PARIS: Bientôt en première ligne sur deux dossiers brûlants, retraites et immigration, le Sénat, à majorité de droite, se prépare en coulisses au renouvellement de la moitié de ses sièges, en septembre. L'élection ne devrait pas renverser les rapports de force, mais pourrait voir émerger Horizons.
Des chiffres et des lieux
170 sièges sur 348 sont renouvelables en 2023, dont celui de Gérard Larcher (LR), que tous au palais du Luxembourg s'accordent à voir réélu président. 5 des huit présidents de groupes sont aussi concernés: Patrick Kanner (PS), Hervé Marseille (centriste), Eliane Assassi (CRCE à majorité communiste), Jean-Claude Requier (RDSE à majorité radicale) et Guillaume Gontard (écologiste).
La série renouvelable comporte les départements du 37 (Indre-et-Loire) au 66 (Pyrénées-Orientales) ainsi que Paris et l'Ile-de-France, six territoires d'outre-mer et six (sur 12) sénateurs représentant les Français de l'étranger.
Le groupe qui compte le plus de sièges renouvelables (11 sur 15) est le CRCE. Les écologistes sont les moins concernés (4 sur 12).
Une droite forte sur ses appuis
Les sénateurs interrogés tablent sur une grande stabilité.
Le principe du renouvellement partiel tous les trois ans - un sénateur est élu pour 6 ans - garantit de fait une forme de continuité. Le suffrage universel indirect lui donne aussi une certaine prévisibilité.
"Le corps électoral (très majoritairement des élus locaux, ndlr) est identique au précédent renouvellement qui ne nous a pas été défavorable, au contraire", souligne le chef de file des Républicains Bruno Retailleau.
"Il y a des grands élus, très rares, qui ont pu basculer vers Horizons, vers la macronie", reconnait-il, tout en prévoyant "une ambiance politique difficile pour le pouvoir" en septembre, à la suite de la réforme des retraites et en raison de "divisions profondes par exemple entre Horizons et Renaissance".
Du nouveau à l'horizon
Côté majorité présidentielle, François Patriat, un des derniers rescapés des macronistes de la première heure, a tiré le premier. Il a déjà annoncé réinvestir 11 des 12 sortants (un ne se représente pas) de son groupe RDPI à majorité Renaissance.
"Nous sommes 24 sortants de la majorité présidentielle", calcule-t-il. "On est quand même bien capable de dire qu'on reconduit nos sortants, qu'on ne va pas aller se faire du gras les uns sur les autres", ajoute-t-il.
Mais Horizons, l'allié de Renaissance, a particulièrement mal pris cette décision hâtive. Le parti d’Edouard Philippe entend en effet bien faire sa pelote lors de cette élection.
Il ne part pas de rien, avec déjà la moitié du groupe Les Indépendants (14 membres) de Claude Malhuret qui sont Horizons, et d'autres ailleurs qui ne sont pas encore sortis du bois.
Avec plusieurs maires de grandes villes passés de LR à Horizons, comme Arnaud Robinet à Reims, le parti d'Edouard Philippe peut aussi espérer de nouveaux élus.
A gauche, la question de LFI
En force à l'Assemblée, La France insoumise ne compte aucun élu au Sénat, et l'élection de septembre ne devrait pas changer grand-chose, ou alors à la marge, faute d'ancrage territorial et du peu d'empressement de Patrick Kanner vis-à-vis de la Nupes.
A gauche, les accords devraient donc essentiellement se jouer entre le PS, les communistes et les écologistes.
"Avec de bons accords", Patrick Kanner espère que la gauche puisse "dépasser le seuil de 100 sénateurs".
L'inquiétude se cristallise sur le groupe CRCE et le sort de ses sièges renouvelables en région parisienne, où son ancrage territorial s'est effrité. "Ce serait une aberration que le groupe CRCE disparaisse et il ne disparaitra pas", veut croire Patrick Kanner.
Le jeune groupe écologiste pourrait lui tirer son épingle du jeu, même si la répartition géographique des sièges renouvelables ne lui est pas aussi favorable qu'en 2020.
Des élus RN ?
Le Sénat a compté jusqu'à deux élus Front national. Fortement représenté au palais Bourbon, le Rassemblement national n'a plus aucun élu au palais du Luxembourg depuis le passage de Stéphane Ravier à Reconquête! A-t-il cette fois des chances ? Le parti de Marine Le Pen peut capter des voix, voire gagner deux ou trois sièges, estiment généralement les sénateurs interrogés.