L'histoire de la contribution des immigrés arabes au sport en Amérique latine

Esporte Clube Sirio est un club sportif et social de premier plan à Sao Paulo, le centre financier du Brésil (Photo, Fournie).
Esporte Clube Sirio est un club sportif et social de premier plan à Sao Paulo, le centre financier du Brésil (Photo, Fournie).
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Publié le Samedi 26 novembre 2022

L'histoire de la contribution des immigrés arabes au sport en Amérique latine

  • Une génération d'immigrants a grandement contribué à populariser le basketball et le football sur le continent
  • Le documentaire «4 Colores» montre comment le football a favorisé le rapprochement entre les Chiliens et la cause palestinienne

SAO PAULO, BRÉSIL: La 15e meilleure joueuse de tennis au monde, la Brésilienne Beatriz Haddad Maia, a quitté l'US Open le 4 septembre après avoir été battue, avec sa partenaire kazakhe Anna Danilina, par le duo Nicole Melichar-Martinez et Ellen Perez.

Néanmoins, les Brésiliens ont développé une dévotion croissante pour Maia et nombreux espèrent qu'elle devienne la meilleure joueuse de tennis de l'histoire du pays.

Elle doit une partie de son succès à ses années de formation à l'Esporte Clube Sirio, un club sportif et social de premier plan à Sao Paulo, le principal centre financier du Brésil.

Fondé en 1917, le club est l'un des grands exemples de la contribution de la communauté arabe au sport en Amérique latine.

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Esporte Clube Sirio, un club sportif ayant des liens étroits avec la communauté arabe de Sao Paulo, a contribué à développer les compétences de la star du tennis Beatriz Haddad Maia (Photo, AFP).

Son premier complexe comprenait quatre courts de tennis, un terrain de basket, un terrain de football et un lac.

Le nombre de membres a augmenté très rapidement au fil des ans parmi les immigrants syriens et libanais — comme la famille Haddad — qui formaient une grande communauté à Sao Paulo, et le club est devenu riche. Les Brésiliens non arabes ont bientôt commencé à s'y joindre également.

En 1949, le Sirio avait acquis la réputation d'être l'un des meilleurs clubs sportifs de Sao Paulo et s'est établi à son emplacement actuel, dans la zone sud de la ville, en construisant un complexe moderne à partir de rien.

«J'ai rejoint Sirio quand j'étais enfant, en 1955. J'ai vu la plus grande partie de sa construction», a révélé Washington Joseph, 72 ans, connu sous le surnom de Dodi, à Arab News. «Mon frère et moi avons commencé à jouer le football, puis à pratiquer la gymnastique et le judo. À 11 ans, j'ai commencé à jouer au basketball.»

Entre 1967 et 1982, Dodi, petit-fils d'immigrés syriens et libanais, a été l'un des plus grands joueurs de basketball du Brésil et a fait partie de l'équipe mythique qui a conquis le championnat du monde en 1979.

Entre les années 1950 et 1980, le Sirio était l'une des principales équipes de basketball du Brésil. Nombre de ses joueurs étaient régulièrement appelés à jouer dans l'équipe nationale, qui était l'une des meilleures du monde à l'époque.

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En 2014, Palestino a décidé d'inclure sur son maillot la carte complète de la Palestine (avant la partition), en remplacement du numéro un (Photo, Fournie).

«Nous avons eu une hégémonie d'environ 30 ans. Nous avons remporté plusieurs tournois nationaux ainsi que le championnat sud-américain à six reprises», a affirmé Dodi.

Un autre club arabe, le Monte Libano de Sao Paulo, avait également une équipe de basketball très compétitive.

Sirio a participé à la Coupe Intercontinentale à six reprises et Dodi a fait partie de l'équipe à chaque fois, à l'exception de l'édition 1984. «Nous avons terminé deux fois à la troisième place, deux fois à la deuxième place et nous l'avons gagnée une fois, en 1979», a-t-il souligné.

Cette année-là, la coupe était organisée par le Brésil. Les matchs ont attiré des milliers de fans de basketball dans le stade et ont été télévisés dans tout le pays.

Sirio se rend en finale contre le club yougoslave Bosna. La spectaculaire victoire 100-98 des Brésiliens n'a jamais été oubliée.

«Notre génération a grandement contribué à populariser le basketball au Brésil», a signalé Dodi. Le Sirio est resté un club de basketball de premier plan jusqu'en 1995, lorsque le sport est devenu largement professionnel au Brésil et que ses dirigeants ont conclu qu'il ne serait plus possible de maintenir le niveau d'investissement nécessaire à son maintien au sommet.

