Migrants, sécurité, la ministre britannique de l'Intérieur fragilisée

Le navire BF Typhoon arrive à Douvres transportant des migrants récupérés dans la Manche le 18 octobre 2022. (Photo, AFP)
Le navire BF Typhoon arrive à Douvres transportant des migrants récupérés dans la Manche le 18 octobre 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Lundi 31 octobre 2022

Migrants, sécurité, la ministre britannique de l'Intérieur fragilisée

  • Selon les autorités britanniques, jusqu'à 80% des migrants effectuant la dangereuse traversée de la Manche sont des ressortissants albanais
  • Près de 40 000 traversées ont été enregistrées depuis le début de l'année, un niveau record qui met à mal la promesse du Brexit de permettre au Royaume-Uni de maîtriser l'immigration

LONDRES: Première crise au sein du gouvernement du Premier ministre britannique Rishi Sunak: sa ministre de l'Intérieur Suella Braverman s'est retrouvée sous forte pression lundi, entre sa gestion de l'afflux de migrants et les questions qui entourent sa renomination.

Cette ultraconservatrice de 42 ans, qui partageait récemment son "rêve" de voir des demandeurs d'asile arrivés illégalement sur le sol britannique expulsés vers le Rwanda - un projet controversé actuellement bloqué - est confrontée à la dure réalité.

Malgré les promesses du Brexit de mieux maîtriser les frontières britanniques, le Royaume-Uni connaît un afflux sans précédent de migrants qui traversent la Manche à bord de petites embarcations. Près de 40 000 ont traversé depuis le début de l'année l'un des détroits les plus fréquentés au monde au péril de leur vie.

S'y ajoute à la situation critique au centre d'accueil de Manston (sud-est de l'Angleterre), surpeuplé, confronté à de graves problèmes sanitaires et à des durées de séjour qui s'étirent, dans ce qui est censé être un centre de transit.

La situation y est "totalement inacceptable", a dénoncé le député conservateur Roger Gale sur la BBC. "Il y a simplement trop de gens et on n'aurait jamais dû laisser cette situation en arriver là", a-t-il déclaré.

Le centre accueille plus 4 000 personnes, selon le député. "Le responsable, qu'il s'agisse de la précédente ministre de l'Intérieur ou de celle-ci, doit rendre des comptes, car une mauvaise décision a été prise et a conduit à ce que je considère comme une atteinte aux droits", a-t-il ajouté sur Sky News.

Traversées de la Manche: trois passeurs présumés arrêtés

Trois passeurs présumés, soupçonnés de vouloir faire traverser la Manche à des migrants albanais sur un puissant bateau semi-rigide, ont été arrêtés dimanche lors d'une opération conjointe des services britanniques et belges, a annoncé lundi l'agence britannique de lutte contre la criminalité (NCA).

Selon les autorités britanniques, jusqu'à 80% des migrants effectuant la dangereuse traversée de la Manche à bord de petites embarcations sont des ressortissants albanais. Près de 40.000 traversées ont été enregistrées depuis le début de l'année, un niveau record qui met à mal la promesse du Brexit de permettre au Royaume-Uni de maîtriser l'immigration.

La police fédérale belge a arrêté deux hommes de 34 et 44 ans, établis dans le sud de l'Angleterre, lors de leur arrivée sur la côte près de Nieuport dimanche à 04H30 locales. Douze migrants, vraisemblablement albanais, ont également été arrêtés, selon un communiqué de la NCA.

Un troisième homme, âgé de 46 ans, a été arrêté un peu plus tard le même jour à environ 80 kilomètres au nord-ouest de Londres, soupçonné d'aide à l'immigration illégale. Il reste en garde à vue, selon l'agence britannique.

Les enquêteurs pensent que ce groupe fait partie d'une organisation plus large de passeurs à destination du Royaume-Uni depuis l'Europe continentale.

La NCA indique qu'elle mène plus de 60 enquêtes sur des réseaux ou individus au plus haut niveau de la criminalité organisée liée à l'immigration ou la traite d'êtres humains.

Il y a près de deux semaines, une Albanaise de 31 ans, passeuse présumée, a été arrêtée par la NCA. Il y a un mois, la police espagnole a annoncé le démantèlement d'un important réseau de passeurs albanais, en collaboration avec la NCA, donnant lieu à sept arrestations.

Le réseau, dont les activités remonteraient à 2014, demandait aux migrants de 3.000 à 15.000 euros pour les faire passer clandestinement à bord de ferries ou de cargos naviguant entre le nord de l'Espagne et la Grande-Bretagne, dans des conditions "dangereuses pour leur vie ou leur intégrité physique", avait expliqué la police espagnole.

Cocktails molotov 

A cette surpopulation s'est ajoutée le transfert temporaire de 700 personnes dimanche, après qu'un centre d'accueil où débarquent les migrants à Douvres a été attaqué avec des cocktails molotov, faisant deux blessés légers, dans un contexte de tensions dans la ville portuaire.

