Comment sortir du «cycle sans fin» des camps de migrants, démantelés puis se reformant ?

Leur camp en Seine-Saint-Denis démantelé, les exilés sont évacués par les forces de police (Photo, Christophe ARCHAMBAULT/AFP).
Leur camp en Seine-Saint-Denis démantelé, les exilés sont évacués par les forces de police (Photo, Christophe ARCHAMBAULT/AFP).
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Publié le Mardi 17 novembre 2020

Comment sortir du «cycle sans fin» des camps de migrants, démantelés puis se reformant ?

  • L'évacuation d'environ 2 400 exilés de leur campement, niché sous une bretelle d'autoroute en Seine-Saint-Denis, est tout sauf inédite
  • Un « cycle sans fin et destructeur », dénoncent mardi une trentaine d'organisations, dont Médecins sans frontières ou Emmaüs

PARIS: Un nouveau campement de migrants proche de Paris a été démantelé mardi matin. Un de plus qui se reformera inéluctablement, avertissent déjà experts et organisations humanitaires en appelant à réformer l'accueil et l'hébergement pour sortir d'un « cycle sans fin ».

L'évacuation d'environ 2 400 exilés de leur campement, niché sous une bretelle d'autoroute en Seine-Saint-Denis, est tout sauf inédite. Depuis la crise migratoire de 2015, c'est le 65e démantèlement de grande ampleur mené en Ile-de-France, pour près de 300 opérations dites de « mise à l'abri ». 

A chaque fois, un campement informel, très souvent insalubre, refait surface. Selon une étude associative, trois résidents sur quatre vivaient déjà auparavant dans un lieu démantelé.

Un « cycle sans fin et destructeur », dénoncent mardi une trentaine d'organisations, dont Médecins sans frontières ou Emmaüs. Les évacuations s'enchaînent, « malgré les dysfonctionnements du système d'hébergement qui les accompagne » et alors qu'elles « ont prouvé qu'elles étaient inefficaces ». 

« Nous demandons à ce qu'une vraie réflexion soit engagée » par les autorités « afin de trouver de nouvelles solutions », écrivent-elles. 

L'impasse est réelle. En cinq ans, le dispositif national d'accueil a plus que doublé, pour atteindre quelque 110 000 places, mais il augmente toujours moins vite que le nombre de demandeurs d'asile.

Et l'affichage de fermeté des autorités n'y change rien. Le préfet de police Didier Lallement affirmait fin janvier lors d'un autre démantèlement : « Nous ne recommencerons pas un cycle infini évacuations-réinstallations » qui serait « incompréhensible pour les citoyens ».

« Volonté politique »

Mais le tour de vis sécuritaire, qui concernait surtout Paris, n'a fait que repousser la situation de l'autre côté du périphérique, en Seine-Saint-Denis, où se forment depuis les campements.

Comment expliquer cette situation ?

D'abord le système « a du mal à suivre car il est sous-dimensionné ». Et puis « en France, il y a l'idée que c'est à l'Etat de gérer cette situation », là où chez le voisin allemand « les grandes associations humanitaires chrétiennes peuvent par exemple offrir une puissance d'accueil en cas de crise », avance François Héran, responsable de la chaire Migrations du Collège de France.

« C'est une volonté politique de laisser prospérer ce cycle infernal. Car après cinq ans, on ne peut pas dire qu'on est dépassés. On est sur une stratégie de dispersion permanente pour dissuader (les migrants) de venir », estime pour sa part Louis Barda, responsable des maraudes dans les campements pour Médecins du Monde.

Pour lui, « les campements sont la variable d'ajustement de la politique migratoire : quand on veut se montrer humaniste, on dit ‘regardez, on les met à l'abri’, quand on veut se montrer ferme on dit ‘on démantèle’ ».

Pourtant, juge Pierre Henry, ancien directeur général de l'organisation France terre d'asile, la politique du gouvernement n'est « en rien dissuasive, elle trimbale juste des gens qui se retrouvent dans l’errance ».

Une solution serait pour lui de créer une agence qui prendrait en charge les demandeurs d'asile « du début à la fin, y compris l'éloignement si besoin », pour fluidifier le système.

La rue, « passage privilégié »

Symbole de la paralysie, « la rue est devenue un passage privilégié pour avoir une place d'hébergement », regrette Pierre Henry. Selon lui, « moins d'une centaine de demandeurs d'asile » seulement ont obtenu un hébergement en 2019 « en passant par le circuit normal », en préfecture. 

Une situation qui pousse certaines associations militantes à monter des campements afin d'obtenir un hébergement d'urgence pour des exilés.

« Les tentes, ça focalise la discussion sur le premier accueil, alors qu'aujourd'hui la discussion principale devrait être celle de l'intégration des réfugiés, qu'on n'arrive pas à sortir des centres d'accueil et qui restent coincés dans des lieux qui ne sont plus faits pour eux », explique Didier Leschi, directeur de l'Office français de l'immigration et l'intégration (OFII).

Cette « embolie » fait qu' « on a toujours un effet retard », reconnaît le patron de l'OFII.

En moyenne, souligne-t-il, un réfugié reste 528 jours dans un centre d'accueil. Pour fluidifier la situation, les collectivités devraient davantage jouer le jeu, « car le logement de droit commun est une compétence partagée ».