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Gros plan sur un maillot représentant une carte de la Palestine. (Photo fournie).

Mais Sirio n'a jamais cessé d'être une école pour les nouveaux athlètes. Il a eu de grands champions comme l'haltérophile Tamer Chaim — qui a participé aux Jeux olympiques d'été de Munich — et le joueur de tennis William Kyriakos. 

«Nous avions aussi de grands combattants de judo et des équipes de handball et de volleyball de haut niveau. Nous continuons à faire autorité dans le domaine du sport», a signalé Dodi, ajoutant qu'un rival fréquent de Sirio est le Club Deportivo Palestino de Santiago du Chili.

Carlos Medina Lahsen, un Chilien d'origine palestinienne et expert de l'histoire de la Palestine, a déclaré à Arab News: «Surtout dans les années 1950, les matchs entre les deux clubs étaient très attendus.»

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Première composition de l'équipe du Club deportivo Palestino (1920) Elias Zaror, Miguel Saffie et Nicolas Hirmas, Rafael Hiramas, Elias Hirmas et Antonio Sarah, Jose Yunis, Victor Panayotti, Emillio Deik, Jorge Lama et Elias Deik. (Photo fournie)

Palestino a été fondé en 1920 en tant que club de football. En raison de l'influence britannique, les Palestiniens jouaient déjà au football au Moyen-Orient avant d'émigrer en Amérique latine, a expliqué Medina Lahsen.

«Des communautés d'étrangers ont commencé à pratiquer des sports en cherchant à s'intégrer dans la société chilienne, mais la discrimination était très intense à cette époque», a-t-il ajouté.

Le club a abandonné le football en 1923 et a donné la priorité au tennis. Mais Palestino et un autre club arabe ont uni leurs forces dans les années 1940 et ont repris le football au moment de la partition de la Palestine en 1947.

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L'équipe de basketball de Sirio qui a remporté la Coupe intercontinentale en 1979 (Photo, fournie).

Dans les années 1950, l'équipe a reçu de nombreux investissements de la part d'hommes d'affaires palestiniens et a été surnommée «les millionnaires». En 1955, elle a conquis le championnat national de football.

Avec le deuxième soulèvement contre l'occupation israélienne (2000-2005), l'intérêt de nombreux Chiliens palestiniens pour Palestino s'est accru et le club a vu affluer de nouveaux supporters.

En 2008, Palestino s'est rendu en finale du championnat national contre Colo Colo. Bien que Palestino ait été vaincu, cet événement a suscité une grande attention de la part des Palestiniens.

À l'ère d'Internet, la nouvelle d'un club de football portant le nom de leur pays les a étonnés. «Nous avons entendu dire que des gens ont loué des salles de cinéma et ont diffusé le match en streaming dans la bande de Gaza», a indiqué Medina Lahsen.

Dès lors, le lien entre le club et la Palestine s'est considérablement renforcé. Les joueurs chiliens se sont rendus en Palestine à de nombreuses reprises et même l'équipe principale y a participé à des matchs. La Banque de Palestine est devenue un sponsor fréquent.

En 2014, Palestino a décidé d'inclure sur son maillot la carte complète de la Palestine (avant la partition), en remplacement du numéro un.

Cela a suscité une controverse au Chili, les membres de la communauté juive accusant le club d'effacer Israël de la carte et beaucoup ont fait pression sur la fédération nationale de football pour qu'elle intervienne.

Les autorités sportives n'ont pas considéré que le symbole était de nature politique et n'ont infligé une amende à Palestino que parce que la carte dépassait la zone maximale du maillot pouvant afficher un contenu imprimé.

«Le club a utilisé ce maillot tout au long de la saison. Jusqu'à présent, c'est le maillot le plus populaire de l'histoire de Palestino», a mentionné Medina Lahsen.

Le documentaire «4 Colores», qui retrace l'histoire du club, montre comment le football a favorisé l'établissement de liens entre les Chiliens et la cause palestinienne.

«De nombreux fans de Palestino ne font pas directement partie de la communauté arabe du Chili, mais ils ont néanmoins été touchés par la situation critique des Palestiniens dans le monde entier», a affirmé Medina Lahsen, qui était chargée des recherches pour le documentaire.

Il a découvert que dans toute l'Amérique latine, il y a eu des clubs sportifs dont le nom comportait le mot Palestino ou Arabe, comme le Central Palestino en Uruguay et le Palestino Football Club au Honduras. En Argentine et au Chili, il existe des dizaines de clubs nommés Sirio ou Sirio Libanes.

Au Panama, l'un des meilleurs clubs de football est le Deportivo Arabe Unido, de la ville de Colon.

