM, qui invite à la vigilance.

Pour février, "l'ensemble des nappes affichent des niveaux sous les normales et 80% des niveaux sont modérément bas à très bas", indique le Bureau des recherches géologiques et minières (BRGM).

Les zones du couloir rhodanien, du Limousin, des Causses et de la plaine du Roussillon sont particulièrement touchées, affichant des niveaux "rouge" et des nappes "très basses".

"On a déjà connu une situation avec beaucoup plus de points rouges" à cette époque, en 2012 et en 2017, "mais ce qui est inédit c’est que toute la France est touchée", a souligné Violaine Bault, hydrogéologue du BRGM, lors d'une conférence de presse.

Le mois de février, qui selon Météo-France a été le 4e le plus sec en France depuis 1959 avec notamment une série record de 32 jours sans précipitations entre le 21 janvier et le 21 février et un déficit global des précipitations dépassant les 75%, a été particulièrement dommageable, avec un "arrêt brutal de la recharge", note Mme Bault.

A l'issue de ce mois, les niveaux sont "généralement en baisse" sur les nappes réactives - les plus sensibles à la pluie - et ce alors que la période de recharge 2022-23 a débuté "avec un à deux mois de retard" et "reste déficitaire".

Restrictions d'eau

Pour les prochains mois, le BRGM fait état d'une "grande incertitude".

L'évolution des tendances "dépendra essentiellement de la pluviométrie", ajoute l'institut géologique, qui estime toutefois que "la reconstitution des stocks d'ici le printemps reste difficilement envisageable sur les nappes réactives affichant des niveaux très bas".

Est-ce à dire que l'été 2023 sera pire que celui de 2022, déjà marqué par une sécheresse exceptionnelle ?

La recharge pourrait reprendre dans certains secteurs en mars mais "les prochaines pluies auront probablement peu d'impact", dans la mesure où dès courant avril, la reprise de la végétation absorbera la majeure partie de l'eau.

"Là début mars il pleut mais il faut d’abord que ça humidifie les sols avant de permettre une infiltration vraiment en profondeur", note Mme Bault. Un processus d'autant plus long que la sécheresse des sols est déjà particulièrement marquée, selon Météo France, qui fait état d'une situation à fin février qui correspond à celle de mi-avril voir mi-mai pour certains secteurs.

Le BRGM souligne par ailleurs que les pluies de l'automne et de l'hiver, période de recharge essentielle pour la reconstitution des stocks, ont été "très insuffisantes pour compenser les déficits accumulés durant l'année 2022".

Donc s'il ne pleut pas abondamment dans les prochaines semaines alors que Météo France annonce pour les trois prochains mois des températures probablement plus chaudes que la normale, "on risque d'avoir toute la France concernée par des arrêtés de restriction d'eau", estime Violaine Bault.

Sobriété

Actuellement 14 départements sont déjà en vigilance ou en alerte, selon le site officiel Propluvia.

Le gouvernement s'apprête à lancer un plan pour améliorer la gestion de l'eau en France. Il sera publié "dans quelques jours", a promis samedi le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu.

Ce plan, censé tirer les leçons de la canicule historique de l'été 2022, "est très complet, il comporte une cinquantaine de mesures, il traite de la sobriété, de la quantité, de la qualité, des moyens financiers, de la gouvernance", a ajouté le ministre.

Pour préserver les eaux souterraines, le BRGM a esquissé des pistes, comme de désimperméabiliser les sols pour favoriser l'infiltration des eaux ou recharger les nappes par des eaux "non-conventionnelles", y compris des eaux usées traitées.

Il est aussi possible de limiter les prélèvements. "Faire des économies d'eau avec chaque petit geste qui permet d'économiser l'eau peut compter", affirme encore Violaine Bault.


