Des écologistes font face à la crise environnementale dans le nord-est de la Syrie

La pépinière Barin, située à Qamishli, en Syrie, fait don de milliers d'arbres et de jeunes plants à des projets locaux de lutte contre la surexploitation agricole (Photo, AN/Ali Ali)
La pépinière Barin, située à Qamishli, en Syrie, fait don de milliers d'arbres et de jeunes plants à des projets locaux de lutte contre la surexploitation agricole (Photo, AN/Ali Ali)
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Publié le Mardi 01 novembre 2022

Des écologistes font face à la crise environnementale dans le nord-est de la Syrie

  • Les conflits et les variations climatiques ont abandonné cette région riche en ressources à la pollution et à la désertification
  • Les comités écologiques locaux et les projets bénévoles se sont inspirés des initiatives environnementales de l'Arabie saoudite

QAMISHLI, Syrie: Pendant des milliers d'années, les terres situées entre l'Euphrate et le Tigre ont vu naître et disparaître des dizaines de civilisations qui dépendaient des fleuves et des richesses naturelles de la région pour survivre.
Mais aujourd'hui, après une décennie de conflit et de sécheresse, le territoire situé entre les fleuves, et plus particulièrement le nord-est de la Syrie, n'est plus que l'ombre de ce qu'il était autrefois.
Les grands fleuves et leurs affluents, qui coulaient autrefois d'une eau claire, se sont asséchés jusqu'à devenir un filet d'eau et sont remplis d'ordures et d'eaux usées. Le sol riche qui nourrissait autrefois toutes sortes d'arbres est asséché, et ses forêts ont disparu avec lui.
Cependant, tout espoir n'est pas perdu. De petits groupes d'écologistes et de bénévoles refusent de rester impuissants face à la crise et s'efforcent de reverdir le nord-est de la Syrie.
Planter quatre millions d'arbres dans un pays menacé par le changement climatique, la désertification et la guerre peut sembler une tâche colossale, mais c'est celle que l'initiative écologique locale Green Tress a décidé d'entreprendre.
«Nous sommes dans l'un des pays les plus dangereux du monde, mais cela ne signifie pas que nous ne pouvons rien faire, ou que nous sommes une société impuissante. Nous pouvons créer des initiatives et prendre des responsabilités dans notre société», a déclaré Ziwar Sheikho, l'administrateur de Green Tress, à Arab News dans la pépinière de l'initiative située dans la ville de Qamishli.
«La pollution a le potentiel de tuer plus de personnes que les balles», a affirmé M. Sheikho, en se baissant pour vérifier si l'une des milliers de graines qu'il avait plantées avait commencé à germer. «Tout le monde comprend que la disparition de l'environnement est la disparition de l'humanité.»
L'initiative locale a commencé en 2020, après que la municipalité de Tel Kocher a érigé une série de palmiers en ciment le long de la route principale de la ville. Sheikho a écrit une lettre à la municipalité et au conseil écologique local pour critiquer la construction et inciter la ville à adopter une approche plus écologique. Finalement, les faux arbres ont été retirés et remplacés par de vrais.
Non content de cette petite victoire, M. Sheikho savait qu'il devait faire davantage. Avec un écrivain et un cinéaste locaux, M. Sheikho, journaliste de profession, a réfléchi à la manière de rendre son pays plus respectueux de l'environnement.
Outre la plantation de quatre millions d'arbres, Green Tress vise également à porter à 18 le pourcentage de zones vertes dans le nord et l'est de la Syrie. De nombreuses forêts autrefois luxuriantes le long de la frontière nord ont été détruites pendant la crise, lorsque des habitants désespérés ont été contraints de couper des arbres pour en faire du bois de chauffage lorsque les sources de combustible se sont épuisées.