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Le match inoubliable et décisif de Sirio contre Bosna qui a permis de remporter le championnat. (Photo fournie)

Bien que la communauté arabe de Colon ne soit pas très nombreuse — elle compte environ 120 familles — elle a joué un rôle central dans les sports locaux. 

DAU «a été fondé par des Panaméens arabes dans les années 1990, lorsque le pays n'avait pas de ligue de football professionnel. Nous n'avons jamais pensé qu'il se développerait autant», a déclaré le président du club, Mohamed Hachem, à Arab News.

Depuis sa création, le club a été l'un des plus performants de la première division panaméenne, avec plusieurs championnats nationaux. Aujourd'hui, la plupart de ses supporters ne sont pas membres de la communauté arabe.

«Nous avons eu quelques joueurs d'origine arabe et la communauté arabe nous soutient beaucoup», a soutenu Hachem.

Le club est en train de construire son nouveau siège et son centre sportif, qui comprendra un espace social.

L'un des projets de Hachem pour l'avenir est de promouvoir un championnat entre les clubs de football arabes en Amérique latine. «Ce serait une belle chose de les rassembler tous», a-t-il estimé.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Un an après la chute d’Assad, les Syriens affichent un fort soutien à al-Chareh

Des citoyens syriens brandissent leurs drapeaux nationaux lors des célébrations marquant le premier anniversaire du renversement de l'ancien président Bachar al-Assad à Damas, lundi. (AP)
Des citoyens syriens brandissent leurs drapeaux nationaux lors des célébrations marquant le premier anniversaire du renversement de l'ancien président Bachar al-Assad à Damas, lundi. (AP)
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  • Un sondage révèle un optimisme croissant et un large soutien aux progrès du gouvernement après la chute d’Assad
  • L’Arabie saoudite apparaît comme le pays étranger le plus populaire, Trump reçoit également un soutien marqué

LONDRES : Alors que les Syriens ont célébré cette semaine le premier anniversaire de la chute de Bachar Al-Assad, une enquête menée dans le pays révèle un soutien massif au nouveau président et place l’Arabie saoudite comme principal partenaire international apprécié.

L’ancien président avait fui le pays le 8 décembre 2024, après une offensive éclair de l’opposition jusqu’à Damas, mettant fin à 14 ans de guerre civile.

La campagne était menée par Ahmad al-Chareh, aujourd’hui président du pays, qui s’efforce de stabiliser la Syrie et de rétablir des relations avec ses partenaires internationaux.

Ces efforts ont été salués dans un sondage récemment publié, montrant que 81 % des personnes interrogées ont confiance dans le président et 71 % dans le gouvernement national.

Les institutions clés bénéficient également d’un fort soutien : plus de 70 % pour l’armée et 62 % pour les tribunaux et le système judiciaire.

L’enquête a été menée en octobre et novembre par Arab Barometer, un réseau de recherche américain à but non lucratif.

Plus de 1 200 adultes sélectionnés aléatoirement ont été interrogés en personne à travers le pays sur une large gamme de sujets, notamment la performance du gouvernement, l’économie et la sécurité.

Le large soutien exprimé envers al-Chareh atteint un niveau enviable pour de nombreux gouvernements occidentaux, alors même que la Syrie fait face à de profondes difficultés.

Le coût de la reconstruction dépasse les 200 milliards de dollars selon la Banque mondiale, l’économie est dévastée et le pays connaît encore des épisodes de violence sectaire.

Al-Chareh s’efforce de mettre fin à l’isolement international de la Syrie, cherchant l’appui de pays de la région et obtenant un allègement des sanctions américaines.

Un soutien clé est venu d’Arabie saoudite, qui a offert une aide politique et économique. Le sondage place le Royaume comme le pays étranger le plus populaire, avec 90 % d’opinions favorables.

Le Qatar recueille lui aussi une forte popularité (plus de 80 %), suivi de la Turquie (73 %).

La majorité des personnes interrogées — 66 % — expriment également une opinion favorable envers les États-Unis, saluant la décision du président Donald Trump d’assouplir les sanctions et l’impact attendu sur leur vie quotidienne.

Après sa rencontre avec al-Chareh à Washington le mois dernier, Trump a annoncé une suspension partielle des sanctions, après en avoir déjà assoupli plusieurs volets.

Le sondage montre que 61 % des Syriens ont une opinion positive de Trump — un niveau supérieur à celui observé dans une grande partie du Moyen-Orient.

En revanche, l’enthousiasme est bien moindre concernant les efforts américains pour normaliser les relations entre la Syrie et Israël.

Seuls 14 % soutiennent cette démarche, et à peine 4 % disent avoir une opinion favorable d’Israël.

