France: au procès de l'attentat de Nice, le récit d'une mère qui s'est jetée sous le camion-bélier

Mohamed Lahouaiej-Bouhlel a volontairement foncé sur la foule avec un camion de 19 tonnes, faisant 86 morts et plus de 450 blessés (Photo, AFP).
Mohamed Lahouaiej-Bouhlel a volontairement foncé sur la foule avec un camion de 19 tonnes, faisant 86 morts et plus de 450 blessés (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Vendredi 07 octobre 2022

France: au procès de l'attentat de Nice, le récit d'une mère qui s'est jetée sous le camion-bélier

  • Le soir du 14 juillet 2016, Hager Ben Aouissi et sa fillette attendaient leur tour près d'un stand de bonbons sur la Promenade des Anglais quand soudain la petite fille s'exclame: «Maman, il y a un camion!»
  • Hager reste allongée. «Je ne sais pas si je suis morte ou vivante». Des cris de sa fillette la sortent de sa torpeur. «Maman, tu saignes... Ma fille avait la mâchoire qui tremblait, le regard terrifié»

PARIS : "J'ai regardé ma fille et me suis dit: "Je ne veux pas voir mon bébé broyé sous les roues de ce camion'": une rescapée de l’attentat de Nice en 2016 a raconté vendredi, devant la cour d'assises spéciale de Paris, comment elle s'était jetée sous le camion-bélier pour sauver son enfant.

Le soir du 14 juillet 2016, Hager Ben Aouissi et sa fillette attendaient leur tour près d'un stand de bonbons sur la Promenade des Anglais quand soudain la petite fille s'exclame: "Maman, il y a un camion!".

Les terrifiantes images de vidéosurveillance diffusées à l'audience au début du procès ont montré le camion de 19 tonnes conduit par un Tunisien, Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, foncer volontairement vers ce stand entouré d'une foule dense, essentiellement des familles avec des enfants, en ce soir de fête nationale française.

Lunettes noires à cause de séquelles sur un oeil, Hager, 38 ans, soutenue à la barre par sa jeune soeur Lobna, poursuit son récit d'une voix essoufflée: "j'ai le sentiment horrible que ma fille va mourir".

"Courir? Le camion arrivait trop vite. Je n'avais pas le temps. Une seule chose comptait: protéger ma fille. Je me dis que je vais essayer de passer sous le camion entre ses roues".

Elle demande à sa fille de se coucher sur le sol, lui passe une main sous la tête et la couvre de son corps. Le camion arrive.

"Les choses vont très vite. Je sens un choc. C'est le noir total, un bruit atroce comme un rideau de fer qui se baisse. Et puis la lumière, le camion nous dépasse".

Hager reste allongée. "Je ne sais pas si je suis morte ou vivante". Des cris de sa fillette la sortent de sa torpeur. "Maman, tu saignes... Ma fille avait la mâchoire qui tremblait, le regard terrifié". Près d'elles, des corps broyés, déchiquetés.

«Comme un zombie»

"Ma fille se souvient de tout. Moi, j'ai perdu la mémoire de certains moments de ce soir-là. J'aimerais tellement que ce soit sa mémoire à elle qui fasse défaut et pas la mienne", confie-t-elle.

Grâce à son geste insensé, Hager a sauvé sa fille, âgée aujourd'hui d'une dizaine d'années mais celle-ci souffre de séquelles psychologiques.

Elle doit être entendue par la cour mardi en visioconférence depuis Nice.

Après l'attentat, la fillette était comme "un zombie", raconte Hager: elle doit remettre des couches, reprend le biberon...

"Elle a aussi repris la tétine. Aujourd'hui encore, elle ne sort jamais sans sa tétine. Elle n'a plus jamais dormi dans sa chambre. Pendant les trois ans qui ont suivi, elle ne dormait qu'à cheval sur moi, dans le canapé", raconte Hager.

Sa fille est "en hyper vigilance". Chaque été quand le mois de juillet arrive, "elle fait des crises de panique".

Il a fallu déscolariser la petite fille qui ne supporte plus ni les cris, ni les bousculades.

"Les regards, les moqueries des autres sont devenues pour elle insupportables. Elle s'empêche de vivre, elle se déteste, elle se trouve nulle", poursuit Hager en pleurant. L'enfant est aujourd'hui dans une petite structure accueillant seulement sept élèves.

Hager parle de l'enfance "gâchée" de sa fille, rythmée désormais par les rendez-vous quasi quotidiens chez les psy.

