BEYROUTH: Les banques libanaises ont entamé lundi une fermeture de trois jours, à la suite d’une décision de l’Association des banques visant à empêcher les effractions et les braquages par les déposants.
Cette décision survient après une série d’incidents très médiatisés dans des agences bancaires, où des déposants ont tenté de retirer leurs économies, gelées depuis trois ans, en dollars américains.
Le ministre de l’Intérieur par intérim, Bassam Mawlawi, qualifie d’«organisés» les cambriolages de banques à Beyrouth et dans d’autres régions. L’Association des banques a exigé que «les mesures nécessaires soient prises» afin de garantir la sécurité des employés et des clients, et de préserver les droits des déposants.
Certains services centraux des banques sont restés administrativement fonctionnels lundi, tandis que la plate-forme Sayrafa de la Banque centrale n’a pas été affectée par la grève. Le taux de change du dollar américain sur le marché noir n’a pas augmenté autant que prévu en raison des troubles politiques et sécuritaires dans le pays, un dollar (1 dollar = 1 euro) valant 38 350 livres libanaises.
Un certain nombre de banques prévoient des mesures d’autoprotection strictes lors de la réouverture des agences, en soumettant les clients à des inspections et en ne recevant que ceux qui ont des rendez-vous programmés.
Le président de l’Association des déposants au Liban, Hassan Moghnieh, avertit que «la grève ne résoudra pas la crise actuelle. Lorsque le travail reprendra jeudi prochain, les banques pourraient assister à une nouvelle vague de braquages, ce qui signifie que la solution est ailleurs.»
Lundi matin, plusieurs militants ont tenté de pénétrer dans le palais de justice de Beyrouth pour protester contre la détention de militants ayant participé à des braquages de banques. L’armée a empêché les familles et les militants d’entrer dans le palais.
Des cris ont été entendus alors que les manifestants exigeaient la libération de Mohammed Rustom et d’Abdelrahmane Zakaria, arrêtés pour avoir pénétré par effraction dans la Blom Bank afin de soutenir la déposante Sali Hafiz, qui avait auparavant utilisé un pistolet en plastique pour récupérer son épargne en vue de soigner sa sœur malade.
L’analyste politique Ali Hamadeh déclare: «La colère des citoyens libanais est grande et tout le monde parle de la nécessité d’une révolution capable de reverser l’ensemble de la classe dirigeante.»
Les récentes évolutions au sein du pays – la hausse du taux de change du dollar, l’absence de plafonnement du dollar sur le marché noir et les craintes d’un vide présidentiel – font que le public libanais est profondément inquiet.
Des groupes ont également protesté contre la détérioration des conditions de vie, notamment les pénuries d’électricité, en bloquant les rues de Beyrouth et d’autres régions avec des poubelles et en brûlant des pneus de voiture.
L’analyste économique Violette Balaa déclare: «Tant que la classe politique continuera de faire la sourde oreille face aux souffrances des déposants et des citoyens, personne ne peut garantir que certains bénéficiaires ne profiteront pas de la situation sécuritaire devenue fragile à la suite des chocs négatifs altérant les conditions de vie.»
Elle avertit que «le fait de tourner en rond ne profitera ni à la classe politique, ni aux banques, ni aux déposants».
Lundi, une délégation du FMI est arrivée à Beyrouth et a immédiatement entamé des pourparlers avec le ministre des Finances, Youssef Khalil, des directeurs de banque et un groupe d’experts. La délégation rencontrera également un certain nombre de responsables politiques, de banquiers et d’organismes économiques.
La délégation du FMI est dirigée par le chef de mission pour le Liban, Ernesto Ramirez-Rigo.
Il décrit sa mission comme «très précise», affirmant que son objectif principal est «de prendre connaissance des actions entreprises par le Liban dans le cadre de l’accord conclu avec le FMI».
«Le deuxième objectif est d'exhorter les responsables libanais à poursuivre la mise en œuvre des termes de l'accord afin de parvenir à de futures ententes.»
Selon les observateurs financiers, aucun des éléments de l’accord conclu avec le FMI en avril dernier n’a été mis en œuvre. Le président a gelé une loi approuvée par le Parlement concernant la levée du secret bancaire.
En outre, le Parlement doit encore approuver le budget pour 2022, la loi sur le contrôle des capitaux et la loi de reconstruction bancaire qui sont compris dans le plan de relance et de sauvetage actuellement au point mort.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com