Les écoliers irakiens, victimes de l’agression iranienne

Plusieurs écoliers se réfugient par crainte de nouveaux bombardements par des drones (Photo fournie).
Plusieurs écoliers se réfugient par crainte de nouveaux bombardements par des drones (Photo fournie).
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Publié le Vendredi 30 septembre 2022

Les écoliers irakiens, victimes de l’agression iranienne

  • Des civils sont morts lorsque Téhéran a lancé un assaut aérien massif sur le nord de l'Irak, mercredi
  • Selon les analystes, les frappes visaient à détourner l'attention des manifestations qui secouent la République islamique

ERBIL, Kurdistan irakien: La photo d'une fillette kurde ensanglantée, dont l'école dans le nord du Kurdistan irakien a été attaquée mercredi par des drones et des missiles iraniens, a donné un visage humain au coût croissant de l'assaut aveugle de Téhéran contre la région semi-autonome.

Des clips postés par des journalistes ont montré des écoliers kurdes terrifiés, escortés en lieu sûr et se réfugiant sur des collines près de la ville de Koya, ce que les analystes ont décrit comme un acte d'agression intolérable visant à détourner l'attention internationale des manifestations en cours dans la République islamique.

Les vidéos tournées sur des téléphones portables partagées avec les chaînes d'information locales montrent des enfants de l'école primaire hurlant en réaction à des explosions proches, tandis que des parents et des enseignants paniqués tentent de les éloigner.

Ce mercredi, le Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) de l'Iran a lancé plusieurs missiles balistiques Fateh 360, un nouveau missile que l'Iran a testé pour la première fois en septembre, et des drones suicide Shahed 136, les mêmes que ceux récemment déployés par la Russie dans la guerre ukrainienne, sur des cibles dans la région du Kurdistan de l'Irak voisin.

Les cibles présumées étaient les sièges des groupes dissidents kurdes iraniens. Au moins 14 personnes auraient été tuées et 58 blessées, dont des femmes et des enfants.

Les groupes dissidents kurdes visés par ces frappes sont le Parti démocratique du Kurdistan d'Iran (PDKI), le Parti de la liberté du Kurdistan et Komala. Selon les informations locales, l'école primaire Rozhhalat de Koya, située à proximité de la base principale du PDKI dans la région du Kurdistan irakien, a également été touchée dans ce que les experts considèrent comme une attaque délibérée.

«Il semble que l'Iran ait agi sur la base de renseignements géospatiaux pour les frappes, mais il reste à savoir à quel point ces renseignements étaient précis», a déclaré à Arab News Ceng Sagnic, responsable de l'analyse chez TAM-C Solutions, une société multinationale de conseil et de renseignements géopolitiques.

Une photo fournie par le bureau de l’armée iranienne le 25 août 2022 montre le lancement d’un drone militaire lors d’un exercice dans un lieu non divulgué en Iran. (Photo, AFP)

«Il est assez improbable que les lieux ciblés aient été choisis au hasard pour les frappes, car elles se sont produites dans des zones où l'activité du PDKI est élevée, ce qui peut suggérer qu'une école a été choisie à dessein.»

«Téhéran avait déjà pris pour cible des zones peuplées de civils dans la région du Kurdistan irakien, dans le but de faire pression à la fois sur la population locale et sur le GRK (gouvernement régional du Kurdistan) contre les groupes dissidents kurdes iraniens», a-t-il signalé.

Osamah Golpy, un journaliste kurde qui se trouvait à Koya mercredi, a affirmé que la plupart des attaques précédentes menées par l'Iran contre des bases dissidentes au Kurdistan irakien avaient «presque toujours lieu la nuit».

«Cette fois, l'Iran a choisi d'attaquer en plein jour car il voulait une couverture médiatique, comme pour envoyer un message», a-t-il déclaré à Arab News. «L'Iran voulait montrer qu'il peut mener des attaques contre les Peshmerga (les forces armées du GRK) et les civils pour terroriser les groupes dissidents (kurdes iraniens) et envoyer un message à la région du Kurdistan irakien, notamment à la population.»

Ces attaques ont coïncidé avec les manifestations anti-régime qui ont eu lieu dans tout l'Iran après la mort de Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans, détenue par la police des mœurs iranienne au motif qu'elle ne portait pas correctement le hijab obligatoire.

