Ukraine: quelle «voie de sortie» possible pour un Poutine acculé?

Pour la France, Vladimir Poutine est lancé dans une «fuite en avant» (photo AFP)
Pour la France, Vladimir Poutine est lancé dans une «fuite en avant» (photo AFP)
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Publié le Samedi 08 octobre 2022

Ukraine: quelle «voie de sortie» possible pour un Poutine acculé?

  • Des négociations de paix sont inenvisageables dans le contexte actuel, et l'avenir se joue sur le front militaire, où l'Ukraine a repris l'offensive
  • Vladimir Poutine reste opaque, illisible, et personne ne sait jusqu'où prendre au sérieux son «chantage nucléaire»

PARIS : Son armée accumule les revers, des fissures apparaissent en Russie même, mais rien ne semble arrêter la «fuite en avant» de Vladimir Poutine en Ukraine. Entre négociations, impossibles à ce stade, et menaces nucléaires du président russe, aucun scenario de sortie de guerre ne se dessine.

Avec l'annexion de territoires ukrainiens, la mobilisation de centaines de milliers de Russes et la réthorique enflammée du Kremlin, «on s'éloigne plus d'une solution qu'on s'en approche», résume la chercheuse Marie Dumoulin, de l'European Coucil on Foreign relations (ECFR).

Pour la France, Vladimir Poutine est lancé dans une «fuite en avant». Les Etats-Unis, eux, mettent en garde contre une «apocalypse nucléaire», et s'interrogent sur les options de Vladimir Poutine.

«Comment peut-il s'en sortir? Comment peut-il se positionner de façon à ni perdre la face, ni perdre une portion significative de son pouvoir en Russie?», a déclaré jeudi le président Joe Biden, illustrant les questions qui hantent les chancelleries occidentales quant aux buts du président russe et la façon de mettre fin à la guerre.

«La seule sortie de ce conflit, c'est que la Russie quitte l'Ukraine», a lancé depuis Prague la Première ministre finlandaise Sanna Marin, opposée comme les pays d'Europe de l'est à tout compromis avec la Russie de Vladimir Poutine.

Mais le retrait russe n'est pas à l'ordre du jour.

- Pas de négociations à court terme -

Des négociations de paix sont inenvisageables dans le contexte actuel, et l'avenir se joue sur le front militaire, où l'Ukraine a repris l'offensive.

«Nous sommes toujours dans un temps de la guerre», a reconnu jeudi dans une interview à des journaux d'Europe de l'Est Emmanuel Macron, longtemps soupçonné d'avoir poussé à des négociations et d'avoir été trop conciliant vis à vis de la Russie.

Pour autant, la guerre «se terminera par un traité de paix, mais au moment et dans les termes choisis par les Ukrainiens», a-t-il ajouté - même si Paris répète qu'une sortie de guerre devra aussi prendre en compte les impératifs de sécurité européens.

Côté ukrainien, «ils ne s'arrêteront pas avant d'avoir reconquis les territoires et d'avoir infligé une défaite militaire à la Russie» estime Mme Dumoulin, de retour d'Ukraine. Tout en admettant ignorer «à quel moment les Ukrainiens considèreront avoir regagné suffisamment de territoires», ni si la reconquête de la Crimée sera toujours sur la table.

- «Blessé et dangereux» -

Qualifié par des diplomates d'«ours blessé», et donc de plus en plus dangereux, Vladimir Poutine reste opaque, illisible, et personne ne sait jusqu'où prendre au sérieux son «chantage nucléaire».

«Aujourd'hui il est en difficulté, il y a une guerre qu'il n'arrive pas à gagner, qu'est ce qui le satisferait ? On n'a pas de réponse. Mais l'escalade verticale est un risque. Un dictateur ne peut pas perdre une guerre, car s'il perd cela veut dire qu'il est mort», commentait récemment une source diplomatique française.

Nombre d'analystes exhortent l'Europe et les Etats-Unis à ne pas céder au «chantage nucléaire» de Vladimir Poutine et à rester solide dans leur soutien à l'Ukraine.

Le président russe «est en train de perdre la guerre conventionnelle qu'il a lancée. Il espère que les références aux armes nucléaires dissuaderont les démocraties de livrer des armes à l'Ukraine et lui permettront de gagner du temps pour ralentir l'offensive ukrainienne», écrit l'historien américain Timothy Snyder sur son site.

«La Russie essaye de gagner du temps dans l'espoir que les pays européens vont s'effondrer avant elle», estime aussi le chercheur Joris von Bladel dans une note pour le Belgian Royal Institute for International Relations.