Lors du chaos provoqué par la chute d’Assad, l’armée israélienne a occupé de nouveaux territoires dans le sud de la Syrie et a mené de fréquentes attaques au cours de l’année écoulée.

Plus de 90 % des Syriens considèrent l’occupation israélienne des territoires palestiniens et les frappes contre l’Iran, le Liban et la Syrie comme des menaces critiques pour leur sécurité.

Dans Foreign Policy, Salma Al-Shami et Michael Robbins (Arab Barometer) écrivent que les résultats de l’enquête donnent des raisons d’être optimiste.

« Nous avons constaté que la population est pleine d’espoir, favorable à la démocratie et ouverte à l’aide étrangère », disent-ils. « Elle approuve et fait confiance à son gouvernement actuel. »

Mais ils notent aussi plusieurs sources d’inquiétude, notamment l’état de l’économie et la sécurité interne.

Le soutien au gouvernement chute nettement dans les régions majoritairement alaouites.

La dynastie Assad, au pouvoir pendant plus de 50 ans, était issue de la minorité alaouite, dont les membres occupaient de nombreux postes clés.

L’économie reste la principale préoccupation : seuls 17 % se disent satisfaits de sa performance, et beaucoup s’inquiètent de l’inflation, du chômage et de la pauvreté.

Quelque 86 % déclarent que leurs revenus ne couvrent pas leurs dépenses, et 65 % affirment avoir eu du mal à acheter de la nourriture le mois précédent.

La sécurité préoccupe aussi : 74 % soutiennent les efforts du gouvernement pour collecter les armes des groupes armés et 63 % considèrent l’enlèvement comme une menace critique.

À l’occasion de l’anniversaire de la chute d’Assad, lundi, al-Chareh a affirmé que le gouvernement œuvrait à construire une Syrie forte, à consolider sa stabilité et à préserver sa souveraineté.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Israël mène une série de frappes contre le Hezbollah au Liban

Des soldats libanais debout sur un véhicule militaire à Alma Al-Shaab, près de la frontière avec Israël, dans le sud du Liban. (AFP)
Des soldats libanais debout sur un véhicule militaire à Alma Al-Shaab, près de la frontière avec Israël, dans le sud du Liban. (AFP)
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  • Israël a frappé vendredi plusieurs sites du Hezbollah au sud et à l’est du Liban, ciblant notamment un camp d’entraînement de sa force d’élite al-Radwan, malgré le cessez-le-feu conclu en novembre 2024
  • Ces raids interviennent alors que l’armée libanaise doit achever le démantèlement des infrastructures militaires du Hezbollah le long de la frontière israélienne d’ici le 31 décembre

BEYROUTH: Israël a mené une série de frappes aériennes contre le sud et l'est du Liban vendredi matin, selon les médias officiels, l'armée israélienne affirmant viser des objectifs du Hezbollah pro-iranien dont un camp d'entrainement.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024 avec le groupe islamiste libanais, Israël continue de mener des attaques régulières contre le Hezbollah, l'accusant de se réarmer.

Selon l'Agence nationale d'information (Ani), les raids de vendredi, qualifiés en partie de "violents", ont visé une dizaine de lieux, certains situés à une trentaine de km de la frontière avec Israël.

Dans un communiqué, l'armée israélienne a affirmé avoir "frappé un complexe d'entrainement" de la force d'élite du Hezbollah, al-Radwan, où des membres de la formation chiite apprenaient "l'utilisation de différents types d'armes", devant servir dans "des attentats terroristes".

L'armée israélienne a également "frappé des infrastructures militaires supplémentaires du Hezbollah dans plusieurs régions du sud du Liban", a-t-elle ajouté.

L'aviation israélienne avait déjà visé certains des mêmes sites en début de semaine.

Ces frappes interviennent alors que l'armée libanaise doit achever le démantèlement le 31 décembre des infrastructures militaires du Hezbollah entre la frontière israélienne et le fleuve Litani, situé à une trentaine de km plus au nord, conformément à l'accord de cessez-le-feu.

Les zones visées vendredi se trouvent pour la plupart au nord du fleuve.

Le Hezbollah a été très affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth.

Depuis, les Etats-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe.


