PARIS : En cas de coupure totale des approvisionnements de gaz en provenance de la Russie, la croissance française pourrait perdre "jusqu'à un point" de produit intérieur brut (PIB), a estimé jeudi à Paris le ministre de l'Economie Bruno Le Maire.
Le président russe "Vladimir Poutine peut décider demain de couper totalement le gaz à destination de l'Europe, auquel cas nous aurons un impact sur la croissance française", a averti le numéro 2 du gouvernement français lors d'un déjeuner avec des journalistes.
Concernant l'ampleur de cet impact, "j'ai donné le chiffre de 0,5%" ces derniers jours, a-t-il rappelé.
Mais "en fonction de l'impact" qu'un arrêt complet des livraisons de gaz russe aura sur l'Allemagne "et de la possibilité d'avoir une récession en Allemagne, on peut avoir un impact qui irait jusqu'à un point de PIB", a estimé Bruno Le Maire.
Depuis que la Russie a lancé une offensive militaire en Ukraine, fin février, l'Union européenne a adopté plusieurs paquets de sanctions économiques contre Moscou, auxquelles le Kremlin a répliqué par une baisse progressive des livraisons de gaz à destination du Vieux Continent.
Ces tensions sur l'approvisionnement en gaz seront "un élément déterminant de la croissance française en 2023", a ajouté Bruno Le Maire.
Dans son "programme de stabilité" envoyé en juillet à la Commission européenne, Bercy a tablé sur une progression d'1,4% du PIB français en 2023.
La prévision du ministère de l'Economie est identique à celle de l'OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) mais sensiblement supérieure aux attentes du Fonds monétaire international (1%).
"La conjoncture, la géopolitique n'est pas bien orientée", a observé Bruno Le Maire.
Redémarrer des réacteurs
"Dans le court terme", en dehors des contraintes d'approvisionnement en gaz, le ministre a cité "les incertitudes économiques aux Etats-Unis, en Chine et celles qui pèsent sur l'Allemagne, notre principal partenaire commercial", par ailleurs grand consommateur de gaz russe.
Il a réaffirmé sa prévision de croissance pour 2022, à 2,5%, au lendemain de la confirmation par l'Insee d'un rebond d'un demi-point de l'économie française au printemps, après un recul de 0,2% au premier trimestre.
"Je pense que nous ferons en 2022 les 2,5% que nous avons prévus, peut-être un peu mieux", a même espéré le ministre en soirée sur la chaîne LCI.
Il s'est en revanche montré plus pessimiste sur l'inflation, estimant que le léger tassement enregistré par l'Insee en août (+5,8% sur un an, contre 6,1% en juillet) n'était pas encore le signe d'un ralentissement durable de la hausse des prix.
"Il y a un léger reflux (en août) mais nous sommes aujourd’hui à des niveaux d’inflation élevés, ça va durer encore plusieurs mois", a-t-il prédit.
"Il n’y aura pas de recul significatif de l’inflation avant début ou mi-2023", a-t-il poursuivi, dans la lignée des propos tenus ces dernières semaines.
Interrogé sur les possibles tensions d'approvisionnement électrique cet hiver, alors que seuls 24 des 56 réacteurs du parc nucléaire français sont actuellement en service, Bruno Le Maire a martelé que le redémarrage des réacteurs à l'arrêt pour des problèmes non liés à la maintenance était une "urgence": "Les Français vont avoir besoin qu'avant la fin du mois de décembre 2022, en tout ou partie, les réacteurs mis à l’arrêt pour des problèmes de corrosion ou de soudures puissent redémarrer", a-t-il insisté.