- Craquements russes ? -

Une «porte de sortie», littéralement, serait l'effondrement du régime de Poutine, estiment des chercheurs.

Ils s'appuient sur les signes de mécontentement récemment apparus au sein de l'élite russe face aux défaites en Ukraine, notamment les critiques acerbes du dirigeant tchétchène Ramzan Kadyrov ou du fondateur du groupe paramilitaire Wagner, Evgueni Prigojine.

Plusieurs officiels et propagandistes ont aussi critiqué la manière chaotique et aléatoire dont est menée la mobilisation partielle qui a poussé des dizaines de milliers de Russes vers l'exil.

L'élite russe, contrairement à Poutine, ne voit pas l'Ukraine comme «un problème existentiel» pour la Russie, rappelle Tatiana Stanovaya, chercheuse au Carnegie.

«La question clé est de savoir si les élites russes et la société en général sont préparées à le suivre dans son voyage vers l'enfer, ou si Poutine, en doublant la mise de son pari désastreux en Ukraine, a seulement ouvert la voie à sa propre chute», écrit-elle pour Foreign Policy cette semaine.

Selon le Washington Post vendredi, un membre du cercle proche de Poutine lui aurait directement exprimé son désaccord sur la façon de mener la guerre en Ukraine. Toutefois, il n'y a pas de signes que le régime soit sur le point d'être renversé, selon les sources du renseignement interrogées par le journal.

«Il ne faut pas prendre nos rêves pour des réalités», tempère également Marie Dumoulin, pour qui les tensions entre «clans internes au système» ne remettent pas en cause le président russe lui-même.

«Personne ne sait quand ça arrivera, selon quel scénario, et qui viendra après Poutine», conclut-elle.


Inde: l'opposition fustige Modi et ses propos anti-musulmans

Le Premier ministre indien et chef du parti au pouvoir Bharatiya Janata (BJP), Narendra Modi (Photo, AFP).
Le Premier ministre indien et chef du parti au pouvoir Bharatiya Janata (BJP), Narendra Modi (Photo, AFP).
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  • M. Modi a offert au parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) deux victoires écrasantes en 2014 et 2019
  • Les analystes politiques l'ont donné vainqueur avant même les élections générales qui ont débuté le 19 avril

NEW DELHI: L'opposition indienne a accusé jeudi le Premier ministre Narendra Modi de tenir des propos stigmatisant les musulmans et alimentant, en plein processus électoral, les tensions sectaires dans la plus grande démocratie du monde, constitutionnellement laïque.

M. Modi déploie "son jeu habituel consistant à diviser les hindous et les musulmans", a déclaré jeudi P. Chidambaram, ancien ministre des Finances et membre influent du Congrès, principal parti d'opposition,

"Le monde observe et analyse les déclarations du Premier ministre indien, qui ne sont pas à la gloire de l'Inde", a-t-il ajouté.

M. Modi a offert au parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) deux victoires écrasantes en 2014 et 2019 en jouant sur la fibre religieuse de l'électorat hindou.

Agé de 73 ans et encore très populaire dans l'ensemble du pays, le Premier ministre brigue un troisième mandat à la tête du pays.

Les analystes politiques l'ont donné vainqueur avant même les élections générales qui ont débuté le 19 avril et se déroulent en sept phases jusqu'au 1er juin.

M. Modi a présenté mardi sa candidature au siège de député de Varanasi (Bénarès), cité sacrée de l'hindouisme, dans l'Etat de l'Uttar Pradesh (nord), qu'il occupe depuis une décennie.

L'opposition et les défenseurs des droits accusent M. Modi de favoriser les hindous, majoritaires dans le pays, au détriment d'importantes minorités, dont 210 millions d'Indiens musulmans, inquiètes pour leur avenir.

M. Modi a récemment suscité l'indignation dans les rangs de l'opposition en accusant le Congrès de vouloir distribuer la "richesse nationale" aux "infiltrés", "à ceux qui ont le plus d'enfants", désignant ainsi la communauté musulmane.

L'opposition a saisi les autorités électorales qui n'ont pas sanctionné le Premier ministre. L'Inde est constitutionnellement laïque et son code électoral interdit toute campagne fondée sur des "sentiments communautaires".

Dans un entretien mardi sur la chaîne d'information continue News18, le chef du gouvernement s'est défendu d'alimenter et d'exploiter tout clivage entre hindous et musulmans.

