PÉKIN: Les Etats-Unis ont rejoint un nombre croissant de pays ayant décidé d'imposer des contrôles aux passagers en provenance de Chine, après la levée de ses restrictions sanitaires, des précautions que le chef de l'OMS a jugé "compréhensibles".
Dans la journée, une agence européenne pour la santé, le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), a toutefois estimé que la mise en place d'un dépistage dans l'UE serait pour l'heure "injustifié".
Trois ans après l'apparition des premiers cas de coronavirus à Wuhan (centre), la Chine a mis fin sans préavis le 7 décembre à sa politique draconienne dite du "zéro Covid".
Elle a permis depuis 2020 à la population d'être largement protégée du Covid, grâce à des tests de dépistage généralisés, un suivi strict des déplacements mais également des confinements et quarantaines obligatoires dès la découverte de cas.
Ces mesures draconiennes, qui tenaient le pays largement isolé du reste de la planète, ont porté un rude coup à la deuxième économie mondiale et provoqué en novembre des manifestations de mécontentement inhabituelles.
Depuis la levée des restrictions, les hôpitaux chinois sont submergés par une déferlante de malades pour la plupart âgés, et vulnérables car peu ou pas vaccinés.
En dépit du rebond épidémique, les autorités vont cesser le 8 janvier les quarantaines obligatoires à l'arrivée en Chine, et autoriser les Chinois à voyager à l'étranger, après trois ans de frustrations.
Par précaution, les Etats-Unis et plusieurs pays, dont l'Italie et le Japon, ont annoncé qu'ils exigeraient des tests négatifs des passagers provenant de Chine.
Ces mesures sont "compréhensibles" au vu du manque d'informations fournies par Pékin, a estimé le chef de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus.
"En l'absence d'informations complètes venant de Chine, il est compréhensible que des pays prennent les mesures dont ils pensent qu'elles protègeront leurs population", a-t-il déclaré.
Pour l'ECDC, l'introduction d'un dépistage obligatoire de la Covid-19 au sein de l'Union européenne pour les voyageurs arrivant de Chine serait cependant "injustifiée".
Les pays de l'UE "ont des niveaux d'immunisation et de vaccination relativement élevés" et les "variants circulant en Chine circulent déjà dans l'UE", a affirmé l'ECDC dans un communiqué, expliquant qu'une telle mesure n'est pas nécessaire au niveau de l'Union européenne dans son ensemble.
Sans nommer explicitement de pays, Pékin a appelé jeudi à privilégier des mesures "scientifiques" qui n'entravent pas les échanges humains.
«Faits pour salir»
La Chine maintient ses frontières largement fermées aux ressortissants étrangers depuis 2020.
Le pays ne délivre plus de visas touristiques depuis bientôt trois ans et impose une quarantaine obligatoire à l'arrivée. Cette mesure d'isolement sera levée le 8 janvier mais un test de dépistage de moins de 48 heures sera toujours exigé.
En France, le président Emmanuel Macron a "demandé des mesures adaptées de protection" des Français au gouvernement.
A Bruxelles, une réunion informelle convoquée par la Commission européenne, visant à "une approche coordonnée" des Etats membres, n'a pas donné lieu à ce stade à une prise de décisions dans un sens ou un autre.
A l'aéroport international de Pékin-Capitale, la plupart des Chinois interrogés jeudi par l'AFP se montraient compréhensifs à l'égard des mesures prises vis-à-vis de la Chine.
"Chaque nation a ses propres inquiétudes et sa manière de se protéger", estime Huang Hongxu, 21 ans, soulignant que la propagation possible de nouveaux variants était une source de préoccupation.
"Ces mesures ciblant les passagers en provenance de Chine sont temporaires" et justifiées par "l'inquiétude" autour de la réouverture de la Chine, remarque Wu Jing, une Pékinoise.
«Discriminatoire»
Un voyageur a pour sa part qualifié ces mesures d'"inutiles" auprès de l'AFP.
"C'est un peu discriminatoire", souligne Hu, qui n'a pas souhaité donner son nom complet.
En Chine, "notre politique Covid pour les arrivées internationales est appliquée (de la même façon pour tous)", relève le jeune homme de 22 ans. "Pourquoi les autres pays doivent-ils accorder un traitement spécial aux arrivées de Chine?"
Sur le front épidémique en Chine, les hôpitaux luttent contre une recrudescence des cas qui touche le plus durement les personnes âgées.
A Shanghai, des journalistes de l'AFP ont vu jeudi des patients masqués être acheminés sur des civières vers un hôpital de la ville. Dans l'établissement, un malade s'est plaint d'avoir attendu quatre heures pour obtenir des médicaments.
En dépit du contexte, seuls 5.000 nouveaux cas et un décès ont été annoncés jeudi par le Centre chinois pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC). Des chiffres qui ne semblent plus refléter la réalité, les dépistages généralisés n'étant plus obligatoires.