PARIS: Les banques centrales doivent agir avec "détermination" pour combattre l'inflation, "même au risque d'une croissance plus faible et d'un chômage plus élevé", a plaidé samedi Isabel Schnabel, membre du directoire de la Banque centrale européenne (BCE) lors de la réunion de Jackson Hole, aux Etats-Unis.
Face à "la voie de la prudence", la responsable monétaire a défendu "celle de la détermination" qui consiste à "réagir avec plus de force à la poussée actuelle d'inflation, même au risque d'une croissance plus faible et d'un chômage plus élevé".
Trois facteurs plaident en faveur de cette option, a-t-elle expliqué lors de la grand-messe annuelle des banquiers centraux dans l'Ouest américain : "l'incertitude quant à la persistance de l'inflation, les menaces pour la crédibilité de la banque centrale et les coûts potentiels d'une action trop tardive" contre la hausse des prix, selon son discours mis en ligne par la BCE.
Le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau a lui aussi défendu une action déterminée de la BCE.
"Nous pouvons avoir une approche graduelle, mais nous ne devons pas être lents et retarder la normalisation (de la politique monétaire, NDLR) jusqu'à ce que des anticipations d'inflation plus élevées nous obligent à des relèvements de taux agressifs", a-t-il expliqué.
"Ramener l'inflation à 2% est notre responsabilité; notre volonté et notre capacité à tenir les engagements de notre mandat ne sont pas négociables", a déclaré le gouverneur, selon son discours obtenu par l'AFP.
Vendredi, le président de la Réserve fédérale américaine Jay Powell a prévenu que le retour à la stabilité des prix "prendra du temps" et "entraînera une longue période de croissance plus faible".
La hausse des prix à la consommation dans la zone euro a atteint en juillet le niveau record de 8,9% sur un an.
Ne pas «tarder»
Afin de l'endiguer, la Banque centrale européenne (BCE) a relevé fin juillet d'un demi-point de pourcentage ses trois principaux taux directeurs, pour les porter entre 0% et 0,75%.
Selon les observateurs, elle devrait à nouveau les relever lors de sa prochaine réunion de politique monétaire le 8 septembre, bien que la conjoncture se soit assombrie cet été dans la zone euro.
Les grandes banques centrales font face au dilemme de resserrer leur politique monétaire sans précipiter le ralentissement économique.
Mais plusieurs responsables monétaires estiment que le risque d'être trop timoré face à l'inflation est plus grand que celui de frapper fort avec des hausses de taux marquées.
"Si une banque centrale sous-estime la persistance de l'inflation – comme la plupart d'entre nous l'ont fait au cours de la dernière année et demie – et si elle tarde à adapter ses politiques en conséquence, les coûts peuvent être considérables", a déclaré Mme Schnabel.
Pour François Villeroy de Galhau, le taux d'intérêt directeur neutre, compatible avec une croissance de long terme équilibrée, "se situe probablement entre 1% et 2%".
Tout en reconnaissant que "au moins pour l'Europe, les perspectives de croissance pour l'an prochain ont été revues à la baisse en raison des prix de l'énergie et du gaz ainsi que de l'évolution des taux de change", le gouverneur de la Banque de France n'exclut pas une hausse des taux au-delà du niveau neutre.
"N'ayez aucun doute qu'à la BCE, nous augmenterons les taux si nécessaire au-delà de la normalisation", assure M. Villeroy de Galhau dans son discours.