Pluies diluviennes et vents puissants ajoutent au chaos qui frappe Gaza

Sous des trombes d'eau, l'océan de toile et de bâches s'est transformé en marécage. Tous les auvents dégoulinent à grosses gouttes. (AFP)
Sous des trombes d'eau, l'océan de toile et de bâches s'est transformé en marécage. Tous les auvents dégoulinent à grosses gouttes. (AFP)
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  • A al-Zawaida, dans le centre de la bande de Gaza, des mares forcent les gens à marcher dans l'eau stagnante, qui leur arrive aux chevilles, ou à sauter d'un îlot de sable émergé à un autre
  • Selon un rapport de l'ONU, 761 sites, abritant environ 850.000 déplacés, présentent un risque élevé d'inondation dans la bande de Gaza

GAZA: Pelle à la main, des Palestiniens portant des sandales en plastique et des pulls fins creusent des tranchées autour de leurs tentes dans le quartier de Zeitoun, à Gaza-ville, rempart dérisoire face aux pluies torrentielles qui s'abattent depuis des heures.

Dès mercredi soir, la tempête Byron a balayé le territoire palestinien, bordé par la mer Méditerranée, inondant les campements de fortune et ajoutant à la détresse de la population, déplacée en masse depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas, le 7 octobre 2023.

A Zeitoun, le campement planté au milieu des décombres a des allures cauchemardesques, sous un ciel chargé de gros nuages gris et blancs.

Sous des trombes d'eau, l'océan de toile et de bâches s'est transformé en marécage. Tous les auvents dégoulinent à grosses gouttes.

Accroupis sur des briques posées dans la boue, un groupe d'enfants mangent à même des faitouts en métal devant l'ouverture d'un petit abri en plastique, en regardant le ciel s'abattre sur le quartier.

"Nous ne savions pas où aller" 

A al-Zawaida, dans le centre de la bande de Gaza, des mares forcent les gens à marcher dans l'eau stagnante, qui leur arrive aux chevilles, ou à sauter d'un îlot de sable émergé à un autre.

"La nuit dernière a été terrible pour nous et pour nos enfants à cause des fortes pluies et du froid, les enfants ont été trempés, les couvertures et les matelas aussi. Nous ne savions pas où aller", raconte à l'AFP Souad Mouslim, qui vit sous une tente avec sa famille.

"Donnez-nous une tente décente, des couvertures pour nos enfants, des vêtements à porter, je le jure, ils ont les pieds nus, ils n'ont pas de chaussures", implore-t-elle.

"Jusqu'à quand allons-nous rester comme ça? C'est injuste", dit-elle en élevant la voix pour couvrir le bruit des gouttes frappant la toile.

Selon un rapport de l'ONU, 761 sites, abritant environ 850.000 déplacés, présentent un risque élevé d'inondation dans la bande de Gaza.

Le territoire connait généralement un épisode de fortes pluies en fin d'automne et en hiver, mais la dévastation massive due à la guerre l'a rendu plus vulnérable.

"La situation est désespérée", résume Chourouk Mouslim, une déplacée originaire de Beit Lahia, dans le nord de Gaza, elle aussi sous une tente à al-Zawaida.

"Nous ne pouvons même pas sortir pour allumer un feu" pour cuisiner ou se chauffer, déplore-t-elle, avant d'ajouter qu'elle n'a de toutes les manières ni bois, ni gaz.

Dans ce territoire dont les frontières sont fermées, où l'aide humanitaire arrive en quantité insuffisante selon l'ONU, malgré l'entrée en vigueur d'une trêve le 10 octobre, les pénuries empêchent une population déjà démunie de faire face à ce nouveau problème.

Lointaine reconstruction 

Sous les tentes, les plus chanceux bâchent le sol ou le recouvrent de briques pour empêcher que le sable humide ne détrempe leurs affaires. Dans les zones où le bitume n'a pas été arraché, des bulldozers continuent de déblayer les décombres des bâtiments détruits.

Beaucoup de gens restent debout, à l'entrée des abris, plutôt que de s'asseoir une surface mouillée.

"La tempête a eu un impact grave sur la population, des bâtiments se sont effondrés et une grande partie des infrastructures étant détruite, elles ne permettent plus d'absorber cet important volume de pluie", note Mahmoud Bassal, le porte-parole de la Défense civile de Gaza.

Cette organisation, qui dispense des premiers secours sous l'autorité du Hamas, a affirmé que la tempête avait causé la mort d'une personne, écrasée par un mur ayant cédé. Elle a ajouté que ses équipes étaient intervenues après l'effondrement partiel de trois maisons durant les fortes pluies.

La Défense civile a averti les habitants restés dans des logements partiellement détruits ou fragilisés par les bombardements qu'ils se mettaient en danger.

"Les tentes, c'est inacceptable", estime M. Bassal, "ce qui doit être fourni maintenant, ce sont des abris qu'on peut déplacer, équipés de panneaux solaires, avec deux pièces, une salle de bain et toutes les installations nécessaires pour les habitants. Seulement à ce moment-là, la reconstruction pourra commencer".