Relations UE/Chine: Macron insiste sur la protection des «intérêts stratégiques» de l'Europe

Le président français Emmanuel Macron (CL) serre la main du Premier ministre japonais Fumio Kishida (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron (CL) serre la main du Premier ministre japonais Fumio Kishida (Photo, AFP).
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  • La visite d'Etat de XI Jinping vise à célébrer 60 ans de relations diplomatiques bilatérales
  • Les grandes crises internationales, et notamment la guerre en Ukraine, devraient également être au menu des discussions franco-chinoises

PARIS: L'Europe doit défendre ses "intérêts stratégiques" dans ses relations économiques avec la Chine, a déclaré jeudi le président Emmanuel Macron dans une interview à The Economist, à quelques jours d'une visite d'Etat en France du président chinois XI Jinping.

"Il faut être d'un grand pragmatisme et regarder cette question avec nos intérêts stratégiques", dit le chef d'Etat français, interrogé sur l'ouverture ou non du marché européen à la Chine.

"C'est un de mes objectifs principaux en accueillant le président Xi Jinping, il faut tout faire pour engager la Chine sur les grandes questions mondiales et avoir un échange sur nos relations économiques qui reposent sur la réciprocité", ajoute le président, qui accueillera son homologue chinois les 6 et 7 mai.

Et de citer le cas des voitures électriques chinoises, selon lui "taxées à 10%" sur le marché européen alors que leur production est "massivement aidée" par l'exécutif chinois. A l'inverse, les véhicules électriques européens, pour lesquels "l'Europe a des règles qui limitent les aides" à leurs producteurs, sont "taxés à 15%" sur le marché chinois.

Plan

"Aujourd'hui nous devons avoir sur le plan commercial avec la Chine un comportement respectueux, mais de défense de nos intérêts, de réciprocité et de sécurité nationale", insiste M. Macron, qui dit soutenir les enquêtes ouvertes par la Commission européenne sur le véhicule électrique, le photovoltaïque, l'éolien concernant des subventions chinoises soupçonnées de fausser la concurrence.

"Il ne faut pas oublier les enjeux de sécurité nationale", souligne M. Macron. "Il y a de nombreux secteurs pour lesquels la Chine exige que les producteurs soient chinois, parce qu'ils sont trop sensibles. Eh bien nous Européens, nous devons pouvoir faire la même chose."

La visite d'Etat de XI Jinping vise à célébrer 60 ans de relations diplomatiques bilatérales. Il s'agira du début de sa première tournée européenne depuis la pandémie de Covid-19, qui avait vu le géant asiatique couper longuement nombre d'interactions avec le reste du monde.

Les grandes crises internationales, et notamment la guerre en Ukraine, devraient également être au menu des discussions franco-chinoises.

"Notre intérêt est d'obtenir de la Chine qu'elle pèse pour la stabilité de l'ordre international. Ce n'est pas l'intérêt de la Chine aujourd'hui d'avoir une Russie déstabilisatrice de l'ordre international, d'avoir un Iran qui peut se doter de l'arme nucléaire et d'avoir un Moyen-Orient plongeant dans une forme de chaos. Il faut donc travailler avec la Chine pour construire la paix", affirme M. Macron.


Ukraine: Macron assume à nouveau la possibilité d'envoyer des troupes occidentales au sol

Le président français Emmanuel Macron (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron (Photo, AFP).
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  • Macron a créé la controverse fin février en affirmant que l'envoi de troupes occidentales sur le sol ukrainien ne devait pas «être exclu»
  • Ce débat doit dépasser l'Union européenne, avance encore le président français

PARIS: Emmanuel Macron a détaillé, dans The Economist, son plan pour éviter une mort "brutale" de l'Europe, assumant au passage sa position controversée sur la possibilité d'envoyer des troupes au sol en Ukraine, si Moscou allait "percer les lignes de front".

"Si les Russes devaient aller percer les lignes de front, s'il y avait une demande ukrainienne – ce qui n'est pas le cas aujourd'hui – on devrait légitimement se poser la question", a dit le président français dans un long entretien publié jeudi par l'hebdomadaire britannique.

Le chef de l'Etat français a créé la controverse fin février en affirmant que l'envoi de troupes occidentales sur le sol ukrainien ne devait pas "être exclu" à l'avenir. La plupart des pays européens, ainsi que les Etats-Unis, s'étaient nettement démarqués, même si certains ont depuis fait un pas en sa direction.

