Entre la France et le Burkina, une relation historique en dents de scie

Luc Hallade, ambassadeur de France au Burkina Faso, et le général Laurent Michon, commandant de la force Barkhane (Photo, AFP).
Luc Hallade, ambassadeur de France au Burkina Faso, et le général Laurent Michon, commandant de la force Barkhane (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 20 février 2023

Entre la France et le Burkina, une relation historique en dents de scie

  • Le royaume Mossi devient un protectorat français en 1896
  • A son arrivée au pouvoir, Blaise Compaoré entame une normalisation des relations avec l'ex-puissance coloniale

OUAGADOUGOU:  L'armée burkinabè a annoncé dimanche la fin des opérations de la force française Sabre au Burkina Faso, dernier épisode d'une relation intime et souvent houleuse entre ce pays sahélien et l'ancienne puissance coloniale.

Voici les principaux événements ayant jalonné les relations, en dents de scie, entre les deux pays.

La «Haute-Volta» et les violences de la colonisation

Le royaume Mossi devient un protectorat français en 1896.

Le territoire alors dénommé "Haute-Volta" est intégré à l’Afrique occidentale française.

Au cours de la Première Guerre mondiale, les habitants de plusieurs régions se révoltent contre les recrutements forcés de tirailleurs par l’armée française. Environ 30.000 seront tués.

Dans le sillage de plusieurs pays d'Afrique francophone, la Haute-Volta accède à l’indépendance le 5 août 1960.

Sankara, pionnier de la lutte contre la «Françafrique»

Le capitaine Thomas Sankara accède au pouvoir par un putsch en 1983 et instaure un régime d’inspiration marxiste et "anti-impérialiste".

La Haute-Volta devient le Burkina Faso, la "patrie des personnes intègres" et entame sa "révolution", qui passe par une remise en cause des relations avec la France.

Lors d’une visite du président de la République François Mitterrand en 1986, Thomas Sankara critique violemment la politique française devant les caméras de télévision.

Un an plus tard, le leader révolutionnaire est assassiné avec douze de ses compagnons lors d'un coup d'État orchestré par son bras droit, Blaise Compaoré qui prend le pouvoir. L'an dernier, M. Compaoré a été condamné par contumace par la justice burkinabè à la prison à perpétuité pour son rôle dans cette affaire.

"Jusqu’à aujourd’hui, pour une bonne partie de l’opinion burkinabè, l’assassinat de Sankara a été orchestré depuis le fameux séjour de Mitterrand au Burkina Faso", rappelle l'expert burkinabè en relations internationales Oumarou Paul Koalaga.

"Parmi ceux qui se définissent aujourd’hui comme des révolutionnaires, beaucoup attendaient de prendre une revanche sur cette partie de l’histoire" souligne-t-il à l'AFP.

Entre 2018 et 2021, la France avait transmis à la justice burkinabè des documents déclassifiés sur cet assassinat.

La parenthèse dorée Compaoré

A son arrivée au pouvoir, Blaise Compaoré entame une normalisation des relations avec l'ex-puissance coloniale.

Il est élu pour la première fois à la présidence de la République en 1991, malgré une faible participation (25%).

Peu de temps après sa réélection en 1998, le célèbre journaliste Norbert Zongo est assassiné alors qu'il enquêtait sur la mort du chauffeur de François Compaoré, le frère du président.

Un crime qui soulève une vive émotion et entraîne des manifestations dans tout le pays.

"L'assassinat de Norbert Zongo ou de Thomas Sankara étaient des dossiers emblématiques en matière de droits humains et on n'a pas senti de soutien véritable de la France", souligne l'analyste Oumarou Paul Koalaga.

Après 27 ans de règne, Blaise Compaoré est finalement contraint de quitter le pouvoir par une insurrection populaire en 2014.

À l'aide de moyens militaires français, il est exfiltré vers la Côte d'Ivoire voisine, où il vit toujours.

"Pour une certaine opinion, c'est une complicité manifeste, et ça fait partie de certains éléments de justification des rapports difficiles avec la France qui existent aujourd'hui", résume Oumarou Paul Koalaga.

La difficile lutte contre le terrorisme

Dès 2008, des soldats français prennent position au Burkina Faso.

Les premières attaques jihadistes frappent le pays en 2015. L'une d'entre elles vise en mars 2018 l'ambassade de France à Ouagadougou, tuant huit militaires burkinabè.

L'insécurité grandissante conduit de nombreux expatriés français à quitter le Burkina Faso.