Un semis de pin à la pépinière Green Tress à Qamishli, en Syrie. (Photo, AN/Ali Ali)

D'après l'outil de surveillance en ligne Global Forest Watch, basé aux États-Unis, la Syrie a perdu plus de 26 000 hectares de couverture forestière depuis 2001.
L'initiative s'est heurtée à de nombreux obstacles, dont le principal est le manque de soutien. «Nous sommes tous des volontaires. Le terrain que nous utilisons actuellement nous a été donné. Notre citerne d'eau nous a été offerte. Comme nous sommes une organisation indépendante, qui n'est liée à aucun gouvernement, nous devons obtenir tous nos outils auprès de donateurs», a déclaré M. Sheikho.
La Vision 2030 saoudienne, annoncée par le prince héritier Mohammed ben Salmane en 2016, a été une source d'inspiration majeure pour Green Tress, a indiqué M. Sheikho. L'Initiative verte saoudienne, qui a été lancée en 2021 conformément aux objectifs de la Vision 2030, s'est engagée à réhabiliter 40 millions d'hectares de terres et a déjà planté 8,4 millions d'arbres dans le Royaume.
«Nous avons constaté que de nombreux projets au Moyen-Orient se sont avérés destructeurs pour l'environnement. Par exemple, à cause des 23 barrages construits par la Turquie sur l'Euphrate, 178 rivières, ruisseaux et sources qui se trouvaient auparavant dans (le nord de la Syrie) se sont asséchés. Le Tigre et l'Euphrate sont en mauvais état à cause de cela.»
«La Vision 2030 saoudienne, et l'Initiative verte saoudienne, ont changé notre opinion. Elle nous a donné beaucoup d'espoir. Elle a pour objectif de planter des milliards d'arbres au Moyen-Orient. Nous avons lancé notre initiative au moment même où elle a été annoncée. Nous espérons qu'elle s'étendra à de nombreux autres pays», a-t-il poursuivi.
Les ambitions de l'Arabie saoudite se sont effectivement étendues au-delà de ses propres frontières sous la forme de l'Initiative verte du Moyen-Orient, qui entend planter 50 milliards d'arbres dans la région, parmi d'autres initiatives visant à atténuer le changement climatique.
Pour sa part, Green Tress va au-delà de la simple plantation d'arbres. L'initiative organise des ateliers dans les villages du nord-est de la Syrie pour enseigner aux habitants les principes fondamentaux du compostage afin de réduire la dépendance aux engrais chimiques nocifs, qui, selon le département de l'agriculture, sont parmi les principales causes de la désertification.

EN CHIFFRES

* 59 % des terres syriennes sont menacées par la désertification
* 26 000 hectares de forêts syriennes ont disparu depuis 2001
* 34 mètres cubes d'eau souterraine sont pompés par les Syriens chaque année

Un panneau présentant des initiatives environnementales menées avec l'aide de la municipalité populaire de Qamishli. (Photo, AN Ali Ali)

