Kurdes de France: une «émotion légitime» sur «une question non résolue»

Une manifestante en pleurs lors d’une manifestation en hommage aux victimes de la fusillade de la rue Enghien à Paris (Photo, AFP).
Une manifestante en pleurs lors d’une manifestation en hommage aux victimes de la fusillade de la rue Enghien à Paris (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 28 décembre 2022

Kurdes de France: une «émotion légitime» sur «une question non résolue»

  • Selon Boris James, la communauté kurde de France reste fortement marquée par l'attentat en 2013
  • «Ces violences qui ont pu être exercées dans le monde sur des individus de la communauté kurde se poursuivent»

PARIS: L'émotion provoquée en France par l'assassinat de trois Kurdes à Paris vendredi est "légitime" car liée à une question politique "qui n'est pas résolue", explique à l'AFP Boris James, maître de conférences à l'Université Paul-Valéry de Montpellier.

Selon lui, la communauté kurde de France reste fortement marquée par l'attentat en 2013 contre trois militantes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), ennemi juré de la Turquie considéré comme "terroriste" par Ankara comme par l'Union européenne.

Mais l'agression raciste de vendredi mis à part, c'est plus ce parti que la communauté kurde elle-même qui est objectivement ciblé par la Turquie du président Recep Tayyip Erdogan.

AFP: Le triple assassinat de vendredi semble pour l’instant une affaire de racisme isolé. Pourquoi l'émotion est-elle si grande chez les Kurdes de France ?

Boris James: L’émotion est tout à fait légitime pour beaucoup de raisons, notamment une atmosphère générale autour des Kurdes, une question politique qui n’est pas résolue. Ces violences qui ont pu être exercées dans le monde sur des individus de la communauté kurde se poursuivent. Le problème de la représentation politique et culturelle des Kurdes à l’échelle mondiale a pu susciter de la violence de la part des États centraux du Moyen-Orient - Turquie, Iran, Irak et Syrie. Quand on nait kurde, on vit avec cette idée que le fait de parler kurde, jouer de la musique kurde, avoir une vie communautaire kurde, fait qu’on est menacé pour ce que l'on est.

La communauté kurde en France semble en majorité d'origine turque, plus que des trois autres pays où ils sont aussi implantés. Est-ce le cas ?

Démographiquement, c’est clair. La majorité des Kurdes vivent en Turquie et les Kurdes qui se retrouvent en Europe en général et en France en particulier sont essentiellement venus de Turquie pour toutes sortes de raisons politiques et économiques.

En quoi l’assassinat de trois militants du PKK en 2013 est-il un marqueur fort ?

Il y a évidemment un parallèle vite établi entre l'événement de vendredi dernier et 2013, où on parle cette fois clairement d’une possible implication de l'extrême droite turque et des services de sécurité turcs. On n’a pas fait toute la lumière sur cet attentat et une partie du dossier est sous le sceau du secret défense dans le cadre d’une instruction qui n'aboutira pas complètement puisque le suspect est mort. Est-ce que les juges d’instruction anti-terroristes saisis depuis iront jusqu’au bout ? Le secret défense est là probablement pour contrôler ce qui va sortir de cette affaire.

Les Kurdes de France sont-ils réellement en danger ?

Je n’irai pas jusque-là. Il faut distinguer des événements liés à des gens agités, des nationalistes turcs qui peuvent vouloir en venir aux mains à certains moments, mais qui sont quantifiables, voire contrôlables, en tout cas j’ose l’espérer. Il y a forcément des effets de repli communautaire, de racisme. Mais en 2013, c'est autre chose : il y a un montage extrêmement complexe qui vise essentiellement non pas les Kurdes comme une communauté, mais une organisation kurde, le PKK. Le but était de le décapiter. On peut parler en revanche d’une forme de fusion entre les intérêts nationaux de l’État turc et ce que l’extrême droite turque se représente. Ce sont des discours, voire des actions qui se rejoignent.

Quand Ankara convoque l’ambassadeur de France en Turquie, de quoi s’agit-il ?

Erdogan fait un peu de politique intérieure. Il continue de raconter que la question kurde n’est qu’une affaire de terrorisme et non de construction politique de la Turquie contemporaine. Sur le plan de la relation bilatérale avec Paris, Emmanuel Macron est dans la position de l’épouvantail un peu facile. Il représente l'Occident sans être aussi puissant que les États-Unis. Sa relation avec Erdogan est polluée par de multiples dossiers, la Méditerranée orientale, l’Otan, l’Union européenne, la Syrie etc… Le tout alors que le bilan intérieur d’Erdogan est marqué par une inflation galopante et une économie en berne.


Un influenceur franco-iranien jugé en juillet pour apologie du terrorisme

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
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  • La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels
  • Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient

BOBIGNY: Un influenceur franco-iranien sera jugé début juillet devant le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour apologie du terrorisme, ont indiqué jeudi à l'AFP le parquet et ses avocats.

