STRASBOURG: Pour la troisième fois cet été, un épisode caniculaire, doublé d'une vaste vigilance "sécheresse", s'abat sur l'est de la France où Météo-France a relevé jeudi des pointes à 37°C à Strasbourg et 38°C à Lyon ou Saint-Etienne, avant un week-end qui s'annonce plus frais.
L'agence météorologique a maintenu pour vendredi la vigilance orange dans 26 départements, principalement dans l'est, et en a placé 64 autres en jaune. Seuls les quatre départements bretons ainsi que la Manche et le Calvados ne font l'objet d'aucune vigilance.
L'épisode caniculaire, d'intensité moindre qu'en juillet, reste "durable sur la vallée du Rhône et le pourtour méditerranéen", prévient Météo-France, qui précise que "l'axe de plus fortes chaleurs se situait jeudi après-midi du Sud-Ouest, à la vallée du Rhône, à la Bourgogne et au Nord-Est".
"Si on s'assoit dehors, on brûle", témoigne ainsi Zackaria, un sans-abri de 27 ans qui a trouvé refuge dans un centre d'accueil parisien climatisé d'Emmaüs Solidarité. L'association a étendu ses horaires d'accueil de jour pour faire face à la vague de chaleur.
"Quand il faut chaud, on n'a plus de place dans notre petit train touristique", explique Pascal Ohlmann, 65 ans, le conducteur de ce convoi qui sillonne les rues de Strasbourg et évite aux touristes de marcher sous un soleil de plomb.
A 15h30, Météo-France a relevé jusqu'à 38°C à Saint-Etienne et Lyon, 37° à Strasbourg, Mâcon ou Avignon et 36° à Dole et Clermont-Ferrand.
Week-end plus frais
Vendredi, la chaleur va régresser "sur un grand quart sud-est du pays" où "des pointes à 36/38°C, localement 39°C" seront toutefois encore possibles, prévient Météo-France. "Ailleurs, les maximales seront en baisse, comprises entre 30°C et 33°C du sud-ouest au nord-est", et même "inférieures à 30° sur une petite moitié nord-ouest du pays", poursuit l'agence.
Cette troisième vague de chaleur s'annonce ainsi moins longue que la précédente qui avait pris fin le 25 juillet et duré 14 jours. Mais après un week-end plus frais, une nouvelle hausse des températures est redoutée en début de semaine prochaine.
Quant aux pluies, elles restent bien faibles pour apaiser les craintes liées à la sécheresse.
Juillet 2022 est "au second rang des mois les plus secs tous mois confondus" en France depuis le début des mesures en 1958-1959, avec un cumul de précipitations agrégées de 9,7 millimètres, selon Météo-France. Le record remonte à mars 1961, avec 7,8 millimètres.
Jeudi, 93 départements faisaient l'objet de restrictions d'eau dont 62 sont considérés "en crise", le niveau d'alerte le plus élevé. Depuis mercredi, la Creuse et la Nièvre les ont rejoints.
Le débat fait d'ailleurs rage sur les réseaux sociaux autour des dérogations accordées aux golfs qui peuvent encore arroser leurs greens même lorsque le département qui les abrite est en "crise sécheresse".
Situation extrême
Dans les Vosges, l'inquiétude est vive aussi à Gérardmer, station qui souffrait déjà de saisons hivernales de plus en plus compliquées en raison du réchauffement climatique et qui affronte désormais une sécheresse estivale d'une intensité et d'une précocité exceptionnelles.
Une "situation extrême", selon le maire (PS) Stessy Speissmann. La nappe phréatique est exsangue et la ville doit puiser l'eau dans le grand lac qui fait sa réputation. Mercredi et jeudi, cette eau est considérée comme non-potable, le temps de mener des analyses.
En Corse, la ligue des droits de l'Homme de l'île a alerté dans un communiqué sur la situation des détenus de la maison d'arrêt de Borgo (Haute-Corse), dénonçant une "chaleur accablante dans les cellules qui sont de véritables étuves".
Lourdes conséquences également pour EDF qui pourrait abaisser encore sa production d'électricité nucléaire ces prochains jours, voire d'arrêter un réacteur de la centrale du Tricastin (Drôme) en raison des températures élevées des fleuves.
EDF a aussi mis en garde sur de possibles "restrictions de production" à la centrale de Saint-Alban (Isère), sur le Rhône, ou à celle de Golfech (Tarn-et-Garonne), sur la Garonne.
Autre secteur en souffrance : l'agriculture.
"Nous avons eu chronologiquement ou presque la crise porcine, la grippe aviaire, la crise ukrainienne, le gel et la grêle et vient la sécheresse... Sur douze mois nous avons eu le condensé de ce que nous avons sur 5 ou 10 ans", a résumé le ministre Marc Fesneau dans une interview à l'AFP.
Certains éleveurs de bovins en sont réduits à vendre leurs bêtes, faute de pouvoir les nourrir.
Depuis 1947, 45 vagues de chaleur ont été recensées en France.
Mais "sur les 35 dernières années, elles ont été trois fois plus nombreuses que sur les 35 années précédentes", selon Météo-France.