À l'époque où le régime syrien contrôlait le nord-est, celui-ci a désigné ces régions comme des zones agricoles, notamment pour la production de coton ainsi que de blé et d'autres céréales. Des décennies de production céréalière continue ont rendu la plupart des sols riches situés entre le Tigre et l'Euphrate vulnérables à la désertification.
Selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), la surproduction d'une même culture conjuguée au manque d'eau entraîne la désertification dans les régions venteuses comme le nord-est de la Syrie. Le rapport 2022 de la FAO indique que la production syrienne de blé est tombée cette année à un million de tonnes, soit 75 % de moins que les niveaux d'avant-guerre, en raison de la forte dépendance à l'égard de l'agriculture pluviale résultant de l'effondrement des systèmes d'irrigation et des coupures et pénuries d'eau répétées.
Selon le département agricole de l'Administration autonome du nord et de l’est de la Syrie (AANES), des études ont montré que la désertification menace au moins 59 % des terres agricoles du pays.
L'érosion hydrique due à l'abattage excessif des arbres, l'érosion éolienne due au manque de couverture végétale et l'augmentation de la salinité des eaux souterraines due à l'absence de systèmes de drainage efficaces sont autant de facteurs qui ont contribué à la désertification rapide, a déclaré un porte-parole du département agricole à Arab News.
Dans le sillage de ces politiques, l'AANES, qui a été établie comme une zone autonome dans le nord et l'est de la Syrie, séparée à la fois du régime et de l'opposition, a créé un conseil écologique pour tenter de réparer les dommages causés par des années de guerre et de mauvaise gestion.
«Le travail que nous accomplissons ne concerne pas seulement cette région, mais le monde entier. Notre objectif est la protection de la planète», a déclaré à Arab News Berivan Omer, vice-président du conseil écologique de la région de Jazira de l'AANES.
Le conseil écologique a réussi à faire pression pour l'application de deux lois l'année dernière: la loi sur la propreté et la loi sur la protection de l'environnement. La loi sur la propreté interdit de jeter des déchets dans des zones non désignées à des heures non désignées, de jeter des détritus et de déverser des déchets dans les rivières, les ruisseaux et les sources.
Elle interdit également aux industriels de jeter leurs déchets dans des endroits quelconques et punit d'une amende pouvant aller jusqu'à 250 000 livres syriennes (environ 45 dollars) ceux qui abattent des arbres dans des jardins publics ou privés sans autorisation.
La rivière Jaghjagh, un affluent de l'Euphrate, était autrefois claire et coulait rapidement à travers la ville de Qamishli. Aujourd'hui, elle est remplie de déchets et d'ordures, et son odeur nauséabonde se répand sur plusieurs quartiers de la ville. Le faible niveau d'eau de tous les cours d'eau syriens a entraîné la propagation de maladies telles que la leishmaniose et même le choléra, qui a récemment fait son retour dans le pays et a infecté plus de 15 000 personnes.
Bien que la municipalité locale, le conseil écologique et des bénévoles aient mené plusieurs opérations de nettoyage au cours des dernières années, la rivière revient invariablement à son état antérieur après peu de temps.
Beaucoup de choses échappent au contrôle de l'administration locale, explique Omer. Les maisons qui déversent leurs déchets directement dans la rivière ont été construites sur ses rives il y a des décennies, et à part l'expulsion des résidents, il ne semble pas y avoir de solutions faciles.

Des déchets obstruent la rivière Jaghjagh à Qamishli, en Syrie. (Photo, AN/Ali Ali)


«En ce qui concerne la rivière, nous effectuons actuellement des études. Nous allons mener six mois de recherche pour comprendre comment la nettoyer correctement», a-t-il annoncé à Arab News. «Nous allons essayer de voir si le problème peut être résolu par un simple nettoyage ou si nous devons détourner tout le système d'égouts.»
D'autres problèmes environnementaux abondent dans la région: Le manque de raffineries avancées de pétrole a conduit à l'utilisation de brûleurs primitifs pour produire du carburant. Les déchets gazeux et liquides issus du processus de fabrication du combustible se retrouvent dans l'air, l'eau et le sol, ce qui a entraîné une augmentation des maladies respiratoires et des cas de cancer dans la région de Jazira, où fonctionnent plus de 200 de ces brûleurs.
Bien que le conseil écologique ait tenté de promouvoir l'utilisation de sources d'énergie alternatives telles que l'énergie solaire, les matériaux accessibles sont chers et de mauvaise qualité. Le réseau électrique principal fonctionnant en dessous de ses capacités depuis le début de la guerre, la majorité du nord-est de la Syrie dépend des générateurs de quartier, qui sont bruyants et produisent des fumées toxiques.
Omer et Sheikho pensent tous deux que le changement le plus important réside dans la mentalité de la communauté.
«Les gens ici disent: "si je nettoie mon environnement, je ne nettoierai que ma maison. Tout le reste est de la responsabilité de l'État ou de la municipalité"», a indiqué M. Omer.
Sheikho a expliqué que Green Tress a tenu des réunions avec la Communauté démocratique de l'islam, un conseil des responsables religieux musulmans locaux, pour leur demander d'inclure dans leurs sermons des leçons sur les avantages de la protection de l'environnement.
Le conseil écologique a également organisé des ateliers parmi les conseils de village locaux pour apprendre aux habitants à trier leurs déchets en vue de leur recyclage.
«Nous devons commencer au niveau des ménages. Il faut beaucoup d'argent, de travail et d'outils spéciaux pour trier les déchets destinés au recyclage. Mais si cela commence dans les foyers, ce sera beaucoup plus facile», a déclaré Omer.
«Les gens avaient l'habitude de vivre comme faisant partie de la nature, mais maintenant, ils en sont séparés. Ils se considèrent comme le centre de la nature et non plus comme une simple composante. En tant qu'humains sur cette planète, nous pouvons vivre en harmonie avec tous les êtres vivants.»


Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Lors d'une cérémonie en Irak, les premiers combattants kurdes du PKK ont brûlé leurs armes

Une trentaine de combattants kurdes du PKK, le Parti des Travailleurs du Kurdistan en guerre contre Ankara depuis quatre décennies, ont entamé vendredi en Irak le début d'un désarmement censé mettre fin à quatre décennies de violences. (Reuters)
Une trentaine de combattants kurdes du PKK, le Parti des Travailleurs du Kurdistan en guerre contre Ankara depuis quatre décennies, ont entamé vendredi en Irak le début d'un désarmement censé mettre fin à quatre décennies de violences. (Reuters)
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  • Selon une journaliste de l'AFP, quatre commandants du mouvement et leurs hommes ont déposé et brûlé leurs armes lors d'une cérémonie, vendredi matin, à 50 km à l'ouest de Souleimaniyeh, dans la région autonome du Kurdistan, dans le nord de l'Irak
  • Celle-ci s'est déroulée dans la grotte de Casene, connue pour avoir notamment abrité une imprimerie qui a publié l'un des premiers journaux kurdes, a-t-elle précisé

SOULEIMANIYEH: Une trentaine de combattants kurdes du PKK, le Parti des Travailleurs du Kurdistan en guerre contre Ankara depuis quatre décennies, ont entamé vendredi en Irak le début d'un désarmement censé mettre fin à quatre décennies de violences.

Selon une journaliste de l'AFP, quatre commandants du mouvement et leurs hommes ont déposé et brûlé leurs armes lors d'une cérémonie, vendredi matin, à 50 km à l'ouest de Souleimaniyeh, dans la région autonome du Kurdistan, dans le nord de l'Irak.

Celle-ci s'est déroulée dans la grotte de Casene, connue pour avoir notamment abrité une imprimerie qui a publié l'un des premiers journaux kurdes, a-t-elle précisé.

Le PKK a salué une "opération historique et démocratique".

Les combattants devaient ensuite regagner les montagnes proches où ils sont basés, avait indiqué précédemment à l'AFP un responsable du PKK.

Des représentants du gouvernement autonome du Kurdistan irakien et de son président Nechirvan Barzani ont assisté aux opérations, mais il n'a pas été précisé qui avait été dépêché par Ankara, hormis des membres des services de renseignements selon les médias turcs.

Les autorités locales kurdes avaient annoncé peu avant avoir abattu deux drones à proximité des positions des forces kurdes, quelques heures avant le début des opérations.

Un processus de paix initié depuis l'automne doit permettre de tourner la page de plus de quatre décennies de violences qui ont fait au moins 40.000 morts, et résoudre la question kurde tant au niveau national que régional, selon les experts.

"Responsabilité historique" 

Le 27 février, le chef du PKK Abdullah Öcalan, 76 ans dont vingt-six en prison, a appelé le mouvement à "déposer les armes et (...) à se dissoudre", affirmant "assumer la responsabilité historique de cet appel".

Parmi un nombre restreint d'invités conviés vendredi, officiellement pour des raisons de sécurité, figurent des élus du parti turc prokurde DEM, médiateur entre le PKK et le gouvernement turc.