La fillette a régulièrement des "crises de reviviscence" qui la replonge dans l'horreur de la nuit du 14 juillet.

Comme beaucoup d'adultes survivants, l'enfant souffre aussi d'un complexe de culpabilité. "Elle dit que c'est elle qui voulait des bonbons et que c'est à cause d'elle" que nous nous sommes retrouvés dans la trajectoire du camion, dit sa mère effondrée.

Elle se reprend et très digne, le ton plus ferme, elle dit: "Nos enfants ne retrouveront jamais leur enfance, volée, brisée. Mais on peut leur faire comprendre qu'il y a une justice, qu'une horreur pareille, ça ne reste pas impuni".


La manifestation de soutien à Le Pen "n'est pas un coup de force", dit Bardella

La présidente du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), l'eurodéputé Jordan Bardella (G) et la présidente du groupe parlementaire du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, quittent le palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 26 août 2024, après leur rencontre avec le président français. (Photo by Bertrand GUAY / AFP)
La présidente du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), l'eurodéputé Jordan Bardella (G) et la présidente du groupe parlementaire du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, quittent le palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 26 août 2024, après leur rencontre avec le président français. (Photo by Bertrand GUAY / AFP)
Short Url
  • « Ce n'est pas un coup de force, c'est au contraire une défense très claire et très profonde de l'État de droit et de la démocratie française.
  • « Cela nous semblait nécessaire que nous puissions nous exprimer directement aux Français.

STRASBOURG : La manifestation de soutien à Marine Le Pen prévue dimanche à Paris « n'est pas un coup de force », mais une mobilisation « pour la démocratie », a assuré mercredi Jordan Bardella, président du Rassemblement national, à des journalistes au Parlement européen à Strasbourg.

« Ce n'est pas un coup de force, c'est au contraire une défense très claire et très profonde de l'État de droit et de la démocratie française. C'est une mobilisation en réalité, non pas contre, mais pour la démocratie française », a déclaré l'eurodéputé au sujet de ce rassemblement annoncé par le RN après la condamnation de la triple candidate à la présidentielle à une peine d'inéligibilité immédiate.

« Cela nous semblait nécessaire (...) que nous puissions nous exprimer directement aux Français par l'intermédiaire de ces discours qui seront prononcés dimanche avec l'ensemble de nos cadres, de nos parlementaires et de nos militants », a-t-il ajouté.

Cette condamnation, que le RN qualifie de « scandale démocratique », compromet grandement ses chances de concourir une quatrième fois à la fonction suprême en 2027.

Pour Jordan Bardella, cela ne change « absolument rien » à sa relation avec Marine Le Pen, « si ce n'est qu'elle est peut-être encore plus forte qu'elle ne l'a été par le passé ».

« Je suis à ses côtés, je vais continuer à l'être (...) Nous allons évidemment mener le combat », a assuré l'eurodéputé qui faisait son retour au Parlement européen après avoir manqué les deux premiers jours de la session.

Il a qualifié de « bonne nouvelle » l'annonce de la justice qu'une décision en appel devrait être rendue « à l'été 2026 », donc bien avant la présidentielle.


Condamnation de Marine Le Pen: Macron rappelle au gouvernement l'indépendance de la justice

Le président français Emmanuel Macron (Photo AFP)
Le président français Emmanuel Macron (Photo AFP)
Short Url
  • Le président français Emmanuel Macron a « rappelé » que l'autorité judiciaire est indépendante et que les magistrats doivent être protégés
  • Le chef de l'État a également affirmé que « tous les justiciables ont droit au recours ».

PARIS : Mercredi en Conseil des ministres, le président français Emmanuel Macron a « rappelé » que l'autorité judiciaire est indépendante et que les magistrats doivent être protégés, après la condamnation de la cheffe de l'extrême droite Marine Le Pen qui a suscité des attaques contre les juges, ont rapporté des participants.

Le chef de l'État a également affirmé que « tous les justiciables ont droit au recours », selon ces sources. La justice a déjà fait savoir qu'un nouveau procès en appel pourrait se tenir dans des délais qui laissent une porte ouverte à une éventuelle candidature présidentielle en 2027 de la leader du Rassemblement national (RN), principale formation d'extrême droite française. 

Devant la presse, à l'issue du Conseil des ministres, la porte-parole du gouvernement Sophie Primas a rapporté mercredi les propos du chef de l'État.