Dans The Economist, Emmanuel Macron affirme que la Russie "est rentrée dans une logique de guerre totale". Et il faut l'empêcher de gagner en Ukraine, faute de quoi "nous n'aurons plus de sécurité en Europe".

Plus largement, il inscrit cette question dans la nécessité d'aboutir à une "crédibilité militaire européenne", lors d'un débat qu'il a appelé de ses voeux il y a une semaine à la Sorbonne.

Dans ce discours, à l'approche des élections européennes de juin qui voient son camp largement distancé dans les sondages par l'extrême droite, il avait mis en garde: "l'Europe peut mourir".

Cette "mort" peut être "beaucoup plus brutale qu'on ne l'imagine", insiste-t-il jeudi. Selon lui, "un sursaut est possible" mais doit être "beaucoup plus profond" face à un "triple risque existentiel pour notre Europe": "militaire et de sécurité", "économique" et démocratique.

Sur la défense, les Européens doivent s'asseoir "autour de la table pour bâtir un cadre cohérent", plaide Emmanuel Macron. "L'Otan apporte une de ces réponses et il ne s'agit pas de balayer l'Otan. Mais ce cadre est beaucoup plus large", ajoute-t-il.

«Braqueurs»

Ce débat doit dépasser l'Union européenne, avance encore le président français, qui veut "arrimer la discussion dans le cadre de la Communauté politique européenne", ce nouveau format qu'il a inspiré pour inclure notamment Londres après le Brexit. "Ce serait une erreur d'exclure des pays qui ne sont pas dans l'UE", comme la Norvège, le Royaume-Uni ou les Balkans".

La réflexion doit aussi inclure l'arme nucléaire, dont la France et le Royaume-Uni sont dotés en Europe, réitère-t-il. Il propose que les partenaires européens "prennent en compte" cette "capacité" française, "sans pour autant la mutualiser".

Sur le plan économique, à la veille d'une visite d'Etat en France du président chinois Xi Jinping, lundi et mardi, Emmanuel Macron appelle l'Europe à défendre ses "intérêts stratégiques" et "les enjeux de sécurité nationale" au nom de la "réciprocité" dans ses relations commerciales avec Pékin. "Il y a de nombreux secteurs pour lesquels la Chine exige que les producteurs soient chinois, parce qu'ils sont trop sensibles. Eh bien nous Européens, nous devons pouvoir faire la même chose."

S'agissant de la "vulnérabilité démocratique", le chef de l'Etat, qui a promis de s'impliquer dans la campagne des européennes, lance enfin un avertissement aux électeurs: "la meilleure façon de construire ensemble, c'est d'avoir le moins de nationalistes possible".

"Je dis aux Européens: réveillez-vous!", "tous les nationalistes européens sont des brexiters cachés", ajoute-t-il, visant particulièrement l'extrême droite française.

Après avoir prôné la sortie de l'Europe, le Rassemblement national tire maintenant "les dividendes de l'Europe en voulant la détruire sans rien dire", accuse le président Macron. "C'est comme si on était en train de dire +ce n'est pas grave de confier la banque à des braqueurs+", ajoute-t-il.


Sciences Po: place au débat interne, après la mobilisation de soutien à Gaza

Des manifestants brandissent des pancartes du drapeau palestinien alors qu'ils manifestent près de l'entrée de l'Institut d'études politiques (Sciences Po Paris) occupé par des étudiants, à Paris, le 26 avril 2024 (Photo, AFP).
Des manifestants brandissent des pancartes du drapeau palestinien alors qu'ils manifestent près de l'entrée de l'Institut d'études politiques (Sciences Po Paris) occupé par des étudiants, à Paris, le 26 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • A Saint-Etienne, le blocage d'un des sites de l'université Jean Monnet par une quinzaine d'étudiants réclamant le cessez-le-feu à Gaza a repris jeudi matin
  • Des actions se sont multipliées en France ces derniers jours, principalement sur les sites de Sciences Po en régions, mais aussi dans quelques universités

PARIS: Sciences Po Paris a accueilli jeudi un débat interne sur le Proche-Orient, qualifié de "dur" et de riche en "émotion" par la direction, au moment où le gouvernement redouble de vigilance face à la multiplication d'actions en soutien à Gaza sur les campus français.