Pour la Turquie, comme pour ses alliés occidentaux, le PKK est considéré comme un mouvement terroriste.

C'est paradoxalement l'allié du président turc Recep Tayyip Erdogan, le chef du parti nationaliste MHP, Devlet Bahceli, qui a tendu la main à l'ennemi public, lui proposant d'appeler les combattants à renoncer à la lutte armée et à "venir s'exprimer devant le Parlement".

Mercredi, dans un message vidéo en turc, "Apo" (oncle) comme l'appellent ses fidèles, a confirmé l'imminence du désarmement.

"Je crois au pouvoir de la politique et de la paix sociale et non des armes. Et je vous appelle à mettre ce principe en pratique", insistait-il dans cette longue adresse.

Le chef de l'Etat turc a récemment exprimé sa confiance de voir "une Turquie sans terroriste", espérant que "ce processus prometteur se conclurait avec succès le plus rapidement possible, sans obstacle, ni risque de sabotage".

"Geste de bonne volonté" 

Selon un commandant du PKK, cette première cérémonie était un "geste de bonne volonté".

Abdullah Öcalan, lui, est toujours détenu sur l'île prison d'Imrali, au large d'Istanbul, et ne réclame pas d'en sortir, alors que ses commandants faisaient de sa libération un des termes de l'équation.

"La situation de notre chef, Apo, affecte le processus et le ralentit", jugeait la semaine dernière un haut responsable du PKK, Mustafa Karasu.

En refusant de lier son sort personnel à l'avenir du processus de paix, M. Öcalan "contredit les conditions posées par le Parti qui demandait son élargissement afin qu'il puisse mener à bien le processus de paix", note l'historien des mouvements kurdes Boris James.

Le chercheur relève par ailleurs l'absence "d'acteur tiers pour garantir la probité du processus" et insiste: "Une très forte défiance subsiste entre le PKK et l'Etat turc, or l'Etat a donné peu de gages" aux combattants kurdes.

Ces derniers ont régulièrement dénoncé la poursuite des bombardements turcs sur leurs positions en Irak malgré le processus en cours.

Depuis les derniers violents combats qui avaient ensanglanté la ville turque à majorité kurde de Diyarbakir (sud-est) en 2015, les combattants du PKK sont principalement restés cantonnés dans les montagnes de Qandil, en Irak, soumis également aux opérations de ratissage de l'armée turque.

 


Dix personnes secourues après l'attaque meurtrière d'un navire en mer Rouge

Après plusieurs mois d'accalmie, les Houthis ont attaqué le navire Magic Seas dimanche, dont l'équipage a été évacué par la marine émiratie, puis l'Eternity C lundi et mardi, coulant les deux bâtiments. (Reuters)
Après plusieurs mois d'accalmie, les Houthis ont attaqué le navire Magic Seas dimanche, dont l'équipage a été évacué par la marine émiratie, puis l'Eternity C lundi et mardi, coulant les deux bâtiments. (Reuters)
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  • Après plusieurs mois d'accalmie, les Houthis ont attaqué le navire Magic Seas dimanche, dont l'équipage a été évacué par la marine émiratie, puis l'Eternity C lundi et mardi, coulant les deux bâtiments
  • Trois membres d'équipage philippins et un membre grec de l'équipe de sécurité à bord du Eternity C ont été récupérés en mer dans la nuit, "portant le nombre total de personnes secourues à 10", a indiqué jeudi la mission navale de l'Union européenne sur X

DUBAI: Dix personnes ont été secourues après l'attaque d'un navire en mer Rouge par les rebelles houthis du Yémen, tandis que trois autres ont été tuées et douze sont toujours portées disparues, selon la mission européenne Aspides déployée dans la zone.