Le suspect a ensuite été retrouvé mort dans une station-service, selon la police, des informations de presse affirmant que l'homme a mis fin à ses jours.

La ministre de l'Intérieur Suella Braverman a évoqué des faits "bouleversants" sur Twitter, sa première expression publique ses derniers jours.

La patronne du "Home Office" a quitté le gouvernement de Liz Truss le 19 octobre, après avoir reconnu avoir envoyé indûment un document officiel depuis une adresse email personnelle.

Mais dans la foulée de son arrivée à Downing Street la semaine dernière, le nouveau chef du gouvernement Rishi Sunak l'a renommée six jours plus tard.

Sunak confirme sa confiance 

Mise sous pression par l'opposition travailliste, Suella Braverman a publié lundi un récit détaillé des événements. Si elle a transféré à six reprises des documents gouvernementaux vers sa boîte mail personnelle, ils n'étaient pas classés "secrets" ou "top secrets", ni n'étaient de nature à faire bouger les marchés financiers, a-t-elle assuré.

"J'ai été transparente à propos de mes erreurs", a-t-elle écrit dans sa lettre adressée à une commission parlementaire, estimant l'affaire "close".

Le porte-parole officiel du Premier ministre a assuré lundi que Suella Braverman a la pleine confiance de Rishi Sunak, et que celui-ci estime qu'elle a livré un "compte-rendu détaillé" des faits.

"Nous avons besoin d'actes de la part du Home Office (...) et pour le moment on ne voit rien", a fustigé sur Sky News la députée d'opposition Yvette Cooper, responsable des questions de sécurité au parti travailliste.

Rishi Sunak a promis "intégrité, professionnalisme et responsabilité, on n'a aucune de ces trois choses de la part de la ministre de l'Intérieur", a accusé Yvette Cooper.

Dans une lettre ouverte publiée lundi, plus de 120 associations et ONG ont exhorté la ministre à créer des voies sûres pour les demandeurs d'asile et respecter le droit international et Convention des Nations-Unies pour les réfugiés. "Alors", conclut la lettre, "vous auriez vraiment fait quelque chose qui vaut qu'on en rêve".


L'Allemagne aux urnes, sous pression de l'extrême droite et de Trump

Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
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  • Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.
  • Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

BERLIN : Alors qu'elle est déstabilisée par les crises, l'Allemagne vote dimanche pour des élections législatives où l'opposition conservatrice part largement favorite après une campagne bousculée par le retour au pouvoir de Donald Trump et l'essor de l'extrême droite.

Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.

« Nous traversons une période très incertaine », constatait Daniel Hofmann, rencontré à la sortie d'un bureau de vote à Berlin.

Selon cet urbaniste de 62 ans, qui se dit préoccupé par la « sécurité européenne » sur fond de guerre en Ukraine, le pays a besoin d'un « changement, une transformation ».

Récession économique, menace de guerre commerciale avec Washington, remise en cause du lien transatlantique et du « parapluie » américain sur lequel comptait Berlin pour assurer sa sécurité : c'est le « destin » de l'Allemagne qui est en jeu, a déclaré samedi le chef de file des conservateurs Friedrich Merz.

Ce dernier semble très bien placé pour devenir le prochain chancelier et donner un coup de barre à droite dans le pays, après l'ère du social-démocrate Olaf Scholz. D'après les derniers sondages, il recueillerait environ 30 % des intentions de vote.

Visiblement détendu, souriant et serrant de nombreuses mains, le conservateur de 69 ans a voté à Arnsberg, dans sa commune du Haut-Sauerland, à l'ouest.

Son rival social-démocrate, visage plus fermé, a lui aussi glissé son bulletin dans l'urne, à Potsdam, à l'est de Berlin.

Les électeurs ont jusqu'à 18 heures (17 heures GMT) pour voter. Les premiers sondages sortie des urnes seront publiés dans la foulée.

Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

Le parti anti-migrant et pro-russe a imposé ses thèmes de campagne, suite à plusieurs attaques et attentats meurtriers perpétrés par des étrangers sur le territoire allemand.

L'AfD a également bénéficié du soutien appuyé de l'entourage de Donald Trump pendant des semaines.

Son conseiller Elon Musk, l'homme le plus riche du monde, n'a cessé de promouvoir la tête de liste du parti allemand, Alice Weidel, sur sa plateforme X.

« AfD ! » a encore posté M. Musk dans la nuit de samedi à dimanche, accompagnant son message de drapeaux allemands.
Les élections législatives anticipées ont lieu la veille du troisième anniversaire de l'invasion russe en Ukraine, un événement particulièrement marquant en Allemagne.

Le conflit a mis fin à l'approvisionnement en gaz russe du pays, qui a accueilli plus d'un million d'Ukrainiens. La perspective d'une paix négociée « dans le dos » de Kiev et des Européens inquiète tout autant.

