PARIS : Moins de six mois après le déconfinement, les Français doivent à nouveau se cloitrer chez eux ce week-end. Mais la fermeture des magasins dits "non essentiels" exaspère les petits commerçants, soutenus par des élus, car les grandes surfaces restent ouvertes.
Les mesures de ce confinement allégé, entré en vigueur vendredi, sont claires: comme au printemps, on ne peut « prendre l'air » que pendant une heure maximum et dans un rayon d'un kilomètre de son domicile. Les dérogations permettent aussi d'aller faire ses courses ou d'aller chez le médecin.
Mais tous les restaurants, bars et commerces jugés « non essentiels » doivent garder le rideau baissé. Même si certains font de la résistance.
Des maires de villes petites et moyennes (Perpignan, Brive, Beaune, Valence, Chalon-sur-Saône, Colmar etc.) ont pris des arrêtés autorisant l'ouverture des commerces non alimentaires sur leur commune, dénonçant l' « inégalité » de traitement face à la grande distribution et à la vente en ligne.
A Rochefort (Charente-Maritimes), le maire Hervé Blanché, auteur d'un arrêté qu'il qualifie d'"acte symbolique", veut ainsi « interpeller, discuter, proposer » d’autres solutions, comme par exemple un couvre-feu pour tous. A la place de la fermeture des « petits commerces de proximité qui prennent toutes les précautions et ne sont pas des lieux de propagation ».
Plusieurs préfectures ont demandé le retrait de ces arrêtés « illégaux ».
« Tu vends, je vends »
Le marché des Capucins à Bordeaux, traditionnelle ruche commerçante et gastronomique le weekend, était animé samedi, mais loin de l’effervescence habituelle. « Les gens sont venus plus tard que d’habitude », indique à l'AFP un commerçant.
Du côté des instances professionnelles, la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) assure que « le commerce de proximité, déjà fragilisé par le commerce en ligne, est aujourd’hui en danger de mort ».
A Lille, la librairie indépendante « Place Ronde » accueillait les clients: porte grande ouverte pour aérer la pièce, gel hydroalcoolique à disposition et peu de monde. Pour sa gérante, Fabienne van Hulle, la fermeture des rayons livres à la Fnac ne résout pas le problème. « Mon slogan c'est +tu vends, je vends+ », déclare-t-elle.
« Celui qui va gagner, c'est Amazon, qui traite ses employés comme des esclaves, qui ne paie pas d'impôts en France. Que veut-on? Que tout le monde soit en train de cliquer derrière un ordi? On veut faire de nous des robots? », s'indigne-t-elle.
« 1 malade toutes les 2 secondes »
« Je me bats tous les jours pour apporter des solutions concrètes aux commerçants », a répondu samedi dans Le Parisien le ministre de l'Economie Bruno Le Maire.
« Oui, le confinement est une épreuve pour tous les français », a tweeté le ministre de la Santé Olivier Véran. "Mais je rappelle que le #covid19, c’est: 1 malade toutes les 2 sec. 1 hospitalisation toutes les 30 sec. 1 mort toutes les 4 mins. Respectons ce confinement, soyons solidaires. L'État protégera, et accompagnera ».
Par ce nouveau confinement prévu « a minima » jusqu'au 1er décembre, le gouvernement vise un retour à « environ 5.000 » cas de contaminations par jour, contre près de 50.000 enregistrés vendredi.
Quant aux patients en réanimation, une donnée cruciale à surveiller afin d'éviter un engorgement des hôpitaux, l'Institut Pasteur prévoit un pic à 6.000 mi-novembre, même si le nouveau confinement produit le même ralentissement qu'au printemps, selon des prévisions transmises samedi à l'AFP.
Dans un laboratoire de Tours, la file d'attente ne tarit pas ces derniers jours et le public a changé. « Il y a une véritable inquiétude. Le public est plus jeune, plus familial », constate François Blanchecotte, à la tête du groupe ABO+ en Indre-et-Loire.
Selon les derniers chiffres publiés vendredi, 3.368 malades du Covid-19 sont désormais en réanimation ou en soins intensifs (pour 6.400 lits actuellement sur le territoire). Les autorités craignent la saturation dans les prochaines semaines.
« J'ai l'impression quand même que globalement la population française a compris la gravité de la situation dans laquelle nous étions et la gravité de la situation qui peut advenir », a estimé samedi sur BFMTV Stéphane Gaudry, professeur de médecine intensive à l'hôpital Avicenne de Bobigny.
Et Noël ?
Malgré tout, « il est illusoire de penser qu'un confinement de quatre semaines nous permettra de passer Noël comme si de rien n'était », a mis en garde dans Le Figaro Vittoria Colizza, directrice de recherche à l'Inserm. « La durée du confinement va dépendre de son efficacité, mais il faudra dans tous les cas opter pour un déconfinement prudent: fermeture de certains commerces, mise en place éventuelle d'un couvre-feu, etc. »
Comme lors du premier confinement, les Français qui veulent prendre l'air ou aller au marché ce samedi doivent se munir d'une attestation temporaire, sous peine d'une amende de 135 euros.
Il y a en revanche trois changements majeurs par rapport au printemps: écoles, collèges et lycées rouvriront lundi après les vacances de la Toussaint, on pourra rendre visite aux résidents des Ehpad et le travail sur site pourra continuer, même si le recours au télétravail devient la règle.
Les autorités feront le point tous les 15 jours sur l'évolution de l'épidémie qui a fait plus de 36.500 morts, pour voir si les mesures doivent être renforcées ou allégées.