Cette attaque, l'une des plus meurtrières menées par les Houthis contre la marine marchande, marque une escalade dans cette zone maritime essentielle pour le commerce mondial, menaçant une trêve conclue en mai avec les Etats-Unis censée préserver la liberté de navigation.

Après plusieurs mois d'accalmie, les Houthis ont attaqué le navire Magic Seas dimanche, dont l'équipage a été évacué par la marine émiratie, puis l'Eternity C lundi et mardi, coulant les deux bâtiments.

Trois membres d'équipage philippins et un membre grec de l'équipe de sécurité à bord du Eternity C ont été récupérés en mer dans la nuit, "portant le nombre total de personnes secourues à 10", a indiqué jeudi la mission navale de l'Union européenne sur X.

Au total, 25 personnes se trouvaient à bord de ce vraquier battant pavillon libérien.

Mardi, Aspides avait déclaré à l'AFP que trois personnes avaient été tuées et au moins deux blessées, parmi lesquelles un électricien russe qui a perdu une jambe, lors de l'attaque menée par les rebelles yéménites.

Le sort des autres membres de l'équipage reste incertain.

Mercredi, les Houthis ont affirmé avoir "secouru" un nombre indéterminé de personnes à bord du navire et les avoir emmenés dans un " lieu sûr". L'ambassade des Etats-Unis au Yémen les a accusés d'avoir enlevé les survivants.

Les insurgés ont également diffusé une vidéo montrant une puissante explosion sur le pont du cargo, qui a ensuite coulé.

"Profonde inquiétude" 

Depuis fin 2023, les Houthis ont attaqué des dizaines de navires qu'ils estiment liés à Israël, affirmant agir par solidarité avec les Palestiniens de la bande de Gaza, en proie aux bombardements israéliens depuis le début de la guerre le 7 octobre 2023.

Ces attaques ont contraint de nombreux armateurs à éviter la mer Rouge, par où transite 12% du commerce mondial, d'après la Chambre internationale de la marine marchande (ICS).

Les Houthis, qui contrôlent la capitale Sanaa et de larges pans du Yémen, en proie à une guerre civile depuis 2014, avaient interrompu leurs attaques maritimes cette année après un cessez-le-feu à Gaza conclu en janvier et qui a pris fin deux mois plus tard.

En mai, ces rebelles proches de l'Iran avaient averti qu'ils continueraient à s'en prendre aux navires israéliens ou liés à Israël, malgré une trêve avec les Etats-Unis qui a mis fin à des semaines de bombardements américains des cibles rebelles au Yémen.

Leur chef, Abdel Malek al-Houthi, a répété jeudi que ces opérations se poursuivront "tant que l'agression et le siège de Gaza perdureront", en affirmant que les navires visés appartiennent à des compagnies "violant l'interdiction" de se rendre en Israël.

Selon le Centre conjoint d'information maritime, géré par une coalition navale occidentale, le Magic Seas et l'Eternity C ont probablement été attaqués "en raison de précédents passages dans des ports israéliens ou de liens entre leurs propriétaires ou gestionnaires et d'autres navires ayant fréquenté Israël".

L'émissaire de l'ONU pour le Yémen, Hans Grundberg, a fait part de sa "profonde inquiétude", en déplorant des "pertes civiles, des blessés, ainsi qu'un risque potentiel de dommages environnementaux".

L'attaque contre l'Eternity C est la plus meurtrière depuis l'attaque de missile contre le navire marchand True Confidence en mars de l'année dernière, qui avait fait trois morts.

Les Houthis ont également capturé le Galaxy Leader en novembre 2023 et coulé le Rubymar, qui transportait 21.000 tonnes d'engrais, en février 2024.