Shahin Hazamy, 29 ans, s'est vu "délivrer une convocation à une audience du 3 juillet pour apologie du terrorisme par un moyen de communication en ligne en public", a déclaré le parquet, confirmant son arrestation mardi révélée par le magazine Le Point.

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels.

Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient.

"En s'en prenant à un journaliste la justice envoie un très mauvais signal à la liberté de la presse. Notre client Shahin Hazamy a subi un traitement inadmissible, avec une perquisition devant ses enfants en bas âge alors que les faits reprochés ont bientôt deux ans", ont déclaré à l'AFP ses avocats Nabil Boudi et Antoine Pastor.

Ces poursuites font suite à l'arrestation fin février d'une autre Iranienne en France, Mahdieh Esfandiari, actuellement écrouée pour apologie du terrorisme dans le cadre d'une information judiciaire confiée au Pôle national de lutte contre la haine en ligne (PNLH).

Annonçant cette nouvelle arrestation en France d'un de ses ressortissants, la télévision d'Etat iranienne a fustigé mercredi une "violation flagrante de la liberté d'expression dans un pays qui prétend être une démocratie".


Macron appelle à intégrer Mayotte dans la Commission de l'océan Indien

Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
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  • "Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo
  • Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale

ANTANANARIVO: Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores.

"Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo.

La COI réunit les États insulaires (Madagascar, Comores, Maurice, Seychelles et La Réunion pour la France) dans le sud-ouest de l'océan Indien.

Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale.

"L'implication de nos populations, l'intégration de toutes nos îles dans les efforts de la COI pour la prospérité et la sécurité, dans la pluralité de ses dimensions maritime, alimentaire et pour la santé sont dans l'intérêt de nos peuples et de la région", a insisté M. Macron.

Il a suggéré toutefois d'"avancer de manière pragmatique vers cet objectif", sans réclamer l'intégration pleine et entière immédiate de l'archipel.

"La France est le premier bailleur de la COI", a-t-il aussi souligné, en précisant que l'Agence française du développement (AFD) gérait un "portefeuille de 125 millions d'euros de projets" de l'organisation.

"La COI est un modèle de coopération (...) Aucune de nos îles ne peut relever seule le défi", a-t-il ajouté, évoquant un "océan Indien profondément bousculé" par les défis planétaires actuels.

"Ensemble, en conjuguant nos atouts (..) nous pouvons tracer une voie nouvelle singulière", a-t-il assuré.

L'Union des Comores s'oppose à l'intégration de Mayotte dans la COI car elle conteste la souveraineté de la France sur Mayotte, restée française lorsque l'archipel des Comores est devenu indépendant en 1975.

Mayotte, tout comme les îles Éparses, autre territoire français hérité de la colonisation et revendiqué par Madagascar, sont au cœur du canal du Mozambique, voie majeure de transport maritime qui renferme d'importantes réserves en hydrocarbures.


Narcobanditisme à Marseille: le ministre de l'Intérieur annonce 21 arrestations dans «le haut du spectre»

Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
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  • Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme"
  • Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail

MARSEILLE: Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a annoncé jeudi un coup de filet avec 21 interpellations de trafiquants appartenant au "haut du spectre" du narcobanditisme marseillais, lors d'un déplacement à Marseille.

Une opération "a eu lieu très tôt ce matin avec 21 interpellations liées au narcobanditisme, dans le haut de spectre, qui doit nous permettre de démanteler un réseau important sur Marseille", qui tenait la cité de la Castellane, dans les quartiers populaires du nord de la ville, a déclaré Bruno Retailleau lors d'une conférence de presse.

Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme", a insisté M. Retailleau.

Selon une source policière, cette enquête portait notamment sur du blanchiment.

Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail.

Au total, 170 enquêteurs ont été mobilisés pour ce coup de filet qui est, selon le ministre, "un coup dur", "sinon mortel", porté à ce réseau.

La cité de la Castellane, vaste ensemble d'immeubles blancs en bordure d'autoroute, est connue pour être un haut lieu marseillais de ces trafics de stupéfiants qui empoisonnent le quotidien des habitants. En mars 2024, Emmanuel Macron s'y était rendu pour lancer des opérations "place nette XXL" contre les trafiquants et depuis la présence policière y était quasi constante, mais si le trafic était moins visible il se poursuivait notamment via les livraisons.

Ce coup de filet n'a a priori "pas de lien" avec les récents faits visant des prisons en France, a également précisé le ministre.

Le ministre était à Marseille pour dresser un premier bilan des plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien, lancés en février, avec par exemple mercredi 1.000 fonctionnaires mobilisés dans les Bouches-du-Rhône qui ont procédé à 10.000 contrôles d'identité.

Au total, 106 personnes ont été interpellées, dont une trentaine d'étrangers en situation irrégulière, dans le cadre d'une opération "massive" et "visible".