Discrimination 

"Le jour où je commencerai à parler des hindous-musulmans sera celui où je perdrai ma capacité à mener une vie publique", a-t-il affirmé en hindi.

Le lendemain, en plein rassemblement électoral, Narendra Modi accusait le Congrès d'orchestrer un "jihad par le vote" pour que les musulmans se prononcent contre lui.

Au début de la semaine, Madhavi Latha, actrice et candidate du BJP à Hyderabad (sud), s'est autorisée, dans un bureau de vote, à vérifier que la carte électorale de musulmanes correspondait à leur identité, exigeant qu'elles ôtent leur voile.

La police de la ville a ouvert une enquête sur l'incident.

Au total, 968 millions d'Indiens sont appelés à élire les 543 membres de la chambre basse, soit plus que la population totale des Etats-Unis, de l'Union européenne et de la Russie réunis.


L'axe Pékin-Moscou, facteur de «stabilité» et de «paix» selon Xi et Poutine

Le président russe Vladimir Poutine et le président chinois Xi Jinping assistent à un concert marquant le 75e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre la Russie et la Chine (Photo, AFP).
Le président russe Vladimir Poutine et le président chinois Xi Jinping assistent à un concert marquant le 75e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre la Russie et la Chine (Photo, AFP).
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  • Tout juste de retour d'une tournée en Europe, Xi Jinping y a défendu le droit de maintenir avec son voisin russe des liens économiques normaux
  • Vladimir Poutine est arrivé jeudi matin à Pékin pour une visite de deux jours, son premier voyage à l'étranger depuis sa réélection en mars et son deuxième en Chine en un peu plus de six mois

PEKIN: Xi Jinping et Vladimir Poutine ont défendu jeudi l'axe Pékin-Moscou comme un facteur de "stabilité" et de "paix" dans le monde, le dirigeant russe espérant un soutien accru de la Chine à sa guerre en Ukraine.

La relation Chine-Russie "est non seulement dans l'intérêt fondamental des deux pays et des deux peuples, mais elle est également propice à la paix", a estimé Xi Jinping, lors d'une rencontre avec son homologue à Pékin.

Et "la Chine est prête à travailler avec la Russie pour (...) soutenir l'équité et la justice dans le monde". "La relation Chine-Russie aujourd'hui a été durement acquise et les deux parties doivent la chérir et la nourrir", a-t-il ajouté.

Cette relation est "un facteur de stabilité sur la scène internationale", a assuré de son côté Vladimir Poutine, selon le Kremlin. Elle "n'est pas opportuniste et elle n'est dirigée contre personne".

"Ensemble, nous soutenons les principes de justice et un ordre démocratique mondial reflétant les réalités multipolaires et fondé sur la loi internationale", a-t-il déclaré.

Après leur entretien bilatéral, les deux hommes ont signé un communiqué commun pour approfondir le "partenariat stratégique global" sino-russe, selon l'agence officielle Chine nouvelle.

«Reconnaissant»

Vladimir Poutine est arrivé jeudi matin à Pékin pour une visite de deux jours, son premier voyage à l'étranger depuis sa réélection en mars et son deuxième en Chine en un peu plus de six mois.

Quelques heures plus tôt, il s'était félicité des avancées de l'armée russe en Ukraine.

Dans leur communiqué commun jeudi, Pékin et Moscou jugent "nécessaire" d'éviter toute décision contribuant "à la prolongation des hostilités et à une nouvelle escalade du conflit".

Une formulation qui semble viser Européens et Américains, la Chine et la Russie affirmant régulièrement que ce sont les livraisons d'armes occidentales à l'Ukraine qui font durer la guerre.

Le géant asiatique est une planche de salut économique cruciale pour la Russie, en proie aux lourdes sanctions occidentales.

Tout juste de retour d'une tournée en Europe, Xi Jinping y a défendu le droit de maintenir avec son voisin russe des liens économiques normaux. La Chine bénéficie notamment d'importations d'énergie russe bon marché.

S'exprimant devant la presse au côté de Xi Jinping, Vladimir Poutine s'est dit jeudi "reconnaissant" envers la Chine pour ses "initiatives" de paix dans la crise ukrainienne, selon les agences russes.

La Chine appelle régulièrement au respect de l'intégrité territoriale de tous les pays (sous-entendu Ukraine comprise) mais exhorte aussi à prendre en considération les préoccupations de sécurité de la Russie.

Ligne rouge 

"Les deux parties sont d'accord sur le fait qu'une solution politique à la crise en Ukraine est la voie à suivre", a déclaré M. Xi face à la presse.