« La première chose qu'il a rappelée, a poursuivi Mme Primas, est que la justice est évidemment indépendante et prend ses décisions en toute indépendance, et qu'il faut donc la respecter comme l'un des piliers de notre démocratie. La première, a-t-elle dit, est que la justice est indépendante et qu'elle prend ses décisions en toute indépendance et qu'il faut donc la respecter comme un pilier de notre démocratie.

« La troisième chose, pour rappeler que les menaces qui sont faites à l'encontre des magistrats sont absolument insupportables et intolérables, puisque nous sommes encore une fois dans une démocratie. Et la justice est tout à fait indépendante et doit être respectée », a-t-elle ajouté.

« Et la troisième chose, pour rappeler que chacun a le droit à une justice équivalente et que le droit est le même pour tous. »


Bac: l'épreuve de maths en première se précise pour l'an prochain

La ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Elisabeth Borne, lors d'une conférence de presse à l'issue d'une visite à l'école élémentaire Claude-Monnet à Rueil-Malmaison, en banlieue parisienne, le 28 mars 2025. (Photo Thomas SAMSON / AFP)
La ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Elisabeth Borne, lors d'une conférence de presse à l'issue d'une visite à l'école élémentaire Claude-Monnet à Rueil-Malmaison, en banlieue parisienne, le 28 mars 2025. (Photo Thomas SAMSON / AFP)
Short Url
  • Le Conseil supérieur de l'éducation (CSE, qui rassemble syndicats, associations de parents, collectivités, etc.) a majoritairement voté contre le projet de décret et d'arrêté
  • L'ex-ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal, avait annoncé en décembre 2023 la création de cet examen sur le modèle de l'épreuve anticipée de français pour le baccalauréat en fin de première,

PARIS : Le projet d'épreuve de mathématiques en classe de première pour l'an prochain, qui vise à mettre en œuvre le « choc des savoirs » annoncé par l'ex-ministre de l'Éducation nationale Gabriel Attal, a été présenté mardi devant une instance consultative de l'Éducation nationale, étape-clé avant sa publication.

Le Conseil supérieur de l'éducation (CSE, qui rassemble syndicats, associations de parents, collectivités, etc.) a majoritairement voté contre le projet de décret et d'arrêté instaurant cette « épreuve terminale de culture mathématique aux baccalauréats général et technologique ».

Ils ont recueilli 0 voix pour, 27 contre, 31 abstentions et 4 refus de prendre part au vote (l'administration ne votant pas dans cette instance), un vote indicatif qui n'empêche pas la mise en œuvre de la réforme, selon des sources syndicales.

Cette épreuve écrite d'une durée de deux heures, qui entrera en vigueur au printemps 2026, sera « affectée d'un coefficient 2 » (points pris sur l’épreuve du Grand oral en terminale), selon ces textes, consultés par l'AFP.

L'ex-ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal, avait annoncé en décembre 2023 la création de cet examen sur le modèle de l'épreuve anticipée de français pour le baccalauréat en fin de première, un projet confirmé en novembre 2024 par sa successeure, Anne Genetet.

Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, principal syndicat du second degré (collèges et lycées), qualifie auprès de l'AFP la mesure de « rafistolage supplémentaire du bac Blanquer », décidé en 2019 par l'ex-ministre Jean-Michel Blanquer.

Pour Jérôme Fournier, secrétaire national du SE Unsa, la nouvelle épreuve « alourdit la fin de l'année pour les élèves et les correcteurs ».

La première partie, qui est commune à tous les élèves, sera sous forme de QCM et pourrait être corrigée automatiquement, ce à quoi « de nombreuses organisations syndicales sont opposées », a-t-il ajouté, tandis que la deuxième partie devrait consister en des résolutions de problèmes.

Des projets de textes ont par ailleurs été votés au CSE relatif à « la mise en place du +parcours renforcé+ en classe de seconde générale et technologique » ou professionnelle à partir de la rentrée 2026, avec trois votes pour, 45 contre et 13 abstentions.

Mis en place par la ministre Élisabeth Borne, ce parcours est destiné aux élèves n’ayant pas obtenu le diplôme du brevet. Son organisation relèvera « de l’autonomie de l’établissement sur la base indicative de deux heures hebdomadaires sur tout ou partie de l’année », selon le projet d'arrêté.

Sophie Vénétitay déplore « une coquille vide » tandis que Tristan Brams (CFDT Éducation) regrette l'absence de « moyens supplémentaires ».