Les frappes iraniennes sur la région du Kurdistan irakien ont été diffusées en direct par la télévision iranienne tout au long de la journée. Golpy pense qu'il s'agissait d'un geste intentionnel de la part de Téhéran afin de «fixer l'ordre du jour».

Conséquences des attaques transfrontalières iraniennes à Zargwez, où les partis kurdes iraniens en exil ont des bureaux, à environ 15 km de Sulaimaniyah, en Irak, le 28 septembre 2022. (Photo, AFP)

«Il y a moins de couverture des manifestations et plus de couverture des attaques iraniennes à l'intérieur du Kurdistan irakien», a-t-il souligné. «D'après ce que je comprends, c'était intentionnel et cela a été programmé pour envoyer ces messages à diverses parties prenantes, notamment la région du Kurdistan et les groupes dissidents kurdes iraniens.»

Sagnic, de TAM-C Solutions, soupçonne également que les attaques du CGRI sont destinées à détourner l'attention des manifestations nationales en cours. «Les frappes transfrontalières généralisées de l'Iran qui coïncident avec le plus grand mouvement de protestation contre le régime ne semblent pas être une simple coïncidence», a-t-il expliqué.

«L'Iran a particulièrement utilisé les attaques transfrontalières au Kurdistan irakien comme outil de diversion pour l'opinion publique en période de crise, la plupart de ces attaques étant présentées comme des représailles contre les États-Unis et Israël.»

Sagnic estime qu'une «campagne similaire mais élargie» est probablement à l'origine des dernières frappes, ce qui, ajoute-t-il, est «mis en évidence par une tentative ratée de viser des installations militaires américaines à Erbil (la capitale kurde irakienne)».

«À mon avis, l'Iran a peut-être tenté de modifier le cours du débat public au niveau national en désignant un “ennemi” extérieur qui serait soutenu par l'Occident. Les affirmations de Téhéran selon lesquelles l'agitation publique actuelle est alimentée par les États-Unis viennent compléter cette théorie», a-t-il ajouté.

Sagnic ne pense pas que l'Iran ait lancé l'assaut transfrontalier à titre préventif de manière à dissuader ou empêcher les groupes kurdes iraniens d'intervenir activement dans la région occidentale à majorité kurde de l'Iran.

Des Américains d'origine iranienne se rassemblent à Washington pour soutenir le mouvement iranien de résistance (Photo, AFP).

«Je crois que les attaques à Koya ont davantage à voir avec l'image que l'Iran veut donner de l'ennemi étranger présumé et de l'implication des dissidents qu'avec la prévention d'une nouvelle intervention des groupes kurdes stationnés au Kurdistan irakien», a-t-il déclaré.

Bien que Sagnic ne pense pas que les attaques de mercredi soient sans précédent, il estime que le moment choisi est «plutôt intéressant» et suggère que cela pourrait «montrer un certain niveau de panique au sein de l'establishment du régime».

«En effet, il reste une forte probabilité que l'Iran tente de faire avancer la politique liant les troubles actuels à des acteurs extraterritoriaux, et de mener des attaques transfrontalières continues pour conditionner l'opinion publique. Donc plus d'attaques dans la région du Kurdistan, en particulier à Erbil où se trouve la présence militaire et diplomatique occidentale à grande échelle la plus proche de l'Iran.»

Le journaliste kurde Golpy partage cet avis, affirmant que le moment choisi pour attaquer un pays voisin semble être plus qu'une simple coïncidence alors que des manifestations de masse ont lieu à l'intérieur des frontières iraniennes.

«Presque à chaque fois qu'il y a des protestations, le régime tente de contenir et de traiter d'une manière ou d'une autre les problèmes à l'intérieur du pays», a affirmé Golpy. «Bien sûr, ils ont toujours accusé les acteurs extérieurs tels qu'Israël et les États-Unis, mais ils ne prennent jamais de mesures contre les prétendus acteurs extérieurs.

«Mais cette fois, je pense que pour la première fois, Téhéran a essayé d'aborder la question en dehors de ses frontières en attaquant ces groupes dissidents kurdes, ce qui, selon moi, est un signe de faiblesse.»