"La Chine espère que la paix et la stabilité seront rapidement rétablies sur le continent européen et continuera à jouer un rôle constructif à cette fin", a-t-il promis.

Par ailleurs, Vladimir Poutine a jugé "nuisible" toute alliance politique et militaire "fermée" en Asie-Pacifique, où son partenaire chinois est en concurrence avec les Etats-Unis, qui coopèrent avec l'Australie et le Royaume-Uni pour contrer l'influence de Pékin.

Le président russe a également rencontré jeudi après-midi le Premier ministre Li Qiang, lequel a déclaré que Pékin souhaitait "continuer à approfondir la coopération dans divers domaines" avec Moscou.

Ces liens sino-russes étroits sont vus avec une suspicion croissante en Occident.

Washington a fixé une ligne rouge à Pékin - ne pas fournir directement d'armes à Moscou - et dit n'avoir à ce jour pas eu la preuve du contraire.

Mais les Etats-Unis estiment que le soutien économique chinois permet tout de même à la Russie de renforcer sa production de missiles, de drones et de chars.

Banques prudentes 

Les échanges commerciaux sino-russes ont explosé depuis l'invasion de l'Ukraine, dépassant les 220 milliards d'euros en 2023, selon les douanes chinoises.

Les exportations chinoises vers le voisin russe ont toutefois baissé en mars et en avril, après la menace de sanctions américaines.

Car un décret signé en décembre par le président américain Joe Biden autorise désormais des sanctions secondaires contre les banques étrangères liées à la machine de guerre russe. Le Trésor américain peut les exclure du système financier mondial, fondé sur le dollar.

Plusieurs banques chinoises ont ainsi interrompu ou réduit leurs transactions avec leurs clients russes, selon huit ressortissants des deux pays impliqués dans le commerce bilatéral.

La Chine cherche parallèlement à renouer ses liens avec les Etats-Unis et devrait limiter le renforcement de sa coopération avec la Russie, selon des analystes.

Moscou et Pékin ont toutefois signé jeudi plusieurs accords commerciaux.

Vendredi, Vladimir Poutine doit se rendre à Harbin (nord-est) pour visiter une foire dédiée au commerce et aux investissements.


Le Premier ministre slovaque dans un état stable mais toujours «très grave»

Le Premier ministre slovaque Robert Fico transporté d'un hélicoptère par des médecins et ses agents de sécurité à l'hôpital de Banska Bystrica, en Slovaquie, où il doit être soigné, le 15 mai 2024. (Photo de AFP)
Le Premier ministre slovaque Robert Fico transporté d'un hélicoptère par des médecins et ses agents de sécurité à l'hôpital de Banska Bystrica, en Slovaquie, où il doit être soigné, le 15 mai 2024. (Photo de AFP)
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  • Le dirigeant de 59 ans a subi mercredi «une opération de cinq heures», a précisé la directrice de l'établissement Miriam Lapunikova
  • Selon le vice-Premier ministre, il s'agit d'«une attaque politique» à laquelle il faudra «réagir en conséquence»

BANSCA BYSTRICA: Le Premier ministre slovaque Robert Fico se trouve jeudi matin dans un état stable mais toujours "très grave", après avoir été blessé par balle la veille, a déclaré le vice-Premier ministre Robert Kalinak.

"Cette nuit, les médecins ont réussi à stabiliser l'état du patient", a déclaré M. Kalinak, qui est également ministre de la Défense. "Malheureusement, l'état reste très grave, car ses blessures sont compliquées", a-t-il ajouté lors d'un point de presse devant l'hôpital Roosevelt de Banska Bystrica (centre).

Le dirigeant de 59 ans a subi mercredi "une opération de cinq heures", a précisé la directrice de l'établissement Miriam Lapunikova, confirmant qu'il est toujours dans un état "vraiment très grave" et va rester en soins intensifs.

Robert Fico a été touché par balle "plusieurs fois", selon sa page officielle Facebook, mercredi en début d'après-midi après une réunion de cabinet à Handlova, dans le centre de la Slovaquie. L'attentat a suscité une vive émotion dans le pays d'Europe centrale et une vague de condamnations internationales.

Selon M. Kalinak, il s'agit d'"une attaque politique" à laquelle il faudra "réagir en conséquence".

La police a arrêté l'assaillant présumé, un homme de 71 ans identifié par les médias slovaques comme un écrivain local. Aucune information n'a été donnée à ce stade sur ses motivations.