"Ça a été un débat dur, avec des prises de position assez claires, beaucoup d'émotion et donc j'aspire maintenant à ce que chacun retrouve le calme" avant les examens prévus lundi, a indiqué Jean Bassères, l'administrateur provisoire de la prestigieuse école parisienne.

Il a admis rester "extrêmement prudent sur la suite des événements", alors que la mobilisation se diffuse en France, en écho à la mobilisation croissante des campus aux Etats-Unis, marquée par le déploiement de la police sur plusieurs sites.

Le débat à peine fini, les organisations étudiantes mobilisées - Union étudiante et Solidaires - ont appelé à sit-in jeudi après-midi dans le hall d'entrée de Sciences Po.

L'administrateur provisoire a reconnu avoir "pris des positions assez fermes sur certains sujets", en refusant "très clairement la création d'un groupe de travail qui était proposé par certains étudiants pour investiguer nos relations avec les universités israéliennes".

"Après un début où les débats étaient apaisés, la tension est montée à la fin", a témoigné auprès de l'AFP Hugo, 22 ans, étudiant en master à Sciences Po, pour qui "la principale information est le refus du directeur de créer un groupe de travail pour réévaluer les partenariats de Sciences Po".

«Maintien de l'ordre»

"Il y avait des demandes claires et il n’y a pas eu de réponse claire", a regretté une étudiante en master d'urbanisme, qui a refusé de donner son nom, fustigeant "une mollesse de l'administration".

Après une mobilisation émaillée de tensions vendredi dernier, le mouvement avait été suspendu à Sciences Po Paris: la direction avait accepté d'organiser un débat interne "ouvert à toutes les communautés de Sciences Po", qualifié de "townhall", terme utilisé aux Etats-Unis pour une grande réunion publique.

Sur la demande des étudiants d'interroger les "partenariats de l’école avec les universités et organisations soutenant l’Etat d’Israël", la ministre de l'Enseignement supérieur Sylvie Retailleau avait répété jeudi matin qu'il était "hors de question que les universités prennent une position institutionnelle en faveur de telle ou telle revendication dans le conflit en cours au Proche-Orient".

La ministre a demandé aux présidents d'université de veiller au "maintien de l'ordre" public, en utilisant "l'étendue la plus complète des pouvoirs" dont ils disposent, notamment en matière de sanctions disciplinaires en cas de troubles ou de recours aux forces de l'ordre, lors d'une intervention en visioconférence au conseil d'administration de France Universités.

A l'issue de cet échange, France Universités, qui fédère 116 membres, dont 74 universités, a "salué la détermination de la ministre à porter une voie équilibrée et ferme pour un retour au calme".

Actions à Lille et Saint-Etienne 

Des actions se sont multipliées en France ces derniers jours, principalement sur les sites de Sciences Po en régions, mais aussi dans quelques universités. Le tout dans un contexte politique électrique, en pleine campagne des européennes, La France Insoumise étant notamment accusée par la droite d'"instrumentalisation" du mouvement.

Jeudi matin à Lille, l'institut d'études politiques est resté fermé et les accès à l'école supérieure de journalisme (ESJ) étaient bloqués et les cours annulés.

A Saint-Etienne, le blocage d'un des sites de l'université Jean Monnet par une quinzaine d'étudiants réclamant le cessez-le-feu à Gaza a repris jeudi matin, a constaté l'AFP. Ils n'ont pas trouvé d'accord avec la présidence de l'université pour l'organisation d'une conférence sur la situation à Gaza, selon un représentant étudiant.

La police était intervenue mardi sur ce site stéphanois pour déloger des militants pro-Palestiniens. La police est aussi intervenue lundi pour évacuer des manifestants de la Sorbonne après avoir déjà mis fin à une occupation nocturne d'un site de Sciences Po Paris la semaine dernière, les deux fois à la demande du Premier ministre Gabriel Attal.

Selon l'organisation étudiante Le Poing Levé, le campus Jourdan de l'Ecole normale supérieure (ENS) à Paris était bloqué jeudi, des étudiants appelant à un rassemblement sur le site à 15H00.