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le ministre irakien des Affaires étrangères en visite officielle aux États-Unis

 Le ministre irakien des affaires étrangères, Fuad Hussein. (File/AFP)
Le ministre irakien des affaires étrangères, Fuad Hussein. (File/AFP)
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  • La visite s'inscrit dans le cadre de l'engagement diplomatique continu entre les deux pays dans un contexte d'évolution de la dynamique régionale
  • "Nous discuterons des moyens de renforcer la sécurité commune et la coopération dans divers domaines", a déclaré le ministre des affaires étrangères.

DUBAI : Le ministre irakien des Affaires étrangères, Fuad Hussein, s'est envolé jeudi pour les Etats-Unis afin de participer à une série de réunions bilatérales visant à renforcer les liens entre Bagdad et Washington.

Dans une déclaration partagée sur la plateforme X et rapportée par l'Agence de presse irakienne, M. Hussein a déclaré que la visite se concentrera sur le renforcement des relations irako-américaines et la coordination des efforts sur les questions régionales et internationales clés.

"Nous discuterons des moyens de renforcer la sécurité commune et la coopération dans divers domaines", a déclaré le ministre des affaires étrangères.

Cette visite s'inscrit dans le cadre d'un engagement diplomatique continu entre les deux pays, dans un contexte d'évolution de la dynamique régionale.


Gaza: 22 morts dans des bombardements israéliens, selon secouristes et hôpitaux

L'hôpital indonésien à Jabalia dit avoir reçu les corps de neuf victimes après un bombardement israélien sur un commissariat de police de cette ville du nord du territoire palestinien. (AFP)
L'hôpital indonésien à Jabalia dit avoir reçu les corps de neuf victimes après un bombardement israélien sur un commissariat de police de cette ville du nord du territoire palestinien. (AFP)
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  • L'armée israélienne a confirmé dans un communiqué avoir effectué une frappe dans la région de Jabalia, précisant qu'elle ciblait "des terroristes opérant dans un centre de commandement et de contrôle du Hamas et du Jihad islamique"
  • Une autre frappe aérienne sur une maison dans le nord de la ville de Gaza, dans le nord du territoire palestinien, a tué une famille de six personnes, un couple et ses quatre enfants, a indiqué la Défense civile à Gaza

GAZA: Au moins 22 personnes, dont six membres d'une même famille, ont été tuées dans de nouveaux bombardements israéliens sur la bande de Gaza jeudi matin, ont annoncé la Défense civile palestinienne et des sources hospitalières.

L'hôpital indonésien à Jabalia dit avoir reçu les corps de neuf victimes après un bombardement israélien sur un commissariat de police de cette ville du nord du territoire palestinien.

L'armée israélienne a confirmé dans un communiqué avoir effectué une frappe dans la région de Jabalia, précisant qu'elle ciblait "des terroristes opérant dans un centre de commandement et de contrôle du Hamas et du Jihad islamique".

Une autre frappe aérienne sur une maison dans le nord de la ville de Gaza, dans le nord du territoire palestinien, a tué une famille de six personnes, un couple et ses quatre enfants, a indiqué la Défense civile à Gaza.

Cette organisation de secouristes a aussi fait état de deux morts dans une frappe sur une tente de personnes déplacées à Khan Younès, dans le sud.

Toujours à Khan Younès, l'hôpital Nasser annonce avoir reçu les dépouilles de deux victimes après une frappe sur une maison familiale. L'hôpital des martyrs d'al-Aqsa dit, lui, avoir reçu trois corps après une frappe sur une tente de personnes déplacées dans le camp de Nuseirat (centre).

Rompant une trêve de près de deux mois dans la guerre déclenchée il y a plus d'un an et demi, Israël a repris le 18 mars son offensive aérienne puis terrestre dans la bande de Gaza, où au moins 1.928 Palestiniens ont été tués depuis selon le ministère de la Santé du Hamas.

Ce bilan porte à 51.305 le nombre de morts dans la bande de Gaza, selon la même source, depuis le début de l'offensive israélienne lancée en représailles à l'attaque du Hamas en Israël le 7 octobre 2023.

L'attaque sans précédent du Hamas a entraîné la mort de 1.218 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Sur les 251 personnes enlevées le 7-Octobre, 58 sont toujours otages à Gaza dont 34 sont mortes, selon l'armée israélienne.

