À Washington, Macron met en garde les Etats-Unis contre une «fragmentation de l'Occident»

Le président français Emmanuel Macron s'exprime avec l'envoyé américain pour le climat John Kerry devant les membres du Congrès des États-Unis et les principales parties prenantes américaines sur le climat, à la Bibliothèque du Congrès, le 30 novembre 2022 (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron s'exprime avec l'envoyé américain pour le climat John Kerry devant les membres du Congrès des États-Unis et les principales parties prenantes américaines sur le climat, à la Bibliothèque du Congrès, le 30 novembre 2022 (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 01 décembre 2022

À Washington, Macron met en garde les Etats-Unis contre une «fragmentation de l'Occident»

  • Au premier jour d'un voyage officiel devant célébrer l'amitié franco-américaine, le président français n'a pas caché ses préoccupations
  • Soulignant que l'alliance avec les Etats-Unis était «plus forte que tout», il a cependant mis en garde contre le «risque» que «l'Europe et la France deviennent une sorte de variable d'ajustement»

WASHINGTON: Il s'est voulu "direct" au premier jour de sa visite d'Etat: Emmanuel Macron a déploré mercredi à Washington les mesures "super agressives" prises par Joe Biden pour doper l'industrie américaine, avant d'avertir qu'elles risquaient de "fragmenter l'Occident".

Au premier jour d'un voyage officiel devant célébrer l'amitié franco-américaine, le président français n'a pas caché ses préoccupations, d'abord lors d'un déjeuner avec des parlementaires américains.

Les subventions massives décidées par le président américain dans une grande loi économique et sociale appelée "Inflation Reduction Act" (IRA) sont "super agressives pour nos entreprises", a-t-il déploré, selon une journaliste de l'AFP présente dans la salle.

"Je ne veux pas devenir un marché pour les produits américains parce que j'ai exactement les mêmes produits que vous. J'ai une classe moyenne (qui doit) travailler et des gens qui doivent trouver du boulot. Et la conséquence de l'IRA est que vous allez peut-être régler votre problème mais vous allez aggraver le mien. Je suis navré d'être aussi direct", a déclaré Emmanuel Macron.

Le président français a réitéré ses inquiétudes dans la soirée lors d'un discours devant la communauté française à l'ambassade de France.

"Les choix faits, dont je partage les objectifs, en particulier l'IRA, sont des choix qui vont fragmenter l'Occident", a déclaré Emmanuel Macron.

«Variable d'ajustement»

Soulignant que l'alliance avec les Etats-Unis était "plus forte que tout", il a cependant mis en garde contre le "risque" que "l'Europe et la France deviennent une sorte de variable d'ajustement" de la rivalité entre les Etats-Unis et la Chine, les deux premières puissances mondiales.

La France voit avec inquiétude le patriotisme économique décomplexé dont fait preuve le président démocrate américain, qui s'est donné pour mot d'ordre "Made in USA".

Joe Biden entend en particulier doper la filière des véhicules électriques, dans une optique à la fois de relance de l'emploi industriel, de transition énergétique, et de compétition technologique avec la Chine.

Le président français a indiqué qu'il ne "croyait pas une seconde" à une volte-face américaine mais a plaidé pour une meilleure synchronisation entre les Etats-Unis et l'Europe.

La porte-parole de Joe Biden, Karine Jean-Pierre, a elle répété la position de Washington, à savoir que cet "Inflation Reduction Act" crée "des opportunités significatives pour les entreprises européennes et pour la sécurité énergétique européenne. Ce n'est pas un jeu à somme nulle".

La visite d'Etat d'Emmanuel Macron, premier dirigeant étranger à qui Joe Biden réserve cet honneur diplomatique, s'est poursuivie sur un ton plus solennel.

Le chef de l'Etat s'est rendu au cimetière national d'Arlington, où il a déposé une gerbe sur la tombe du soldat inconnu mais aussi une rose blanche sur la sépulture de Pierre Charles L'Enfant, l'architecte français qui a dessiné les plans de la capitale américaine.

Après une réunion sur le nucléaire civil et une rencontre avec la communauté française, Emmanuel et Brigitte Macron rencontreront Joe et Jill Biden pour un dîner se voulant intime, loin du faste protocolaire que va déployer jeudi la Maison Blanche pour le président français, entre coups de canon, réunion dans le Bureau Ovale et dîner de gala.

Le ministre français des Armées rencontre son homologue américain au Pentagone

Le ministre des Armées français Sébastien Lecornu a rencontré son homologue américain Lloyd Austin mercredi au Pentagone, ont annoncé les deux parties.