Depuis 2015, les groupes jihadistes progressent sur le territoire et multiplient les attaques contre les forces burkinabè et les exactions contre les populations civiles.

"La France est toujours perçue comme le colonisateur qui, malgré la présence d'une force spéciale, peine à aider le Burkina pour mettre fin aux attaques terroristes. Rester sous cette coupe est perçue par les jeunes comme une soumission qui perdure" pointe l'analyste Drissa Traoré.

Le coup d'État d’Ibrahim Traoré, nouvelle rupture

Le 30 septembre 2022, le capitaine Ibrahim Traoré prend le pouvoir par un putsch, soutenu par une large frange de la jeunesse qui exige une remise en question du partenariat avec l'ancienne puissance coloniale.

En janvier 2023, la France rappelle son ambassadeur au Burkina Faso, Luc Hallade, sur demande des autorités burkinabè.

Dans la foulée, le régime de Ouagadougou donne un mois aux forces françaises pour quitter le pays.

"Il existe des raisons légitimes de critiquer la politique française, mais pour les dirigeants, notamment le régime actuel, il suffit d'exhiber quelques situations, de dire qu'on est pro-Sankara et révolutionnaire, pour créer une certaine adhésion au sein de l'opinion. C'est devenu un fond de commerce, et ça fonctionne", estime l’analyste Oumarou Paul Koalaga.


Première mission du porte-avions nucléaire français Charles de Gaulle aux Philippines

Le 6 juillet 1999, un prototype du Rafale M02 effectue un appontage sur la piste du porte-avions nucléaire Charles de Gaulle à Brest (Photo Getty Images)
Le 6 juillet 1999, un prototype du Rafale M02 effectue un appontage sur la piste du porte-avions nucléaire Charles de Gaulle à Brest (Photo Getty Images)
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  • L'ambassadrice de France a jugé dimanche que ces exercices militaires étaient « encore plus importants » en raison de la montée des tensions en mer de Chine méridionale.
  • La France cherche à réaffirmer son poids dans la région Asie-Pacifique, où la Chine et les États-Unis sont en concurrence pour exercer leur influence.

SUBIC BAY FREEPORT ZONE PHILIPPINES : Le porte-avions nucléaire français Charles de Gaulle a effectué sa première mission aux Philippines, où l'ambassadrice de France a jugé dimanche que ces exercices militaires étaient « encore plus importants » en raison de la montée des tensions en mer de Chine méridionale.

« Compte tenu de la montée des tensions, il est d’autant plus important de défendre le droit international et la liberté de navigation, que ce soit en mer ou dans les airs », a déclaré l'ambassadrice Marie Fontanel sur le pont du porte-avions, dans la baie de Subic, au nord de Manille.

Le groupe aéronaval a rejoint la marine des Philippines vendredi pour ces exercices.

Constitué de quelque 3 000 marins, il avait quitté le port de Brest en novembre pour une mission de plusieurs mois en mer Rouge, dans l'océan Indien et dans le Pacifique, durant laquelle il doit intégrer régulièrement des frégates ou des sous-marins de pays étrangers.

La France cherche à réaffirmer son poids dans la région Asie-Pacifique, où la Chine et les États-Unis sont en concurrence pour exercer leur influence.

Les Philippines cherchent pour leur part à renforcer leurs relations avec leurs alliés face aux confrontations régulières entre Manille et Pékin concernant la mer de Chine méridionale. Pékin y revendique en effet la majeure partie de cette voie navigable stratégique.

En novembre, Manille avait annoncé l'achat à la France de 40 vedettes rapides de patrouille dans le cadre d'un accord de 440 millions de dollars (environ 420 millions d'euros).


L'écrivain Boualem Sansal a entamé une grève de la faim, a déclaré son avocat

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  • « Je suis inquiet pour sa santé, comme pour la possibilité même d'un procès équitable », a affirmé Me François Zimeray, avocat français de l'écrivain, confirmant une information du JDD.
  • Selon Me Zimeray, qui a expliqué ne pas avoir obtenu de visa pour se rendre en Algérie afin de voir son client, Boualem Sansal aurait pris cette décision « en raison des pressions exercées contre lui pour changer d'avocat ».

PARIS : L'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, incarcéré en Algérie depuis mi-novembre, a entamé lundi une grève de la faim, a indiqué son avocat dimanche à l'AFP, précisant tenir cette information d'une source judiciaire.

