PARIS: L'avenir politique d'Adrien Quatennens, accusé par son épouse de violences depuis "plusieurs années", est de plus en plus compromis: les appels à la démission du député insoumis se multiplient et son groupe l'a exclu de ses activités jusqu'à une décision de justice mi-décembre.
"Moi si j'étais à sa place, je démissionnerais", relève un cadre du Parti socialiste, pourtant allié de LFI au sein de la Nupes. "Il est cramé. Il va revenir en disant quoi? Coucou, j'ai fait un stage dans une association féministe?".
Après les nouvelles accusations portées mercredi par son épouse Céline Quatennens, évoquant des "violences physiques et psychologiques" exercées depuis "plusieurs années", plusieurs responsables politiques considèrent que le retour dans l'hémicycle du député du Nord, en retrait depuis les premières révélations de l'affaire en septembre, est impossible.
La présidente des députés RN Marine Le Pen a estimé que LFI devait "l'exclure", la cheffe des députés Renaissance Aurore Bergé qu'il n'avait "plus sa place dans l'hémicycle", le patron des socialistes Olivier Faure que son retour était "impossible", l'écologiste Sandrine Rousseau qu'il "ne pouvait plus siéger".
Rappelant que les partis de l'alliance de gauche Nupes se revendiquent féministes, le député PS Arthur Delaporte a aussi considéré que "la Nupes ne peut plus accueillir Adrien Quatennens sur ses bancs".
Au sein d'EELV, l'élue lilloise Melissa Camara, qui porte une motion pour prendre la tête du parti, juge que "le message serait catastrophique". "Il ne peut pas représenter le programme émancipateur que LFI a porté (pendant la campagne présidentielle, ndlr)", et "il peut pas représenter ses électeurs", dit-elle, ayant elle-même voté pour Adrien Quatennens dans sa circonscription.
"Ca remue du côté des féministes et même chez LFI, il faut qu'ils le voient" dit-elle, jugeant que ce serait "un très mauvais calcul pour les années à venir" de continuer à soutenir le député", car "beaucoup de féministes avaient appelé à voter Mélenchon" à la présidentielle.
Des féministes ont d'ailleurs exprimé leur réprobation en taguant dans la nuit de mercredi à jeudi la permanence de la députée LFI Pascale Martin à Perigueux: "Quatennens, prends tes cliques et ta claque".
Jean-Luc Mélenchon, qui avait en septembre exprimé dans un premier temps son soutien à son poulain Adrien Quatennens, ne s'est pas encore exprimé depuis les nouvelles accusations.
Après quelques heures d'embarras, le groupe insoumis à l'Assemblée, qui préparait le retour de l'élu, a décidé mercredi soir de ne pas le réintégrer dans ses activités parlementaires, jusqu'à ce qu'une décision de justice soit prise.
sanction financière
Le groupe devra donc se prononcer définitivement sur son sort à l'issue de la convocation d'Adrien Quatennens le 13 décembre par la justice dans le cadre d'une procédure de reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC, parfois dite "plaider-coupable").
Judiciairement, le député pourrait se voir infliger "des amendes, voire du sursis mais d’après les avocats c’est hyper rare", souligne son entourage.
Le vice-président du groupe LFI à l'Assemblée nationale Alexis Corbière, lui, n'appelle pas à la démission de son collègue: "les électeurs doivent garder le contrôle de leurs élus", a-t-il expliqué jeudi.
Démissionner et retourner devant ses électeurs dans sa circonscription serait-elle une option? "ça peut être une attitude qui est décidée, de manière générale et dans le cas présent", a reconnu Alexis Corbière.
En attendant, il a évacué les critiques concernant le fait qu'Adrien Quatennens, qui n'est plus en arrêt maladie mais n'a pas repris son poste, continue de toucher ses indemnités.
Il n'est "pas en capacité" d'exercer son mandat de député, notamment en raison de la pression médiatique, dit-il.
Le député du Nord lui-même "estime qu’il vaut mieux qu’il reste en retrait", confirme son entourage, et il est "prêt à assumer" une sanction pour sa non présence au Palais Bourbon.
Selon le règlement de l’Assemblée, "une retenue de 25% sur le montant mensuel de son indemnité de fonction", peut être appliquée pour les absences en commission, "au‑delà de deux absences mensuelles".