PARIS: "Cap du paritarisme", refus répétés de CDI pénalisés: les sénateurs, majoritairement de droite, ont marqué de leur empreinte en commission le projet de loi "assurance chômage" qui sera débattu à partir de mardi en première lecture dans l'hémicycle du Palais du Luxembourg.
Adopté le 12 octobre par les députés en première lecture, ce texte amorce une nouvelle réforme de l'assurance chômage visant à faire évoluer les règles en fonction de l'état du marché du travail.
"Favorables" au principe de cette modulation que le gouvernement entend instaurer par décret, après concertation avec les partenaires sociaux, les rapporteurs Frédérique Puissat (LR) et Olivier Henno (centriste) ont souhaité l'inscrire en clair dans la loi.
Un nouvel article prévoit dans le code du travail la possibilité de moduler l'assurance chômage en fonction d'indicateurs conjoncturels, charge à la convention d'assurance chômage conclue entre les partenaires sociaux d'en fixer les paramètres.
Le gouvernement voit la modulation comme une première brique pour atteindre l'objectif de plein emploi en 2027, soit un taux de chômage d'environ 5% contre 7,4% actuellement. Une concertation entre le gouvernement et les partenaires sociaux sur cette modulation a débuté le 17 octobre et doit s'achever le 21 novembre.
Les rapporteurs ont également prévu qu'un demandeur d'emploi ayant refusé trois propositions de CDI à l'issue d'un CDD au cours des douze derniers mois ne puisse pas avoir droit à l'assurance chômage.
Ils estiment que la rédaction proposée "permet de bien cibler le refus caractérisé d'un salarié de s'engager dans un emploi stable".
A l'Assemblée nationale, des amendements prévoyant la même mesure avaient été déposés par des députés Horizons et MoDem, mais retirés par leurs auteurs, à la demande du gouvernement qui souhaitait retravailler une telle disposition.
Elle va en tout cas faire débat dans l'hémicycle, la gauche accusant la majorité sénatoriale de "durcir" le texte du gouvernement. A contrario, des sénateurs LR souhaitent aller plus loin en réduisant le nombre à un seul CDI refusé.
Quant à la disposition assimilant "l'abandon de poste" à une démission, introduite à l'Assemblée par des amendements de la majorité présidentielle et des LR, les sénateurs ont précisé la procédure applicable afin de la "sécuriser".
Ils estiment en effet "pas souhaitable qu'un salarié licencié à l'issue d'un abandon de poste dispose d'une situation plus favorable en matière d'assurance chômage qu'un salarié qui démissionne et qui n'est pas indemnisé".
«Lettre d'orientation»
C'est surtout sur l'article premier du texte, qui prévoit dans un premier temps de prolonger les règles actuelles de l'assurance chômage, que la majorité sénatoriale a marqué sa différence avec le gouvernement en commission.
"Nous souhaitons redonner la main aux partenaires sociaux", a expliqué à l'AFP Mme Puissat. "On maintient le cap du paritarisme qui correspond à l'ADN du Sénat, dans l'esprit de la loi Larcher" de 2007, a précisé M. Henno.
L'article 1er du projet de loi autorise le gouvernement à prendre par décret en Conseil d'État les mesures d'application du régime d'assurance chômage jusqu'au 31 décembre 2023. En commission, les sénateurs ont ramené cette limite au 31 août 2023.
Cette période "devra être utilisée pour engager des concertations destinées à faire évoluer la gouvernance de l'assurance chômage", a indiqué Mme Puissat.
Un amendement abroge les dispositions du code du travail prévoyant depuis 2018 la procédure de négociation d'un accord sur la base d'une "lettre de cadrage", afin de revenir à une "lettre d'orientation" qui "ne préempte pas la conclusion".
Autre point rectifié par les sénateurs en commission: les paramètres du bonus-malus, dispositif qui a vocation à limiter les contrats-courts. Ils ont notamment exclu du dispositif les fins de missions d'interim.
Un autre volet du projet de loi prévoit d'étendre la validation des acquis de l'expérience (VAE) aux "proches aidants et aidants familiaux" pour leur faciliter l'accès aux métiers du grand âge. Les sénateurs veulent l'ouvrir "à toute activité en lien avec une certification, afin de donner un nouvel élan à ce dispositif".