CRETEIL: Créteil n'est pas la ville des rois de France, mais c'est bien elle qui a enfanté le "Duc": Adrien Rabiot, qui à 27 ans va disputer sa première Coupe du monde avec l'équipe de France, est un pur enfant du Val-de-Marne.
Contrairement à ce que son surnom et sa longue chevelure ont pu parfois laisser croire de lui, le milieu de terrain de la Juventus Turin vient d'un quartier dit "prioritaire", le Mont-Mesly, notamment connu pour le trafic de stupéfiants.
"Adrien, c'est pas un +bourge+ ou un +aristo+, c'est faux. Les gens disaient ça à cause de sa chevelure", rigole Stéphane Soumaré, un de ses anciens éducateurs à Créteil.
"Il vient d'un vrai quartier, le Mont-Mesly, avec son frère ils jouaient avec nous, sur le terrain de la Habette", appuie-t-il.
Très jeune, vers 6-7 ans, Rabiot rejoint le club de sa ville, l'US Créteil-Lusitanos. Sa première éducatrice, Martine Moulin, se souvient d'un enfant "mordu de foot" qui se démarque très vite par son talent et son aisance.
"On a vu tout de suite qu'il était au-dessus de tout le monde. A cet âge-là, c'est rare qu'un enfant arrive à voir le jeu, à faire des changements d'aile".
C'est elle qui décide de le placer au coeur du jeu, un poste qu'il ne quittera plus de sa carrière.
"Au début comme il mettait beaucoup de buts je le mettais à l'avant, mais comme à chaque fois il redescendait pour tout gérer, je l'ai laissé au milieu de terrain", raconte-t-elle.
En U10, Rabiot doit cependant faire une pige au club voisin d'Alfortville: "Ils avaient raté la période des réinscriptions et le club était plein", explique Martine Moulin.
Véronique Rabiot, toujours très présente
A l'US Alfortville, son coach Ludovic Ebles n'hésite pas à faire participer la jeune pépite aux entraînements des U13, malgré son plus jeune âge.
Et décrit, lui aussi, un joueur déjà grand et adroit techniquement, "avec ce petit truc en plus": "La première fois que je l'ai fait jouer avec les plus grands, le gardien adverse fait un dégagement. Rabiot fait un amorti poitrine, frappe de volée, et boum, il marque".
Le futur international (29 sélections) ne reste qu'une saison à Alfortville avant de retrouver le club cristolien, mais sa mère, qui gère maintenant les intérêts de son fils, n'a pas oublié cette étape.
"Véronique est reconnaissante envers nous parce que cette saison-là on l'a pris alors qu'il n'avait pas de club. Quand il était au PSG sa famille nous a toujours offert des billets pour voir les matches. Sa mère était la première à donner de l'argent tous les ans pour aider le club quand il était en difficulté financièrement", détaille Ludovic Ebles.
En 2021 encore, la mère et agent d'Adrien Rabiot a participé à une manifestation à Alfortville pour se battre pour la survie du club, dont elle a été nommée présidente d'honneur.
Tous les anciens formateurs val-de-marnais racontent n'avoir que des choses positives à dire sur Véronique Rabiot, décrite comme ayant toujours été très présente pour son fils.
«Simple et efficace»
Quand ce dernier quitte Paris pour la Juventus Turin en 2019, Martine Moulin se rappelle avoir été invitée à une fête de départ dans un hôtel de Saint-Germain-en-Laye.
"Véronique a fait un discours et m'a interpellée en me disant: +Martine, tu te souviens quand tu me disais de venir le voir jouer?+", se remémore-t-elle en souriant. "Il faut dire qu'au début le foot c'était pas trop son truc."
"Lui c'était un garçon très agréable, mature, très gentil. Et elle, c'est une mère aimante, très attachante, à qui on ne peut rien reprocher. C'est une maman adorable", insiste Stéphane Soumaré.
A 12 ans, Rabiot tape dans l'oeil du Paris Saint-Germain. "On avait fait un match où on avait perdu 4-1 contre eux mais il avait été plus que bon. Leur entraîneur m'avait dit +Celui-là il faudra nous le laisser+", explique Stéphane Soumaré.
Finalement le joueur ira à Manchester City l'année suivante mais l'intérêt était réel puisqu'il rejoindra le centre de formation parisien à 15 ans.
"Pourtant ce n'était pas le meilleur dribbleur, ou le meilleur buteur, mais c'était lui qui ressortait toujours", analyse Stéphane Soumaré.
"Les adversaires pouvaient être à deux ou trois sur lui, Adrien avait une technique sûre. Tout ce qu'il faisait c'était simple et efficace. Un contrôle, pof, une passe. Il prenait toujours l'information en avance".
Des qualités qui lui ont permis de retrouver l'équipe de France en 2020, lui qui n'était plus sélectionné depuis qu'il avait refusé un rôle de réserviste au Mondial-2018. Et qui peut aspirer cette année, avec les forfaits de Pogba et Kanté, à régner sur le milieu de terrain des Bleus.