Les deux ministres "ont insisté sur l'importance d'entretenir la forte coopération bilatérale entre nos deux pays, et ont signé une déclaration d'intention qui codifie nos principes partagés", a déclaré le Pentagone dans un communiqué.

Pour le chef du Pentagone, le texte fait respecter "nos engagements dans le domaine du contre-terrorisme à travers le monde, de l'Afrique, à l'Indo-Pacifique", et renforce "notre coopération dans les domaines spatiaux et cyber".

Les deux ministres ont également évoqué le "soutien à l'Ukraine", et la force de l'Alliance de l'OTAN", précise le Pentagone.

Côté français, un communiqué du ministère des Armées souligne que cette déclaration d'intention "définit un haut niveau d'ambition pour la relation de défense entre la France et les Etats-Unis pour les années à venir".

"Elle approfondit et précise le cadre de nos coopérations opérationnelles, notamment dans l'Indo-Pacifique et en Afrique, afin de renforcer notre interopérabilité", précise-t-il.

Fromages américains

La First Lady a détaillé mercredi à la presse la réception qui sera donnée sous une grande tente dans les jardins de la Maison Blanche, une "expression de bienvenue et d'amitié". Les photographes ont pu mitrailler les tables chargées de fleurs blanches, bleues et rouges, ainsi que les plats prévus - homard, boeuf et fromages américains.

Elle a vanté les liens personnels entre les deux couples présidentiels et expliqué avoir eu une "connexion instantanée" avec Brigitte Macron en raison de leurs parcours professionnels similaires dans l'enseignement.

La soirée sera animée par Jon Batiste, jazzman de la Nouvelle-Orléans - où Emmanuel Macron se rendra vendredi. Ce chanteur et compositeur est aussi un artiste engagé pour la défense des droits des Afro-américains.

Côté américain, on espère tourner pour de bon la page de la grave crise diplomatique de l'an dernier.

En septembre 2021, les Etats-Unis annonçaient une nouvelle alliance, AUKUS, avec l'Australie et le Royaume-Uni, suscitant l'ire de la France, tenue à l'écart dans une région-clé du monde et qui perdait, au passage, un mégacontrat pour vendre des sous-marins à Canberra.

Outre la question du protectionnisme commercial, Joe Biden et Emmanuel Macron devraient aussi discuter jeudi des grands sujets internationaux: la Chine et l'Ukraine.


Un influenceur franco-iranien jugé en juillet pour apologie du terrorisme

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels. (AFP)
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  • La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels
  • Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient

BOBIGNY: Un influenceur franco-iranien sera jugé début juillet devant le tribunal de Bobigny (Seine-Saint-Denis) pour apologie du terrorisme, ont indiqué jeudi à l'AFP le parquet et ses avocats.

Shahin Hazamy, 29 ans, s'est vu "délivrer une convocation à une audience du 3 juillet pour apologie du terrorisme par un moyen de communication en ligne en public", a déclaré le parquet, confirmant son arrestation mardi révélée par le magazine Le Point.

La justice vise des propos tenus par l'influenceur sur l'attaque sanglante du Hamas le 7 octobre 2023, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des chiffres officiels.

Se présentant comme journaliste indépendant sur TikTok, où il est suivi par 330.000 abonnés, le mis en cause, qui s'est fait connaître avec une association d'aide aux plus démunis, y partage de nombreux contenus sur l'actualité du Moyen-Orient.

"En s'en prenant à un journaliste la justice envoie un très mauvais signal à la liberté de la presse. Notre client Shahin Hazamy a subi un traitement inadmissible, avec une perquisition devant ses enfants en bas âge alors que les faits reprochés ont bientôt deux ans", ont déclaré à l'AFP ses avocats Nabil Boudi et Antoine Pastor.

Ces poursuites font suite à l'arrestation fin février d'une autre Iranienne en France, Mahdieh Esfandiari, actuellement écrouée pour apologie du terrorisme dans le cadre d'une information judiciaire confiée au Pôle national de lutte contre la haine en ligne (PNLH).

Annonçant cette nouvelle arrestation en France d'un de ses ressortissants, la télévision d'Etat iranienne a fustigé mercredi une "violation flagrante de la liberté d'expression dans un pays qui prétend être une démocratie".


Macron appelle à intégrer Mayotte dans la Commission de l'océan Indien

Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores. (AFP)
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  • "Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo
  • Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale

ANTANANARIVO: Le président français Emmanuel Macron a demandé jeudi "l'intégration" du département français de Mayotte à la Commission de l'océan Indien (COI), en plaidant pour une "approche pragmatique" face à l'hostilité des Comores.