 


1982 – Le massacre de Sabra et Chatila

Les corps des victimes du massacre de Sabra et Shatila sont transportés par le personnel de la Croix-Rouge pour être enterrés à Beyrouth. (Getty Images)
Les corps des victimes du massacre de Sabra et Shatila sont transportés par le personnel de la Croix-Rouge pour être enterrés à Beyrouth. (Getty Images)
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  • Le massacre, qui s'est déroulé au plus fort de la guerre civile libanaise, et les raisons qui l'ont motivé mettent en lumière les dimensions régionales complexes qui ont entouré le conflit
  • Arab News a publié des images saisissantes du massacre, qualifié de crime commis «avec la connivence des envahisseurs israéliens»

LONDRES: Le massacre de Sabra et Chatila, survenu en 1982, reste l’un des épisodes les plus tragiques et emblématiques de l’histoire politique mouvementée du Liban.

Des membres d’une milice chrétienne libanaise de droite ont pénétré dans le quartier de Sabra, au sud de Beyrouth, ainsi que dans le camp de réfugiés palestiniens de Chatila, tout proche. Ils y ont massacré des centaines de personnes. Certaines estimations font état de plus de 3 000 victimes, majoritairement des civils palestiniens et des Libanais musulmans.

Au moment où les atrocités ont eu lieu, le quartier, où résidaient de nombreux dirigeants palestiniens, ainsi que le camp, étaient sous le contrôle des forces d'occupation israéliennes à la suite de leur invasion du Liban-Sud trois mois plus tôt.

Selon certaines sources, les meurtres de masse ont été commis au vu et au su des forces israéliennes, de 18 heures environ le 16 septembre à 8 heures du matin le 18 septembre. Certains ont même affirmé que les milices chrétiennes avaient reçu l'ordre des Israéliens de «chasser» les combattants de l'Organisation de libération de la Palestine de Sabra et Chatila, dans le cadre de l'avancée israélienne dans la partie ouest de Beyrouth, majoritairement musulmane. Des rapports ultérieurs ont suggéré que les Israéliens avaient reçu des rapports sur les atrocités, mais qu'ils n'avaient pris aucune mesure pour les prévenir ou les arrêter.

Le massacre, qui s'est déroulé au plus fort de la guerre civile libanaise, et les raisons qui l'ont motivé mettent en lumière les dimensions régionales complexes qui ont entouré le conflit.

Comment nous l'avons écrit

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Arab News a publié des images saisissantes du massacre, qualifié de crime commis «avec la connivence des envahisseurs israéliens», provoquant une onde de choc et des réactions d’horreur à travers le monde.

Au Liban, le sectarisme a presque toujours été un facteur central des conflits qui ont façonné les équilibres politiques et redessiné les cartes du pouvoir. Bien avant la chute de l’Empire ottoman à la fin de la Première Guerre mondiale, dont le territoire libanais faisait alors partie, la région du Mont-Liban avait déjà été le théâtre de violences confessionnelles. Ces tensions ont débuté en 1840 et ont atteint leur paroxysme en 1860, avec des massacres d'une telle ampleur qu'ils ont entraîné une intervention militaire française. L’Empire ottoman avait alors réagi avec fermeté, cherchant à contenir l’avancée française, dans un contexte de pressions diplomatiques exercées par les grandes puissances européennes.

Le bouleversement politique majeur consécutif aux massacres de 1860 fut la création, en 1861, du district autonome du Mont-Liban, gouverné par un fonctionnaire ottoman chrétien dont la nomination devait être validée par les puissances européennes.

Mais après la défaite de l’Empire ottoman à l’issue de la Première Guerre mondiale, la Conférence de paix de Paris en 1920 annexa plusieurs régions au Mont-Liban – notamment Beyrouth – et plaça le nouvel État élargi du Liban sous mandat français.

Dans ce Grand Liban, la population chrétienne, auparavant majoritaire dans la région montagneuse du Mont-Liban, vit son poids démographique réduit par l’intégration de grandes villes et districts à majorité sunnite et chiite. Néanmoins, les chrétiens comptaient sur le soutien du mandat français pour préserver leur domination politique. Une illusion qui s’estompa rapidement, surtout après l’indépendance du Liban en 1943.