En attendant une hypothétique réforme, prévient l'association Utopia56, présente sur le démantèlement mardi, « nous n'avons aucun doute sur le fait qu'un nouveau camp verra le jour dans les semaines à venir ».


Un influenceur franco-iranien jugé en juillet pour apologie du terrorisme

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
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  • La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels
  • Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient

BOBIGNY: Un influenceur franco-iranien sera jugé début juillet devant le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour apologie du terrorisme, ont indiqué jeudi à l'AFP le parquet et ses avocats.

Shahin Hazamy, 29 ans, s'est vu "délivrer une convocation à une audience du 3 juillet pour apologie du terrorisme par un moyen de communication en ligne en public", a déclaré le parquet, confirmant son arrestation mardi révélée par le magazine Le Point.

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels.

Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient.

"En s'en prenant à un journaliste la justice envoie un très mauvais signal à la liberté de la presse. Notre client Shahin Hazamy a subi un traitement inadmissible, avec une perquisition devant ses enfants en bas âge alors que les faits reprochés ont bientôt deux ans", ont déclaré à l'AFP ses avocats Nabil Boudi et Antoine Pastor.

Ces poursuites font suite à l'arrestation fin février d'une autre Iranienne en France, Mahdieh Esfandiari, actuellement écrouée pour apologie du terrorisme dans le cadre d'une information judiciaire confiée au Pôle national de lutte contre la haine en ligne (PNLH).

Annonçant cette nouvelle arrestation en France d'un de ses ressortissants, la télévision d'Etat iranienne a fustigé mercredi une "violation flagrante de la liberté d'expression dans un pays qui prétend être une démocratie".


Macron appelle à intégrer Mayotte dans la Commission de l'océan Indien

Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
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  • "Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo
  • Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale

ANTANANARIVO: Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores.

"Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo.

La COI réunit les États insulaires (Madagascar, Comores, Maurice, Seychelles et La Réunion pour la France) dans le sud-ouest de l'océan Indien.

Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale.

"L'implication de nos populations, l'intégration de toutes nos îles dans les efforts de la COI pour la prospérité et la sécurité, dans la pluralité de ses dimensions maritime, alimentaire et pour la santé sont dans l'intérêt de nos peuples et de la région", a insisté M. Macron.

Il a suggéré toutefois d'"avancer de manière pragmatique vers cet objectif", sans réclamer l'intégration pleine et entière immédiate de l'archipel.

"La France est le premier bailleur de la COI", a-t-il aussi souligné, en précisant que l'Agence française du développement (AFD) gérait un "portefeuille de 125 millions d'euros de projets" de l'organisation.

"La COI est un modèle de coopération (...) Aucune de nos îles ne peut relever seule le défi", a-t-il ajouté, évoquant un "océan Indien profondément bousculé" par les défis planétaires actuels.

"Ensemble, en conjuguant nos atouts (..) nous pouvons tracer une voie nouvelle singulière", a-t-il assuré.

L'Union des Comores s'oppose à l'intégration de Mayotte dans la COI car elle conteste la souveraineté de la France sur Mayotte, restée française lorsque l'archipel des Comores est devenu indépendant en 1975.

Mayotte, tout comme les îles Éparses, autre territoire français hérité de la colonisation et revendiqué par Madagascar, sont au cœur du canal du Mozambique, voie majeure de transport maritime qui renferme d'importantes réserves en hydrocarbures.


Narcobanditisme à Marseille: le ministre de l'Intérieur annonce 21 arrestations dans «le haut du spectre»

Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
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  • Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme"
  • Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail

MARSEILLE: Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a annoncé jeudi un coup de filet avec 21 interpellations de trafiquants appartenant au "haut du spectre" du narcobanditisme marseillais, lors d'un déplacement à Marseille.

Une opération "a eu lieu très tôt ce matin avec 21 interpellations liées au narcobanditisme, dans le haut de spectre, qui doit nous permettre de démanteler un réseau important sur Marseille", qui tenait la cité de la Castellane, dans les quartiers populaires du nord de la ville, a déclaré Bruno Retailleau lors d'une conférence de presse.

Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme", a insisté M. Retailleau.

Selon une source policière, cette enquête portait notamment sur du blanchiment.

Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail.

Au total, 170 enquêteurs ont été mobilisés pour ce coup de filet qui est, selon le ministre, "un coup dur", "sinon mortel", porté à ce réseau.

La cité de la Castellane, vaste ensemble d'immeubles blancs en bordure d'autoroute, est connue pour être un haut lieu marseillais de ces trafics de stupéfiants qui empoisonnent le quotidien des habitants. En mars 2024, Emmanuel Macron s'y était rendu pour lancer des opérations "place nette XXL" contre les trafiquants et depuis la présence policière y était quasi constante, mais si le trafic était moins visible il se poursuivait notamment via les livraisons.

Ce coup de filet n'a a priori "pas de lien" avec les récents faits visant des prisons en France, a également précisé le ministre.

Le ministre était à Marseille pour dresser un premier bilan des plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien, lancés en février, avec par exemple mercredi 1.000 fonctionnaires mobilisés dans les Bouches-du-Rhône qui ont procédé à 10.000 contrôles d'identité.

Au total, 106 personnes ont été interpellées, dont une trentaine d'étrangers en situation irrégulière, dans le cadre d'une opération "massive" et "visible".