KHERSON: Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s'est rendu lundi à Kherson, une ville d'importance majeure dans le Sud de l'Ukraine reprise vendredi à l'armée russe après des semaines de combats.
Au même moment, à l'issue d'entretiens de 3 heures avec son homologue américain Joe Biden à la veille d'un sommet du G20 boudé par Vladimir Poutine, le président chinois Xi Jinping, crédité jusqu'à présent d'un soutien tacite à la Russie, s'est dit "très préoccupé" par le conflit en Ukraine.
"Il est impossible de tuer l'Ukraine", a lancé à Kherson Volodymyr Zelensky, lors d'une visite surprise dans la ville libérée il y a trois jours par l'armée ukrainienne.
"Le prix de cette guerre est élevé", a-t-il ajouté, cité par la présidence. "Nous allons pas à pas dans tous les territoires temporairement occupés de notre pays. (...) C'est un chemin long et difficile", a-t-il reconnu.
Le Kremlin a de son côté continué d'affirmer que la ville ukrainienne, officiellement annexée en septembre au même titre que la région du même nom, appartenait à la Russie bien que ses troupes aient dû l'abandonner.
Le président américain Joe Biden a salué une "victoire importante" au sujet de la reprise de Kherson par l'armée ukrainienne, assurant toutefois que l'issue de la guerre "reste à voir", à l'issue de sa rencontre avec Xi Jinping en Indonésie. Les deux hommes se sont accordés sur leur "opposition" à tout recours à l'arme nucléaire en Ukraine, selon la Maison Blanche.
A Kherson, main sur le coeur, comme les autres responsables civils et militaires présents, Volodymyr Zelensky a chanté l'hymne national au moment de la levée du drapeau ukrainien devant le bâtiment de l'administration régionale dans le centre de Kherson.
Selon des photos publiées sur Telegram, le dirigeant ukrainien, habillé de kaki, s'est également promené dans les rues de la ville, entouré de gardes du corps lourdement armés, sans toutefois porter lui-même de casque ni de gilet pare-balle.
De nombreux habitants, certains drapés dans les couleurs ukrainiennes, étaient massés sur son passage.
"Gloire à l'Ukraine!", lui ont crié des habitants depuis le balcon d'un immeuble. "Gloire aux héros!", ont répondu conformément à la tradition le chef de l'Etat et ceux qui l'accompagnaient, selon une vidéo relayée sur les réseaux sociaux.
«Mois à venir difficiles»
Les forces russes ont été contraintes de se retirer la semaine dernière de Kherson après huit mois d'occupation, laissant le champ libre aux soldats ukrainiens pour entrer vendredi dans la ville.
Interrogé sur ce déplacement du président ukrainien à Kherson, le Kremlin a de son côté continué d'affirmer que la ville appartenait à la Russie.
"Nous ne commenterons pas, vous savez bien que c'est le territoire de la Fédération de Russie", a déclaré à la presse le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.
Kherson avait été la première grande ville et le seul centre régional à tomber après l'invasion russe déclenchée fin février. Le retrait forcé des troupes de Moscou face à la pression de la contre-offensive ukrainienne a constitué un camouflet pour le président russe Vladimir Poutine, qui avait ordonné la mobilisation de 300 000 réservistes en septembre.
"Les mois à venir seront difficiles" pour l'Ukraine, a toutefois averti le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg.
"Nous ne devons pas commettre l'erreur de sous-estimer la Russie" a-t-il déclaré à La Haye, estimant que "l'objectif de Poutine est de laisser l'Ukraine froide et sombre cet hiver".
L'armée russe a mené ces dernières semaines plusieurs vagues de frappes massives de missiles et drones kamikazes sur les infrastructures énergétiques ukrainiennes.
Elle a affirmé lundi avoir conquis une localité de l'Est de l'Ukraine, Pavlivka, un rare succès revendiqué par Moscou après des semaines de revers et de retraites.
Résistance
Dans son allocution quotidienne, Volodymyr Zelensky a accusé dimanche soir les forces russes d'avoir commis des "atrocités" à Kherson comme dans les autres régions libérées précédemment.
Il a affirmé que 400 "crimes de guerre" russes avaient été documentés à ce stade, sans préciser s'ils concernaient uniquement la région de Kherson.
Lundi, le service de renseignement ukrainien a annoncé avoir arrêté à Kherson un militaire russe "déguisé en civil", alors que les craintes sont fortes que des soldats de Moscou soient toujours présents dans la ville.
Interrogés par l'AFP, des habitants de Kherson ont raconté les mois d'occupation russe et pour certains, leurs actes de résistance pour aider la contre-offensive ukrainienne.
Volodymyr Timor, un jeune de 19 ans, dit avoir noté avec ses amis durant des mois les mouvements des soldats russes dans la ville pour informer l'armée ukrainienne.
"On signalait tout: où se trouvaient leurs équipements et leurs lieux de stockage de munitions, où ils dormaient, où ils allaient boire des coups", a-t-il expliqué à l'AFP.
Dans la région de Lougansk (est) où se poursuivent des combats violents contre les forces russes, l'armée ukrainienne a repris le village de Makiivka, à 50 km au nord-est de la ville stratégique de Severodonetsk, contrôlée par les Russes, a affirmé lundi la présidence ukrainienne.
Un étudiant zambien de 23 ans, qui purgeait une lourde peine de prison en Russie, a par ailleurs été tué le 22 septembre au combat en Ukraine, a annoncé le gouvernement zambien.
Le patron du groupe paramilitaire Wagner, Evguéni Prigojine, réputé proche de Vladimir Poutine, est accusé par l'Ukraine d'envoyer sur le front des milliers de combattants recrutés directement dans les prisons russes, contre la promesse d'une amnistie.