Interrogé sur ces élections allemandes, le président américain a répondu avec désinvolture qu'il souhaitait « bonne chance » à l'allié historique des États-Unis, qui ont leurs « propres problèmes ».

Le discours de son vice-président JD Vance à Munich, dans lequel il exhortait les partis traditionnels allemands à mettre fin à leur refus de gouverner avec l'extrême droite, a creusé un peu plus le fossé entre Washington et Berlin.

Friedrich Merz souhaite que l'Allemagne puisse « assumer un rôle de leader » en Europe.

Dans le système parlementaire allemand, il pourrait s'écouler des semaines, voire des mois, avant qu'un nouveau gouvernement ne soit constitué.

Pour former une coalition, le bloc mené par les conservateurs CDU/CSU devrait se tourner vers le parti social-démocrate (SPD), excluant ainsi toute alliance avec l'AfD, avec laquelle il a entretenu des relations tendues durant la campagne, notamment sur les questions d'immigration.

Les sondages lui attribuent 15 % des voix. Ce score serait son pire résultat depuis l'après-guerre et signerait probablement la fin de la carrière politique d'Olaf Scholz. Mais auparavant, le chancelier devra assurer la transition.

« J'espère que la formation du gouvernement sera achevée d'ici Pâques », soit le 20 avril, veut croire Friedrich Merz.

Un objectif difficile à atteindre si les deux partis qui ont dominé la politique allemande depuis 1945 sont contraints, faute de majorité de députés à eux deux, de devoir trouver un troisième partenaire.

La fragmentation au Parlement dépendra notamment des résultats de petits partis et de leur capacité ou non à franchir le seuil minimum de 5 % des suffrages pour entrer au Bundestag.


Sécurité européenne, Ukraine : réunion des ministres européens de la Défense lundi

Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
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  • Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien
  • Cette réunion des ministres de la Défense s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

PARIS : Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien et de renforcer la sécurité du Vieux continent, a-t-on appris dimanche auprès du ministère français des Armées.

Cette réunion, qui se tiendra dans l'après-midi à l'initiative de l'Estonie et de la France, rassemblera également les ministres de la Défense de Lituanie, de Lettonie, de Norvège, de Finlande, de Suède, du Danemark, des Pays-Bas, d'Allemagne, d'Italie, de Pologne et du Royaume-Uni, selon cette source.

À cette occasion, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, se rendra à Tallinn aux côtés de son homologue estonien Hanno Pevkur, après avoir participé aux célébrations de la fête nationale estonienne.

La France déploie environ 350 militaires en Estonie dans le cadre d'un bataillon multinational de l'OTAN.

Cette réunion des ministres de la Défense, trois ans jour pour jour après l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

La semaine passée, plusieurs chefs de gouvernement européens avaient été conviés à Paris par le président Emmanuel Macron. D'après un résumé obtenu de sources parlementaires, ils se seraient accordés sur la nécessité d'un « accord de paix durable s'appuyant sur des garanties de sécurité » pour Kiev, et auraient exprimé leur « disponibilité » à « augmenter leurs investissements » dans la défense.

Plusieurs pays membres avaient en revanche exprimé des réticences quant à l'envoi de troupes européennes en Ukraine, dans l'hypothèse d'un accord mettant fin aux hostilités.


Le ministre russe des Affaires étrangères effectue une visite en Turquie lundi

Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
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  • La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

ISTAMBUL : Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu en Turquie lundi, jour du troisième anniversaire du déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé dimanche des sources diplomatiques turques.

M. Lavrov doit s'entretenir à Ankara avec son homologue turc Hakan Fidan, ont indiqué ces mêmes sources, précisant que les deux hommes discuteraient notamment d'une solution au conflit ukrainien.

Dimanche, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a confirmé à l'agence Tass qu'une délégation menée par Sergueï Lavrov devait se rendre prochainement en Turquie pour y discuter d'« un large éventail de sujets ».

La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.

Mardi, en recevant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

Toutefois, ces dernières semaines, Moscou et Washington ont entamé un dialogue direct, alors que les relations se réchauffent entre Donald Trump et Vladimir Poutine.

Mardi, Russes et Américains se sont rencontrés en Arabie saoudite pour entamer le rétablissement de leurs relations, une réunion dénoncée par Volodymyr Zelensky qui redoute un accord sur l'Ukraine à leur insu.

M. Lavrov, dont la dernière visite en Turquie remonte à octobre, doit se rendre dans la foulée en Iran, un allié de la Russie.

La Turquie, qui est parvenue à maintenir ses liens avec Moscou et Kiev, fournit des drones de combat aux Ukrainiens mais n'a pas participé aux sanctions occidentales contre la Russie.

Ankara défend parallèlement l'intégrité territoriale de l'Ukraine et réclame la restitution de la Crimée du Sud, occupée par la Russie depuis 2014, au nom de la protection de la minorité tatare turcophone de cette péninsule.