À cette date, selon de nombreuses estimations, les musulmans – sunnites, chiites et druzes – formaient déjà une majorité démographique. Parallèlement, l’émergence du nationalisme arabe, alimenté par la Nakba palestinienne de 1948, radicalisa la scène politique régionale. L’afflux de réfugiés palestiniens au Liban, comme en Jordanie, accentua les tensions et contribua à fragiliser davantage l’équilibre confessionnel libanais.

Le processus de radicalisation a été encore accéléré par la défaite arabe lors de la guerre israélo-arabe de juin 1967, qui a donné naissance, ainsi qu'une énorme crédibilité, au mouvement de résistance palestinien (les «fedayins»).

À l'automne 1970, à la suite de batailles entre les fedayins et l'armée jordanienne, les mouvements de résistance palestiniens ont transféré leur quartier général d'Amman à Beyrouth.

Les musulmans libanais, les nationalistes arabes et les dirigeants de gauche se rangent aux côtés des Palestiniens et font cause commune avec eux. De l'autre côté, l'élite politique chrétienne et les masses chrétiennes au Liban craignaient que cette alliance naissante ne constitue une menace mortelle pour leur position dominante dans le pays et, par conséquent, pour son régime, son identité et sa souveraineté.

J'ai vécu cette époque et je m'en souviens très bien. En 1973, l'armée libanaise, dirigée par les chrétiens, a tenté de contenir le pouvoir des fedayins dans les camps de réfugiés, mais le tollé soulevé par la gauche musulmane contre les actions de l'armée a ouvert la voie à une guerre civile imminente. Très vite, les milices chrétiennes ont été ouvertement armées et entraînées par des officiers de l'armée, tandis que les milices gauchistes et arabisantes ont également obtenu des armes et un entraînement par l'intermédiaire des Palestiniens et de certains régimes arabes.

La guerre a éclaté en 1975 et s'est poursuivie, en plusieurs phases, jusqu'en 1990. L'invasion israélienne de juin 1982 avait pour but d'achever l'infrastructure militaire et politique palestinienne et d'établir un régime «ami» à Beyrouth. Israël a tenté d'y parvenir en utilisant sa puissance militaire pour forcer les mouvements de résistance palestiniens à quitter le Liban, puis en confiant la présidence libanaise à Bachir Gemayel, chef des Forces libanaises, la milice chrétienne la plus puissante, en août 1982.

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Des familles pleurent les victimes du massacre dans le quartier de Sabra à Beyrouth et dans le camp de réfugiés adjacent de Chatila, où vivent des milliers de réfugiés palestiniens. (Images Getty) 

Cependant, Gemayel a été assassiné le 14 septembre 1982, avant même d'avoir pu prêter serment. Son assassinat, dans une explosion massive à Beyrouth, a choqué les chrétiens et rendu furieuses leurs milices, qui ont riposté en attaquant Sabra et Chatila deux jours plus tard.

À cette époque, le monde arabe est affaibli et profondément divisé à la suite de la reconnaissance d'Israël par l'Égypte dans les accords de Camp David de 1979, qui a entraîné la suspension de l'adhésion du pays à la Ligue arabe.

Les Israéliens ont donc pu participer au massacre de Sabra et Chatila sans craindre d'importantes représailles de la part des Arabes. En fait, c'est le tollé général suscité par ce massacre qui a conduit à la création d'une commission d'enquête présidée par Sean MacBride, assistant du secrétaire général des Nations unies et président de l'Assemblée générale des Nations unies à l'époque.

Le rapport de la commission, publié en 1983, concluait qu'Israël, en tant que puissance occupante, portait la responsabilité des violences et que le massacre constituait une forme de génocide.

La réaction de choc au massacre a été forte même en Israël, où les autorités ont créé leur propre commission Kahan pour enquêter sur l'incident. Son rapport, également publié en 1983, conclut que, bien que consciente de l'existence d'un massacre, l'armée israélienne n'a pris aucune mesure sérieuse pour y mettre un terme.

La commission a déclaré qu'Israël était indirectement responsable «d'avoir ignoré le danger d'effusion de sang et de vengeance» et que le ministre de la Défense, Ariel Sharon, en portait personnellement la responsabilité, ce qui l'a contraint à démissionner.

Eyad Abu Shakra est le rédacteur en chef d'Asharq Al-Awsat.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com