Gaza: la Défense civile annonce 66 morts dont des enfants devant une clinique

La Défense civile locale a fait état de 66 morts jeudi dans les opérations militaires israéliennes à Gaza, dont 17, y compris des enfants, dans une frappe devant une clinique de Deir al-Balah où l'armée a dit avoir visé un combattant du Hamas. (AFP)
La Défense civile locale a fait état de 66 morts jeudi dans les opérations militaires israéliennes à Gaza, dont 17, y compris des enfants, dans une frappe devant une clinique de Deir al-Balah où l'armée a dit avoir visé un combattant du Hamas. (AFP)
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  • La clinique de Deir al-Balah est gérée par l'ONG humanitaire Project HOPE, qui a rapporté de son côté la mort de 15 personnes, dont dix enfants et deux femmes
  • "Les cliniques de Project HOPE sont des lieux de refuge à Gaza, où les gens amènent leurs jeunes enfants, où les femmes reçoivent des soins pendant et après leur grossesse, où l'on traite la malnutrition"

GAZA: La Défense civile locale a fait état de 66 morts jeudi dans les opérations militaires israéliennes à Gaza, dont 17, y compris des enfants, dans une frappe devant une clinique de Deir al-Balah où l'armée a dit avoir visé un combattant du Hamas.

Un raid aérien a touché en matinée un groupe de personnes qui patientaient devant un établissement médical de Deir al-Balah, a indiqué à l'AFP Mohammad al-Moughayyir, un responsable de l'organisation de premiers secours. Parmi les 17 morts figurent huit enfants au moins, selon lui.

L'armée israélienne a indiqué à l'AFP avoir ciblé à Deir al-Balah un membre d'une unité d'élite du mouvement islamiste palestinien Hamas, la Noukhba, ayant participé selon elle "au massacre du 7 octobre" 2023, à l'origine de la guerre à Gaza.

Elle a dit regretter "tout dommage causé à des personnes non impliquées" et oeuvrer "autant que possible à limiter les atteintes aux civils".

"Il n'y a eu aucun avertissement, juste une frappe directe au milieu des civils", a raconté à l'AFP Mohamed Abou Ouda, qui était dans la file d'attente devant la clinique. "Qu'avons-nous fait et qu'ont fait nos enfants pour mériter cela?"

"Nous étions des dizaines à attendre", a déclaré un autre témoin, Youssef Al-Aydi. "Soudain, nous avons entendu le bruit d'un avion s'approcher, puis l'explosion a retenti. Le sol a tremblé sous nos pieds et autour de nous ce n'était que sang et cris déchirants".

"Familles innocentes" 

La clinique de Deir al-Balah est gérée par l'ONG humanitaire Project HOPE, qui a rapporté de son côté la mort de 15 personnes, dont dix enfants et deux femmes.

"Les cliniques de Project HOPE sont des lieux de refuge à Gaza, où les gens amènent leurs jeunes enfants, où les femmes reçoivent des soins pendant et après leur grossesse, où l'on traite la malnutrition", a commenté dans un communiqué le responsable de l'ONG, Rabih Torbay.

"Pourtant, ce matin, des familles innocentes ont été attaquées sans pitié alors qu'elles faisaient la queue en attendant l'ouverture des portes", a-t-il ajouté, appelant à un cessez-le-feu immédiat.

Selon l'Unicef, l'un des enfants tués devant la clinique avait tout juste un an et venait de prononcer ses premiers mots quelques heures plus tôt d'après sa mère.

"Aucun parent ne devrait avoir à faire face à une telle tragédie", a commenté la directrice de l'agence onusienne Catherine Russell. "Tuer des familles qui tentent d'avoir accès à une aide vitale est quelque chose d'inconcevable".

L'armée israélienne n'a pas commenté les autres incidents rapportés par la Défense civile, dont l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les bilans et les affirmations compte tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain.

L'attaque du 7-Octobre a entraîné côté israélien la mort de 1.219 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles.

Sur les 251 personnes enlevées ce jour-là, 49 sont toujours retenues à Gaza, dont 27 ont été déclarées mortes par l'armée israélienne.

Au moins 57.762 Palestiniens, majoritairement des civils, ont été tués dans la campagne de représailles militaires israéliennes à Gaza, selon des données du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas, jugées fiables par l'ONU.