« Je suis inquiet pour sa santé, comme pour la possibilité même d'un procès équitable », a affirmé Me François Zimeray, avocat français de l'écrivain, confirmant une information du JDD.

Selon Me Zimeray, qui a expliqué ne pas avoir obtenu de visa pour se rendre en Algérie afin de voir son client, Boualem Sansal aurait pris cette décision « en raison des pressions exercées contre lui pour changer d'avocat ».

« Ni la pondération dans l'expression de sa défense, ni la retenue face à la campagne abjecte que j'ai subie dans certains médias algériens, ni le respect du cadre judiciaire de ce pays ne semblent avoir été appréciés par un régime qui persiste à me refuser le visa sans raison valable, privant Boualem Sansal de la défense de son choix », a martelé l'avocat.

Ce dernier a également affirmé que le protocole de soin suivi par Boualem Sansal avait été interrompu, alors que l'écrivain souffrirait d'un cancer, d'après des informations de presse.

Boualem Sansal est poursuivi en vertu de l'article 87 bis du Code pénal algérien, qui sanctionne comme acte terroriste ou subversif tout acte visant la sûreté de l'État, l'intégrité du territoire, la stabilité et le fonctionnement normal des institutions.

Selon le quotidien français Le Monde, le pouvoir algérien aurait mal pris les déclarations de Boualem Sansal au média français Frontières, réputé d'extrême droite, reprenant la position du Maroc selon laquelle le territoire de ce dernier pays aurait été amputé sous la colonisation française au profit de l'Algérie.

Son incarcération a provoqué les protestations de nombreux intellectuels et écrivains, qui estiment les poursuites sans aucun fondement.

Boualem Sansal a longtemps affirmé être né en 1949, ce qui lui donnerait aujourd'hui 75 ans. En décembre, son éditeur Antoine Gallimard avait pour sa part indiqué qu'il était en vérité né en 1944 et avait donc 80 ans.


Immigration : un conseil interministériel se réunit mercredi

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) serre la main d'un agent de la police nationale française dans une caserne de pompiers après une attaque au couteau à Mulhouse, dans l'est de la France, où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux agents de police, le 22 février 2025 (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) serre la main d'un agent de la police nationale française dans une caserne de pompiers après une attaque au couteau à Mulhouse, dans l'est de la France, où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux agents de police, le 22 février 2025 (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
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  • Ce conseil, qui était prévu avant l'attaque de Mulhouse, « se réunira ce mercredi », a déclaré Jean-Noël Barrot lors d'un entretien avec Europe 1 et CNews, où il était interrogé sur l'attaque de samedi.
  • Interrogé sur TF1, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué que le suspect faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et a accusé l'Algérie de l'avoir refoulé à 10 reprises.

PARIS : Le gouvernement français réunira un conseil interministériel de contrôle de l'immigration mercredi, alors qu'une attaque au couteau, perpétrée par un Algérien en situation irrégulière, a fait un mort samedi à Mulhouse, a assuré dimanche le ministre des Affaires étrangères.

Ce conseil, qui était prévu avant l'attaque de Mulhouse, « se réunira ce mercredi », a déclaré Jean-Noël Barrot lors d'un entretien avec Europe 1 et CNews, où il était interrogé sur l'attaque de samedi.

Au cours de l'entretien, le ministre a été interrogé sur les discussions avec ses homologues algériens concernant les obligations de quitter le territoire français (OQTF).

« Cette attaque terroriste nous appelle à amplifier encore la mobilisation qui est la nôtre pour mieux contenir et prévenir les conséquences de la présence de ce terroriste islamiste sur le territoire national », a estimé le ministre avant d'évoquer le conseil interministériel.

Interrogé sur TF1, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué que le suspect faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et a accusé l'Algérie de l'avoir refoulé à 10 reprises.

Le Premier ministre, François Bayrou, a d'ailleurs convoqué un conseil interministériel de contrôle de l'immigration ce mercredi. « Nous devons faire plus et nous devons faire mieux », a-t-il déclaré.

M. Barrot a également affirmé avoir demandé « aux 19 ambassadeurs, dans les pays où nous rencontrons le plus de difficultés pour renvoyer les étrangers en situation irrégulière, à me faire un rapport circonstanciel dont je présenterai les résultats ce mercredi au Premier ministre pour que nous puissions prendre des mesures fortes ».

« Il y a des pays vis-à-vis desquels il nous faut effectivement prendre des mesures fortes. Il y en a d'autres où, au contraire, il nous faut des mesures d'accompagnement », a-t-il ajouté.