KHARKIV : L'Ukraine a annoncé samedi des percées de ses troupes sur "plusieurs dizaines de km" sur le front sud, ainsi que la reconquête d'une ville clé dans l'est, nouvelle victoire dans la contre-offensive éclair de Kiev qui lui a permis de reprendre des pans entiers de territoire.
"Nos soldats avancent sur les lignes de front dans le sud dans plusieurs zones allant de deux à plusieurs dizaines de kilomètres", a déclaré à des médias locaux la porte-parole du commandement militaire du sud de l'Ukraine, Natalia Goumeniouk.
Dans l'est, l'Ukraine affirme avoir repris le contrôle de la ville de Koupiansk, qui se trouve sur des routes d’approvisionnement de l'armée russe.
Cette nouvelle victoire de Kiev dans la région de Kharkiv pourrait affecter d'une manière significative la capacité de la Russie à ravitailler et à apporter un soutien logistique efficace à ses positions sur le front de l'est.
La veille, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait annoncé que les forces de Kiev avaient repris 30 localités aux troupes russes dans cette région frontalière de la Russie, dans le nord-est de l'Ukraine.
"Koupiansk, c'est l'Ukraine", a écrit un responsable régional sur les réseaux sociaux en publiant une photo de soldats ukrainiens dans la ville de 27.000 habitants.
Les forces spéciales ukrainiennes ont elles aussi diffusé des images montrant leurs officiers "à Koupiansk, qui a été et sera toujours ukrainienne".
"Les forces ukrainiennes avancent dans l'est de l'Ukraine, libérant plus de villes et de villages. Leur courage additionné au soutien militaire occidental donne des résultats surprenants", a déclaré le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Oleg Nikolenko, sur les réseaux sociaux.
"Il est crucial d'envoyer des armes à l'Ukraine. Infliger une défaire à la Russie sur le champ de bataille signifie gagner la paix en Ukraine", a-t-il ajouté.
La ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock est entretemps arrivée à Kiev pour une visite surprise de soutien à l'Ukraine.
La Russie a annoncé vendredi avoir envoyé des renforts dans la région de Kharkiv. Les médias d'Etat russes ont diffusé des images montrant des colonnes de blindés, d'obusiers et de véhicules de soutien roulant sur des routes non carrossables.
La plus grande ville reconquise par les forces de Kiev jusqu'à présent est celle de Balakliïa, dont la population avant la guerre était estimée à 30.000 habitants.
Centrale de Zaporijjia: nouvel appel entre Macron et Zelensky
Le président Emmanuel Macron a de nouveau échangé par téléphone samedi avec son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky à propos de la situation toujours "très préoccupante" autour de la centrale nucléaire de Zaporijjia, a indiqué l'Elysée.
Les deux présidents "sont revenus sur la situation autour de la centrale de Zaporijjia, qui demeure très préoccupante. Ils ont marqué leur soutien au travail de l'Agence internationale de l'énergie atomique", souligne la présidence française.
Le chef de l'Etat français a aussi "interrogé le président Zelensky sur les développements du conflit sur le terrain, et sur les besoins de l'Ukraine auxquels la France pourrait contribuer à répondre", ajoute l'Elysée, alors que les Etats-Unis ont déjà annoncé une nouvelle aide militaire de 2,8 milliards de dollars pour Kiev et des pays de la région.
Au sujet de la centrale de Zaporijjia, Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky "partagent la même exigence d'un retrait des forces russes de la zone pour garantir la sécurité et sûreté des installations nucléaires", indique l'Elysée.
Emmanuel Macron et Volodymyr Zelensky s'étaient déjà entretenus lundi à ce sujet.
Vendredi, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) avait fait état d'une "coupure totale de courant" dans la ville ukrainienne d'Energodar (sud), où est située la centrale nucléaire de Zaporijjia, une situation qui "compromet la sécurité des opérations".
"C'est totalement inacceptable. Cela ne peut pas continuer", avait déclaré dans un communiqué le directeur général, Rafael Grossi, appelant à "cesser immédiatement les bombardements dans la zone".
«Ils peuvent compter sur nous»
Dans le village de Grakové près de Kharkiv, repris par les forces ukrainiennes, les journalistes de l'AFP ont vu des destructions témoignant de la violence de combats, pylônes électriques abattus et câbles étalés sur le sol.
Des chats et des chiens errants vagabondaient à la recherche de nourriture dans les habitations vides.
"C'était effrayant, il y avait des bombardements et des explosions partout", a raconté à l'AFP Anatoli Vassiliev, 61 ans, évoquant la bataille au cours de laquelle les forces ukrainiennes ont repris aux Russes la village de Grakové.
Les corps de deux civils, avec des traces de torture et des impacts de balle à l'arrière de la tête, y ont été découverts, a annoncé samedi le bureau du procureur général qui a ouvert une enquête et un examen médico-légal des corps.
Selon cette source, après la reprise de la localité par les forces ukrainiennes, un habitant de Grakové s'est rendu à la police, assurant que des soldats russes l'avaient obligé à enterrer les deux hommes.
La visite de la ministre allemande à Kiev est sa deuxième dans la capitale ukrainienne depuis l'invasion de l'Ukraine par les forces russes. Elle intervient une semaine après la visite à Berlin du Premier ministre ukrainien Denys Shmygal qui a de nouveau demandé l'envoi d'armes à son pays.
"Je me suis rendue à Kiev aujourd'hui pour montrer qu'ils peuvent continuer à compter sur nous. Que nous continuerons à soutenir l'Ukraine aussi longtemps qu'il le faudra, par la livraison d'armes, par un soutien humanitaire et financier", a assuré Mme Baerbock, citée dans un communiqué de ses services.
Au cours des dernières semaines, l'Allemagne a livré à l'Ukraine des obusiers, des lance-roquettes et des missiles anti-aériens, qui font partie de l'arsenal militaire fourni par l'Occident ayant, selon les experts, contribué à affecter les capacités des forces russes.
La visite de la ministre allemande intervient après un voyage du secrétaire d'Etat américain Antony Blinken qui a promis une nouvelle aide militaire de 2,8 milliards de dollars.
Lors d'une rencontre à Bruxelles avec le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg, M. Blinken a déclaré que l'envoi de renforts par la Russie montrait qu'elle payait "un prix énorme" dans sa tentative de s'emparer du territoire ukrainien.
Les forces russes ont pour leur part causé des destructions sévères lors des bombardements de Kharkiv et dans la région industrielle du Donbass à l'est.
le gouverneur de la région de Kharkiv, Oleg Sinegoubov, a déclaré que les bombardements russes, effectués "en représailles" à la contre-offensive réussie des forces ukrainiennes, avaient blessé 14 civils.
Pavlo Kirilenko, gouverneur de la région de Donetsk, dans le Donbass, a fait état de deux morts dans les frappes russes.