"Nous ne pouvons pas laisser un territoire et ceux qui y vivent à l'écart d'un certain nombre de nos programmes", a dit M. Macron, en citant expressément Mayotte, au cinquième sommet de la COI dans la capitale malgache Antananarivo.

La COI réunit les États insulaires (Madagascar, Comores, Maurice, Seychelles et La Réunion pour la France) dans le sud-ouest de l'océan Indien.

Mais à la différence de La Réunion, autre département français dans cette partie du monde, Mayotte reste à la porte de l'organisation intergouvernementale.

"L'implication de nos populations, l'intégration de toutes nos îles dans les efforts de la COI pour la prospérité et la sécurité, dans la pluralité de ses dimensions maritime, alimentaire et pour la santé sont dans l'intérêt de nos peuples et de la région", a insisté M. Macron.

Il a suggéré toutefois d'"avancer de manière pragmatique vers cet objectif", sans réclamer l'intégration pleine et entière immédiate de l'archipel.

"La France est le premier bailleur de la COI", a-t-il aussi souligné, en précisant que l'Agence française du développement (AFD) gérait un "portefeuille de 125 millions d'euros de projets" de l'organisation.

"La COI est un modèle de coopération (...) Aucune de nos îles ne peut relever seule le défi", a-t-il ajouté, évoquant un "océan Indien profondément bousculé" par les défis planétaires actuels.

"Ensemble, en conjuguant nos atouts (..) nous pouvons tracer une voie nouvelle singulière", a-t-il assuré.

L'Union des Comores s'oppose à l'intégration de Mayotte dans la COI car elle conteste la souveraineté de la France sur Mayotte, restée française lorsque l'archipel des Comores est devenu indépendant en 1975.

Mayotte, tout comme les îles Éparses, autre territoire français hérité de la colonisation et revendiqué par Madagascar, sont au cœur du canal du Mozambique, voie majeure de transport maritime qui renferme d'importantes réserves en hydrocarbures.


Narcobanditisme à Marseille: le ministre de l'Intérieur annonce 21 arrestations dans «le haut du spectre»

Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) s'entretient avec la présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence Martine Vassal et le président du Conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier lors d'une visite d'inspection des mesures de sécurité publique à Marseille. (AFP)
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  • Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme"
  • Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail

MARSEILLE: Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a annoncé jeudi un coup de filet avec 21 interpellations de trafiquants appartenant au "haut du spectre" du narcobanditisme marseillais, lors d'un déplacement à Marseille.

Une opération "a eu lieu très tôt ce matin avec 21 interpellations liées au narcobanditisme, dans le haut de spectre, qui doit nous permettre de démanteler un réseau important sur Marseille", qui tenait la cité de la Castellane, dans les quartiers populaires du nord de la ville, a déclaré Bruno Retailleau lors d'une conférence de presse.

Les personnes arrêtées sont de "hauts responsables qui tiennent un réseau à la Castellane", "pas du menu fretin", a-t-il insisté: ce "ne sont pas des petites mains, des charbonneurs, mais des responsables de haut niveau du narcobantitisme", a insisté M. Retailleau.

Selon une source policière, cette enquête portait notamment sur du blanchiment.

Toutes ces interpellations jeudi matin n'ont cependant pas eu lieu à Marseille, pour ce réseau qui présente des "ramifications nationales mais avec des racines marseillaises", a ajouté le ministre sans plus de détail.

Au total, 170 enquêteurs ont été mobilisés pour ce coup de filet qui est, selon le ministre, "un coup dur", "sinon mortel", porté à ce réseau.

La cité de la Castellane, vaste ensemble d'immeubles blancs en bordure d'autoroute, est connue pour être un haut lieu marseillais de ces trafics de stupéfiants qui empoisonnent le quotidien des habitants. En mars 2024, Emmanuel Macron s'y était rendu pour lancer des opérations "place nette XXL" contre les trafiquants et depuis la présence policière y était quasi constante, mais si le trafic était moins visible il se poursuivait notamment via les livraisons.

Ce coup de filet n'a a priori "pas de lien" avec les récents faits visant des prisons en France, a également précisé le ministre.

Le ministre était à Marseille pour dresser un premier bilan des plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien, lancés en février, avec par exemple mercredi 1.000 fonctionnaires mobilisés dans les Bouches-du-Rhône qui ont procédé à 10.000 contrôles d'identité.

Au total, 106 personnes ont été interpellées, dont une trentaine d'étrangers en situation irrégulière, dans le cadre d'une opération "massive" et "visible".